@ Caesar
Je ne dis pas que les autres pays n'ont pas triché aussi. On le sait l'Allemagne, l'Angleterre et les Etats Unis ont sans doute triché plus et plus tôt que les Français.
Mais! La différence est que protection ou pas, les mines de charbons de Newcastle et de Dorum allaient un jour ou l'autre donner un énorme avantage comparatif à l'Angleterre et à l'Allemagne. L'industrie française, elle, ne pouvait que se développer à l'abris de barrières protectionnistes. Ils ont triché mais ils n'en avaient pas besoin.
C'est un peu comme si l'ES Romorantin se faisait étriller par le Real Madrid, puis accusait les Espagnols d'avoir tricher. Ce n'est pas forcément faux, mais triche ou pas les Solognots se seraient fait décalquer de toute façon.
Pour moi, l'explosion du système planifié sous perfusion grâce à la répression financière explique les 20-25 premières années de la crise en France. Pour la suite, je dois bien admettre qu'en bon historien, je suis comme un médecin légiste, je n'aime pas quand le sujet est trop frais.
Cependant, il est rare que des décisions gouvernementales puissent avoir un effet important à long terme sur le destin d'une nation qui soit totalement en contradiction avec les fondamentaux de l'économie. Il y a des exceptions (Corée du Nord...) mais c'est comme les poissons volants (ça existe, mais c'est pas la majorité).
A la limite, si vous me donniez une raison pour leur inaptitude (je ne pense pas que nos hommes politique soient nécessairement plus bêtes que ceux des autres pays).
Pour en revenir au début des années 70, il faut noter que les années 50 ont été plutôt moins glorieuses en France qu'ailleurs en Europe alors que les années 60 ont vu un rattrapage accéléré, il n'y a donc rien d'étonnant à ce que la France commence la décennie en trombe. Mais encore une fois, la crise financière de 1971-4 est particulièrement durement ressentie en France parce que les fondamentaux du pays étaient d'autant plus éloignés de l'idéal industrialiant de l'époque.
Barbetorte a écrit :
Je ne pense pas que s'il n'y avait que deux étaux-limeurs chez Dewoitine, ce soit par manque de charbon.
Et pourtant...
Si vous suivez le raisonnement suivant, ça peut aider à comprendre le faible niveau de mécanisation de l'industrie française:
L'absence de charbon a un impact négatif sur la productivité moyenne des ouvriers français (moins d'énergie par travailleur, moins de fours et moins de tout). La productivité étant faible, les salaires restent faibles aussi. Les travailleurs à bon marché ne créés pas les incitations suffisantes pour mécaniser. Les patrons français se retrouvent donc devant trois problèmes:
1. Des bas salaires qui limitent l'intéret de la mécanisation au niveau comptable (pourquoi acheter un étau-limeur à 10.000frs quand un ouvrier coûtent 100frs l'an).
2. Un prix de l'énergie qui limite aussi l'intéret de la mécanisation.
3. Un niveau de mécanisation limité dans l'industrie qui rend le passage aux machines pour chaque compagnie plus onéreux (pas d'effet d'entrainement, pas d'économie d'échelle).
Je ne peux pas garantir au niveau de la firme individuelle, peut-être que les patrons de Dewoitines sont effectivement des idiots, mais pour l'industrie en général, c'est rare que des centaines de patrons et des milliers de managers fassent la même erreur sans raison. 1936, c'est aussi le moment où le syndicat national des meuniers publie des chiffres qui indiquent que 50% de ses membres utilisent toujours la force hydraulique plutôt que la machine à vapeur. A certains égards, la France n'est pas sortie du Moyen Age!
Ce refus de mécaniser a un rapport avec quelque chose de fondamental dans l'économie, ce n'est pas un cas d'aveuglement collectif.