Après une présentation générale et une rétrospective des diverses sortes de suites selon les pays et les époques, Roland de Candé conclut :
"C'est dans la deuxième moitié du XVIIe siècle seulement que s'organise la suite classique, telle que l'a pressentie Lully dès 1660 et telle que Bach l'a portée à un haut degré de perfection dans ses Suites Anglaises."
Il fournit ensuite le
"Plan de la Suite classique :
1) Introduction facultative (Prélude, Intrada, Sinfonia, Canzone, Ouverture, Toccata, Fantaisie, etc.) généralement de forme assez libre, et dans le style d’une improvisation, mais parfois très développée et allant jusqu’à revêtir la forme de l’Ouverture française (lent - allegro fugué - lent).
2) Allemande à 4/4.
3) Courante (italienne ou française) à 3/2 ou ¾
4) Sarabande, souvent la pièce la plus importante de la suite.
5) Un ou plusieurs mouvements supplémentaires (que les Allemands appelaient parfois « Galanterien » et les Italiens « Intermezzi »), agréables concessions au goût du public. À cette place se trouvent le plus fréquemment les Menuets, Gavottes, Bourrées, Passepieds, Rigaudons : ces danses sont presque toujours doubles, c’est-à-dire qu’un 2ème menuet, une 2ème gavotte, etc. (généralement écrits à trois parties : trio) alternent avec le 1er menuet, la 1ère gavotte, etc. mais c’est à cette place aussi que les musiciens, donnant libre cours à leur caprice introduisent des danses moins courantes, des pièces de caractère léger (rondeau, capriccio, scherzo, etc. : Bach, Partitas n° 2 et n°3) des aire ou des « pièces de genre ». Ces dernières, véritables petits tableaux musicaux portant des titres suggestifs, furent une des spécialités du grand Couperin : La Lutine, les Nonètes, Le Bavolet flotant, Les Vieux galans et les trésorières surannées, Les petites crémières de Bagnolet, etc.
6) Gigue à 6/8.
Parmi les autres danses héritées des siècles précédents la Pavane, la Gaillarde, la Forlane, la Polonaise et la Sicilienne sont exclues, à de rares exceptions près de la suite classique. La Chaconne et la Passacaille également : on ne les trouve que dans des suites de forme très libre (Frescobaldi, Couperin, Haendel) généralement pour conclure ; leur carrière, comme pièces indépendantes, se poursuit par contre avec éclat.
La suite classique rappelle la Sonate dont les quatre mouvements sont pressentis dans la succession : allemande-sarabande-menuet-gigue. Mais elle s’en distingue par trois caractères principaux :
a) elle est constituée d’une série de danses, conservant chacune son rythme particulier.
b) Chacune de ces danses est de forme simple, en deux parties (la première se terminant à la dominante, la seconde revenant à la tonique) et construites sur un seul sujet qui ne module pas.
c) Tous les morceaux sont dans la même tonalité."
In Dictionnaire de Musique par Roland de Candé (Microcosme, Éditions du Seuil, 1961).
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