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Message Publié : 04 Mai 2011 19:33 
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Polybe
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Ma question est peut-être un peu naïve mais étant donné qu'Achille a été plongé dans les eaux du Styx, et est donc invulnérable, pourquoi a-t-il besoin d'une armure ?
Est-ce qu'en fait il est immortel mais vulnérable tout de même ?

Merci pour les précisions que vous pourrez m'apporter.


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Message Publié : 04 Mai 2011 20:16 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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D'une manière générale, il ne faut pas chercher une cohérence dans "la" mythologie, prise en son ensemble. Par contre, chaque auteur, chaque version elle est en général cohérente. Or dans le cas qui t'intéresse, le mythe de l'invulnérabilité (à ne pas confondre avec l'immortalité) suite à la trempette dans le Styx est tardif, absent d'Homère. Je me demande même s'il n'est carrément pas d'origine latine : on le trouve chez Hygin, Stace et Quintus, mais autant que je m'en souvienne, chez aucun Grec (à vérifier; j'ai jeté un œil par acquis de conscience dans Apollodore qui compile les versions hellènes habituelles, et il ignore lui-aussi cette version).


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Message Publié : 05 Mai 2011 10:37 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 11 Juin 2007 19:48
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J’ai un peu repris le sujet hier soir.

D’abord, il ne fait vraiment aucun doute que l’Achille grec est vulnérable. Dans l’Iliade, XXI.166-167, il se fait même blesser au coude par Astéropée : « L’autre javeline touche et égratigne le coude du bras droit ; elle fait gicler le sang noir, puis etc. » Un peu plus loin dans le même chant, Agénor se motive à lutter contre Achille : « Il a comme les autres, une peau qu’entaille la pointe de bronze, une vie semblable à la nôtre, et tous les humains le disent mortel » Ptolémée Chennus (Ier/IIe ap) évoque même d’autres légendes, et d’autres blessures, à la tête, à la main : §4 : « Hélène . . . la fille de l’Aitolien Tityre: elle provoqua Achille en combat singulier et lui infligea une blessure non mortelle à la tête, mais ce fut elle qui tomba sous ses coups. » §6 : « Hélénos, fils de Priam, fut aimé d'Apollon et reçut de lui l'arc d'argent avec laquelle il blessa Achille à la main. . . »
En même temps, c’est tout à fait logique, car rendre le héros invulnérable par magie réduit fortement son aura et son prestige : à vaincre sans péril on triomphe sans gloire !

Finalement, quand devient-il « invulnérable » ? Hygin (contemporain d’Auguste), Fables, 107 est le premier à l’évoquer… en apparence. Chez lui, Apollon décoche le trait dans le talon « qu’il savait être vulnérable (vulneratum) », sous entendu le reste est invulnérable. Mais d’une part, le mot est une reconstitution d’un passage corrompu, etd’autre part… il ne sous entend pas forcément un procédé magique. La blessure mortelle au talon est un vieux fond grec, que l’on retrouve dès les poèmes des Cycles Epiques des VII-VIe, dans les Cypria par exemple, et l'on retrouve la scène sur plusieurs peintures de vase. Mais si Achille est invulnérable sur le reste du corps, cela provient justement de son armure divine, et non d’une aura magique : avec une cuirasse, un casque, des cnémides et un bouclier forgés par Héphaïstos, Achille de fait est invulnérable en dehors des extrémités, et une des rares parties découvertes dont la blessure peut s’avérer mortel se trouve à l’arrière du pied, laissé sans protection donc « vulnérable ». Bref, contrairement à ce que je pensais, je ne crois pas qu’Hygin évoque ces traditions plus tardives, mais reste fidèle à la vulgate grecque.

