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Message Publié : 01 Déc 2013 12:42 
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Georges Duby
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Catherine II a conquis le pouvoir après l'arrestation puis la mort de son mari Tsar de Russie, Pierre III, en opérant un coup d'Etat. Ce coup d'Etat a réussi grâce au concours d'officiers de la capitale dont elle s'était attaché le dévouement, en dénonçant notamment la faiblesse d'esprit et l 'admiration peu patriotique du Tsar pour Frédéric II et l'armée prussienne ainsi qu' en s'adaptant spectaculairement à son nouveau pays.
Mais comment expliquer qu'elle ait pu régner comme impératrice, étant une toute jeune princesse allemande récemment venue en Russie, alors que son titre exact aurait du être celui de Régente pendant la minorité de son fils futur tsar. Pourquoi n'y a t-il pas eu de protestation de la noblesse et de l'armée, de l'Eglise chrétienne orthodoxe, contre cette prise de pouvoir étonnante à plusieurs égards ?

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Message Publié : 01 Déc 2013 23:36 
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La Russie est habituée aux révolutions de palais, et le terme est approprié, car le pouvoir en Russie dépend de peu de gens, à savoir la garde. Celle ci a participé à tous les coups d'état qui ont jalonnés la Russie durant ce XVIIIème siècle.

Pierre III, dont la personnalité est aujourd'hui réévaluée après la propagande désastreuse que sa femme a organisé contre lui, était certes le petit fils de Pierre le Grand, mais n'a pas connu sa mère, morte quand il avait 3 mois. Élevé par son père à Kiel, en Allemagne, ce prince se sentait plus allemand que russe. Fasciné par l'Art militaire, et donc par Frédéric II, génie militaire de son époque, il l'a prit pour modèle et a voulu réformé la Russie, entreprise des plus risquée quant on n'a pas la garde dans sa poche...

Ayant sous estimé cette Garde, ayant une approche plus occidentale du monarque, obéit de ces soldats, il a voulu imposé à la Garde la discipline prussienne, ce qui n'a pas été apprécié.

Arrêté, il restait encore dangereux, l'armée qu'il avait massée pour sa future guerre contre le Danemark pouvait rapidement revenir et renverser Catherine, d'où l'assassinat.

Alors, effectivement, Paul aurait dû avoir le trône, mais Catherine voulait être Impératrice, et en aucun cas régente, et dans une Russie habituée d'être dirigée par des femmes, et après s'être assurée le soutien de la garde, elle a fait le choix de garder le pouvoir pour elle seule.

Le peuple russe n'a jamais été à l'origine des révolutions, et ne faisait que subir ce qu'il se passait à la cour.

On lui annonce que son tsar était un ivrogne, débile mental, anti orthodoxe, alors le peuple le croit, que peut il faire d'autre ?

L'armée quant à elle, constatant son chef mort, elle aurait pu tenter de destituer l'impératrice, mais celle ci ayant réussi à prendre le pouvoir, à quoi bon ? D'autant plus que cette guerre contre le Danemark était diversement appréciée.

Les nobles se sont vite rangés derrière celle qui l'avait emporté, afin d'obtenir des avantages, qu'elle ne s'est pas privée de distribuer.

Quand Catherine prend le pouvoir, cela fait 17 ans qu'elle vit en Russie, elle a 33 ans, un an de plus que l'âge qu'avait Elisabeth quand elle a conquis le trône en 1741.

C'est pour toutes ces raisons qu'elle a pu garder le trône pour elle.


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Message Publié : 02 Déc 2013 12:16 
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Georges Duby
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Merci, très intéressant, Catherine a plus de force de caractère que je le pensais et il y a cette tradition de la Révolution de palais que je n'avais pas perçu ni l'habitude au pouvoir des femmes.
Il reste un point obscur, au vu de ce qu'on peut lire, c'est quelques officiers de la garde autour de son amant Orlov, qui font le tour des casernes et réussissent à convaincre leurs collègues.
Ils ont pourtant de petits grades; que font les généraux, les chefs de l'armée et de la garde. Tout a l'air si facile et il y a si peu de résistances au coup d' Etat, qu'on a l'impression qu' il manque une partie de l'histoire. Tout s'est donc passé ainsi, un tour de casernes de quelques officiers a été suffisant ?

