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Message Publié : 12 Mars 2013 22:27 
(d'après Polyen) : La bataille de Leuctres entre Thébains et Spartiates a lieu un jour de fête religieuse, qui devrait normalement interdire toute hostilité. Dans les deux camps, la cavalerie s'avance la première. Un escadron thébain, sur ordre, fait volte-face ostensiblement, comme s'il refusait de combattre en ce jour. Les cavaliers spartiates qui lui font face croient devoir l'imiter : il ne sera pas dit qu'ils se montreront moins respectueux de la tradition que l'ennemi. Résultat, pagaille, altercations, désorganisation de la ligne de bataille. Et les Thébains, dont les mouvements ont été bien coordonnés, en profitent pour lancer une attaque générale, et victorieuse. Reste l'infanterie spartiate, mais pour ça Epaminondas a encore une innovation, l'"ordre oblique".


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Message Publié : 15 Mars 2013 12:59 
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Georges Duby
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Lors de la traque du Bismarck par la GB, soumis à des attaques de l'aviation anglaise, l'amiral commandant le cuirassé ordonna de tirer d'énormes obus dans l'eau, juste devant chaque appareil volant à basse altitude, pour créer un mur d'eau s'élevant à 50-60 mètres afin de gêner les attaques.

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 15 Mars 2013 14:28 
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Philippe de Commines
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Bonjour Enki-Ea

Enki-Ea a écrit :
Ah énorme, je ne connaissais pas cet épisode. En avez-vous d'autres?
Comme leurs "ancêtres" huns, les Mongols étaient tellement inventifs, tellement subtils, qu'ils ont un paquet de ruses de guerre à leur actif. Je me rappelle en avoir lu quelques-unes mais ça fait bien longtemps...




Au siège de Boukhara (1220, Campagne du Kharezm), les Mongols laissent une porte laissée apparemment sans surveillance. Profitant de l'aubaine, la garnison turque abandonne ses positions sous le couvert de la nuit.
Les Mongols ne troublent pas l'ennemi pendant cette sortie et l'armée turque quitte la ville sans incident. Mais des troupes mongoles les suivent de loin sans qu'ils le sachent, les encerclent et les attaquent en rase campagne le lendemain. Les Türks seront massacrés jusqu'au dernier.

Il y a d'autres exemples repris dans les nombreuses batailles que les Mongols ont engagées et qui sont 'racontées' sur le site : Peuples cavaliers

Bien à vous.

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Hugues de Hador.


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Message Publié : 16 Mars 2013 16:40 
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Fustel de Coulanges
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Ruser, c'est aussi monter des fausses ruses...

Hiver 93-94, en Corse, alors que les Anglais s’apprêtaient à mettre le siège devant Bastia, le représentant du peuple Lacombe-Saint-Michel envoya au consul de France à Gênes une lettre malicieuse dont voici un extrait :
"J'ai éprouvé un échec à Saint-Florent ; mais de la nouvelle position où je suis, j'ai tendu un piège aux Anglais, et pas un seul n'échappera s'ils tombent dedans"
Le piège en question était totalement fictif...
Lacombe-Saint-Michel confia la lettre à un capitaine ragusain qui s’empressa de remettre cette dernière aux Britanniques. Le piège du représentant du peuple venait de fonctionner et les Anglais, méfiants, retardèrent de six semaines leurs opérations sur Bastia.

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" Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)


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Message Publié : 16 Mars 2013 18:13 
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Drouet Cyril a écrit :
Ruser, c'est aussi monter des fausses ruses...

Hiver 93-94, en Corse, alors que les Anglais s’apprêtaient à mettre le siège devant Bastia, le représentant du peuple Lacombe-Saint-Michel envoya au consul de France à Gênes une lettre malicieuse dont voici un extrait :
"J'ai éprouvé un échec à Saint-Florent ; mais de la nouvelle position où je suis, j'ai tendu un piège aux Anglais, et pas un seul n'échappera s'ils tombent dedans"
Le piège en question était totalement fictif...
Lacombe-Saint-Michel confia la lettre à un capitaine ragusain qui s’empressa de remettre cette dernière aux Britanniques. Le piège du représentant du peuple venait de fonctionner et les Anglais, méfiants, retardèrent de six semaines leurs opérations sur Bastia.