Le mérite de la création de la version trempette du bambin revient à Stace (Ier ap), dans l’Achilléide où il y fait plusieurs allusions : en I.133-140 : « Souvent moi-même, ô horreur ! je porte mon fils dans le noir Tartare, pour le plonger de nouveau dans le Styx. Le devin de Carpathos, pour détruire ces craintes, m'ordonne un sacrifice magique ; il veut que j'aille, sous un ciel propice, purifier mon fils dans ces ondes mystérieuses, où, vers les derniers rivages de l'Océan, mon père se réchauffe au feu des astres qu'il reçoit dans son sein : c'est là que je dois offrir à des dieux inconnus des sacrifices horribles, des présents expiatoires. Mais il serait long de tout énumérer, et quelque chose me le défend. » ; I.269sq. : « Au nom de ta beauté, des joies futures de ta jeunesse, si pour toi j'ai accepté sur la terre un époux obscur, si, dès ta naissance, j'ai armé ton corps (que ne l'ai-je armé tout entier !) des tristes eaux du Styx, souffre quelque temps que ce vêtement te protège ; il ne nuira pas à ton courage. » ; I.479-481 : « Quel est l'autre dont le beau corps a été plongé en secret par la main d'une Néréide dans ces ondes du Styx qui défient le fer ? »
Stace s’inspire-t-il d’une source antérieure ? Je l’ignore ; pas nécessairement. La tradition lui donnait déjà des pistes pour développer ce nouvel aspect : en particulier, il renouvelle le topos de la mère éplorée prête à tout pour assurer la survie de son fils, que l’on retrouve dans le mythe posthomérique qui veux que sa mère Thétis ait tenté de lui accorder l’immortalité en purifiant son jeune corps de ses faiblesses humaines héritée de son père, soit en le passant sous la flamme, sous en le faisant bouillir dans une marmite. Ces traditions remontent au moins aux VII/VIe, évoquée par exemple dans l’Aigimios attribué à Hésiode ou à Cécrops, évoquée ensuite par Lycophron (IVe av), par Apollonios de Rhodes (IIIe av.) le Pseudo-Apollodore (I/IIe ap.) ou encore Ptolémée Chennus.
A cela s’ajoute le lieu de la scène : la Thessalie, terre par excellence des sorcières du monde grec, domaine d’une magie inquiétante spécifiquement féminine. Et justement, le premier passage fait allusion à d’autres affreux rites magiques et secrets auxquels Thétis s’est livrée ; la trempette dans le Styx n’est rien d’autre qu’un procédé parmi d’autres.
Ce faisant, Stace met en valeur la douleur de la mère (qu’il développera à intervalle régulier dans d’autres tableaux), mais au dépend finalement de la gloire de son héros lui-même. Mais comme Stace est le seul qui nous ai conservé une monographie entière consacrée au fils de Pélée, porté par son statut de poète épique majeur, sa version pourtant très isolée va se populariser dans nos cultures occidentales, d’autant qu’il écrit en latin et non en grec. Mais très vite, l’anecdote dût devenir populaire dans le monde latin puisque la scène est immortalisée sur une fresque de la maison des Dioscures à Pompéi.

Mais à part lui, personne ne développe. Des allusions à l’invulnérabilité du héros en dehors du talon se trouvent dans Quintus (IVe ap.), dans Servius (IVe ap.), Commentaires à l’Enéide, VI.57, dans Lactantius Placidius (VIe ap.), Epitomé des Métamorphoses d’Ovide, XII.6 mais sans que le Styx ne soit évoqué. [Lactantius évoque le mythe sans son commentaire à l’Achilléide, I.134, mais je n’ai pas été capable de mettre la main sur ce texte, j’ignore ce qu’il en dit; je présume qu'il évoquait le Styx, mais apporte-t-il du nouveau ?]. Et il faut attendre Fulgence (VIe ap), III.7 pour voir ressurgir cette trempette : « Then after Achilles was born his mother dipped him in the waters of the Styx to make him a perfect man, that is, she protected him securely against all trials, but his heel alone she did not dip » fixant définitivement le tableau devenu classique (et franchement, un peu ridicule… pauvre gosse…) de Thétis tenant à bout de bras le bambin par le talon tandis que ce dernier bois la tasse (détail auquel Stace semble faire allusion au vers 271 mais sans l’exprimer clairement).

Un aspect m’échappe : pourquoi choisir précisément le Styx ? Je vais voir si je trouve dans d’autre mythes, antérieurs, des allusions à un tel pouvoir protecteur attribué à ses eaux. Des histoires de bains fortifiant, cela se trouve (par exemple Pélias : Médée trompe ses filles en leur faisant croire, démonstration à l’appui, qu’un petit bouillon dans une marmite lui rendra sa jeunesse ; on retrouve la marmite bouillante dans le mythe d’Achille d’ailleurs, comme une des variantes de la purification par le feu : « L'auteur de l'Aigimios dit, dans son livre II, que Thétis plongeait dans une chaudière pleine d'eau bouillante les enfants qui lui étaient nés de Pelée, voulant savoir s'ils étaient mortels; d'autres, comme Apollonios, disent qu'elle les jetait dans le feu. L'auteur ajoute que, beaucoup étant déjà morts ainsi, Pelée s'irrita et empêcha qu'Achille ne fût plongé dans la chaudière. » (Scholie à Apollonios, IV.816).
Je me demande aussi quels ont été les intermédiaires médiévaux et modernes qui ont donné à cette légende secondaire et tardive autant de crédit.


