Une autre amazone ?
Il s’agit de Louise, reine de Prusse. Ces méchantes caricatures sont le reflet de ce que pouvait dire à l’époque les Bulletins de la Grande Armée :
« La reine de Prusse est à l'armée, habillée en amazone, portant l'uniforme de son régiment de dragons; écrivant vingt lettres par jour pour exciter de toutes parts l'incendie. Il semble voir Armide dans son égarement, mettant le feu à son propre palais; après elle le prince Louis de Prusse , jeune prince plein de bravoure et de courage, excité par le parti, croit trouver une grande renommée dans les vicissitudes de la guerre. A l'exemple de ces deux grands personnages, toute la cour crie à la guerre ; mais quand la guerre se sera présentée avec toutes ses horreurs, tout le monde s'excusera d'avoir été coupable , et d'avoir attiré la foudre sur les provinces paisibles du Nord »
(1er Bulletin, 8 octobre 1806)
« La reine de Prusse a été plusieurs fois en vue de nos postes; elle est dans des transes et dans des alarmes continuelles. La veille, elle avait passé son régiment en revue. Elle excitait sans cesse le roi et les généraux. Elle voulait du sang, le sang le plus précieux a coulé. »
(8e Bulletin, 16 octobre 1806)
La première caricature illustre la lettre écrite par Napoléon à Talleyrand le 15 octobre (propos retranscrits ensuite dans le Journal de l’Empire, le 26 du même mois) :
« La reine de Prusse a été poursuivie par un escadron de hussards ; elle a été obligée de rentrer à Weimar et en est repartie trois heures avant que nos postes y entrassent. Elle a suivi une route sur laquelle nous avons beaucoup de troupes ; il est possible qu'elle ait été prise. »
En vérité, Louise, à l’annonce de la bataille à venir, avait reçu l’ordre de quitter les environs d’Auerstaedt le 13 octobre pour rentrer à Berlin ; elle coucha à Weimar et en partit le 14.
Les paroles de Minerve dans la 2e caricature : « Tiens, voilà ta quenouille. Tu ferais mieux de filer et de laisser filer ton mari », ne sont pas sans rappeler les mots du 19e Bulletin (27 octobre) :
« Combien sont malheureux les princes qui laissent prendre aux femmes l'influence sur les affaires politiques. »
Ou encore les propos de Napoléon tenus alors qu’ils évoquaient les femmes soldats :
« [Les femmes] ne doivent pas être regardées commue les égales des hommes, et ne sont, en réalité, que des machines à faire des enfants. Pendant la Révolution, elles s'insurgeaient, s'érigeaient en assemblées, voulaient même se former en bataillons : on fut obligé de réprimer cela. Le désordre se fût entièrement mis dans la société si les femmes étaient sorties de l'état de dépendance où elles doivent rester. C'eût été des luttes, des combats continuels. Un sexe doit être soumis à l'autre. »
(Gourgaud, Journal de Sainte-Hélène)