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Message Publié : 27 Jan 2014 15:32 
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Hérodote
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« Aucune race n’a été témoin de l’injure comme la race nègre »



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Né en 1969 à Alger à l’occasion du premier festival culturel africain, finalisé en 1972, l’ouvrage de Stanislas Spero Adotevi « Négritude et Négrologues » sera la première tentative sérieuse d’analyse critique de la « négritude », ce concept élaboré dans les années 30, place de la Sorbonne, et c’est à noter, à mille lieux des crimes de l’administration coloniales d'une Afrique « pouilleuse, ravalée et broyée » par deux forts en thème : Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire.


Analyse critique car, pour l’auteur, il ne fallait plus penser le monde en général et l'Afrique en particulier en termes de races mais d’individus, de droits et de valeurs ; il est vrai que dans les années 70 la pomme de la discorde était entre les Africains et non plus entre des colons racistes et voleurs et les Noirs, race opprimée.


A la fois onirique, symbolique et poétique, "la négritude » se voulait un concept capable de transformer une insulte courante (sale nègre !) en titre de gloire et d’orgueil.

Né du déracinement (Senghor et Césaire étaient alors étudiants à Paris), élaboré hors-sol pour ainsi dire, au bord de la Seine - qu’il se soit agit de la rive gauche ne change rien à l’affaire -, loin de toute promiscuité avec les causes, ce concept avait comme faiblesse de faire l’impasse sur Hegel, Marx et Lénine : l’Histoire, la lutte des classes et l’action révolutionnaire.



Si l'auteur qualifie " la négritude" de concept abstrait, il reconnaît et paie néanmoins sa dette lorsqu'il écrit : « La négritude n’en demeure pas moins le temps primitif de la renaissance africaine, une prise de conscience et une nouvelle littérature » avant de puiser à pleines mains dans l’immense bêtisier de Césaire, de Senghor et dans une moindre mesure (il arrivera plus tard) de Frantz Fanon accoucheurs de formules telles que « l’homme total africain » ou bien encore « l’intuition mystique propre à l’homme africain ».

Sartre en compagnon de route de cette négritude, ne sera pas en reste (mais c’est moins grave car il s’agit d’un Blanc ; et puis, on ne se refait pas !).



Pour tous ces poètes pris en flagrant délit de fureur narcissique, le Nègre est amour, innocent et heureux. Son royaume est celui de l’enfance. Il n’a donc pas changé depuis la création.

Sous leurs plumes à tous, l'auteur réalise très vite que la négritude court le risque de devenir une mascarade, une avalanche de clichés grotesques, quand ils ne sont pas des lieux communs éculés et des théories les plus réactionnaires. Le danger est imminent : avec la négritude, le Nègre - senghorien en particulier - n’aurait donc pas sa place auprès du Blanc sur le terrain de la science et de la raison.


Et l’auteur de lancer à la cantonade : « La réalité, celle qui appelle la restructuration du monde, est en effet affaire de révolution et non de bouillonnement poético-cosmique. La négritude c’est le dernier-né d’une idéologie de domination (1). C’est l’aboutissement de plusieurs décennies d’ethnologie européenne. »

Ces poètes normaliens avaient tout simplement oublié que « les colonisateurs n’étaient pas des poètes mais des manieurs de sabres »,



Humour grinçant, ironique, une écriture loin de la Sorbonne et de ses incantations les plus fumeuses, l’auteur se moque et dénonce le Noir quand il cesse d’être pour mieux rêver ce qu’il n’est pas et qu’il n’a vraiment pas besoin d’être et de regretter non plus.

Et l’auteur de s’exprimer en ces termes : « La négritude retrouvée du salut personnel d’un Césaire ou d’un Senghor, c’est de la névrose. »

De ce fait, la course pour la reconnaissance de la dignité de l’homme noir s’avère sans objet.

Il se moquera aussi de cette bourgeoisie blanche qui « après avoir bousillé l’homme » sur sa machine, ici en Occident, en appelle à « l’idylle de l’humanité et de la nature », là où, comme par magie... l’Afrique et le Nègre apparaissent inévitablement : on pensera aux Duhamel (Georges), aux surréalistes (ce qui n’enlève rien à l’apport colossal de ce mouvement), Picasso, Apollinaire, Sartre encore…



A propos de l’esclave et du racisme anti-Noir, en relation directe avec "la négritude » - insulte transformée en titre de gloire -, doit-on néanmoins affirmer avec l’auteur que l’esclavage n’est pas né du racisme mais bien plutôt le racisme de l’esclavage ? Les deux ne se sont-ils pas nourris l’un l’autre ? Après tout, les négriers se faisaient-ils une si haute idée de la personne humaine qui pouvait ou pas, à leurs yeux, habiter le Nègre ? Leur mépris racial ne devait-il pas se porter plutôt bien (tous n’avaient sans doute pas encore rencontré le Persan de Montesquieu) lorsqu’ils chargeaient sur leurs bateaux des hommes et des femmes à fond de cales pour un voyage dont un sur trois ne connaîtra jamais la destination ?