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Message Publié : 05 Mai 2011 11:25 
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Polybe
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Inscription : 14 Mai 2008 10:32
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Merci beaucoup Thersite pour toutes ces explications, et c'est vrai que le choix de Styx est assez étrange mais en même temps cela reprend les mythes grecs de la plongée dans l'eau bouillante avec plus de poésie.
Par ailleurs j'ai lu qu'elle le frottait d'ambroisie mais là encore, l'auteur n'est pas précisé.


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Message Publié : 05 Mai 2011 11:54 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 11 Juin 2007 19:48
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C'est la version d'Apollonios et d'Apollodore que je signalais plus haut.
Apollonios, IV.870sq.:
Car elle avait coutume de brûler ses chairs mortelles, au milieu de la nuit, à la flamme du feu; pendant le jour, d'autre part, elle oignait d'ambroisie son tendre corps, pour qu'il devint immortel, pour que sa chair fût garantie de l'odieuse vieillesse. Mais Pelée, ayant sauté de sa couche, vit son fils se débattre au milieu des flammes; à cette vue, il poussa un cri affreux: grande était son imprudence! Car, en l'entendant, Thétis arracha son fils aux flammes, le lança à terre, gémissant; elle-même, son corps devint semblable au vent, et, comme un songe, elle s'élança, rapide, hors de sa demeure et se précipita dans les flots, indignée. Et, depuis, elle ne revint plus.
Apollodore, III.13.6:
13.6. Quand Thétis mit au monde un enfant, elle voulut le rendre immortel ; aussi, à l'insu de Pélée, la nuit elle trempait le bébé dans le feu, pour détruire la partie mortelle qu'il avait reçue de son père, et, le jour, elle l'oignait d'ambroisie. Mais Pélée l'épia, il vit l'enfant se tordre dans les flammes, et poussa un cri : Thétis fut contrainte de mettre un terme à son projet ; elle abandonna l'enfant et retourna auprès des Néréides.
A rapprocher par exemple de l'Hymne homérique à Déméter, où la déesse inflige le même traitement à Démophon, dans le même but, et est elle aussi interrompue. Cette version ancienne (VIe) s'est amalgamée à l'histoire d'Achille pour finalement remplacer le bouillon de l'Aigimios.

Mais ce traitement n'a pas pour but de lui accorder une quelconque invulnérabilité (que les dieux n'ont pas) comme le bain dans le Styx, mais bel et bien l'immortalité. Les logiques sont très différentes.


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Message Publié : 08 Mai 2011 19:12 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 26 Fév 2011 9:10
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brunehilde a écrit :
Merci beaucoup Thersite pour toutes ces explications, et c'est vrai que le choix de Styx est assez étrange mais en même temps cela reprend les mythes grecs de la plongée dans l'eau bouillante avec plus de poésie.
Par ailleurs j'ai lu qu'elle le frottait d'ambroisie mais là encore, l'auteur n'est pas précisé.


Est ce qu'il ya des refences ou on peut etudier ce type de mythe ? Parce que j'ai lu lors de recherche sur les protos celtes et sur les anatoliens, la possibilité (au conditionnel) que certains peuplent auraient utilisés de grands chaudrons pour faire cuire des hommes ! (ennemis ou rite je ne sais pas).


