Akhilleús a écrit :
Vous avez dit que l'assimilation se fait au I siècle....
Houlala, non !
Je me suis très mal exprimé. J'ignore absolument quand cette assimilation s'est faite et surtout généralisée. Elle s'est réalisée très naturellement dès les premiers contact, mais les Romains n'ont du intégrer les mythes grecs que très progressivement. Dater précisément est à mon avis impossible, d'une part du fait de la nature du phénomène, d'autre part de la rareté des sources romaines nous transmettant ces mythes avant le Ier siècle av. JC. Simplement, dans les faits, au Ier siècle, l'assimilation est complète de la part des élites cultivées romaines (Lucrèce, Ovide...). En tout cas, bien avant l'introduction du culte de Mithra.
L'image que nous transmettent Hésiode et surtout Homère d'Arès est effectivement peu flatteuse, mais il ne faut pas non plus généraliser ce petit mépris classique des poètes (aveugles qui plus est !
) pour la force brutale. Un guerrier se serait sans doute exprimé très différemment ! Et pourtant, Arès reste un des douze dieux majeurs du panthéon; il intervient dans la légende fondatrice de Thèbes où il passe pour l'ancêtre des descendants de Cadmos. etc. Son rôle dans l'imaginaire grec n'est pas si noir qu'on pourrait le croire.
A ce titre,
l'Hymne Homérique à Arès est très représentative. Il est court, je le cite in-extenso, dans la traduction Humbert de 1936 en Budé.
Citer :
À Arès
Arès souverainement fort, fardeau des chars, dieu casqué d'or, cœur vaillant, toi qui sait porter le bouclier, protecteur des cités, tout revêtu d'airain, bras puissant, infatigable, fort par ta lance, rempart de l'Olympe, père de la Victoire qui clôt heureusement les guerres, soutien de la Justice, toi qui maîtrise l'adversaire et diriges les hommes les plus justes, prince de vaillance qui fait rouler ton char de feu dans les Sept Voies constellées de l'éther, où tes coursiers flamboyant te portent toujours au-dessus de la troisième orbite [**allusion à la planète Mars**] ! Entends ma prière, recours des mortels, dispensateur de la jeunesse pleine de courage ! Répands d'en haut ta douce clarté sur notre existence, et aussi ta force martiale, pour que je puisse détourner de ma tête la lâcheté dégradante, réduire en moi l'impétuosité décevante de mon âme, et contenir l'âtre ardeur d'un cœur qui pourrait m'inciter à entrer dans la mêlé de glaciale épouvante! Mais toi, dieu heureux, donne-moi une âme intrépide, et la faveur de demeurer sous les lois inviolées de la paix, en échappant au combat de l'ennemi et au destin d'une mort violente !
Voilà Arès devenu une divinité protectrice, soutien de la Justice, et même, il aidera le fidèle à ne pas succomber à ses impulsions brutales !
Malheureusement, il est sans doute très tardif (la notice du Budé de 1936 le date du IVe ou Ve de notre ère), a subit des influences étrangères (assimilation avec la planète Mars), bref, il est difficilement transposable à l'époque classique. Juste pour illustrer un autre son de cloche, même de la part des Grecs !
De l'autre côté de l'Adriatique, le Mars italique s'impose comme une divinité majeure. Il symbolise l'année nouvelle (le mois de Mars, début du printemps mais aussi début de l'année romaine des origines, et restant le début de l'année civile pour les magistratures après l'adjonction de deux nouveaux mois). Il dispense sa bénédiction sur les champs, etc. Ses attributs sont bien plus vastes, bien que méconnus pour la plupart. D'où une ferveur italienne plus importante, malgré l'assimilation.