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Message Publié : 31 Mars 2005 8:31 
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Grégoire de Tours
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Zunkir a écrit :
Franchement, je dois avouer que ces chiffres cités sur le PIB/PNB des pays autour de 1800 me laissent perplexes. Au moins autant que le sujet de ce débat : aucun historien sérieux ne contredirait la domination économique des pays occidentaux sur la Chine au XIXè siècle.


Ni même aucun amateur un peu documenté !

Citer :
Après, on peut toujours chercher à remettre en cause avec un peu plus d'arguments le fait que ce fut le Royaume-Uni qui dominait, mais rien de probant n'a encore été établi sur ce point-là.


Il suffit de voir l'extraordinaire étalage des richesses de l'Empire déjà lors de la Grande Exposition de Londres en 1851 pour être convaicu qu'on le remettra dificilement en cause...


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Message Publié : 31 Mars 2005 9:40 
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Jules Michelet
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Inscription : 29 Déc 2003 23:28
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Goya a écrit :
Citer :
Après, on peut toujours chercher à remettre en cause avec un peu plus d'arguments le fait que ce fut le Royaume-Uni qui dominait, mais rien de probant n'a encore été établi sur ce point-là.


Il suffit de voir l'extraordinaire étalage des richesses de l'Empire déjà lors de la Grande Exposition de Londres en 1851 pour être convaicu qu'on le remettra dificilement en cause...

Il se trouve que certains historiens de l'économie (anglo-saxons de surcroît), ne sont pas aussi catégoriques sur le sujet. Le modèle économique français serait juste différent du britannique, pas forcément inférieur. Je ne trouve pas le nom de ces sources, alors si quelqu'un en a aussi entendu parler ...
Pour ce qui est de la population de la Chine, on y effectuait en revanche des recensements depuis une époque assez ancienne si je ne me trompe. On dispose donc d'estimations assez fiables.


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Message Publié : 31 Mars 2005 11:38 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 20 Avr 2004 15:03
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Mais mes sources ne sont pas seulement Fernand Braudel. Ce dernier, pour les chiffres cités, s’appuie sur une étude de Paul Bairoch. Mais il n’y a pas que cette étude et je me sers notamment d'une récente datée de 2001 et faite par un professeur d’économie de renommée mondiale.
Donc je peux comprendre que mes affirmations peuvent vous paraître surprenantes mais s’il vous plaît messieurs arrêtez de me prendre pour un imbécile. Ce forum est intéressant car l’on peut apprendre des uns et des autres. Alors apprenez !

Selon cette étude :
Population de la Chine en 1820 : 381 millions.
PIB de la Chine en 1820 : 1/3 du PIB mondial.
Le PIB des Etats-Unis dépassera celui de la Grande-Bretagne en 1872. Il dépassera celui de l’Inde à la fin des années 1870 et il dépassera celui de la Chine à la fin des années 1880.
Le PIB de la Grande-Bretagne dépassera celui de l’Inde seulement en 1898 et il dépassera celui de la Chine seulement en 1938.


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Message Publié : 31 Mars 2005 11:53 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Il y a une erreur de méthodologie, comme je le pressentais.

Les Indes font partie de l'Empire Britannique depuis 1857. Mais L'Angleterre en possédait bien la moitié depuis les années 1830...

Pour la Chine, je suis heureux de constater que vous renoncez à ce chiffre de 500 millions d'habitants en 1800 ! :D


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Message Publié : 31 Mars 2005 12:39 
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Je ne demande qu'à apprendre, il est vrai que l'on fait plus de volumes avec ce que j'ignore qu'avec ce que je connais.

Je croyais que le P.I.B et le P.N.B étaient deux choses différentes, mais vous semblez mélanger les deux avec allégresse et désinvolture.

Peut-on connaitre le nom de ce professeur de renommée mondiale dont vous ne citez pas le nom ?

Je ne vous prends pas pour un imbécile, mais convenez que votre réaction a de quoi surprendre.

Alors, Monsieur le Professeur, expliquez moi clairement, car pour l'instant, je ne vois pas force probante dans vos arguments.

_________________
Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)


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Message Publié : 31 Mars 2005 13:07 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 20 Avr 2004 15:03
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Jean-Marc Labat a écrit :
Peut-on connaitre le nom de ce professeur de renommée mondiale dont vous ne citez pas le nom ?

Professeur Maddison, le meilleur historien en macroéconomie.