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Message Publié : 08 Mai 2011 22:56 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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J'ignore ce qu'il en est des études sur le sujet, mais l'histoire du "chaudron de jouvence" apparait dans plusieurs légendes à fort relents orphiques et dionysiens. En particulier donc, la mise à mort de Pélias par ses filles sur l'instigation de Médée (ici, l'opération est un échec), mais aussi en parallèle le rajeunissement d'Aeson, le père de Jason, par Médée (ici, l'opération réussit). Ovide en particulier y consacre la majeure partie du livre VII des Métamorphoses, mais le thèmes est archaïque, évoqué en particulier par Diodore (IV.50-51), Euripide (Médée) ou Pindare (Pythiques, x) , et au-delà, la légende est représentée sur des vases du VIe.
Image
A l'occasion, je creuserais la question pour présenter une collection plus complète de références, si vraiment ça t'intéresse. On peut aussi signaler la résurrection par la même procédé des nourrices de Dionysos, mais beaucoup moins documentée (attesté néanmoins dès le Ve pas une pièce homonyme d'Eschyle). Je me demande, sans certitude, si la résurrection de Pélops ne se fait pas de la même façon, après le banquet cannibale de Tantale ; à vérifier. Et dans quelle mesure le bain bouillonnant mortel de Minos (comme par hasard juge des Enfers) peut-il être rapproché ? je ne sais pas trop, à supposer qu'il y ait un quelconque rapport...

Mais j'ai vraiment du mal à voir un lien quelconque avec une pratique concrète.... Chercher une origine matérielle à des mythes m'a toujours semblé voué à l'impasse...
Sur quoi reposent ces théories (fumeuses, c'est le cas de la dire) ?
Il me semble que pour la Gaule (l'Helvétie), l'archéologie témoigne d'os humains préalablement cuits, je dirais plutôt blanchis, avec des traces de coups de couteaux pour décoller la chair des os destinés à être exposés (souvenir d'une émission radiophonique suisse, je crois); mais difficile de voir un rapport avec les mythes grecs. Et pour l'Anatolie ? Je veux bien qu'on avance que Tantale est phrygien, mais ça reste léger...

Pour revenir au sujet précédent, je n'ai pas trouvé d'explication satisfaisantes pour le Styx.
On peut cependant avancer que dès Hésiode (Théog.383sq), Styx est la mère biologique de Cratos (la Puissance), de Bias (la Force), de Zêlos (l'ardeur, la soif de gloire), et de Nikê (la Victoire). Or il s'agit bien là des principales qualités de l'Achille mise en scène par Homère. Faute-il en déduire une légende intermédiaire dont se serait inspiré Stace, le bain étant préalablement destiné à accorder au bambin les qualités de l'eau divine personnifiée dans sa descendance? Évidemment rien ne permet de l'affirmer, je me contente de signaler l'hypothèse.


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Message Publié : 09 Mai 2011 0:27 
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Grégoire de Tours
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Thersite a écrit :
Mais j'ai vraiment du mal à voir un lien quelconque avec une pratique concrète.... Chercher une origine matérielle à des mythes m'a toujours semblé voué à l'impasse...
Sur quoi reposent ces théories (fumeuses, c'est le cas de la dire) ?
Il me semble que pour la Gaule (l'Helvétie), l'archéologie témoigne d'os humains préalablement cuits, je dirais plutôt blanchis, avec des traces de coups de couteaux pour décoller la chair des os destinés à être exposés (souvenir d'une émission radiophonique suisse, je crois); mais difficile de voir un rapport avec les mythes grecs. Et pour l'Anatolie ? Je veux bien qu'on avance que Tantale est phrygien, mais ça reste léger...


Il n' ya pas multitude de lien avec la Grèce mais cette pratique ne leur ait pas totalement inconnue. par exemple dans le banquet cannibale lors duquel Tantale offre aux dieux les membres de son fils, Pélops, dépecés au couteau, ensuite mis à bouillir dans un chaudron (reference: Première Olympique de Pindare).


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Message Publié : 09 Mai 2011 2:14 
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Salluste
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Il y a aussi le mythe orphique de Zagreus cuit puis dévoré par les titans, avant de renaitre sous la forme de Dionysos, il me semble qu'il était question d'un chaudron mais je n'en suis plus sûr.


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Message Publié : 09 Mai 2011 11:59 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 26 Fév 2011 9:10
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Léandros a écrit :
Il y a aussi le mythe orphique de Zagreus cuit puis dévoré par les titans, avant de renaitre sous la forme de Dionysos, il me semble qu'il était question d'un chaudron mais je n'en suis plus sûr.


sparagmos (demembrement) et omophagia (cannibalisme) lié aux mythes dyonisiens chez les thraces


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Message Publié : 12 Mai 2011 15:30 
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Pierre de L'Estoile
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mithra a écrit :
Il n' ya pas multitude de lien avec la Grèce mais cette pratique ne leur ait pas totalement inconnue. par exemple dans le banquet cannibale lors duquel Tantale offre aux dieux les membres de son fils, Pélops, dépecés au couteau, ensuite mis à bouillir dans un chaudron (reference: Première Olympique de Pindare).


