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Message Publié : 10 Août 2009 23:31 
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Polybe
Polybe

Inscription : 11 Juin 2008 14:10
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Deshays Yves-Marie a écrit :
Citer :
L'écoute musicale est quelque chose qui s'est développée progressivement, et en grande partie grâce aux romantiques...

Stendhal rapporte cependant que lors des représentations d'opéra, on bavardait à qui mieux mieux dans les loges où un des auditeurs faisait le guet pour signaler aux autres un passage intéressant ; on faisait alors silence pour reprendre de plus belle les conversations une fois achevé le passage intéressant!


Tout à fait, et c'est pour cela que j'ai parlé de développement progressif, et pas de passage brutal. Ce changement se faisait à des niveaux différents. Dans la première moitié du 19e siècle, un chaos quasi-total continuait à régner dans les théâtres d'opéra. En même temps, à Paris, les spectateurs de l'Opéra-Comique étaient plutôt bavards; les spectacles du Théâtre des Italiens se faisait sous un silence absolu, alors qu'au Grand-Opéra c'était un peu l'intermédiaire entre le silence et le bavardage.
Par ailleurs, les propos de Stendhal sur les passages intéressants sont aussi dignes d'intérêt pour la problématique des passages entre les styles classique et romantique. En Italie, si la virtuosité vocale connaît une floraison au 18e siècle, l'une des raisons les plus importante, c'est le besoin qu'éprouvent les compositeurs pour attirer l'attention du public. Par ailleurs, les passages virtuoses donnent aux cantatrices et chanteurs (il s'agit souvent de castrats dans l'opéra italien du XVIIIe siècle) d'exposer leur agilité vocale, l'étendue de leur tessiture, et aussi leur créativité - il ne faut pas oublier qu'à l'époque, ce sont les interprètes qui décident librement des cadences et des ornementations de leurs airs. Tout cela n'est pas pour dire que la virtuosité est mécaniquement lié au bavardage du public; l'attitude des spectateurs est juste l'un des raisons qui ont poussé les compositeurs à composer des passages "intéressants".

A partir de la fin du XVIIIe siècle, les choses changent progressivement. D'une part, on est en train de redéfinir l'art: l'artiste devient génie créateur, et s'émancipe de la tutelle de son mécène. Il commence à exiger une attention concentrée sur son oeuvre. Dans la même époque, les compositeurs commencent à s'emparer du monopole de la créativité musicale; ils ne supportent plus les ornementations et les cadences improvisées par les interprètes; dans les années 1820, Rossini va écrire lui-même les cadences des airs de ses opéras. Par ailleurs, quelques décennies plus tard, on n'aura même plus besoin de cadences et de virtuosité pour attirer l'attention du public: dans la deuxième moitié du XIXe siècle, le processus entamé à l'époque des romantiques commence à s'accomplir; le public devient de plus en plus silencieux, par ailleurs, grâce au développement de l'électricité, on peut désormais éviter l'éclairage de la salle, et détourner tous les regards vers la scène, ce qui n'était pas le cas auparavant.

D'autre part, le développement n'est toujours pas schématique. En Italie, les spectateurs d'opéra continuent à parler pendant les représentations dans les années 1870. Au début du XXe siècle, au Metropolitan Opera de New York, il y aura toujours des spectateurs qui vont bavarder pendant les passages orchestraux des opéras de Wagner. Un peu plus tard, à partir des années 1920, le silence absolu s'impose dans les représentations d'opéra.


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Message Publié : 11 Août 2009 8:56 
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Sauriez-vous par hasard quand apparaissent les applaudissements ? Est-ce bien avant le XIXe siècle :?:


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Message Publié : 11 Août 2009 10:41 
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Plutarque
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Inscription : 24 Sep 2008 10:00
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Localisation : Caen
Ce sujet me rappelle une anecdote entendue récemment sur France Musique. Elle concerne le baron Gottfried van Swieten, qui vivait à Vienne à la fin du XVIIIe siècle. Passionné de musique, il commandait des œuvres aux compositeurs, et a notamment aidé Mozart lorsque ce dernier était aux abois. Il collabora aussi avec Haydn, et favorisa le carrière du jeune Beethoven (qui lui dédia sa première symphonie).
Ce baron était connu pour ne pas supporter que les gens parlent quand il organisait chez lui de petits concerts. Toujours assis au premier rang, il se levait d'un bond quand il entendait quelqu'un chuchoter et se retournait pour foudroyer du regard le malheureux qui avait osé manquer de respect à l'œuvre jouée. Le contrevenant redevenu coi, le baron se rasseyait lentement sur sa chaise...
D'après ce que j'ai compris, la passion débordante de van Swieten pour la musique le faisait un peu passer dans son milieu pour un original... Preuve que l'habitude d'écouter l'œuvre en silence n'était pas encore prise...

_________________
« Avec tout ce que je sais, on pourrait faire un livre… Il est vrai qu'avec tout ce que je ne sais pas, on pourrait faire une bibliothèque. » Sacha Guitry


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Message Publié : 11 Août 2009 14:21 
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Georges Duby
Georges Duby
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Inscription : 27 Juil 2007 15:02
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Localisation : Montrouge
Au XVIIè et XVIIIè siècles, chaque grande famille loue sa loge à l'année. On y reçoit les amis, joue aux cartes et dine. On tire le rideau vers la salle pour être tranquille. Rideau indispensable dans certains cas d'occupation de la loge à deux. Quand un grand artiste chante une aria de virtuosité, on ouvre le rideau et on écoute. Il faut dire qu'au XVIIè un Opéra peut durer 5 ou 6 heures et parfois plus.
Au tout début, les invités de marque sont assis sur scène et le parterre (sous les bougies) ne comporte pas de fauteuils, on y circule librement.
Les castrats s'efforcent comme il a été dit de retenir l'attention par des ornements de haute virtuosité, des prouesses vocales et le port de costumes extraordinaires. Dans l'opéra baroque, tout est extraordinaire sur scène, le décor , les machines qui font descendre du ciel des dieux en gloire, la musique est retentissante.
Tout ce monde va disparaitre fin du XVIIIè. A Vienne, l'empereur Joseph II est mélomane, il entend qu'on écoute les opéras qu'il programme lui-même, au Burgthéater notamment. Il assiste aux représentations volontiers et lance les applaudissements.

_________________
Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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