Jean-Marc Labat a écrit :
Je croyais que le P.I.B et le P.N.B étaient deux choses différentes, mais vous semblez mélanger les deux avec allégresse et désinvolture

L'étude de Paul Bairoch estime les PNB. L'étude Maddison estime les PIB. :wink:

Un autre chiffre surprenant. Le PIB par habitant était plus élevé en Afrique qu'en Europe occidentale en l'an mille.


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Message Publié : 31 Mars 2005 13:35 
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Citer :
messieurs arrêtez de me prendre pour un imbécile. Ce forum est intéressant car l’on peut apprendre des uns et des autres. Alors apprenez !

Selon ce joli sophisme ce sont nous les imbéciles qui doivent apprendre.
Merci à vous, je me demande pourquoi discuter avec vous : nous sommes assez nombreux à vous rappeler que seul le PIB - ou le PNB - ne sont pas suffisant pour mesurer la puissance d'un Etat et vous continuer dans votre logique qu'aucun historien sérieux ne peut soutenir, mais bon !

Citer :
L'étude de Paul Bairoch estime les PNB. L'étude Maddison estime les PIB.

Arcticles, thèses, études scientifiques en question ?
Epistémologie de la question et orientation bibliographique ?
La recherche fonctionne avec ces outils et pas avec de vagues affirmations ou citations sorties d'outre-tombe ou de l'au-delà ! :roll:

Vous n'avez toujours pas répondu à cela :
Citer :
Une petite précision : qui et cela à partir du XVIIème siècle avec une accentuation au XIXème siècle contrôle les routes commerciales chinoises et asiatiques ? Qui occupe la quasi totalité des ports chinois vers 1890 ? Qui "gère" les provinces chinoises à cette date ?
Réponse : l'Angleterre, la France, l'Allemagne, la Russie (occupant toute la Mandchourie, sans que Pékin ne puisse faire quoique ce soit ) et le Japon. De plus, la Chine n'est pas encore industrialisée à ce moment là et possède une économie essentiellement agricole.

Citer :
Par ailleurs, même si ces chiffres étaient exacts, ils ne signifient pas grand chose. Richesse ne signifie pas puissance : l'Espagne de Philippe II contrôlait les échanges américano-européens et les bénéfices tombaient chez les marchands français. Elle possédait aussi le plus gros arrivage de minerais d'argent, contrôlait les plantations et les mines d'or et d'argent et elle a fait 5 fois banqueroute.
On peut faire dire aux chiffres ce que l'on veut...


duc de Raguse.

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Un peuple sans âme n'est qu'une vaste foule
Alphonse de Lamartine


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Message Publié : 31 Mars 2005 13:46 
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Philippe de Commines
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Inscription : 08 Mai 2002 9:54
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Noacyl a écrit :
Un autre chiffre surprenant. Le PIB par habitant était plus élevé en Afrique qu'en Europe occidentale en l'an mille.


C'est fort possible: mais comment les estimer ? En sac de blé ou en noix de coco ?


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Message Publié : 31 Mars 2005 14:07 
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Grégoire de Tours
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Je ne parle pas d’empires ou de domination mondiale, je parle de pays et de PIB.

Roy-Henry a écrit :
Pour la Chine, je suis heureux de constater que vous renoncez à ce chiffre de 500 millions d'habitants en 1800 ! :D

D’après Michel Cartier dans La population de la Chine au fil des siècles, on est très proche des 500 millions...

Roy-Henry a écrit :
C'est fort possible: mais comment les estimer ? En sac de blé ou en noix de coco ?

Je laisse la parole à Fernand Braudel:
"Je suis même d'accord avec Jean Marczewski pour penser que la comptabilité nationale n'est pas seulement une technique, mais déjà une science en soi et que, par sa fusion avce l'économie politique, elle a fait de cette dernière une science expérimentale".


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Message Publié : 31 Mars 2005 14:52 
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Localisation : Région Parisienne
Ouaip, mais la phrase est sortie de son contexte. Il y a tout un chapitre sur les modes de calcul des indices macro-économiques dans le Ier tome de Braudel, qui est d'ailleurs fort intéressant, trop long pour être résumé en quelques tronçons lapidaires.

_________________
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Message Publié : 31 Mars 2005 15:49 
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Localisation : Alsace, Zillisheim
Voici quelques liens de Google Schoolbar avec comme mots clefs Maddison économie chinoise:
http://scholar.google.com/scholar?hl=en&lr=&safe=off&q=%C3%A9conomie+chinoise+Maddison&btnG=Search

D'ailleurs l'un des extraits éclaire un peu votre débat:
Citer :
Ces chiffres sont ceux qui sont donnés par le Monde. Dossiers & Documents qui reprend les statistiques internationales, en l'occurrence les chiffres avancés par le FMI. Il en va de même pour les autres statistiques, qui sauf exception, sont tirées des mêmes sources. Ceci est important à savoir. En effet, les statistiques chinoises ont tendance à surestimer les performances du pays, ce qui est normal pour des statistiques administrées. Il existe cependant un consensus parmi les spécialistes concernant les performances du pays, même s'il convient de déflater les chiffres officiels de quelques points, divers facteurs venant biaiser les chiffres officiels. Sur ce point, voir Maddison (1998).