Ou bien, s’est-il agit d’un esclavage dans l’esprit d’un : « Rien de personnel là-dedans mec ! C’est juste que j’ai envie de me faire un paquet de blé sur ton dos ! »

Car dans cette lutte pour la liberté, comme l'auteur nous le fait remarquer, il y avait - et il y a encore aujourd’hui -, du Blanc dans le Noir et du Noir dans le Blanc ; une lutte pour soi avec l’autre en soi jusqu’à ce constat d’une lucidité qui frôle des sommets : «Va saisir chez le Blanc comment on peut vaincre sans avoir raison ».



Avec Senghor, normalien académicien Président du Sénégal - cet orgueil-là annonce toutes les trahisons -, Adotevi sera cinglant et plus encore, avec l’utilisation politique de cette négritude restée inachevée dans sa théorie, jusqu’à reprocher à ce mal-Président de ne s’être jamais arraché à l’esclavage : « La négritude de Senghor et de ses discours n’étaient rien moins que de la propagande gouvernementale à grand renfort de théories les plus usées sur les traditions africaines et l’âme noire ; propagande qui laisse devant sa faim un peuple expulsé de l’Histoire et qui aboutit à le faire piétiner quand elle ne le paralyse pas dans sa marche. »


La négritude sous Senghor devient alors une néo-cléricature opium du peuple : « C’est dans l’inadéquation aux problèmes africains que se trouve la clé des difficultés que soulève la négritude » (verdict sans appel), et son « socialisme à la sauce africaine » naîtra le plus sérieusement du monde de « la copulation entre des rythmes primordiaux de l’Afrique et des accords fécondants de l’Europe ». Il s’agira d’un socialisme qui en rassurera plus d'un ; un socialisme de cœur et d’esprit : pas touche aux intérêts du continent européen !

Ce qui n’arrange rien, car la négritude revêt alors les habits d’un en soi indépassable.



En 1972, Stanislas Spero Adotevi proposera aux Afrcains le projet suivant : «A nous de régler intelligemment et sans les ethnologues européens dans un développement endogène, la question de la famille africaine, la question des ethnies, celle des traditions, et enfin le problème des classes sociales, tout en sachant que la structure traditionnelle africaine est condamnée. Et ce dont nous avons besoin aujourd'hui, c’est des tracteurs et pas seulement de métaphores. »

Quarante ans plus tard, à l’heure d’une mondialisation vorace et impitoyable, il semblerait que cette problématique ait pris une dimension et une accélération gigantesques.





1 - Après tout, peut-on faire remarquer sans provocation excessive qu'en Algérie, Frantz Fanon était médecin psychiatre et non Marabout à visiter à dos d’âne les bleds de la région à la recherche d’une âme à soulager !

Senghor a pris sa retraite de Président du Sénégal sous la pluie, en Normandie : vaches normandes, haras, concours hippiques et climat tempéré…

Quant à Aimé Césaire, il sera maire de Fort-de-France. Il ne partagera pas le destin d’un... disons... Che Guevara.


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Pour prolonger, cliquez : http://sergeuleski.blogs.nouvelobs.com/archive/2013/06/04/penser-le-monde-aujourd-hui-avec-l-afrique.html

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Message Publié : 27 Jan 2014 15:40 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 14 Avr 2005 10:11
Message(s) : 2082
J'ai un peu de mal à saisir la problématique qui nous est proposée...

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« Étudiez comme si vous deviez vivre toujours ; vivez comme si vous deviez mourir demain. » Isidore de Séville


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Message Publié : 27 Jan 2014 15:51 
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Hérodote
Hérodote

Inscription : 24 Sep 2013 9:25
Message(s) : 2
Tout le monde n'est pas obligé de tout comprendre...

Avec cette publication, vous semblez avoir atteint certaines limites...

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Message Publié : 27 Jan 2014 15:58 
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Inscription : 23 Jan 2009 15:49
Message(s) : 1443
En publiant sur ce forum, vous vous engagez à respecter sa charte (que je vous invite à lire avant tout nouveau message ici : viewtopic.php?f=59&t=1521), en particulier ce point fondamental :
Citer :
La courtoisie est de rigueur sur le forum : le débat est bien sûr bienvenu, mais si vous pouvez critiquer les idées, respectez les personnes.

