calame a écrit :
Tiens, je ne savais pas cela... J'avais entendu dire que la Peste était "née" en Egypte ou au Proche Orient et arrivée par des rats sur les bateaux dans les grandes villes portuaires (Gênes, Venise, Marseille).
En tout cas, au Proche-Orient, les Mongols sont bien arrêtés en 1260, mais pas dans leurs attaques vers l'Europe, de toute évidence. Mais où trouvaient-ils leurs cadavres de pestiférés ? Etaient-ils atteints eux-mêmes par l'épidémie ? Depuis quand ? Auriez-vous plus d'infos à ce sujet ?
La peste est venue d'Asie avec les troupes mongoles. A la fin du siège de Caffa (en Crimée), une épidémie commença dans les troupes mongoles, qui balancèrent les cadavres sur les Génois assiégés (emploi conscient de l'arme dite biologique !). Pour échapper à l'épidémie, les Mongols levèrent le camps et les Génois s'empressèrent de quitter la ville et le foyer de l'épidémie. Mais ils débarquèrent avec la peste en Italie.
(J'en profite ici pour rebondir sur une thèse développée dans deux autres sujets du forum, le génocide arménien qui a dévié sur les Amérindiens et la guerre de Gaza. On voit curieusement encore des gens minorer l'importance des épidémies dans le Nouveau Monde ou exagérer la volonté des Espagnols d'employer les épidémies pour éradiquer les Amérindiens, quand les témoignages contemporains attestent qu'il n'en fut rien. A Caffa, on a au contraire une attaque délibérée et consciente qui se développe en une effroyable saignée en Europe et au Moyen-Orient (25 millions de disparus dans chacune des deux régions d'après Wikipedia). J'impute ici encore le fait qu'on remue les disparus amérindiens en oubliant les disparus de la Peste noire au fait que, dans le premier cas, des "Occidentaux" sont incriminés et que notre opinion publique se préoccupe surtout des massacres quand une main "occidentale" est incriminable. Deux poids, deux mesures.)
D'un point de vue historique arabe, l'ère des "grandes invasions" turques, latines et mongoles marque l'arrêt de l'expansion de la culture arabe (domination politique et linguistique). Et les Turcs sont directement responsables des déferlements latins et mongols au Moyen-Orient.
C'est pourquoi on pourrait quand même distinguer le XIe siècle comme étant la période charnière où les Arabes se voient confisquer les rênes de leurs destins politique et culturel pour neuf siècles, les Bouyides n'ayant pas d'influence néfaste ou sensible sur ce terrain.
Concernant la Reconquista, je ne sais si on peut assimiler les premières guerres, sursaut salutaire du dernier royaume germain en Espagne, aux guerres ultérieures qui ressemblent davantage, dans l'esprit et les objectifs, aux croisades franques en Orient. En tout cas, on ne peut imputer la Reconquista à l'influence politique des Turcs sur le monde arabe.
On distinguerait donc :
- une période pré-islamique (au moins Ier siècle av. J.-C.-VIIe siècle) dont je ne connais pas les articulations, mais où les royaumes arabes semblent avoir une influence marginale et confinée aux marges des empires romain ou perse ;
- l'âge d'or post-islamique (VIIe-XIe siècles) avec les grandes chevauchées entre la France et l'Inde ;
- l'âge sous domination étrangère croissante puis déclinante (XIe-XXe siècles), achevée par les guerres nationalistes et coloniales ;
- et peut-être, si l'âge précédent est terminé, ce dont certains doutent en raison de l'existence d'Israël ou de la connivence des gouvernements arabes avec les gouvernements non arabes, une nouvelle ère post-coloniale présente, où les pays arabes gèrent la transition vers une totale indépendance ou une installation dans les grands échanges internationaux.