Sur les captifs de case en général :
http://catherine.abbat.free.fr/FondsAbb ... avage.htmlUn cas particulier, les Gouins du Burkina:
http://africanistes.revues.org/2213Un autre cas particulier, celui des Wogos et des kurteys du Niger :
http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... _40_2_1966Dans les faits il n’y a que des cas particulier mais cela donne une bonne idée du système. Les musulmans ouest-africains sont avant tout des ouest-africains, même si leur culture est réadaptée sous le prisme de l'islam, donc ils ont les mêmes structures sociales avec des castes, des captifs de case, la parenté à plaisanterie etc,etc...
Je rajouterais deux citations.
« l’esclavage au Sénégal n’est, pour parler exactement, qu’un servage héréditaire. Les individus qui font partie de cette classe la population constituent toute la domesticité, tous les ouvriers, laboureurs compris. Ils jouissent de privilèges, de garanties parfaitement définies et pour lesquelles les peuplades du Sénégal ont un très grand respect »
Ce sont les propos d’un gouverneur du Sénégal nommé Jauréguiberry et cité par V. Schœlcher dans son « esclavage au Sénégal » paru en 1880.
« Le captif n’est point un esclave dans le sens strict du mot, mais un serviteur de case vivant dans la famille, relié à ses membres par des sentiments qui exercent une emprise sur leurs relations réciproques. » Ces propos-ci viennent de E.Piner-Laprade, lui aussi gouverneur du Sénégal et cité dans le rapport Deherme sur l’esclavage en AOF.
Quand à moi je tire ces deux extraits de l’ouvrage « Le Kajoor au 19e siécle : Pouvoir ceddo et conquéte coloniale » de Mamadou Diouf.
Parlons justement de ces fameux Ceddos. Leur vrais nom est jaami bur , ce sont des esclaves-soldats appartenant à la couronne et servant de troupes d’élites aux armées Wolofs.
« Les jaami-buur, les esclaves de la couronne, sont aussi appelés fekk-bayyi ou fekk-bayyeetil (esclaves permanents) pour exprimer l’idée qu’ils n’appartiennent à aucun souverain ou aucune famille royaule en particulier, qu’ils doivent servir la royauté »
« Ces esclaves proviennent en général des guerres ou de razzias dans les pays limitrophes. La tradition orale prétend même que des sujets démunis ont préféré, pour survivre dans des périodes difficiles, se mettre au service de leur souverain en devenant ses esclaves pour profiter des avantages matériels du pouvoir. L’origine des plus importants d’entre eux, souvent ancienne, se perd dans la nuit des temps. Ils sont les principaux soutiens du pouvoir dont ils constituent la force armée permanente, formant, aussi, la garde personnelle du roi. Leurs représentants occupent des fonctions élevées et remplissent des charges de confiance, des mission délicates exigeant une fidélité totale au souverain. Ils sont les plus sur exécuteurs de la volonté de celui-ci. » Tiré de « La société Wolof : tradition et changement » d’Abdoulaye Bara Diop.
Et voici l’article de wikipedia sur les ceddos. Il est bourré d’erreurs.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ti%C3%A9dosCe sont justement ces erreurs qui le rendent intéressant, on y voit l’image que la mémoire sénégalaise a retenue des jaami-buurs. Ils sont décrits comme de petits nobles et l’on nous explique que le terme ceddo (qui se prononce tiédo) désigne à l’origine la tradition Wolof. Dans un lien lié à cette page (
http://fr.wikipedia.org/wiki/Mbegnu ) il est dit que les ceddos seraient les descendants des rois guerriers du Ghana et assuraient la sécurité des populations locales. En lisant cela on imagine facilement un genre de table-ronde sénégalaise ou siégeraient des chevaliers ceddos.
Tout cela est faux.
Le terme ceddo ne désigne pas la tradition Wolof, il vient du Peul. C’est le terme par lequel les Peuls du Sénégal désignaient tous les populations ne parlant pas le Peul ,d’ailleurs je met ceddos au plusieurs mais en fait on devrait dire sebbe , par dérivation un grand nombre de Peuls et de Toucouleurs (pour faire simple les Toucouleurs sont un sous-groupe de Peuls) étant islamisés et les populations les entourant ne l’étant généralement pas le terme ceddo a fini par aussi désigner le païen.
