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Sardanapale
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Auteur :  Robert Spierre [ 12 Sep 2018 17:09 ]
Sujet du message :  Sardanapale

En lisant

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je suis tombé sur ce mot "incroyable" : Sardanapale.
Hitler l'a utilisé pour décrire les moeurs (débauche, orgies) de Röhm après son exécution.

Je suis allé consulter les dictionnaires sur le Net afin de connaître sa signification : Personnage riche qui mène une vie de débauche, dissolue.
Il peut être décliné en adjectif, soit "sardanapalesque" : À ce souper sardanapalesque, Rarahu était déjà méconnaissable; elle portait une toilette nouvelle, (...) qui lui donnait fort grand air.

Découvrant ce mot pour la première fois, je voudrais savoir si quelqu'un le connaissait sur ce forum, et si il arrive qu'il soit encore utilisé.

Et une référence historique et artistique :

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"La Mort de Sardanapale" - Delacroix

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 12 Sep 2018 17:17 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Sardanapale, oui, il fut beaucoup employé dans les guerres de Religion des deux côtés, pour le Pape pour les Protestants et pour Henri de Navarre pour les Catholiques.

Je n'ai jamais rencontré sardanapalesque.

Auteur :  carlo68 [ 12 Sep 2018 19:19 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Les étudiants en peinture qui devaient copier le tableau de Delacroix, parlaient de la mort de Sardine à poil. Le nom est une déformation du nom du souverain assyrien Assurbanipal, c'est lui que Delacroix représente s'inspirant d'une tragédie en vers de Byron, Sardanapalus.

Auteur :  ThierryM [ 12 Sep 2018 19:47 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Jean-Marc Labat a écrit :
Sardanapale, oui, il fut beaucoup employé dans les guerres de Religion des deux côtés, pour le Pape pour les Protestants et pour Henri de Navarre pour les Catholiques.

Je n'ai jamais rencontré sardanapalesque.


"Une figure peinte donna-t-elle jamais une idée plus vaste du despote asiatique que ce Sardanapale à la barbe noire et tressée, qui meurt sur son bûcher, drapé dans ses mousselines, avec une attitude de femme ? Et tout ce harem de beautés si éclatantes, qui pourrait le peindre aujourd’hui avec ce feu, avec cette fraîcheur, avec cet enthousiasme poétique ? Et tout ce luxe sardanapalesque qui scintille dans l’ameublement, dans le vêtement, dans les harnais, dans la vaisselle et la bijouterie, qui ?" (Baudelaire)

Auteur :  Sir Peter [ 12 Sep 2018 23:42 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Pour ma part depuis fort longtemps cette allégorie décrit parfaitement toute notre société contemporaine.......aussi bien que celle de la fin de Rome ou Constantinople...Je suis sans doute un cas......je vis depuis mon adolescence entre Lucrèce,St Augustin ..Homère...Thucydide.........Quand je lis quelque chose de Maurice Genevoix...Je trouve des traces de ce que je suis moi même....étrange comme ma formation classique et la fréquentation des vieux pays de France ou d'Angleterre m'ont façonné..........

Auteur :  Oliviert [ 13 Sep 2018 8:05 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Je trouve plusieurs références pour ce mot dans mes textes des Temps Modernes :

- Tallement des Réaux, à propos d'un des maitresses d'Henri IV : "Enfin le Roi rompit avec madame de Verneuil; elle se mit à faire une vie de Sardanapale, ou de Vitellius ; elle ne songeoit qu'à la mangeaille, qu'à des ragôts, et vouloit même avoir son pot dans sa chambre; elle devint si grasse qu'elle en étoit monstrueuse ; mais elle avoit toujours bien de l'esprit."

- Scarron, Guez de Balzac, Pierre de L'Estoile emploient ce mot une ou deux fois.

- Le père Garasse l'emploie plusieurs fois, en se servant du personnage historique pour attaquer les athéistes et les protestants : "Democrite, Epicure, Diagoras, Diogenes, Leucippus, Sardanapale, etc. Qui ont introduit l'atheisme parmy la gentilité, ont esté aussi par consequent despourveus de sens." ; "Je suis honteux de foüiller plus avant dans cette camarine puante, et d'entrer dans l'estable de Sardanapale et des autres atheistes, qui par faute d'esprit ayant estouffé la lumiere de raison, ensevely leurs sens dans les vilainies, abbruty leur ame, et abandonné leur conscience, ont en fin roulé jusques au bas du precipice, et faict tout ce qu'ils ont peu pour se persuader qu'il n'y a point de juge au monde pour chastier leurs impietez" ; "je ne pense pas, que Nemrod, Hercule, Sardanapale, Heliogabale, fussent de leur temps plus excellens en yvrongnerie et gourmandise, que Martin Luther."