Au prochain message méprisant pour un membre de ce forum, vous en partirez aussi vite que vous y êtes arrivé.


Par ailleurs, je rejoins tout à fait Isidore dans sa remarque. Un forum est un lieu de discussion et de débat. Quelle est la problématique historique de votre message ? Que cherchez-vous à débattre ou à comprendre, historiquement parlant ?


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Message Publié : 27 Jan 2014 16:19 
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Eginhard
Eginhard
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Inscription : 04 Juin 2008 20:24
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Leur mépris racial ne devait-il pas se porter plutôt bien (tous n’avaient sans doute pas encore rencontré le Persan de Montesquieu) lorsqu’ils chargeaient sur leurs bateaux des hommes et des femmes à fond de cales pour un voyage dont un sur trois ne connaîtra jamais la destination ?

C''est plutôt le chiffre de 13% et non 33%. Rappelons que l'esclave est une denrée précieuse et que l'on tient à le maintenir en vie (sans aucun humanisme sous-jacent). Les Irlandais qui fuient la famine en 1848 ont des taux de décès supérieurs. Eux, on s'en fout s'ils arrivent vivants de l'autre côté de l'Atlantique...
Citer :
une écriture loin de la Sorbonne et de ses incantations les plus fumeuses

La Sorbonne n'a pas le monopole des incantation fumeuses si j'en crois le blog de l'auteur.
Blague à part, j'ai l'impression que ce texte dont nous est assénée la promotion est une charge contre Senghor à cause de ce qu'il est devenu. Ce n'est pas historique. Il faut se replacer dans le contexte des années 1930-1940 où il n'est pas encore académicien ni président du Sénégal.
La mode est au Senghor bashing. Relisons-le avant d'en faire le "valet des Blancs".
Citer :
« On nous demande notre coopération pour refaire une France qui soit à la mesure de l’Homme et de l’Universel. Nous acceptons, mais il ne faut pas que la métropole se leurre ou essaye de ruser. Le “Bon Nègre” est mort; les paternalistes doivent en faire leur deuil. C’est la poule aux œufs d’or qu’ils ont tuée.
Trois siècles de traite, un siècle d’occupation n’ont pu nous avilir, tous les catéchismes enseignés (et les rationalistes ne sont pas les moins impérialistes) n’ont pu nous faire croire à notre infériorité. Nous voulons une coopération dans la dignité et l’honneur, sans quoi ce ne serait que “Kollaboration”, à la vichyssoise.
Nous sommes rassasiés de bonnes paroles (jusqu’à la nausée), de sympathie méprisante; ce qu’il nous faut ce sont des actes de justice.
Comme le disait un journal sénégalais : « Nous ne sommes pas des séparatistes, mais nous voulons l’égalité dans la cité.»
Nous disons bien : l’ÉGALITÉ.
PRATIQUEMENT NOUS VOULONS ENTRE AUTRES CHOSES:
1. Que la Constituante complète la déclaration des droits de l’homme; en ajoutant à la liberté et à l’égalité des individus, celle des peuples et des races.
2.Que la métropole, au lieu de s’appuyer sans consulter les intéressés sur des coutumes dont on a brisé les cadres et parfois vidé l’esprit, laisse les autochtones eux-mêmes modifier leurs institutions. Car ce sont eux-mêmes qui doivent assimiler les éléments solubles de la civilisation française.
3. Qu’à l’échelle de la Colonie ou de la Fédération, il y ait des assemblées délibératives et non consultatives —qui soient obligatoirement consultées pour toutes les questions intéressant la Colonie ou la Fédération.
4. Qu’un sérieux effort d’instruction et d’éducation soit entrepris…
5. Que les autochtones puissent à titres égaux accéder à toutes les fonctions administratives, et qu’à fonctions égales correspondent des traitements égaux.
6. Que la justice soit la même pour les autochtones comme pour les Européens… ce qui implique la suppression du “code de l’indigénat”.
7. Que le travail forcé, sous quelque nom qu’on le désigne, soit supprimé […]
C’est là un programme révolutionnaire.»

Cela date de 1945 et c'est paru dans Esprit. Accuser d'oncletomisme celui qui proclame que le bon nègre est mort, c'est un sacré tour de passe-passe. Je tenais juste à rappeler ce texte de Senghor car on a vite fait d'assimiler la négritude au choix d'un exotisme de bon aloi. C'est un total contresens.

_________________
"Denken heisst überschreiten" : Penser signifie faire un pas au-delà. Ernst Bloch (1885-1977)


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