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Message Publié : 01 Avr 2005 14:15 
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Salluste
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Le problème vient du mot Dominer:
En fait si on regarde le sens de ce mot, aucun pays n'a jamais dominé le monde dans l'histoire, car aucun pays ou aucun peuple n'a pu diriger n'importe quel peuple du monde, cela n'est jamais arrivé.
Il faut plûtôt parler d'une domination relative, par rapport à la majorité des peuples du monde.
La première puissance économique n'est pas tout à fait la même chose.
C'est vrai que dans l'histoire, probablement jamais, il y a eu une telle différence entre le premier et le deuxième. Avant le monde était beaucoup plus multipolaire.

Quant au PIB dans l'histoire, il est difficile de mesurer le PIB actuel avec une grande précision. Les PIB historique sont encore plus hazardeux, ils donnent des indices tout au plus.
La chine numero un jusqu'au XIX siècle certainement pas, elle est en déclin depuis le XVIsiècle comme l'inde d'ailleurs (curieusement elles ont toujours connus prospérité et déclin en même temps)
elle était probablement numero un au XVI siècle mais plus après...

Pour l'Espagne, il faut surtout ajouter l'or et l'argent obtenu facilement qui ont induit une mentalité de rentier alors que la France et l'Angleterre durent se dévellopper industriellement pour faire face.

_________________
La grande leçon de l'histoire est que l'homme ne tire presque jamais de leçons de l'histoire.


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Message Publié : 01 Avr 2005 17:47 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 20 Avr 2004 15:03
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Localisation : PARIS
satan a écrit :
La chine numero un jusqu'au XIX siècle certainement pas, elle est en déclin depuis le XVIsiècle comme l'inde d'ailleurs (curieusement elles ont toujours connus prospérité et déclin en même temps)
elle était probablement numero un au XVI siècle mais plus après...

Ceci est complètement faux. La Chine n’a jamais été aussi puissante que sous les Mandchous. A côté de l’empereur Kangxi, Louis XIV était un nain.
La Chine en 1750 c’est presque ¼ de la production mondiale de biens manufacturés. Et ce chiffre est le même en 1800.
Le déclin de la Chine commence en 1800. Mais pour qu’un pays occidental la rattrape (au niveau du PIB) il faudra attendre encore plus de 80 ans.
L’extraordinaire croissance des pays occidentaux à partir de la révolution industrielle ne doit pas faire oublier le retard que ces derniers avaient par rapport aux pays asiatiques.

Voici un extrait d’un article de Par Philip S. Golub au sujet du retour de la puissance chinoise dans l’économie d’aujourd’hui :

Citer :
Dans une perspective longue, la Chine, comme d’ailleurs l’Asie dans son ensemble, serait donc en train de renouer avec son histoire précoloniale et de retrouver progressivement la place qu’elle occupait avant 1800, quand elle était un des cœurs de l’économie mondiale et la première puissance manufacturière de la planète. Elle se trouvait alors au centre d’un réseau dense d’échanges régional, établi depuis des siècles, l’Asie étant la zone principale de production et de profit du monde.

En 1776, Adam Smith écrivait à ce propos que « la Chine est un pays bien plus riche que toutes les contrées d’Europe », réalité que les jésuites connaissaient déjà depuis fort longtemps. Pour sa part, le père Jean-Baptiste du Halde, dont l’encyclopédie sur la Chine influença les commentaires favorables de Voltaire, notait en 1735 que l’empire chinois, florissant, connaissait un commerce intérieur incomparablement supérieur à celui de l’Europe.

Cent ans plus tard, ayant acquis une position nouvellement dominante, l’Europe crut redécouvrir une Asie immobile enfermée à jamais dans la prémodernité. Les philosophes allemands, Hegel entre autres, s’imaginaient la Chine comme un monde fermé, cyclique, singulier. Pour Ernest Renan, la « race chinoise » était une « race d’ouvriers (...), d’une dextérité de main merveilleuse, sans presque aucun sentiment d’honneur ». Il suggérait de la gouverner « avec justice, en prélevant d’elle (...) un ample douaire au profit de la race conquérante ». Ces lignes furent écrites, bien sûr, au plus fort de la colonisation.

