Inscription : 26 Juin 2008 8:11 Message(s) : 2722 Localisation : 中国
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Je pense que l'on peut faire rentrer ce sujet, qui touche aux rapports entre l'humanité et les pierres précieuses, dans l'histoire des moeurs. Portés ou appréciés par presque tous les plus grands personnages de l'histoire, ces petits "caillous" en ont vu des événements ou des drames, des gens se battre pour eux... Pour commencer, je voudrais signaler un très bon site sur l'histoire de certaines pierres précieuses: http://www.lamanchette.comEntre autres: Le Youssoupoff, la bonne étoile du prince Felix
Le Youssoupoff est un superbe diamant de Golconde, également appelé l’Etoile polaire en raison de la taille en étoile (stellar cut) de son pavillon, qui rend la pierre exceptionnellement brillante. Elle est si symétrique qu’elle peut reposer sur sa pointe, dont la colette est pourtant très étroite. Avec son poids de 41, 28 carats métriques, le Youssoupoff est l’un des plus beaux diamants au monde.
Le diamant est acquis au XIXe siècle par la princesse Tatiana Youssoupoff, fille du comte de Ribeaupierre, émigré français sous la Révolution. Elle-même, puis sa fille unique Zénaïde (1861-1939), sont à l’origine de la plus fabuleuse collection personnelle de pierreries du XIXe siècle. La famille Youssoupoff est alors réputée “plus riche que le tsar”, grâce aux dividendes de placements effectués dans plus de 3000 sociétés, et aux revenus de domaines immenses dont l’étendue se chiffre en millions d’hectares. Une des propriétés des Youssoupoff, sur la mer Caspienne, s’étend alors sur 250 km de long. Dans le palais du 94, quai de la Moïka à Saint-Pétersbourg deux chambres fortes aménagées dans les sous-sols, et auxquelles on accède par un corridor secret depuis la galerie des tableaux, abritent des amoncellements de joyaux évalués à 300 millions de francs-or.
Lors de la révolution de 1917, le fils de Zénaïde, le prince Felix Youssoupoff (1887-1967) emporte avec lui l’Etoile polaire, parmi d’autres joyaux - notamment la perle Périgrina - et quelques toiles de maîtres. La vente de la pierre à Cartier (Londres) en 1924 permet au prince exilé de créer à Paris sa propre maison de couture, Irfé. Les modèles - et les parfums - créés par le prince Felix sont alors connus pour leurs lignes androgynes. La mode est aux robes et aux coiffures “à la garçonne” pour les femmes, tandis que triomphe un idéal masculin à la virilité très maquillée, incarnée à l’écran par Rudolph Valentino.
Né en 1887, Son Altesse Sérénissime le prince Felix Felixovitch Youssoupoff est connu pour sa beauté ambigüe d’éternel adolescent. Doté d’une grande intelligence et de goûts artistiques très sûrs, diplômé d’Oxford, il scandalise très jeune la cour du Tsar par sa vie dissolue. Marié à la grande-duchesse Irina Alexandrovna, nièce de Nicolas II, avec laquelle il forme un couple très soudé, il affirme néanmoins très tôt sa bisexualité, collectionnant les conquêtes féminines et masculines. On lui prête notamment une liaison avec le grand duc Dimitri Pavlovitch, cousin germain du tsar Nicolas II. Lors d’une soirée petersbourgeoise, travesti en chanteuse légère, il est reconnu par les somptueux joyaux puisés dans l’écrin de sa mère, la princesse Zénaïde.
En 1916, il dirige le complot qui assassine le célèbre Grichka Raspoutine, un mystique errant et inquiétant qui, par les soins qu’il prodigue au tsarévitch, le jeune fils de Nicolas II, acquiert une influence considérable sur la Tsarine et le Tsar. Devant la résistance de Raspoutine au cyanure, le prince Felix et les conjurés tirent sur lui trois coups de feu dont l’un l’atteint au front : le “staretz” respire pourtant encore. Les conjurés le jettent alors dans un trou pratiqué dans la glace qui couvre la petite Neva. Exilé en 1919, Felix Youssouppoff est resté jusqu’à sa mort en 1967 une figure mondaine et artistique éminente de la patrie de son arrière-grand-père, la France. Il reste toute sa vie hanté par la mort sauvage de Raspoutine, qui lui cause des cauchemars incessants. Comment ne pas être frappé en effet par le constraste terrible entre le mystique hirsute et l’androgyne gracile ? Entre la délicatesse luxueuse des Youssoupouff et le meurtre effrayant du moine ? André de Fouquières raconte, dans les années 20, sa rencontre avec Youssoupoff : “Je vis ce jour-là un jeune homme pâle, assis à une table de bridge, en face de la grande-duchesse Anastasie. Comme on me présentait, il me tendit, le plus gracieusement du monde, une main fine, aristocratique et délicate, que je pris, sans savoir alors que c’était cette main-là qui avait poussé sous les blocs de glace qu’emportait la Néva, la tête du moine maudit ! Et j’entendis nommer le prince Youssoupoff”. (in Cinquante ans de panache, Ed. Pierre Horay, 1951, p. 227-228).
Il publie en 1927 J’ai tué Raspoutine puis, dans les années 50, ses Mémoires.
Quant au diamant Youssoupoff, il est vendu en 1928 à lady Detering, épouse du fondateur de la Royal Dutch Shell. Mis aux enchères après sa mort, en 1980, par Christie’s, il a trouvé preneur à plus de 5 millions de dollars.
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