Hitler n'a probablement pas puisé à ces sources. Par contre, il a peut-être été inspiré par Napoléon quand il aurait insulté son entourage en disant "Lucien est un ingrat, Joseph un Sardanapale, Louis un cul-de-jatte, Jérôme un polisson" selon Castelot.

Auteur :  Pédro [ 13 Sep 2018 11:48 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Sir Peter a écrit :
Pour ma part depuis fort longtemps cette allégorie décrit parfaitement toute notre société contemporaine.......aussi bien que celle de la fin de Rome ou Constantinople...Je suis sans doute un cas......je vis depuis mon adolescence entre Lucrèce,St Augustin ..Homère...Thucydide.........Quand je lis quelque chose de Maurice Genevoix...Je trouve des traces de ce que je suis moi même....étrange comme ma formation classique et la fréquentation des vieux pays de France ou d'Angleterre m'ont façonné..........


Pour ce qui est de la société contemporaine je ne m'étendrai guère cependant on y voit se façonner un retour d'une certaine morale bien plus rigotiste qu'il y a 20 ans... Pour ce qui est de la gin de Rome cette image est d'une fausseté absolue.

Les époques où le decadentisme fait florès nous en disent plus sur comment les contemporains perçoivent leur monde que sur sa réalité concrète. C'est totalement dans le champ des représentations et les représentations sont rarement proches du réel.

Auteur :  Jean-Marc Labat [ 13 Sep 2018 13:14 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Bah, la décadence hante chaque génération depuis...l'homme de Cro-Magnon ?

Auteur :  Pierma [ 13 Sep 2018 15:01 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Pédro a écrit :
Les époques où le decadentisme fait florès nous en disent plus sur comment les contemporains perçoivent leur monde que sur sa réalité concrète. C'est totalement dans le champ des représentations et les représentations sont rarement proches du réel.

Effectivement.

De plus, et ça me semble propre à notre époque, la réalité est filtrée et modelée par les médias comme elle ne l'a jamais été dans l'histoire. (Cela dit, chaque époque a ses "influenceurs".)

Auteur :  Jerôme [ 13 Sep 2018 16:49 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Pierma a écrit :
Pédro a écrit :
Les époques où le decadentisme fait florès nous en disent plus sur comment les contemporains perçoivent leur monde que sur sa réalité concrète. C'est totalement dans le champ des représentations et les représentations sont rarement proches du réel.

Effectivement.

De plus, et ça me semble propre à notre époque, la réalité est filtrée et modelée par les médias comme elle ne l'a jamais été dans l'histoire. (Cela dit, chaque époque a ses "influenceurs".)


Les peuples conquérants ont peur du déclin - comme Scipion pleurant sur les ruines de Carthage et comme les grands patrons qui ont peur de la faillite

Symétriquement les peuples décadents ont pu conserver la nostalgie du passé (et encore ...) mais ne craignent pas l'avenir ...

Auteur :  Pédro [ 13 Sep 2018 16:59 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Jean-Marc Labat a écrit :
Bah, la décadence hante chaque génération depuis...l'homme de Cro-Magnon ?


Pas toutes les époques ; il existe des temps où souffle un esprit de renaissance comme c'est le cas lors de l'avènement d'Auguste par exemple. Au contraire d'autres périodes se signalent vraiment par leur crainte de la décadence. La fin du XIXe siècle est éloquente à ce sujet, jusque dans ses expressions littéraires. C'est assez fascinant de les analyser.

Citer :
Les peuples conquérants ont peur du déclin - comme Scipion pleurant sur les ruines de Carthage et comme les grands patrons qui ont peur de la faillite

Symétriquement les peuples décadents ont pu conserver la nostalgie du passé (et encore ...) mais ne craignent pas l'avenir ...