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Message Publié : 02 Déc 2013 12:43 
vincent.1976 a écrit :
Ayant sous estimé cette Garde, ayant une approche plus occidentale du monarque, obéit de ces soldats, il a voulu imposé à la Garde la discipline prussienne, ce qui n'a pas été apprécié.
Il a aussi imposé un retournement d'alliance subit dans la Guerre de 7 ans, alors que la Russie était victorieuse... cela ne pouvait pas le faire aimer des militaires.


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Message Publié : 02 Déc 2013 20:02 
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L'élément manquant et déterminant, qui a poussé les soldats de la garde à suivre Catherine, est que dans un premier temps Catherine a annoncé que Pierre III venait de mourir.

Arrivant devant le Régiment Préobrajensky en début de matinée, elle sollicite la garde pour qu'elle lui prête serment de fidélité comme succédant légitimement à Pierre III au trône dans l'attente de la majorité de son fils. Un Capitaine Vorontsov du régiment refusa de prêter serment et fut arrêté.

Dans le même temps, les officiers mettaient en avant le fait que Pierre III n'avait jamais aimé sa garde et préférait ses soldats du Holstein, il était donc nécessaire de reconnaître rapidement la nouvelle souveraine pour éviter que les Holsteinois ne prennent le pouvoir. Le régiment la déclara donc comme leur souveraine.

Catherine s'assura ensuite le concours du Comte de Villebois qui fut long à accepter mais finalement rejoignit le camp de Catherine.
Puis le vice amiral Tatilzin parti pour Cronstadt s'assurer de la fidélité à la nouvelle impératrice des soldats de cette forteresse. Son commandant, le Général Lievers, fidèle de Pierre III, resta incrédule à la nouvelle de la mort de l'Empereur, Tatilzin le fit arrêté.

Dans le même temps, le Colonel de Budberg, fidèle à Pierre III se mit à la tête de son régiment pour mater la révolte, mais quand il arriva sur la place du Palais d'hiver, toutes les troupes de Catherine étaient assemblées, et devant leur nombre, ne pu que constater son incapacité à résister, il fut alors arrêté

Pareil pour Georges de Holstein, cousin de l'Empereur et feldmarshall des troupes russes, qui ayant vent de la révolte se précipita à son régiment et fut aussitôt arrêté.

Pierre n'apprit qu'en cours de journée, alors qu'il était à Oranienbaum ce qu'il se passait à Petersbourg et fut profondément accablé, tenta d'envoyer des courriers aux régiments stationnés autour de Petersbourg, mais ils furent tous interceptés. Pierre, entouré de conseillers aux avis divergeants, fut incapable de décider quoi que ce soit, puis on annonça que Catherine, à la tête de 20.000 hommes se dirigeait vers Oranienbaum. La résolution fut prise, suivant les conseils de Munnich, de prendre la mer pour Cronstatd. Malheureusement, Tatilzin était déjà arrivé, et quand le bateau de Pierre arriva et qu'il demanda que l'on ouvre les portes de la forteresse à l'Empereur, on lui répondit que l'empereur était mort...

De retour à Oranienbaum, des fortifications étaient en cours pour résister à l'attaque imminente de l'armée de Catherine. Pierre, constatant que le nombre de soldats à sa disposition était faible, comparé à celui que sa femme avait rassemblé à Petersbourg, se résolut de négocier pour éviter un bain de sang...

Et c'est ainsi qu'après avoir été injurié par l'envoyé de Catherine qui lui arracha son cordon de Saint André, Pierre finit par signer son abdication, selon un texte honteux qu'on lui imposa...

Cependant, l'Empereur n'étant pas mort, tout était encore possible. Munnich refusait de jurer fidélité à Catherine, comme d'autres, une partie des soldats abusés par la soit disant mort de l'Empereur, constataient que c'était faux et regrettaient leur félonie. Un homme fidèle à l'Empereur pouvait retourner la situation. De plus l'armée stationnée en Prusse, aux ordres du Général Roumiantsev, restait fidèle à Pierre III...

La nouvelle impératrice craignit alors qu'elle puisse être renversée à son tour, et la décision fatale de tuer Pierre pour couper court à toute révolte fut prise...


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Message Publié : 02 Déc 2013 21:51 
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OK, je comprends mieux. Il y a eu une résistance mais pas au point de menacer le projet de Catherine. Celle-ci semble déjà une femme déterminée, sure d' elle et qui sait convaincre. Elle a déjà beaucoup de sens politique et mène son affaire consciente qu'il faut aller vite et arrêter tous les opposants. Elle est impressionnante dans ce coup d'Etat.

