pierma a écrit :
Une opinion que je prends en compte. Il est à craindre que les "traitres pour la liberté" paraissent un peu mièvres et rebattus, même si des personnages comme Schultze-Boysen (officier de l'Etat-Major de la Luftwaffe et membre de l'Orchestre Rouge) ou Francis Jeanson (porteur de valises du FLN) échappent à la banalité. Et pour ce dernier, je n'imagine guère en parler sans mettre en face la figure du général Challe, un honnête homme qui a fait le choix rigoureusement inverse.
Ce ne serait d'ailleurs pas une mauvaise idée d'associer à chaque fois 2 personnages de la même période faisant des "choix de trahison" parfaitement opposés. Alain Minc a construit de cette façon son ouvrage Antiportraits, en comparant le rôle de personnages historiques qu'il a trouvé intéressant d'apparier :
- Frédéric II et Richelieu (créateurs d'un Etat centralisé)
- Bismarck et Clémenceau (Hommes d'Etat ayant géré la guerre puis la paix)
- Disraéli et Churchill (deux non conformistes aux destins différents, malgré leurs ressemblances)
- Truman et Kohl (des gens banals qui ont pesé lourd à un tournant de l'histoire.)
Bref, c'est à moi de voir quelle largeur de problématique je peux assumer. Mais la comparaison des contraires peut être très éclairante, effectivement.
Ce jeu de miroir est effectivement très intéressant. Un même événement, deux "traîtres" opposés.
On pourrait aussi penser à une sorte de
Vies parallèles des traîtres. Epoques différentes mais trahison pour des motifs semblables, avec des objectifs voire un événementiel similaires. Vous seriez notre nouveau Plutarque!
Miroir ou vies parallèes, je pense sincèrement, si je peux me permettre, que vous devriez creuser dans cette direction. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres intervenants, mais, personnellement, je trouve ça bien plus intéressant et rare.
Citer :
D'abord je ne dis pas cela. Et ces "fléaux" me paraissent bien anodin. Le nazisme est né en Europe, au coeur de notre civilisation, et il a entrepris avec une belle énergie de renverser - de mettre à l'envers - tous les fondements moraux sur lesquels s'appuyait notre civilisation, pour y substituer le règne de la barbarie la plus cynique qui soit.
Oui mais les nazis ne sont pas les premiers ni les seuls à avoir voulu renverser les fondements de la civilisation européenne ou d'une autre. Et puis quels sont ces fondements? Les nazis se sont-ils attaqués à tous ou à certains d'entre eux?
Voici par exemple une petite réflexion que j'ai eue il y a quelque temps, qui m'est passé comme ça par la tête. Elle est sans doute criticable mais je vous la livre :
Depuis que l’homme est homme, et dans toutes les civilisations, on peut déceler quatre grands domaines de son activité sociale :
- l’organisation de la société, la diplomatie et la guerre; ce qu’on peut résumer par le terme général de politique.
- la religion.
- le commerce.
- et enfin l’architecture, la poterie, la sculpture, la danse et, un petit peu plus tard, la littérature, c’est-a-dire les arts.
Quatre grands piliers de l’humanité donc : politique, religion, commerce et arts. Le communisme a voulu supprimer de façon artificielle deux de ces quatre composantes : la religion et le commerce (individuel), ce qui est sans doute l'une des causes de son échec. Il ne me semble pas que les nazis aient été aussi radicaux. Donc, de ce point de vue, le communisme serait bien plus "renverseur" de civilisation que le nazisme.
Citer :
Avez-vous remarqué que ses adversaires se recrutaient dans tous les autres courants de pensée de l'époque ? Royalistes, républicains, patriotes, athées ou catholiques, ils avaient bien quelque chose en commun : le refus de ce la perversité de ce projet totalisant, même s'ils n'en discernaient pas tout.
Certes, mais ce n'est pas l'apanage du nazisme. Les opposants aux Bolchéviks se recrutaient parmi des tsaristes, des socialistes-révolutionnaires, des aristocrates, des artistes, des orthodoxes, des athées... Pareil lors de la Révolution française même si c'est moins marqué et qu'il y a une gradation dans le temps (royalistes, monarchistes constitutionnels, Girondins...).
Citer :
Parce que l'égalité de tous au regard de Dieu est à la base de l'évangile. Une idée révolutionnaire à l'époque de l'Empire Romain.
Avec ce mot de Louis Pauwels : "Le GI venu de New York, le combattant de Stalingrad, le résistant du Vercors avaient en commun l'idée de l'égalité et la foi dans le progrès. Ce sont ces hommes d'une banalité absolue, petits hommes ordinaires et sans génie, dans le regard des nazis, qui sont venus à bout de la race des seigneurs."
Je ne peux être d'accord avec votre argument de l'Evangile car il ne tient tout simplement pas. J'enfoncerais une porte ouverte en disant que la société occidentale chrétienne a été marquée durant près de 2000 ans par une inégalité énorme. Et puis quelle est l'influence d'un livre, aussi sacré soit-il?
Je pense qu'il vaut mieux chercher des arguments bien moins spirituels et plus terre à terre: je vous ai par exemple cité la thèse d'Emmanuel Todd, qui montre d'ailleurs des différences considérables entre les populations européennes. C'est un autre reproche que je vous ferais : je trouve que vous avez une certaine tendance à considérer tous les Européens comme identiques, alors qu'il y a des différences considérables - encore aujourd'hui ! - entre l'égalité à la française et l'égalité à l'anglaise, pour ne prendre que ces deux exemples.
Quant à la phrase de Louis Pauwels, c'est une belle phrase de journaliste mais je ne vois pas trop bien ce que ça prouve ni comment il la prouve. Je ne vois pas en quoi le GI est un obsédé de l'égalité (thème qui n'est pas très populaire dans la culture américaine, c'est le moins que l'on puisse dire!) ni le soldat russe (qui va au front parce qu'il s'agit de défendre le pays et/ou qu'il a le NKVD au cul pour surveiller s'il manque d'ardeur patriotique). Bref, c'est une de ces phrases belles et gratuites qu'on ne peut ni confirmer ni infirmer...
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Personnellement, je suis bien évidemment d'accord avec vous sur les dangers d'une "race supérieure". Mais qu'est-ce qui vous permet de parler de "mal absolu"? C'est une question beaucoup plus philosophique voire théologique qu'historique.
Philosophiquement je veux bien. Mais vous m'accorderez que personne n'a fait pire, et qu'on ne souhaite pas que ce record soit dépassé.
Je ne vous accorde rien du tout (
) car vous n'avez toujours pas répondu à mon interrogation de départ : qu'est-ce que le "pire" et sur quels critères le juger? En nombre de morts, Staline ou Mao ont fait pire, bien pire même. Prenez-vous en compte d'autres critères? Si oui, lesquels?
Cordialement