Là il s'agit d'intoxication, comme quoi ça ne date pas d'hier.
Cette histoire est délicieuse. :mrgreen:

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Message Publié : 16 Mars 2013 22:09 
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Fustel de Coulanges
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Citer :
Là il s'agit d'intoxication, comme quoi ça ne date pas d'hier.


Rien ne se perd… (comme disait d'ailleurs Charette… :wink: )


Canon en bois de l’opération Fortitude :
Image

... Et 150 ans plus tôt en Vendée :
« Saint-Pal et Chouppes, leurs chefs, avaient usé d’un stratagème assez plaisant pour effrayer les troupes peu nombreuses que nous avions dans cette partie. Ils avaient fait placer sur les hauteurs plusieurs troncs d'arbres qu'on pouvait prendre de loin pour des pièces d'artillerie, et, afin que l'illusion fut complète, ils avaient rangé autour de ces canons fictifs un grand nombre de canonniers mannequins. Cette ruse fut employée plus d'une fois par les brigands au début de la guerre. »
(Mercier du Rocher, Mémoires)

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Message Publié : 18 Mars 2013 18:01 
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Georges Duby
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Une ruse classique pour déclencher une guerre, se prétendre victime d'une attaque qu'on ne peut laisser passer et qui sert à motiver son armée et son pays. Ainsi d'Hitler s'apprêtant à envahir la Pologne, fait état d'un coup de main polonais sur l'émetteur de Gleiwitz. Un comble.
Il y a aussi la méthode de vexer le futur ennemi comme dans la falsification de la réalité dans la dépêche d'Ems où il est indiqué que le Kayser a traité de haut le représentant français.

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Message Publié : 18 Mars 2013 18:26 
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Alain.g a écrit :
Ainsi d'Hitler s'apprêtant à envahir la Pologne, fait état d'un coup de main polonais sur l'émetteur de Gleiwitz. Un comble.

Mais ce coup de main a réellement eu lieu ! >:)
Il a été monté par Heydrich (et exécuté par Naujocks, je crois) avec des prisonniers de camps de concentration à qui on avait promis la liberté, et ils ont laissé sur le terrain un cadavre en uniforme polonais.
Il va sans dire que les participants sortis des camps ont été exécutés sitôt le coup réalisé. Heydrich connaissait son boulot... :rool:

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Message Publié : 18 Mars 2013 19:24 
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Georges Duby
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pierma a écrit :
Alain.g a écrit :
Ainsi d'Hitler s'apprêtant à envahir la Pologne, fait état d'un coup de main polonais sur l'émetteur de Gleiwitz. Un comble.

Mais ce coup de main a réellement eu lieu !
Oui, OK. Nom de code : grand mère décédée. La radio émettra un message de haine anti-allemand en polonais. Il y aura d'autres simulations de coups polonais également simulés. Hitler fera état de l'agression contre l'Allemagne.
L'URSS en usera de même en Carélie en attaquant la Finlande.

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Message Publié : 18 Mars 2013 19:38 
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Alain.g a écrit :
Nom de code : grand mère décédée.

ça je l'ignorais.
particulier, l'humour de Heydrich...

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Message Publié : 18 Mars 2013 21:08 
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La prise des ponts de Vienne le 13 novembre 1805 :
http://www.histoire-empire.org/austerli ... cieuse.htm

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Message Publié : 18 Mars 2013 21:32 
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Drouet Cyril a écrit :
La prise des ponts de Vienne le 13 novembre 1805 :
http://www.histoire-empire.org/austerli ... cieuse.htm


Un petit résume pour le jour où ce lien ne sera plus valide ?