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Message Publié : 03 Déc 2013 19:57 
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La seule résistance qui aurait pu faire toute la différence, c'est celle de Pierre. S'il avait pris la tête des régiments à lui fidèles, et s'il était aller à Saint Petersbourg directement, tous ceux qui avaient été abusés par sa soit disant mort, auraient pu se retourner. C'est ce que Munnich avait proposé dès le début des événements...

Mais Pierre a tergiversé, incrédule devant l'action de sa femme. Femme qu'il aurait pu répudier lors de son arrivée sur le trône, ce n'était pas les bonnes raisons qui auraient manqués...
Pierre ne pouvait concevoir que sa femme puisse le trahir ainsi. La veille même, un homme, Pasek, avait été arrêté, membre de la conspiration il avait avoué que tout était prêt pour le coup d'état, seule la date restait à déterminer. Pierre a refusé d'y croire. Et les conspirateurs prévenus de l'arrestation de Pasek ont lancé aussitôt les opérations...


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Message Publié : 03 Déc 2013 20:18 
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J'ai entendu qu'Orlov, l'amant de Catherine, qui a été le grand acteur du coup d' Etat, était à moitié illettré. Elle se serait sentie par ailleurs en danger, en voie d'être répudiée par Pierre III et emprisonnée, ce qui expliquerait son énergie à renverser rapidement son mari.

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Message Publié : 04 Déc 2013 14:40 
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L'éventualité de la répudiation de Catherine est sujette à controverse.

En effet, la répudiation n'a été mise en avant que par Catherine elle même ainsi que par la Princesse Dashkov.

Et c'est là que se trouve tout le noeud de la postérité qui a été faite à Pierre III. En effet, comme on dit "Malheur aux vaincus", pour justifier sa prise du pouvoir, Catherine devait noircir son mari renversé. Et comme elle a vécu longtemps, elle a pu imposer sa vision des événements à tous.

D'où le fait que Pierre était un imbécile, qu'il ne s’intéressait à rien, si ce n'est à jouer avec ses soldats de plomb, qu'il était un alcoolique, et qu'il voulait répudier sa courageuse épouse, qui devait supporter en silence que son mari s'affiche publiquement avec sa maîtresse (Elisabeth Vorontsov).

Pour faire simple, Catherine était parfaite et son mari avait tous les défauts. (C'est d'ailleurs cette exagération qui m'a fait m'intéresser tout particulièrement à Pierre III).

L'affaire de la répudiation imminente fut donc la justification pour une action rapide. Justification donnée dans le manifeste de Catherine après la déposition de son mari.

Or, rien n'indique dans l'attitude de Pierre III qu'il avait l'intention de répudier Catherine, au contraire, malgré tout ce que Catherine lui avait fait (ses amants notamment, mais pas seulement), Pierre lui avait donné toutes les prérogatives que l'Impératrice qu'elle était devait avoir et l'avait pardonné, ce qui est un de ses traits de caractère. Le jour de sa déposition, qui était le jour de la Saint Pierre, il devait dîner avec elle.

La conspiration pour renverser Pierre existait depuis longtemps, avant même la mort d'Elisabeth, sa mise en oeuvre soudaine fut décidée, comme je l'ai dit plus haut, à l'arrestation d'un des membres de al conspiration et pas du tout de l'imminence de la répudiation de Catherine...

Quant à Orlov, il était petit fils d'un prussien installé vers 1680 en Russie, membre des Strelitz, et qui avait changé son nom d'Adler en Orlof, après avoir prit la religion Orthodoxe.
Grégoire Orlov et ses frères ont été éduqués à l'école des Cadets de la gardde de Saint Petersbourg, école qui mettait l'accent sur la formation militaire et rien d'autre. Débauché, il était très recherché par les femmes qui se le disputait. Et un jour Catherine, qui collectionnait les amants, voulut rencontrer ce fameux bel homme d'Orlov...


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Message Publié : 04 Déc 2013 15:07 
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vincent.1976 a écrit :
Grégoire Orlov et ses frères ont été éduqués à l'école des Cadets de la gardde de Saint Petersbourg, école qui mettait l'accent sur la formation militaire et rien d'autre. Débauché, il était très recherché par les femmes qui se le disputait. Et un jour Catherine, qui collectionnait les amants, voulut rencontrer ce fameux bel homme d'Orlov...
En avait-elle eu beaucoup avant Orlov, je croyais que non en dehors du comte mis en place par Elisabeth pour suppléer à la carence de Pierre qui fit craindre un manque d'héritier.

