Mes connaissances ne vont pas bien loin, elles se bornent à la lecture de la version française avec son très long (>120 pages) chapitre introductif qui décrit sommairement l'origine culturelle et linguistique du Kalevala et de la poésie finno-ougrienne. C'est rien, voilà pourquoi je voulais demander si quelqu'un en savait plus !
Voilà ce qu'il en ressort :
Le Kalevala en tant que tel n'est pas une oeuvre ancienne comme une saga, si on entend par là un tout cohérent; c'est la compilation réalisée dans la première moitié du XIXe siècle par Elias Lönnrot de la masse gigantesque de vers et de poèmes anciens qu'il a recueillis auprès des bardes. Mais il a assemblé des éléments qui existaient déjà, en de très nombreuses versions (il y avait de quoi écrire douze Kalevala, paraît-il...) comme des pièces de puzzle. Ce n'est pas une recréation, ni une réécriture, on peut considérer sa matière comme authentique.
Ces poèmes anciens ne nous sont évidemment pas parvenus intacts depuis l'aube de la culture finno-ougrienne, on y trouve des emprunts d'origine slave, germanique, ou chrétienne, mais il semble que la trame principale, les thèmes dominants, et la façon de les traiter, soit restée profondément originale. Ne serait-ce que dans cette forme de chant psalmodié, transmis oralement, et la persistance de la culture chamanique. Ces chants décrivent toute la vie, depuis les mythes fondateurs jusqu'à l'art et la manière de soigner une blessure, construire une barque ou brasser la bière, et le temps des chasseurs-cueilleurs y apparaît encore bien présent. C'est encore plus vrai évidemment des chants recueillis chez des peuples plus nordiques comme les Vogoules qui au XIXe pratiquaient encore fort peu l'agriculture et l'élevage.
Donc en gros : création romantique, non (dans la démarche du compilateur, sa volonté de collecter et écrire cette culture 100% orale, oui; mais pas dans les textes qu'il édite); mythes, sans aucun doute; et des mythes qu'on retrouve avec une grande uniformité dans tout l'arc finno-ougrien; syncrétisme, plutôt présence d'emprunts et qui n'altèrent pas la grande originalité de ces vers.
Une explication à la survie de cette culture serait que jusqu'à une époque très récente, la plupart de ces peuples, occupant des régions périphériques voire carrément inaccessibles de l'Eurasie du Nord-Ouest, ont eu au propre et au figuré la paix pendant l'essentiel de leur histoire. En tout cas bien davantage que la plupart des peuples européens. Cet isolement aurait contribué à la préservation de leur culture propre d'âge en âge.
Je n'en sais vraiment pas plus. Je ne vais pas me faire passer pour un spécialiste ni même un connaisseur du sujet. Tout cela sort de l'édition française du Kalevala, traduction et présentation par Gabriel Rebourcet, chez Gallimard.