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Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
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Message Publié : 18 Mars 2013 21:38 
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Lannes
"Ainsi que j'ai eu l'honneur d'en rendre compte à Votre Majesté, la ville de Vienne est occupée, et, à l'aide d'un peu de ruse nous nous sommes rendus maîtres du pont. Les généraux Bertrand et Moissel, et le chef d'escadrons Lanusse, mon aide de camp, avaient été chargés de s'en emparer et avaient marchés, pour le surprendre, à la tête des 9e et 10e régiments de hussards et des 10e et 22e de dragons, avec trois pièces de canon. Ils se sont avancés si rapidement et la barrière qui fermait le chemin devant eux, à quelque distance en avant du pont, a été si vite entourée, que deux vedettes, qui y étaient placées, ont eu à peine le temps de s'enfuir, après avoir tiré en l'aire leurs coups de carabine. Les hussards arrivés sur le pont ont réussi à arrêter un homme qui allait mettre le feu aux artifices disposés d'un bout à l'autre. Comme on a vu que si les troupes avançaient, l'incendie allait commencer du coté de la rive gauche, on les a fait arrêter, et MM Bertrand, Moissel et Lanusse se sont avancés seuls. Ils allaient être criblés de mitraille, s'ils n'avaient criés aux canonniers dont ils n'étaient plus qu'à quatre pas, qu'ils allaient vers le prince Auesrperg, qui, le matin, avait demandé un entretien avec moi. On les a laissé passer. Au même moment j'arrivais, après avoir traversé la ville, à la tête de la division des grenadiers. Le maréchal Lannes qui m'accompagnait, s'est porté aussitôt, avec quelques officiers, à l'extrémité opposée du pont. Tandis qu'ils causaient avec les Autrichiens, et cherchaient à leur persuader qu'ils ne devraient pas s'opposer à notre passage, je faisais filer une brigade de grenadiers. Les Autrichiens la voyant avancer ont voulu de nouveau tirer, mais la fermeté du maréchal Lannes leur en a imposé et les a empêchés encore une fois de mettre le feu aux canons. Le prince d'Auersperg est arrivé sur ces entrefaites, et a demandé à me voir. Il m'a parlé de ses devoirs, je lui ai parlé de ma position et de celle de mon maître: en attendant, les grenadiers ont achevé de passer et les Autrichiens se sont retirés sur son ordre sur la route de Brain (sic)"


Marmont
"La surprise si singulière du pont de Thabor mérite d'être racontée. Après la prise de possession de Vienne par capitulation, les troupes françaises se portèrent sur les bords du Danube. Là, le fleuve a une grande largeur. Les Autrichiens avaient tout préparé pour en défendre le passage et pour détruire le pont sur pilotis existant et servant à la communication de la capitale avec la Moravie et la Bohême. Des batteries formidables, placées sur la rive gauche, le pont couvert de matières combustibles, rendaient la défense facile: une étincelle pouvait le détruire, quand les troupes françaises se présentèrent à l'entrée; à leur tête se trouvaient Murat, Lannes, et Oudinot.

(...) Les allemands sont, de leur nature, conservateurs, économes; et un pont comme celui-là est d'un grand prix. Murat et Lannes, tous deux Gascons, imaginèrent de profiter de cette disposition des esprits et d'en abuser. Ils mirent en mouvement leurs troupes, sans paraître hésiter. On leur cria de s'arrêter; elles le firent mais elles répondirent qu'il y avait un armistice, et que cet armistice nous donnait le passage du fleuve.

Les deux maréchaux, se détachant des troupes, vinrent seuls sur la rive gauche pour parler au prince Auersperg, qui y commandait, en donnant l'ordre à la colonne d'avancer insensiblement. La conversation s'entama; mille sornettes furent débitées à ce stupide prince Auersperg; et, pendant ce temps, les troupes gagnaient du terrain et jetaient sans affectation dans le Danube la poudre et les matières combustibles dont le pont était couvert. Les plus minces officiers, les derniers soldats autrichiens jugeaient l'évènement; ils voyaient la fraude et le mensonge, et les esprits commençaient à s'échauffer.

Un vieux sergent d'artillerie s'approche brusquement du prince et lui dit avec impatience et colère: <Mon général, on se moque de vous, on vous trompe, et je vais mettre le feu aux pièces >. Le moment était critique; tut allait être perdu, lorsque Lannes, avec cette présence d'esprit qui ne l'abandonnait jamais, et cette finesse, cet instinct du cœur humain, apanage particulier des Méridionaux, appelle à son secours la pédanterie autrichienne, et s'écrie: < Comment, général, vous vous laissez traiter ainsi ! Qu'est donc devenue la discipline autrichienne, si vantée en Europe ? >. L'argument produisit son effet. L'imbécile prince, piqué d'honneur, se fâcha contre le sergent, le fit arrêter. Les troupes, arrivant, prirent canons, généraux, soldats, et le Danube fut passé. Jamais chose semblable n'est arrivée dans des circonstances tout à la fois aussi importantes et aussi difficiles."


