J'ai trouvé cette entretien de Pierre Clastres sur le net :
http://endehors.org/news/1589.shtml
La plupart des pages que j'ai trouvé sur lui sont tenues par des gens d'extrême-gauches, voire des anarchistes ... Mais visiblement c'est un auteur reconnu.
Ses thèses ont l'air intéressantes, notamment celles autour de la personne des leaders des communautés primitives. Les sociétés étudiées, celles d'Indiens d'Amazonie, et aussi d'Amérique du Nord (les Apaches du temps de Geronimo), seraient opposées à l'Etat. En fait il y aurait deux types de sociétés : celles favorables à l'Etat et celles qui y sont opposées, la neutralité n'existant pas. Seulement l'auteur n'explique pas vraiment comment on passe de l'un à l'autre. A ce que j'ai cru comprendre généralement on met en avant des théories liés au changement démographique ou écologique. Si quelqu'un a des connaissances sur ce dernier point, son intervention est la bienvenue, car je ne m'y suis pas intéressé (et à vrai dire ce l'écologie et la démographie c'est pas vraiment mon truc).
Néanmoins je suis plus perplexe quand Clastres dit que le chef de l'Etat n'a pas d'obligations envers les gens qu'il dirige :
Citer :
Dans nos pays, c'est le contraire: c'est la société qui a des obligations par rapport à celui qui commande, alors que le chef n'en a aucune, Et pourquoi le chef qui commande, le despote, n'a-t-il aucune obligation? Parce qu'il a le pouvoir, bien entendu! Alors, le pouvoir, cela veut dire précisément: "Les obligations, maintenant, ce n'est plus pour moi, c'est pour vous'.
Dans chacune des premières sociétés étatiques, le chef a des devoirs. Pas explicitement en faveur de ses sujets, mais il doit respecter une autorité supérieure (les Dieux, le Ciel, l'Ordre cosmique). Cette théorie aboutit au fait que si le souverain est jugé incapable, on peut le renverser légitimement, d'après la conception du pouvoir des diverses premières civilisations. De toute manière faire du souverain un despote est une erreur, son pouvoir n'est jamais total. Clastres me paraît de toute manière surtout raisonner par rapport à la société contemporaine.
Toujours autour du pouvoir dans les premiers Etats, les études d'Alain Testart (
La servitude volontaire, t.1 Les Morts d'accompagnement, t.2 L'Origine de l'Etat, 2004) sont elles aussi très instructives. Il analyse la pratique des "morts d'accompagnement", les sacrifices des serviteurs à la mort de leur maître, que l'on retrouve dans les sépultures en divers endroits (Mésopotamie, Chine, Mésoamérique, peut-être Egypte, Asie Centrale, etc.). Cela traduit le lien de dépendance personnelle des serviteurs envers leur maître, qu'ils suivent jusque dans la mort. Cela traduit une place très importante donnée aux liens personnels entre maître et serviteurs, conférant au premier un pouvoir important. Ce type de liens seraient une première étape dans l'élaboration d'une structure étatique. Dans un deuxième temps, la bureaucratie remplace les liens d'homme-à-homme.