Il y a un article à ce sujet dans le catalogue d'exposition
Trésors fatimides du Caire, qui s'est tenue à l'Institut du monde arabe en 1998 (p. 212 - 217, Ralph Pinder-Wilson, "L'influence fatimide en Sicile et en Italie du Sud"). J'essaye de vous en résumer quelques éléments, qui reprennent en partie ce qui a été déjà dit, mais ajoutent quelques petites choses.
Ce sont les Aghlabides qui ont conquis la Sicile, alors byzantine (827-900). Mais, mis à mal en Afrique du Nord, les Aghlabides perdent aussi le pouvoir sur la Sicile, et les Fatimides y installent un gouverneur. Pas de tentative concertée pour conquérir l'Italie du Sud, mais à partir du VIIIe s., fréquentes attaques sur la côte italienne, qui vont jusqu'à l'établissement d'un émirat éphémère à Bari (847-871). Vers le milieu du XIe s., le gouverneur fatimide perd le contrôle de l'île, anarchie, qui suscite des interventions étrangères : la Sicile est finalement reprise aux musulmans par Robert et Roger Guiscard, fils de Tancrède de Hauteville, afin de protéger leurs terres en Italie du Sud. Roger est reconnu comme comte Roger Ier de Sicile. La Sicile demeure normande jusqu'en 1194. Le plus grand souverain normand de Sicile est Roger II (1105-1154), qui a pour politique de respecter ses sujets musulmans : certains sont nommés à de hautes charges, dans l'armée, la marine ou l'administration.
Il ne reste presque aucun vestige de la période arabe en Sicile, malgré de nombreuses descriptions de poètes et de voyageurs : influence de l'architecture à Palerme, quelques inscriptions sur des stèles funéraires, et surtout un beau fragment de Coran rédigé à Palerme en 982-983.
Roger II fait construire des cathédrales à Palerme et à Cefalù dans un style très roman, par contre, pour ses bâtiments privés, il favorise des formes islamiques, inspirées par l'architecture maghrébine (Qal'a des Banu Hammad, 1010) et fatimide. Ainsi, paradoxalement, les meilleurs représentants de l'architecture islamique en Sicile datent de la période normande (plafond de la chapelle palatine de Palerme, par exemple, avec des muqarnas, mais aussi torre Pisana, palais de la Ziza et de la Cuba). La Sicile a aussi été un grand centre de production d'objets de luxe (textiles, ivoires) à cette période, dans un style parfaitement islamique.
En ce qui concerne l'art sous les Normands de Sicile, la catégorie "Hauteville" de Qantara est un bon indicateur (
http://www.qantara-med.org/qantara4/pub ... ?do_id=876).
Pour ce qui concerne l'architecture pré-normande en Sicile, on trouve quelques restes, notamment dans le centre de Palerme, au palais royal, dans le complexe de San Giovanni degli Eremiti (restes d'une mosquée -
http://www.discoverislamicart.org/datab ... Mon01;6;fr) et dans une chapelle (la Loggia dell' icoronazione - également une mosquée) (
http://www.discoverislamicart.org/datab ... Mon01;5;en), ainsi que dans des matériaux remployés dans des monuments normands. Il y a aussi des ruines de mosquée à Ségeste.
Un ouvrage sur ce sujet (qui reprend le site museum with no frontiers) : N. G. Leone, E. Mauro, C. Quartarone, E. Sessa,
L'art arabo-normand : La culture islamique dans la Sicile médiévale. Et si vous lisez l'italien, plus scientifique : Bellafiore, Giuseppe.
Architettura in Sicilia nell'età islamica e normanna (827-1190). Palerme/Syracuse : A. Lombardi, 1990.