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Message Publié : 13 Juin 2016 19:22 
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L. VLPIVS POLLEX a écrit :
Revenons au sujet !
En 1969, une proposition de référendum avait reçu une réponse négative du peuple souverain (il est vrai qu'en France, on ne répond pas à la question posée, mais on se positionne "pour" ou "contre" celui, qui pose la question);il y avait la disparition du Sénat, entre autre ...

Non pas la disparition, mais la modification du Sénat.

Au départ, d'ailleurs, De Gaulle avait pensé à un référendum sur la participation (du personnel aux profits, voire à la direction, de l'entreprise) ce qui aurait eu l'avantage de renverser la table en transgressant le clivage droite-gauche, mais il a reculé devant les délais nécessaires à l'élaboration d'un projet bien ficelé.

Il s'est donc reporté sur le Sénat, avec lequel il avait un compte à régler. Sans sondage préalable de l'idée - ça ne se pratiquait pas encore - mais dès qu'il l'a annoncé les sondages se sont révélés défavorables, et il savait avant même le vote que le projet ne passerait pas. (Ce qui explique qu'il est resté à Colombey, d'où il a déclenché le communiqué résiliant ses fonctions.)

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Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 13 Juin 2016 19:24 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Barbetorte a écrit :
Pierma et moi sommes donc d’accord, il y avait malentendu. Ce qui caractérisait de Gaulle au pouvoir était un fonctionnement des institutions respectant les principes de la démocratie dans un style qui l’était assez peu et qui agaçait beaucoup.

Pour revenir au Sénat, quelles modifications de son rôle et de sa base électorale ont été apportées par les constituants de la Ve République ?

Fondamentalement, les constituants de la Ve n’ont pas apporté de modification majeure dans les rapports entre les deux assemblées. Ce sont les rapports entre l’exécutif et le législatif ainsi que le rôle dévolu au président de la République qui ont été profondément modifiés.

L’autre grande innovation fut le Conseil Constitutionnel. Sous la Troisième République, les sénateurs se considéraient comme le gardien des principes républicains. Il manquait un organe habilité à juger de la constitutionnalité des lois. Cela revient beaucoup plus logiquement à une cour constitutionnelle n’ayant que des pouvoirs juridictionnels qu’à une assemblée parlementaire.

La presse d’opinion jusque dans les années 1970 faisait entendre la voix de l’intelligentsia plus que celle de la nation et cette intelligentsia s’est distinguée par son aveuglement. Si l’on excepte quelques personnalités comme Raymond Aron ou François Mauriac, l’intelligentsia n’a pas su apporter de réponse pertinente aux grandes questions des années d’après-guerre comme celles de la décolonisation, des rapports nord-sud, de l’idéologie communiste, de la place de la France et, plus largement, de l’Europe entre les deux grandes puissances mondiales.
Mais aussi, comment une personnalité indépendante pouvait-elle approuver un de Gaulle qui s’identifiait avec la nation et qui proclamait : « Après moi le chaos ? ». A moins d’être François Mauriac ou André Malraux, on était enfermé dans l’alternative soit de porter la voix de son maître soit de se situer dans l’opposition.


Réactions sur plusieurs points.

Les institutions de la 5ème république pratiquées par de Gaulle n'étaient pas autoritaires. C'est la société qui était ainsi. Le pouvoir politique, quoique beaucoup moins concentré, n'était pas moins partisan sous les régimes d'assemblée de type 3ème ou 4ème républiques.

De Gaulle avait une vision impérieuse et souveraine de l'exercice du pouvoir autant que de la légitimité et de la responsabilité démocratique.

Ce qu'il y a de plus admirable dans sa conception du pouvoir, c'est que son sens de la responsabilité démocratique et de la légitimité démocratique était à la hauteur de son sens de l'Etat, son sens de l'intérêt national, et son sens de la responsabilité du chef.