Avant 1800, les flux commerciaux entre Chinois, Indiens, Japonais, Siamois, Javanais et Arabes étaient de très loin supérieurs aux flux intra-européens ; le niveau des connaissances scientifiques et techniques était élevé, dépassant dans bien des domaines celui des Européens. « En termes technologiques, [la Chine] se trouvait dans une position dominante avant et après la Renaissance en Europe », souligne Joseph Needham, historien des sciences. Cette avance se confirmait dans des domaines tels que l’acier et le fer, les horloges mécaniques, l’ingénierie (ponts à suspension), les armes à feu et les équipements pour forages profonds.

Il n’est donc pas surprenant que l’Asie ait eu une place prépondérante dans l’économie manufacturière mondiale de l’époque. Selon les estimations de l’historien Paul Bairoch, en 1750, la part relative de la production manufacturière chinoise était de 32,8 %, alors que celle de l’Europe était de 23,2 % – leurs populations respectives étant estimées à 207 millions et 130 millions de personnes. Prises ensemble, les parts de l’Inde et de la Chine atteignaient 57,3 % de la production manufacturière globale. Si l’on ajoute à l’Inde et à la Chine les parts des pays d’Asie du Sud-Est, de Perse et de l’Empire ottoman, la part de l’Asie au sens large (n’incluant pas le Japon) avoisinait les 70 %. L’Asie était particulièrement dominante dans la production de produits textiles finis (cotonnades et soieries indiennes et chinoises) – secteur qui deviendra plus tard l’industrie phare, globalisée, de la révolution industrielle européenne.

Toujours selon les estimations de Bairoch, la Chine connaissait en 1750 des niveaux de productivité supérieurs à la moyenne européenne, si l’on tient compte des populations respectives de l’époque : le produit national brut par habitant en Chine s’élevait à 228 dollars (9), contre 150 à 200 dollars selon les pays en Europe. Avec 66 % de la population mondiale, l’Asie au sens large représentait, toujours en 1750, près de 80 % des richesses produites (du PNB) de la planète. Cinquante ans plus tard, le PNB par habitant de la Chine et celui de l’Europe convergeaient, l’Angleterre et la France étant les seuls pays européens dont les niveaux d’industrialisation (production manufacturière par habitant) étaient légèrement supérieurs à celui de la Chine.

En somme, comme l’écrit André Gunder Frank, « la Chine et l’Inde étaient les deux grandes régions les plus“centrales” dans l’économie mondiale », la position compétitive de l’Inde s’expliquant par sa « productivité relative et absolue » dans le secteur des textiles, par sa « domination du marché mondial des cotonnades » ; celle de la Chine découlant de sa « productivité encore plus grande dans les domaines industriels, agricoles, dans le transport (fluvial) et le commerce ». Lorsqu’on s’intéresse aux Etats plus petits mais prospères, tels le Siam (la Thaïlande d’aujourd’hui), on s’aperçoit que le phénomène s’étendait bien au-delà des frontières des deux géants asiatiques. Dans ce tableau d’ensemble, l’Europe et les Amériques jouaient « un rôle d’une faible importance » avant 1800, essentiellement centré sur le commerce triangulaire atlantique.

Cet ensemble d’éléments remet en cause l’idée encore largement admise que l’ère occidentale aurait débuté en 1500 avec la découverte et la colonisation des Amériques. La fracture fondamentale du monde n’interviendra que plus tard, au XIXe siècle, avec l’accélération de la révolution industrielle et l’expansion coloniale, quand la domination globale européenne se traduira par la désindustrialisation de l’Asie. Par là, il faut entendre la disparition quasi complète dans le cas de l’Inde et partielle pour la Chine de leurs manufactures artisanales au cours du XIXe siècle.

Cette désindustrialisation résultait d’un double mécanisme. Elle tenait, d’abord, à l’avance européenne désormais acquise sur le plan technique. Le machinisme permettait des hausses de productivité importantes, donc une croissance explosive des manufactures, dont le coût de production baissait de plus en plus. Ensuite, cette désindustrialisation procédait des termes de commerce et d’échange inégalitaires imposés de façon coercitive par les métropoles coloniales : la concurrence des manufactures européennes sur les marchés indien et chinois se faisait dans un cadre de « libre-échange » qui était tout sauf libre, les colonies se trouvant dans l’obligation d’ouvrir unilatéralement leurs frontières aux produits européens, sans contrepartie.