Marbot
"Murat et Lannes, auxquels l'Empereur avait ordonné de tâcher de s'emparer du passage du Danube, marchèrent vers les ponts, placèrent les grenadiers d'Oudinot derrière les plantations touffues, puis s'avancèrent, accompagnés de seulement quelques officiers parlant allemand. Les petits postes ennemis tirent sur eux en se repliant. Les deux maréchaux font crier aux autrichiens qu'il y a armistice, et, continuant à marcher, ils traversent sans obstacles tous les petits ponts, et, arrivés au grand, ils renouvellent leur assertion au commandant de Spitz, qui n'osent faire tirer sur les deux maréchaux presque seuls, et affirmant que les hostilités sont suspendues. Cependant, avant de les laisser passer, il veut lui-même aller prendre les ordres du général d'Auersperg; mais, pendant qu'il se rend près de lui, en laissant le poste à un sergent, Lannes et Murat persuadent à celui-ci que, le traité portant que leur pont leur sera livré, il faut qu'il aille avec ses soldats rejoindre son officier sur la rive gauche. Le pauvre sergent hésite (...) On le pousse tout doucement en continuant `lui parler, et par une marche lente, mais continue, on arrive à l'extrémité du grand pont.

Un officier autrichien veut alors allumer les matières incendiaires; on lui arrache des mains la lance à feu en lui disant qu'il se perdra s'il commet un tel crime !... Cependant la colonne des grenadiers d'Oudinot paraît et s'engage sur le pont... Les canonniers autrichiens vont faire feu.. Les maréchaux français courent vers le commandant de cette artillerie, auquel ils renouvellent l'assurance d'un armistice conclu; puis, s'asseyant sur les pièces, ils engagent les artilleurs à faire prévenir de leur présence le général d'Auersperg. Celui-ci arrive enfin; il est sur le point d'ordonner le feu, bien que les grenadiers français entourent déjà les batteries et les bataillons autrichiens; mais les deux maréchaux l'assurent qu'il y a un traité, dont la principale condition est que les français occuperont les ponts. Le malheureux général, craignant de se compromettre en versant du sang inutilement, perd la tête au point de s'éloigner en emmenant toutes ses troupes qu'on lui avaient données pour défendre les ponts !



Dumas
"Nous nous sommes dirigés de suite vers le pont du tabor sur le Danube et, après une conférence entre le prince Murat, le maréchal Lannes, avec le prince autrichien Auersperg chargé de défendre ce passage et de brûler les ponts.

Ce fut là, au moment des pourparlers, que nous rejoignit M. le commandant Chapignac. Soit ruse ou audace de la part des Français, le passage fut effectué sans coup férir; nous nous sommes rendus maîtres d'un parc nombreux d'artillerie et avons neutralisé plus de 15000 hommes autrichiens en leur assurant qu'il existoit un armistice"


Savary
Les troupes se mirent en route vers Vienne. Les maréchaux Lannes et Murat étaient entrés dans Vienne. Ils firent une ruse, qui eut une influence si importante sur le reste de la campagne, qu'il faut en parler.

Le général Giulay n'était pas encore rentré des avant-postes autrichiens, quand nos troupes entrèrent dans Vienne. Les rumeurs d'un armistice étaient propagées par nos ennemis eux-mêmes: on savait que le général Giulay était encore avec l'Empereur. On l'avait aperçu aller et venir. Comme il n'était pas revenu, la rumeur d'un armistice devenait plausible. Les Autrichiens, placés sur la rive gauche du Danube, avaient pris leurs dispositions pour brûler le pont de Tabor, et l'avait fait à peine protéger par un poste de hussards.

Les maréchaux Lannes et Murat, désirant sauvegarder ce moyen de passage si essentiel à l'armée, vinrent eux-mêmes, accompagnés par seulement quelques officiers, au poste autrichien, où ils répétèrent toutes les rumeurs courant sur l'armistice. Le commandant du poste les pris pour de simples officiers; ils marchèrent avec lui, lui faisant traverser le pont, qui est très long. Quelques officiers autrichiens appartenant aux troupes se trouvant sur l'autre coté, c'est-à-dire sur la rive gauche, approchèrent et se mêlèrent à la conversation. Les grenadiers de Lannes, conduits par un officier intelligent, profitèrent de l'instant qu'ils regardaient vers la rive gauche. Ils étaient arrivés par les rues des faubourgs de Vienne, qui sont dans l'île du Prater; ils empêchèrent les vedettes de hussards de donner l'alarme: l'officier français leur dit qu'ils faisaient partie d'un poste que l'on plaçait sur le bord de la rivière; ils le crurent, ne donnèrent pas l'alarme à leurs propres postes, qui virent soudain des soldats déboucher sur leurs arrières, et la tête de la colonne à l'entrée d u pont.