De Gaulle pouvait agir fortement, avoir une politique forte, quitte à ce qu'elle soit tranchée, clivante, parce qu'il prenait un soin scrupuleux à ce que sa personne et son action soient revêtues d'une incontestable légitimité populaire. D'où la pratique du référendum, les dissolutions, avec à chaque fois un principe cardinal énoncé clairement, sans ambiguité et sans concession :
"Vous m'avez élu comme chef pour diriger notre pays. Voilà ce que je ferai, pourquoi je le ferai. Tant que j'aurai votre approbation je le ferai. Quand j'aurai besoin de changer de politique je retournerai devant vous pour vous demander d'approuver ce changement. Et si vous ne m'approuvez pas, je démissionnerai parce que je ne peux pas gouverner sans l'approbation de la majorité du Peuple."

A comparer avec les pratiques détestables des Mitterrand, Chirac, Hollande, et dans une moindre mesure Giscard (le premier à avoir évoqué la perspective d'une cohabitation s'il perdait les législatives de 1978) et Sarkozy (qui a annoncé la couleur sur un mini-traité qui allait devenir le traité de Lisbonne mais n'a pas respecté le mandat donné par ses électeurs en faisant du traité de Lisbonne tout autre chose qu'un simple traité technique améliorant le processus de décision au Conseil de l'UE).

Pour eux, surtout les trois premiers, c'est se faire élire sur des mensonges et une arnaque, et considérer ensuite que le cadre juridique constitutionnel leur donne un chèque en blanc pour toute la durée de leur mandat, et rebelote pour tenter de se faire réélire. Pas étonnant dès lors qu'il y ait des mouvements de rue. Quand les personnes incarnant les institutions agissent sans mandat légitime, la démocratie est en crise.

Le plus démocrate de tous les présidents de la 5ème république, de très loin, c'était de Gaulle. Les autres, depuis au moins 1981, ne sont que des aventuriers carriéristes méprisant les électeurs.


Concernant le Conseil constitutionnel, je rappelle qu'à l'origine il fut créé pour corseter le Parlement et s'assurer que ce dernier respecterait bien le domaine de la loi tel que prévu par l'article 34 de la constitution. C'est la révolution de palais du 16 juillet 1971 (celle ayant permis de contrôler que pour l'essentiel les projets de loi du gouvernement soient désormais soumis au contrôle du respect de principes juridiques supérieurs, ceux de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des préambules de 1958 et 1946), puis la réforme constitutionnelle de 1974 (ouvrant la voie de la saisine du Conseil constitutionnel par l'opposition), puis enfin celle de 2008 (qui en instaurant la QPC, permet à tout justiciable de remettre en cause la constitutionnalité des lois en vigueur) qui a transformé profondément le Conseil constitutionnel en l'instrument du contrôle de l'exécutif et de la majorité parlementaire.

Une telle transition a été tout sauf facile ou évidente, étant donné la conception de l'exercice du pouvoir qui était celle de la France : non seulement la France révolutionnaire mais avant elle la France monarchique. La révolution n'a pas tant procédé à une transformation de la conception impérieuse de l'emprise du pouvoir sur la société qu'à un transfert de souverain : du roi à l'Assemblée représentant la Nation. Le principe était que la loi était l'incarnation de la volonté nationale. Alors soumettre la loi à une norme, c'était un vrai bouleversement conceptuel comme symbolique.


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Message Publié : 13 Juin 2016 22:32 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 27 Déc 2013 0:09
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Pierma a écrit :
Non pas la disparition, mais la modification du Sénat.
Formellement, dans le projet, le Sénat continuait à exister. En réalité il disparaissait. Il fusionnait avec le Conseil économique et social. Il ne votait plus les lois, il n'y avait plus de navettes ni de commissions paritaires. Il était seulement consulté préalablement aux débats à l'Assemblée Nationale sur les projets et propositions de lois. Les sénateurs perdaient la faculté de proposer des lois. Ils ne se réunissaient plus avec les députés en congrès lors des réformes constitutionnelles, celles-ci étant désormais adoptées par les seuls députés. Le président du Sénat n'assurait plus l'intérim du Président de la République. Bref, un Sénat zombie.


