Je lance un fil dont le titre est sans doute très approximatif.
Je me rappelle avoir lu dans la Chronique de la Révolution que sous le Directoire, la dernière activité à la mode dans la bourgeoisie était le sport, sous l'influence de "l'anglomanie du moment" (sic). Ce serait à ce moment-là que le français aurait réimporté le mot "sport" après avoir fourni "desport" à l'autre rive du canal quelques siècles plus tôt. L'article décrivait des programmes d'exercices physiques que l'on suivait aux côtés d'un moniteur, et une gravure montrait ceux-ci, avec notamment des plongeurs et nageurs, et aussi des "joggers" représentés en train de courir tous vêtus de la même tenue, ce qui suggère l'existence d'activités sportives organisées et encadrées, proposées à la clientèle.
Il me semble qu'autrefois, le "desport" se cantonnait à des jeux genre paume pratiqués par l'aristocratie avec une arrière-pensée d'exercice militaire : ayons un corps fort pour être potentiellement un bon guerrier, accessoirement, impressionnons l'assistance par des exploits.
Ici, avec une clientèle bourgeoise, on change complètement de registre, entretenir son corps par le sport devenant un but en soi.
Quelle a été l'origine de cette pratique, notamment en Angleterre, puisqu'elle en provenait ?
Pourquoi cette mode ? Que savait-on en matière de santé, par exemple, qui aurait pu motiver les nouveaux sportifs ? La vogue de l'antique a-t-elle joué un rôle ?
Cette mode a-t-elle duré ? sinon, quand est-elle revenue ?

Initiative intéressante, car jusqu'à présent, je ne connaisais comme exercices physiques que l'équitation, l'escrime et le jeu de paume. Les deux premiers ayant une finalité militaire, bien sûr.
Thème très intéressant si on découvre des témoignages sur le goût de développer les capacités du corps. Sans oublier, toutefois, que pour les gens du peuple, l'ignorance de la machine pour tous les travaux les développait dans les travaux quotidiens. C'est pour la bourgeoisie et la noblesse que c'est plus intéressant.

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" Je n'oublie pas le Colonel Arnaud Beltrame "

A partir des années 1750, la marche et la natation (un traité de natation est publié sous Louis XVI) prennent plus d'importance, cela se développe parallèlement à une nouvelle réflexion sur la médecine : on repense le corps, on veut le renforcer, on s'inspire en partie de Sparte. La conception de l'éducation par Mme de Genlis représente bien cette tendance.

Sur la question vous pouvez vous reporter aux ouvrages de Georges Vigarello et sur celle de la marche plus particulièrement, à celui de Laurent Turcot : Le promeneur à Paris au XVIIIIe siècle.

Merci pour ces pistes. Cependant je précise une chose, sur ce forum de "discussions historiques entre passionnés", nous ne sommes pas tous étudiants ou chercheurs sur chacun des thèmes dont nous discutons, et s'il nous faut à chaque fois nous contenter de titres à lire, mon porte-monnaie ne sera pas content
Par conséquent, si dans la mesure du possible, la personne qui possède une référence biblio peut nous faire un petit aperçu en quelques lignes des thèses principales du bouquin, ce serait très bien.

Les recherches sur l'Angleterre tandent à inclure l'apparition des pratiques sportives chez les élites britanniques dans un vaste mouvement d'apparition d'une sorte de société des loisirs entre le 17e et le 18e siècle. C'est alors que se développent les coffee houses, les maisons de thé, les galeries marchandes, les villes d'eau, les clubs, etc. Et donc les champs de course, les jeux de quille, une sorte de croquet, etc. Et c'est dans ces milieux-là qu'apparaissent des sports qui se codifient, commencent à avoir leurs spécialistes, leurs aficionados qui sont de véritables connaisseurs. Cela différencie ces sports de ceux qui sont pratiqués par le peuple lors des festivités qui ont lieu tout au long de l'année, où on trouve les ancêtres des sports actuels, mais avec des règles imprécises, et avec des échanges plus virils.

Ancêtre du rugby, la soule était un jeu pratiqué couramment au Moyen-âge dans les campagnes françaises et n'a été interdite, sous sa forme "primaire", qu'au XIXème siècle si mes souvenirs sont bons. Ce jeu violent, qui se terminait souvent par de multiples fractures et même des morts, ne concernait pas aristocrates ou bourgeois mais toute la population du village!

Peut-on considérer ce jeu comme une pratique sportive en tant que telle? Il semble que oui si l'on s'en réfère à une ordonnance de Charles V du 3 Avril 1365 précisant "qu'elle ne peut figurer parmi les jeux qui servent l'exercice du corps".

Parler d'une apparition des pratiques sportives en Angleterre au XVIIIème siècle semble donc très éloigné de la réalité...

NB: toujours à propos de l'Angleterre et de la soule, on raconte que c'est Guillaume le Conquérant et ses soldats qui y ont introduit ce jeu.

Il y a très loin de jeux même physiques et brutaux à la pratique régulière et organisée d'exercices expressément destinés à prendre soin de son corps.
Ce sujet est destiné à cette dernière partie.

Limiter la pratique sportive à une volonté de prendre soin de son corps, c'est réducteur, non ? En fait l'opposition qui se dessine me paraît être celle qui marque la naissance des sports modernes. Il y a vers les 17e et 18e siècles une fracture culturelle croissante dans les sociétés aussi bien anglaise que française, entre l'élite et le peuple. Les festivités qui auparavant liaient les deux deviennent "populaires", et sont dévalorisées, donc ce sont ces pratiques brutales qui sont mal vues. A l'inverse, l'élite a ses propres pratiques qui elles sont "policées", avec des règles précises, un code de conduite à respecter pour bien tenir son rang. En cela, les pratiques sportives de ce temps découlent de certaines activités que devaient maîtriser les courtisans idéaux dès le 16e siècle : escrime, équitation, danse notamment. C'étaient ces activités qui permettaient à la bonne société de bien prendre soin de son corps, qui était plus digne que celui du peuple (de la même manière qu'on mangeait et buvait mieux parce que par essence un corps noble est meilleur qu'un corps roturier et mérite donc un meilleur entretien). Mais il reste quand même un esprit de compétition, de "joute". Au jeu de paume, on cherche bien à "épater la galerie", non ?

Sauf qu'il y a là une incompréhension majeure au sujet tel que je l'ai posé : il y a, et vous le notez vous-même, à partir de ce XVIIIe l'apparition de nouveaux objectifs aux activités physiques récréatives. Celles-ci ont existé depuis très longtemps, c'est une évidence, ce dont je veux parler dans ce sujet c'est l'apparition de ces motivations nouvelles, qui ne sont ni celles des jeux collectifs du genre soule ni les dérivés des exercices à vocation militaire que sont l'escrime ou l'équitation. Je ne réduis pas la pratique sportive à la volonté de prendre soin de son corps, je consacre un fil à l'apparition des activités sportives dont le but avoué est de prendre soin de son corps, et là, pour autant que je sache, au XVIIIe la bourgeoisie se met à pratiquer des activités auxquelles elle ne se consacrait pas avant avec des motivations nouvelles. Les premières réponses faites correspondent à ma question.