Je me méfie beaucoup des parallèles établis entre les panthéons ; s’ils peuvent se révéler très instructif, ils s’avèrent également très souvent totalement artificiels, basés sur des aspects secondaires au détriment de l’essentiel qui n’a pas forcément de rapport, un simple jeu intellectuel. Par conséquent, plus encore que d’autre domaines, la mythologie comparée se doit d’être rigoureuse. Or ici, je ne suis pas sûr de comprendre ce qui est rapproché.

D’une part, ni les parallèles « proto-celtes » ni les parallèles anatoliens ne sont développés, comme si le l’amalgame était naturel. Perso, j’ignore ce qu’il en est ; il faudrait peut-être d’abord développer chaque tradition locale à part, avant d’opérer d’éventuelles amalgames, qui se justifieront ou non. Quant à l’archéologie helvétique n’est pas vraiment mon domaine de prédilection (sic !) et je n’ai pas une confiance aveugle en ma mémoire, surtout issus d’une banale émission radiophonique : des éléments concrets seraient les bienvenus, avant de chercher à établir des connections.
Mais de ce que j’ai cru comprendre, la cuisson au court bouillon des corps n’est pas un aspect du culte, mais une technique de désossage, comme lorsque ma tante fait cuire son poulet : il suffit de secouer la cuisse pour n’avoir que l’os dans la main… Qu’ensuite les os nettoyés servent à des rituels n’implique pas que la préparation obéisse à la même règle. Je n’ai pas non plus souvenir que cela suppose un quelconque anthropophagisme helvète.

Pour le cas grec (le mythe du banquet anthropophage de Tantale), contrairement à ce qu’annonce Mitra13, il n’est pas du tout question d’une pratique, mais d’un mythe uniquement, qui trouve sans doute son origine dans la cuisine du sacrifice qui établit un lien entre le divin et le monde mortel, ce qui est bien mis en évidence par la présence matériel des divinités au banquet et dans l’enlèvement de Pélops par Poséidon, conséquence directe de sa résurrection, comme si l’épreuve lui avait fait franchir la frontière entre monde terrestre et monde mortel, comme n’importe quel sacrifice.
Pour la série des « chaudrons de jouvence », le rôle du récipient dans le passage entre les deux mondes me semble effectivement intéressant (même si je n’ai pas d’explications), concurrencé néanmoins par d’autre qui attribuent à la flamme le même effet (école attique du mythe éleusinien, alors qu’au contraire la principale caractéristique du chaudron établit un intermédiaire entre la flamme et l’objet du sacrifice).

Mais à part un récipient à bouillir, quel est le point commun entre les cas inter-civilisationnels avancés ? L’anthropophagie est présente dans les mythes grecs, mais n’a pas grand chose à voir avec le chaudron de jouvence, la résurrection/rajeunissement, et encore moins avec Achille…. :wink:


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Message Publié : 15 Mai 2011 9:56 
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Pierre de L'Estoile
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Florus Épitomes I , 39 : il n’est pas de cruauté que comissent ces Thraces à cette époque dans les traitements qu’ils infligeaient à leurs prisonniers (…) Buvant dans des crânes, souillant par des outrages de toutes sortes une mort causée tantot par le feu, tantôt par la fumée…
Bon, celui-là encore, c’est pas l’objectivité qui va l’étouffer ; mais et puisqu’il n’y a pas de fumée sans feu (je profite qu’on est dans les blagues vaseuses)

Pour les Celtes, on a retrouvé une coupe dans le temple de Libernice (en Bohême) accompagné d’un autre crâne dans un chaudron.

Sur le sujet en général , vous avez Monique Halm Tisserand qui a écrit un article sur la question :

http://www.persee.fr/web/revues/home/pr ... 1_0000_001

pour en revenir un tout petit peu au sujet, j’ai raté hier soir sur France 4 le téléfilm : Hélène de Troie. Vaut-il le coup que je le recherche ou pas du tout ? Est-ce que dedans Achille est invulnérable ? J’imagine bien que oui…

Bien à vous.

_________________
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