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Message Publié : 16 Juin 2016 22:39 
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Marc Bloch
Marc Bloch

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Localisation : Versailles
Oui Barbetorte a raison : le sénat du projet de 1969 c'est le conseil économique et social rebaptisé.

Qu'on me pardonne ma référence encore une fois aux souvenirs de Rocard mais il propose une thèse simpliste mais convaincante : il y a en France 500000 conseillers municipaux et 36000 maires très fiers d'être électeurs sénatoriaux et qui rêvent de devenir sénateurs !

On peut ajouter que ces élus locaux forment une large part de l'encadrement intermédiaire des partis modérés (centristes, radicaux et socialistes) à la différence des gaullistes et des communistes qui avant les années 1970 étaient marginaux dans les collectivités locales !


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Message Publié : 18 Juin 2016 8:00 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 12 Nov 2009 21:20
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Jerôme a écrit :

Qu'on me pardonne ma référence encore une fois aux souvenirs de Rocard mais il propose une thèse simpliste mais convaincante : il y a en France 500000 conseillers municipaux et 36000 maires très fiers d'être électeurs sénatoriaux et qui rêvent de devenir sénateurs !
!



Cela est bien rapide.
- Les conseilleurs municipaux ne sont pas tous grands électeurs. Dans la plupart des communes le conseil ne désigne qu'un grand électeur : en général le maire. Donc Michel Rocard aurait dû dire 36 000 maires. C'aurait été un peu plus exact.
- Mais en fait c'est faux.
- Les maires ruraux savent très bien qu'ils ne sont jamais sénateurs.
- Mais ils savent aussi que les sénateurs sont leurs élus et qu'ils peuvent les appeler pour avoir leur aide quand ils ont un problème avec le conseil général ou l'Etat. Un sénateur c'est un délégué syndical des maires ruraux qui seraient écrasés sinon. Surtout dans la France centralisée d'avant 82 - mais ça reste encore assez vrai de nos jours
- Les députés sont élus au suffrage universel et donc plus attentif aux communes où se concentre la majorité de la population


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 Sujet du message : Re:
Message Publié : 18 Juin 2016 10:00 
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Eginhard
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Clio a écrit :
Le Sénat n'est pas illégitime puisqu'il est prévu dans la Constitution. Par contre, il est inutile à part comme maison de retaite pour d'anciens députés, d'anciens ministres... Idem pour les Conseil economique et social et des petits frères rattachés aux régions. :evil:


C'est bien vrai.


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Message Publié : 24 Juil 2016 16:04 
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Marc Bloch
Marc Bloch

Inscription : 10 Fév 2014 7:38
Message(s) : 4382
Localisation : Versailles
Vous trouverez ici une critique virulente du sénat par un historien d'extreme gauche qui ne pratique pas la langue et bois et se replace dans la longue durée

.https://m.youtube.com/v/G4FfUlcbA5g


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Message Publié : 24 Juil 2016 17:32 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 23 Déc 2010 13:31
Message(s) : 682
Intéressant pour l'aspect "rappel des faits" pour ceux qui auraient oublié, ou jamais su, les origines du bicaméralisme français. Mais critique tellement orientée qu'elle en finit par se contredire elle-même : j'ai du mal à comprendre comment il est possible de dire que le suffrage indirect utilisé pour le Sénat est un signe du caractère non démocratique de celui-ci et, en même temps, de laisser entendre que le recours au référendum (donc, jusqu'à plus ample information, une consultation directe du peuple) serait également un signe d'une tendance non démocratique. Pareillement, il est amusant de voir que le fait que les Constitutions des Quatrième et Cinquième Républiques ont bel et bien été adoptées par référendum (ce qui implique qu'une majorité de citoyens était en faveur du bicaméralisme) ne donne lieu à aucune interprétation du sentiment de la population sur l'existence d'une ou deux chambres, du moins durant ces années-là ; pour une personne prônant le suffrage direct comme seul suffrage vraiment démocratique, il est surprenant que cet élément ne soit nullement intégré à son raisonnement.


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