C’est pourquoi l’Inde, première manufacturière de cotonnades avant 1800, vit son industrie textile assez rapidement dévastée. Elle allait devenir un exportateur net de coton brut et finir, vers la fin du XIXe siècle, par importer la quasi-totalité de ses besoins en produits textiles. Parmi les conséquences humaines tragiques de la transformation du pays en exportateur de biens primaires, on se souviendra des famines dévastatrices dues à la substitution du coton aux cultures vivrières, sans mentionner le recul général du niveau de vie de la population. Quant à la Chine, à qui la Grande-Bretagne puis la France avaient imposé, à travers les deux guerres de l’opium (1839-1842 et 1856-1858), la consommation de l’opium produit aux Indes, elle dut accepter des traités inégaux et connut une désindustrialisation partielle de son industrie sidérurgique.

De là découlent la création des tiers-mondes, la divergence toujours croissante au cours du siècle entre pays colonisés et colonisateurs. Alors que la Chine et les Indes représentaient 53 % de la production manufacturière mondiale en 1800, elles ne comptaient plus que pour 7,9 % en 1900. Et si, au début du XIXe siècle, le PNB par habitant en Europe et en Asie était à peu près équivalent – 198 dollars en moyenne pour l’Europe, 188 dollars pour les futurs tiers-mondes –, avec donc un ratio de 1 à 1, dès 1860 ce ratio était passé de 2 à 1, et même de 3 à 1 dans le cas de la Grande-Bretagne (575 dollars, contre 174 dollars dans les tiers-mondes). En fait, comme l’indiquent ces derniers chiffres, « remarquables et horrifiants » selon l’expression parlante de Paul Kennedy, le recul par rapport à l’Europe ne fut pas seulement relatif, il fut absolu : en 1860, le niveau de vie dans les pays colonisés avait décliné par rapport à 1800, du fait de l’expansionnisme européen.

Seuls le Japon et le royaume de Siam échappèrent à la colonisation. Grâce à la restauration Meiji de 1868 et à la création d’un Etat dirigiste fort, le Japon sera le seul pays non occidental à réussir son effort d’industrialisation et de modernisation au XIXe siècle. Les racines de la réussite nippone dans la seconde moitié du XXe, en dépit de la catastrophe de la seconde guerre mondiale, se trouvent là. Si la discontinuité historique est plus longue, la trajectoire ascendante prise par la Chine ces deux dernières décennies est également ancrée dans l’histoire longue de ce pays. Longtemps habitué à être le sujet pensant de l’histoire des autres, l’Occident devra désormais repenser sa propre histoire non plus comme exception, mais comme un moment circonscrit dans l’histoire universelle.


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Message Publié : 03 Avr 2005 17:57 
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Salluste
Salluste

Inscription : 06 Oct 2004 12:18
Message(s) : 218
Pour la chine j'ai effectivement 500 millions d'habitants au début du XX siecle
30 millions en 1700
tes chiffres me paraissent curieux.

J'ai l'impression que tu prends pour argent comptant des données qui ne sont on ne peut moins fiable.
Leur intérêt est surtout de voir leur évolutions:
exponentielle à partir de la renaissance pour l'Europe, linéaire pour le reste du monde (en gros)
durant le moyen age toutes les civilisations était très proches

Pourquoi la chine a t'elle échoué tant de conquètes alors?
Comment se fait que ce soit les Européens qui ont conquis l'Inde et non Chine

Citer :
En 1776, Adam Smith écrivait à ce propos que « la Chine est un pays bien plus riche que toutes les contrées d’Europe », réalité que les jésuites connaissaient déjà depuis fort longtemps.


Il n'y a jamais été!
Il suffit de voir les descriptions ou représentation de la Chine à cette époque pour se rendre compte de leur méconnaissance totale.

_________________
La grande leçon de l'histoire est que l'homme ne tire presque jamais de leçons de l'histoire.


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Message Publié : 03 Avr 2005 18:34 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 08 Mai 2002 9:54
Message(s) : 1923
Euh... Noacyl, j'ai pas tout compris là...

Il est dit que les aciers chinois étaient de meilleure qualité que les aciers européens ? Mais -à moins de me tromper- le canon est inventé par les Européens (Anglais, suivis par les Français). De même l'arquebuse et le mousquet.

Les Chinois connaissent la poudre; ils en sont les inventeurs mais ne savent pas l'utiliser autrement que sous forme de fourreaux de mine...

Vrai ou faux ? Les Portugais puis les Hollandais leur font découvrir l'usage des armes à feu. Ils vont copier et je ne doute pas que leurs répliques soient d'excellentes qualités. Les Japonais font de même et ne viennent que tardivement au canon. J'ai tout faux ?


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