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Message Publié : 04 Déc 2013 21:10 
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Pour les amants de Catherine, il faut refaire l'histoire depuis le début.

Au début de son mariage avec Pierre, ce dernier ne pouvait la satisfaire en raison d'un problème physique, un phimosis, qui l’empêchait d'avoir des relations sexuelles.

Catherine commença par se consoler en flirtant avec plusieurs hommes, jusqu'à l'arrivée de Saltikoff. C'est ce dernier, qui était très ami avec Pierre tout en courtisant Catherine, qui appris les raisons de l'incapacité du Grand Duc à avoir des relations sexuelles et qui en parla à l'Impératrice Elisabeth, cette dernière décida de faire intervenir un médecin pour régler ce problème. Ce qui fut fait. Pierre put enfin s'occuper de Catherine, et celle ci tomba enceinte et pu 9 mois plus tard accoucher de Paul.

Cependant cette action de Saltykoff cachait un désir caché, celui de pouvoir devenir l'amant de Catherine, le faire avant serait démontrer à tous que la Catherine trompait son époux. Une fois Pierre en état d'accomplir son devoir conjugal, et Catherine enceinte, Saltykoff pouvait sans crainte devenir l'amant de Catherine.

Il faut savoir que Pierre a toujours considéré que Paul était bien son fils, et à aucun moment, à cette époque, n'a été mis en doute la paternité de Pierre. Quand Paul est né, c'est avec grande fierté que Pierre écrivit le jour même de la naissance de Paul à son oncle, le roi de Suède, pour lui annoncer la nouvelle parlant de Paul comme "mon fils", héritier de l'Empire mais aussi de "notre Maison Ducale". Quand on connait l'importance pour Pierre de son héritage paternel, reconnaître Paul comme héritier de son duché est un signe qui ne trompe pas. De même, en annonçant la naissance de Paul au Roi de Danemark, il ne peut s’empêcher de signaler que Paul est l'héritier du Schleswig, partie du duché de Pierre qui a été annexé par le Danemark, démontrant au Roi de Danemark que la prétention de la maison de Holstein sur le Schleswig continuera avec Paul. Ensuite, il s'est toujours intéressé à l'éducation de Paul.

Pendant sa grossesse, il semble certain que Catherine a alors passé le cap avec Saltikoff qui est devenu son amant, ce qui finit par devenir de notoriété publique. Pierre ne put le croire dans un premier temps, Saltikoff étant son ami, mais il finit par se rendre à l'évidence, sa femme enceinte le trompait avec Saltikoff.

Saltikoff fut donc envoyé à Madrid. Et l'intimité entre Pierre et Catherine disparut complètement.

Arriva alors le Comte Poniatowski à la cour, envoyé du Roi de Pologne. Il commença une cour assidue envers Catherine, qui lui tomba rapidement dans les bras...

Ils furent même découvert par Pierre qui entra sans se faire prévenir dans les appartements de Catherine. Mais la raison d'état l'emportant, le Comte Poniatowski ne fut pas renvoyé immédiatement.

Catherine fut à nouveau enceinte, et cette fois, Pierre savait qui était le vrai père (Poniatowski).

Dans son courrier pour annoncer la naissance de "sa fille" Anne, naissance qui a eu lieu le 9 décembre 1757, il n'écrit que le 11 à son oncle et annonce que la grande Duchesse a mis au monde la Grande Princesse Anne. A aucun moment il n'utilise l'expression "ma fille" et tel que c'est écrit, on voit que cet enfant est bien la fille de Catherine, mais sans plus. Evidemment, il ne pouvait dire qu'Anne n'était pas sa fille, mais en écrivant à son oncle, il se permet ses subtilités de langage qui permettent de comprendre, en lisant entre les lignes, qu'il ne reconnait pas Anne comme sa fille.

L'aventure de Catherine avec Poniatowski devient de plus en plus inconvenante. Dans le même temps, le Chancelier Bestoujef est relevé de ses fonctions par Elisabeth, et cette dernière s'aperçoit que c'était lui qui soutenait en sous main l'idylle entre Catherine et Poniatowski. Profondément choquée des relations amoureuses de la femme de son neveu, elle renvoi Poniatowski et se désintéresse de Catherine (1758/1759).