Les hussards autrichiens ne voyant pas leur officier, qui était à ce moment avec les maréchaux Lannes et Murat, et pensant à l'armistice, ne bougèrent pas. La colonne de grenadiers doubla le pas franchi le pont, et se hâta sur l'autre rive, après avoir jeter à l'eau les pièces d'artifice préparées pour la destruction du pont.

Les officiers autrichiens réalisèrent la faute qu'ils avaient commise; mais il était trop tard: et leurs canonniers, qui étaient à leurs pièces sur l'autre rive, ne se doutant pas de ce qui se passait devant eux, ne firent pas feu, voyant leurs propres officiers en conversation avec les nôtres. Ils laissèrent la colonne arriver jusqu'à eux, et virent bientôt leurs canons saisis, ainsi qu'eux-mêmes.

Jamais ruse ne fût aussi bien exécutée.


Rapp

La possession des ponts était une victoire, et il n'y avait que la surprise qui pût nous la faire remporter. Nous prîmes nos mesures en conséquence. On défendit aux troupes échelonnées sur la route de faire aucune démonstration capable de donner l'éveil, on ne permit à personne d'entrer à Vienne. Quand tout fut bien vu, bien examiné, le grand-duc pris possession de cette capitale et chargea Lanusse et Bertrand de faire sans délai une reconnaissance sur le fleuve. Ces deux officiers étaient suivis du 10e hussards. Ils trouvèrent aux portes du faubourg un poste de cavalerie autrichienne. On ne se battait plus depuis trois jours; il y avait une espèce de suspension d'armes. Ils abordent le commandant, lient conversation avec lui, s'attachent à ses pas, ne l'abandonnent plus. Arrivés sur les bords du fleuve, ils s'obstinent encore à le suivre malgré lui; l'Autrichien s'emporte, les Français demandent à communiquer avec le général qui commande les troupes stationnées sur la rive gauche: il y consent, mais il ne souffre pas que nos hussards les accompagnent; le 10e est obligé de prendre position. Cependant nos troupes arrivaient, conduites par le grand-duc et le maréchal Lannes. Le pont était encore intact, mais les conducteurs étaient établis, les canonniers tenaient leurs mèches: le moindre signe qui eût décelé le projet de passer de force eût fait avorter l'entreprise. Il fallait jouer de ruse; la bonhomie des Autrichiens s'y prêtait. Les deux maréchaux mirent pied à terre, la colonne fit halte, il n'y eut qu'un petit détachement qui se porta sur le pont et s'y établit. Le général Belliart s'avança en se promenant les mains derrière le dos avec deux officiers d'état-major. Lannes le joignit avec d'autres; ils allaient, venaient, causaient, et arrivèrent ainsi jusqu'au milieu des Autrichiens. L'officier de poste ne voulait tout d'abord pas les recevoir, mais il finit pas céder, et la conversation s'établit. On lui répéta les propos qu'avait déjà tenu le général Bertrand, que les négociations avançaient, que la guerre était finie, qu'on ne se battrait, qu'on ne se déchirerait plus. < Pourquoi > lui dit le maréchal < tenez-vous encore vos canons braqués sur nous ? N'est-ce pas assez de sang, de combats ? Voulez-vous nous attaquer, prolonger des malheurs qui vous pèsent plus qu'à nous ? Allons, plus de provocations: tournez vos pièces. > Moitié subjugué, moitié convaincu, le commandant obéit. L'artillerie fut dirigée sur l'armée autrichienne, et les armes mises en faisceau. Pendant ces pourparlers, le peloton d'avant-garde avançait lentement; mais enfin il avançait, masquant des sapeurs, des canonniers, qui jetaient dans le fleuve les matières combustibles, répandaient de l'eau sur les poudres et coupaient les conducteurs. L'Autrichien, trop peu familier avec notre langue pour s'intéresser beaucoup à la conversation, s'aperçut que la troupe gagnait du terrain, et s'efforçait de faire comprendre que cela ne devait l'être, qu'il ne le souffrirait pas. Le maréchal Lannes, le général Belliard, tâchèrent de le rassurer; ils lui dirent que le froid était vif, que nos soldats marquaient le pas, qu'ils cherchaient à s'échauffer en se donnant du mouvement. Mais la colonne approchait toujours, elle était déjà aux trois quarts du pont; il perdit patience et commanda le feu. Toute la troupe courut aux armes, les artilleurs apprêtaient leurs pièces, la position était terrible: un peu moins de présence d'esprit, le pont était en l'air, nos soldats dans les flots, et la campagne compromise. Mais l'Autrichien avait affaire à des hommes qui n'étaient pas faciles á déconcerter. Le maréchal Lannes le saisit d'un coté, le général Belliart de l'autre; ils le secouent, le menacent, crient, empêchent qu'on ne l'entende. Arrive sur ces entrefaites le prince d'Hogsberg (note: Auersperg), accompagné du général Bertrand. Un officier court rendre compte au grand-duc de l'état des choses; transmet à la troupe, en passant, l'ordre d'allonger le pas et d'arriver. Le maréchal s'avance au devant du prince, se plaint du chef de poste, demande qu'il soit remplacé, puni, éloigné d'une arrière-garde où il peut troubler les négociations. Hogsberg donne dans le piège. Il discute, approuve, contredit, se perd dans une conversation inutile. Nos troupes mettent le temps à profit; elles arrivent, débouchent, et le pont est emporté."



