Le Cahiers de Science & Vie n°145 de mai 2014 a pour titre "L"origine des civilisations"
Il est sans dire que plusieurs des articles mériteraient leur place dans cette discussion ... Mais, l'article de la page 46 porte sur les méthodes de "classement" des diverses civilisations. Premier point qu'il est important de préciser d'entrée, tous les gens qui débattent de ces classements à l'heure actuelle sont d'accords sur un point : ces classements ne sont pas un jugement de valeur. Une société moins complexe n'est pas une société moins civilisée ou plus primitive. D'ailleurs, si certains ethnologues, dans le passé, ont pu se complaire à juger que certaines sociétés primitives étaient "simples" ou peu évoluées", avec le recul on se rend compte qu'en fait, ils montraient souvent l’insuffisance des connaissances sur les sociétés en question. Or, en histoire, les connaissances sur certaines sociétés sont partielles et/ou partiales ... Il est donc très difficile de classer exactement les sociétés passées. Plusieurs chercheurs ont proposé divers modes de classement tendant d'aller du plus simple au plus complexe. Puisqu'on ne peut nier que nos sociétés ont une tendance à la complexification au fur et à mesure que le temps passe. Certains chercheurs pensent d'ailleurs que c'est cette "complexification" ou plutôt une fuite vers la complexification qui expliquerait la chute de certaines sociétés. Voici ce qui est dit en page 48 dans un encadré :
Citer :
Qaudn la complexité tue les civilisations
En 1988, l'anthropologue américain Joseph Tainter avançais une thèse originale dans Collapse of complex societies. Une société répondrait à la multiplication des problèmes par une complexification à la fois technique, économique et même sociale. cette nouvelle complexité génère dans un premier temps des bénéfices, puis occasionne, à la longue, des coûts qui finissent par en effacer tous les avantages. Ainsi en va-t-il de l'Empire romain qui, face à une baisse de la production agricole et à une augmentation de sa population, se lance dans la conquête des territoires voisins pour s'approprier leurs récoltes, matières premières et main-d’œuvre. Mais bientôt les coûts nécessaires à la cohésion de l'Empire (gouvernements civils, garnisons, communications ...) prennent une telle ampleur qu'ils provoquent sa chute. L'effondrement des civilisations ne serait donc qu'une nécessaire et radicale simplification.
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette analyse et j'y reviendrais plus tard dans une autre intervention.
Donc, plusieurs chercheurs ont proposé des méthodes pour "classer" les sociétés en fonction de la complexité de leur civilisation. Ce qui revient à dire que toutes les sociétés ont un niveau de civilisation allant du plus simple au plus complexe. Je pense que vous aurez noté que cela contredit partiellement la définition du mot civilisation et qui en histoire s'applique surtout aux sociétés qui vivent dans des cités ... Autre point, il faut éviter de confondre complexité sociale et complexité technique. Il existe des sociétés "primitives" où la place de chacun est strictement définie par tout un jeu de règles connues de tous ... J'ajoute, à titre personnel que pas mal d'éthologues ont trouvé dans les troupes de chimpanzés que les relations entre individus y sont aussi définies par des règles assez complexes (ce n'est pas toujours le plus fort qui règne sur le groupe ...).
Pour la suite de l'article, ils parlent beaucoup de la proposition de classement proposée par Alain Testard, proposition qui ne suit pas les tendance classique a classer selon le degré de complexité réel ou supposé. Supposé puisque de nombreux chercheurs ont souvent confondu l'absence d'écriture avec, pas exemple, l'absence de droit ... Alors qu'on s'est rendu compte que de touffus systèmes juridiques étaient déposés dans la mémoire des anciens.
Pour son classement Testard se basait 3 critères. Le premier "Monde 1" ne contient qu'un type de sociétés dites de type 1. Il s'agit de sociétés "sans richesses" et avec une organisation politique minimale. C'est le cas des sociétés de chasseurs-cueilleurs. Leur nomadisme fait qu'il n'y a pas d'accumulation de richesse si ne n'est quelques objets, mais ils sont de tailles réduite.
Les sociétés du "Monde 2" ont des gens qui sont riches, puisqu'elles autorisent l'accumulation des richesses. Mais, il n'y a pas de propriété "fundiaire", la terre appartient à "tous" ou elle appartient au chef de la communauté qui décide de la manière de l'utiliser. Les sociétés du Monde 2 se divisent en 3 types selon le niveau de leur organisation étatique.
Il y a donc les sociétés de type 2 : société avec richesse sans propriété fundiaire et une organisation politique minimale.
Puis les sociétés de type 3 : société avec richesse sans propriété fundiaire et une organisation semi-étatique minimale (ce seraient ce qu'on a eu tendance à nommer des "chefferies").
Et pour terminer les sociétés de type 4 : société avec richesse sans propriété fundiaire et une organisation étatique (l’Égypte pharaonique pourrait être un bon exemple).
Dans la "Monde 3", il n'y a qu'un type de société, le type 5 : société avec richesse avec propriété fundiaire et une organisation étatique. S'il en a les moyens, tout un chacun à le droit de propriété sur un lopin de terre et il a le droit d'en faire ce qu'il désire ... dans les limites des lois en vigueur. Il peut donc faire cultiver son lopin de terre par ceux qui n'en possèdent pas. Sa capacité à accumuler des richesse devient exponentielle. Dans le système sans propriété fundiaire, tout un chacun possède en réalité un lopin de terre qui lui est fourni par la communauté. La production de richesse individuelle est donc limitée par la possibilité physique de l'individu (bien que dans la réalité, le lopin est cultivé par toute une famille, donc plus la famille est nombreuse, plus on augmente la possibilité de générer du surplus et donc de la richesse).