Dès lors, Catherine n'est plus en grâce à la cour, son mari, Pierre, ne s'occupe plus d'elle, et Catherine dès lors s'adonne à la luxure et multiplie les aventures.

Puis, soudain, décide de changer radicalement de comportement. Elle passe son temps en dévotions, fait tout pour faire oublier son comportement passé, et rentre en grâce. On peut dater de cette époque son désir de renverser son mari et oeuvre alors à le déconsidérer auprès d'Elisabeth. Car dans le même temps, Pierre s'est choisi lui aussi une maîtresse (Elisabeth Vorontsov) et son admiration pour Frédéric II déplaît à Elisabeth. Catherine fait tout pour pousser l'Impératrice à choisir Paul comme héritier au détriment de Pierre.

Cependant, sous ses devants assagis, Catherine continue de collectionner les amants jusqu'à l'arrivée d'Orlov.

Elisabeth garde sa confiance à son neveu et n'accorde pas la succession directe à Paul.

Depuis la mort d'Elisabeth et l'avènement de Pierre III, Catherine reste discrète. En effet, elle est à nouveau enceinte, d'Orlov cette fois, et accouche en grand secret le 22 avril 1762. Remise de ses couches, elle prépare activement sa prise de pouvoir...

Ce n'est qu'après sa prise de pouvoir que Catherine fit répandre le bruit que Paul était peut être le fils de Saltykoff. En effet, mettre en doute la légitimité de Paul, faisait qu'il n'était plus l'héritier légitime de Pierre III et n'obtiendrait la couronne que comme héritier de sa mère Catherine Impératrice. Ce qui la renforçait dans sa légitimité à tenir le trône en son nom et pas comme régente de son fils.


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Message Publié : 04 Déc 2013 21:35 
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Dans la marche de Catherine vers le pouvoir il faut mentionner sa conversion à la religion orthodoxe et sa grande piété affichée, qui lui concilie l'église russe, et il me semble qu'elle fait des efforts pour apprendre le russe. Elle cherche donc à jouer la carte de "la Sainte Russie" pour se démarquer des préférences prussiennes de son mari, qui ne sont pas très bien reçues par la noblesse russe.

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Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 06 Déc 2013 20:06 
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Certes, mais Pierre avait lui aussi été baptisé dans l'Eglise Orthodoxe. Cependant, il a fait preuve de tolérance religieuse. Ce qui serait bien vu partout est utilisé comme un point négatif à son encontre.

En effet, élevé dans la foi Luthérienne, il n'a adopté la religion orthodoxe que par raison d'état, restant lui même profondément marqué par sa religion d'origine.

Dès lors, arrivé au pouvoir, il prend un décret de tolérance envers les "vieux croyants" qui étaient persécutés (29 janvier 1762).

Il décide de la sécularisation des biens de l'Eglise, autre point qui lui est reproché. mais cette réforme était dans les cartons du Sénat depuis 1757, et Elisabeth, manquant de courage, n'osa jamais le promulguer. Pierre, arrivé au pouvoir, décide de le faire, il demande au Sénat de lui proposer un texte, qu'il refuse deux fois, indiquant ce qu'il souhaite voir modifié (ce qui répond aussi aux accusations de Catherine sur le fait que Pierre était un idiot fini qui ne s’intéressait pas aux affaires de l'Etat)...

Il voulait imposer des réformes dans l'Eglise Orthodoxe, mais en cela, il en faisait que suivre les pas de son grand père Pierre le Grand.

Celui qui fait des réformes voit toujours dans un premier temps tous les conservatismes s'insurger, puis, la réforme étant appliquée, celle ci est acceptée. Pierre n'a ps eu le temps d'en profiter. Catherine, qui dans un premier temps annonce l'annulation de toutes les décisions de son mari, revient ensuite sur cette annonce et continue les réformes....

Pour la prussophilie de Pierre. Il faut d'abord savoir que cette guerre n'était pas du tout populaire en Russie, quand Pierre a annoncé la paix, elle fut bien accueillie par le peuple, un peu moins par les militaires. Ensuite, Pierre n'était pas Prussophile, il était "Frédéricophile". Frédéric II était son modèle, il représentait tout ce que Pierre souhaiterait être. Si Frédéric avait été autrichien, il aurait été pour les autrichiens.
Dès lors, devenir l'allié de son idole était totalement logique pour Pierre. Frédéric lui même a été le premier surpris de l'attitude de Pierre. Il savait que Pierre l'admirait mais il ne pensait pas qu'il renoncerait à toutes les conquêtes russes. Cette attitude, où l'amitié primait sur la raison d'état étant tellement rare chez les souverains, que cela a beaucoup touché Frédéric II. (voir les mémoires de Frédéric II Tome II page 223).