Lorsque le conquérant Peul Koli Tenguella s’est lancé à la conquête du Tekrour (alors sous l’autorité de l’empire Djolof) il a rallié certains des chefs jaami-buur ainsi que leurs armées, leur promettant au passage le statut d’hommes libres. Notons qu’en fait leur statut n’a absolument pas changé. Hors Tenguella avait déjà recruté un bon nombre de guerriers issus d’ethnies non Peules lors d’une épopée qui le mena des savanes du Mali aux forêts de Guinée puis des forêts Guinéennes aux étendues sableuses du Sénégal et qui s'acheva dans ce fameux Tékrour. L’on se mit alors à désigner par le terme de ceddo les soldats permanents de Tenguella et de ses descendants qui étaient souvent d’origine non-peule et qui pour couronner le tout étaient a peu prés tous païens. Même les Peuls et Toucouleurs de ces armées furent considérés comme ceddos.
Je ne sais pas vraiment comment (surement à cause de la suzeraineté que les Peuls exercèrent sur la Sénégambie de la fin du 16e siècle jusqu’à la seconde moitié du 17e siècle) mais le terme ceddo finit par être repris par les Wolofs eux-mêmes pour désigner les esclaves-soldats jaami-buur et parfois les populations fidèles aux religions traditionnelles.
Puis la mémoire sénégalaise à transformée ces esclaves-soldats en petit noble ,voir semble t-il en roi-guerriers.
Cela peut paraître étonnant mais en se penchant plus prés sur la condition du ceddo ne l'est pas tant que ça. Les chefs jaami-buur avaient un statut les rapprochant de l’aristocratie, certains étaient de fait des seigneurs féodaux ayant autorité sur un territoire et disposant d'une armée formée de ceddo de rangs inférieurs. A la fin de la période précoloniale ils n'hésitent plus à lorgner sur le pouvoir. Quand au simple soldat ceddo sa situation était finalement supérieure à celle du simple paysan libre.
Il était du coté du pouvoir, pouvait piller et le faisait régulièrement, tandis que sa condition d'esclave le dispensait de toute retenue dans son comportement : en Afrique de l'ouest le noble en particulier, et plus généralement l'homme libre, se distingue par son attitude digne et contrôlée, inversement l'esclave n'est pas sensé connaitre la honte et est poussé à tous les débordements. D'ou le comportement provocateur, la réputation d'alcoolique et les mœurs très libertines des guerriers ceddos.
Pour les captifs d’el hadj Oumar je me contenterais de citer un certains Django (étonnant n’est-ce pas ?) qui fut nommé gouverneur de Koundian. D’ailleurs el hadj Oumar utilisait lui aussi des esclaves-soldats, les sofas, mais contrairement aux jaami-buur ceux-ci étaient attachés à sa personne.
Pour Sakoura et N’golo je me contenterais de liens wiki, ça ne veut pas grand-chose, surtout les articles sur l’Afrique qui donnent souvent une image mythifiée de la réalité comme je l’ai montré avec l’exemple des ceddos, mais les articles sont très courts et ne disent en substance pas grand-chose de plus que le statut servile qu’eurent au début de leur vie ces deux souverains.
Sakoura :
http://fr.wikipedia.org/wiki/SakouraN’golo :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ngolo_DiarraA noter que les armées Bambaras étaient formées d’esclaves, les tonjon.
Et enfin je me répète je ne fais pas l’éloge de l’esclavage ouest-africain seulement, et tout ce que je viens d’écrire ou de rapporter le montre, celui-ci n’est pas comparable avec l’esclavage pratiqué en occident (pour l’esclavage en pays islamique je n’y connais pas grand-chose).
Vous dites, je vous cite « A ma connaissance, indépendamment du lieu, la condition d’esclave dépend essentiellement des besoins du maître et de la valeur marchande de l’esclave sur le marché ou de la rançon potentielle de restitution. ». La réalité est plus complexe. L’esclavage est avant tout une institution sociale, avec ses codes et ses normes. Il prendra un visage différent, plus ou moins brutal, selon ces codes et ces normes indépendamment des besoins du maître ou de son caractère.
En Afrique de l’ouest ces normes font qu’il existe de nombreuses limites à l’exploitation de l’esclave et le maître qui les dépasserait s’exposerait à l’hostilité de la communauté ou se verrait privé de son esclave.
Oui l’esclavage pratiqué en occident a été beaucoup plus brutal et cruel que celui pratiqué en Afrique de l’ouest. Je ne vois pas ce qu’il y a d’inacceptable ou d’incompréhensible dans ce fait. Ce n'est pas non plus de l'anti-occidentalisme de le faire remarquer. C'est un fait, c'est tout.
Ça ne fait pas pour autant de l’esclavage ouest-africain une institution positive, il ne l'était pas pour la majorité des esclaves. Le fait que de nombreux esclaves aient profites de la conquête coloniale pour s’enfuir en territoire français et obtenir leur liberté le prouve. Mais pour reprendre votre expression cet esclavage était moins sale que celui pratiqué en Amérique certainement.