Langeron

Murat (alors seulement grand-duc de Berg) commandait l'avant-garde française et dès qu'il eut occupé les faubourgs de Vienne, il courut aux ponts du Danube dont le passage assurait à l'armée française des succès faciles et prompts et exposait Koutousov à être coupé du chemin de Brünn et forcé ou à se retirer sur Iglau, ou à accepter un combat qui pouvait anéantir son armée.

Ces pont du Danube (qu'on aurait dut brûler) sont très longs et faciles à défendre: on avait ramassé à Vienne tout ce qui s'y trouvait encore de soldats et de pièces d'artillerie disponibles et l'on avait confié ce détachement au prince Charles d'Auschberg (Auersperg) lieutenant-général autrichien. C'était un militaire brave de sa personne, honnête homme, mais borné et facile à tromper. Murat profita de cette facilité et ayant demandé une entrevue au prince lui persuada que napoléon venait de conclure la paix avec l'Autriche et que l'empereur François avait consenti à livrer le passage aux troupes françaises pour poursuivre les Russes. Assurément le piège était trop grossier et la nouvelle que donnait Murat trop incroyable que tout autre que le prince d'Auschberg pût y ajouter foi. Le caractère de l'empereur François était trop connu pour que son général pût croire qu'il sacrifiait ses alliés d'une manière si déloyale. Murat, en s'entretenant avec le prince, avançait toujours sur le pont avec la plus inconcevable témérité et était suivi par ses colonnes serrées en masse. Les soldats autrichiens voulurent faire feu; leur général les en empêcha. Enfin, Murat parvint aux batteries et se jeta sur la mèche d'un canonnier qui voulait mettre le feu à une pièce; il l'éteignit, et le prince d'Auschberg fit retirer les troupes et les canons et les ponts furent livrés avec le prince, avançait toujours sur le pont avec la plus inconcevable témérité et était suivi par ses colonnes serrées en masse. Les soldats autrichiens voulurent faire feu; leur général les en empêcha. Enfin, Murat parvint aux batteries et se jeta sur la mèche d'un canonnier qui voulait mettre le feu à une pièce; il l'éteignit, et le prince d'Auschberg fit retirer les troupes et les canons et les ponts furent livrés

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Courageuse cette manière de prendre des ponts au culot en faisant s'avancer des généraux qui avec assurance déclarent qu'il y a armistice, qu'il n'y a donc plus de guerre et finissent par gagner l'autre rive en demandant à parler au commandant en chef, ce qui démobilise les gardiens du pont et ceux qui étaient chargés de le faire sauter en cas de franchissement.
La réaction normale d'un gradé aurait été de stopper les généraux en disant qu'il n'avait pas d'instructions et qu'il allait en chercher mais le mot armistice devait faire son effet ainsi que la vue de généraux.
C'est une ruse par la tromperie qui fait penser à l'utilisation de drapeaux blancs ou de camions de la croix rouge au 20è siècle, plus facile à mettre en oeuvre, mais avec moins de panache il faut le dire.

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