Qu'est-ce qu'un peuple "décadent"? Si ce n'est un peuple qui postule sa décadence. A chercher les indices de décadence on finit par les trouver, comme on n'a cessé dans trouver dans les derniers siècles de Rome. Qu'il y existe une profonde nostalgie du passé c'est certain, cependant de quel manière cela s'exprime? Si on pense à des orgies infinies, à des manières affectées jusqu'au ridicule, à de la faiblesse de coeur ou je ne sais quoi d'autre, on vogue en plein cliché que bien des sources peuvent aisément démonter. Si l'on raisonne avec Ibn Khaldoun il y a peut être quelque chose de plus intéressant à comprendre. La perte d'assabiya, de cohésion sociale, au sein des groupes humains à mesure que s'étendent les Empires est sans doute un élément expliquant leur "déclin", mot incorrect et tellement vague qu'il ne dit finalement pas grand chose de plus que des platitudes.
Un autre élément m'est apparu dans la lecture du bouquin de Ward-Perkins sur la Chute de Rome ; celui de la complexification progressive des sociétés dont chaque organe se spécialise de plus en plus, le rendant inopérant hors de son fragile assemblage. En clair un proto-Etat archaïque comme la Rome du IIe siècle avant peut encaisser des dommages terribles sans rompre parce que ses parties constituantes peuvent survivre indépendamment, au IVe siècle, dans un Etat qui se rapproche des standards modernes, c'est beaucoup moins le cas...

Auteur :  Léonard59 [ 13 Sep 2018 17:03 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Sauf erreur de ma part l'un des premiers romains qui a écrit sur la décadence romaine, çà doit être Caton l'Ancien qui vécu de -234 à -149 av JC ....

Auteur :  Pédro [ 13 Sep 2018 17:12 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Léonard59 a écrit :
Sauf erreur de ma part l'un des premiers romains qui a écrit sur la décadence romaine, çà doit être Caton l'Ancien qui vécu de -234 à -149 av JC ....


Oui il me semble aussi ; c'est dire si Rome n'a cessé de sombrer dans la décadence. Encore une fois les représentations... mais venant de Caton quoi d'étonnant?

Auteur :  Léonard59 [ 13 Sep 2018 17:42 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

ENtre 7 et 14 siècles de décadence selon que l'on compte ou pas l'empire byzantin comme continuateur de l'empire romain .... Ils ont dû tomber profond dans la décadence :rool: ;)

Auteur :  Champollion [ 13 Sep 2018 21:11 ]
Sujet du message :  Re: Sardanapale

Pédro a écrit :
Jean-Marc Labat a écrit :
Bah, la décadence hante chaque génération depuis...l'homme de Cro-Magnon ?


Pas toutes les époques ; il existe des temps où souffle un esprit de renaissance comme c'est le cas lors de l'avènement d'Auguste par exemple. Au contraire d'autres périodes se signalent vraiment par leur crainte de la décadence. La fin du XIXe siècle est éloquente à ce sujet, jusque dans ses expressions littéraires. C'est assez fascinant de les analyser.

Citer :
Les peuples conquérants ont peur du déclin - comme Scipion pleurant sur les ruines de Carthage et comme les grands patrons qui ont peur de la faillite

Symétriquement les peuples décadents ont pu conserver la nostalgie du passé (et encore ...) mais ne craignent pas l'avenir ...


Qu'est-ce qu'un peuple "décadent"? Si ce n'est un peuple qui postule sa décadence. A chercher les indices de décadence on finit par les trouver, comme on n'a cessé dans trouver dans les derniers siècles de Rome. Qu'il y existe une profonde nostalgie du passé c'est certain, cependant de quel manière cela s'exprime? Si on pense à des orgies infinies, à des manières affectées jusqu'au ridicule, à de la faiblesse de coeur ou je ne sais quoi d'autre, on vogue en plein cliché que bien des sources peuvent aisément démonter. Si l'on raisonne avec Ibn Khaldoun il y a peut être quelque chose de plus intéressant à comprendre. La perte d'assabiya, de cohésion sociale, au sein des groupes humains à mesure que s'étendent les Empires est sans doute un élément expliquant leur "déclin", mot incorrect et tellement vague qu'il ne dit finalement pas grand chose de plus que des platitudes.
Un autre élément m'est apparu dans la lecture du bouquin de Ward-Perkins sur la Chute de Rome ; celui de la complexification progressive des sociétés dont chaque organe se spécialise de plus en plus, le rendant inopérant hors de son fragile assemblage. En clair un proto-Etat archaïque comme la Rome du IIe siècle avant peut encaisser des dommages terribles sans rompre parce que ses parties constituantes peuvent survivre indépendamment, au IVe siècle, dans un Etat qui se rapproche des standards modernes, c'est beaucoup moins le cas...


Ne vous prend-il pas une furieuse envie de retourner lire Huysmans ? J'ai toujours trouvé fascinant le lien qu'établissait cet auteur entre son époque et celle de la présumée décadence romaine.

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