Pour finir, Pierre connaissait l'allemand, le Français et le Russe, qui lui avait été enseigné dans sa jeunesse, avant de voir la couronne russe s'éloigner, puis à son arrivée en russie, et des notions de suédois, trône pour lequel il avait commencé à être préparé.

Quant à la noblesse russe, elle était dans sa grande majorité acquise à Pierre, après son manifeste sur l'émancipation de la noblesse.

Pierre a fait des erreurs, c'est certain. Il a voulu venger son père en s'attaquant au Danemark. Guerre possible qui n'était guère populaire, il est vrai.
Après avoir reçu l'Aigle noir (ordre prussien qui lui avait été décerné par Frédéric II), il était fier de le porter à la place de l'ordre de Saint André, ce qui n'a pas été apprécié. Il a voulu réformer l'armée sur le modèle prussien. L'indiscipline notoire des armées russes ne pouvait, lui qui était si friand d'ordre, qu'inciter Pierre a lui donner pour modèle la rigueur allemande.
Il bousculait les popes, etc...

A la lecture de tout cela, on constate aisément qu'il était bien le petit fils de Pierre le Grand... Pierre III n'a malheureusement pas pensé à affermir son trône avant de se lancer dans toutes ses réformes... Ce qui lui sera fatal...


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Message Publié : 09 Jan 2014 13:12 
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Philippe de Commines
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Alain.g a écrit :
ni l'habitude au pouvoir des femmes.

Au décès de Pierre le Grand, c'est sa seconde épouse qui devient tsarine sous le nom de Catherine Ière.
Ivan IV est propulsé, on se sait pourquoi, ceci durera quelques mois et le trône va à Elisabeth Ière, fille de Pierre le Grand.
Elle règnera plus de 20 ans. C'est elle qui fera le choix de son neveu Charles-Pierre, duc de Holstein-Gottorp pour lui succéder. Avec cette succession, la Russie n'est plus guère "Romanov" mais bon. C'est Paul Ier, fils de Catherine II qui avec la "loi pauline" en terminera de l'accession des femmes au trône de Russie.

vincent.1976 a écrit :
Pierre III, dont la personnalité est aujourd'hui réévaluée [...] Arrêté, il restait encore dangereux, l'armée qu'il avait massée sur sa future guerre contre le Danemark pouvait rapidement revenir et renverser Catherine, d'où l'assassinat.

Une nouvelle biographie de Pierre III serait-elle sortie ? Si oui je suis preneuse.
Les cadres de l'armée sont souvent d'origine allemandes. Aussi Catherine va-t-elle jouer sur "La Russie d'abord". Orlov s'imaginait sans doute jouer un rôle après la prise de pouvoir. C'est mal connaître la personnalité de Catherine. Par sa piété -feinte ou réelle-, elle a l'appui de l'église orthodoxe, ce qui n'est pas négligeable.
Sankt-Petersburg (et oui, c'était le nom de l'époque) est incontournable et là encore elle va réussir à se faire accepter.
La politique extérieure de Pierre III est mal perçue.
A son accession au trône il abonde Frédéric II en troupes qui iront sur le front autrichiens, ceci va impacter sur l'équilibre des politiques occidentales car l'Autriche se voit dans l'obligation de négocier. PIerre III planifie une guerre contre le Danemark dans la seule fin de capter le Schleswig afin d'agrandir le duché Holstein-Gottorp. Les troupes russes sont commandées par le général Roumiantsiev et massées en Poméranie. Roumantsiev n'est pas spécialement affilié à Pierre III, il a gagné son titre de comte sous Elisabeth Ière. Le conflit avorte, une négociation russo-danoise est ouverte à Berlin sous la médiation de Frédéric II dès Juillet 1762. Peu de temps après Pierre III est assassiné après un règne d'à peine 200 jours.
Il obligea la noblesse en revenant sur une loi de Pierre Ier concernant l'armée et l'obligation de service.
Avec son assassinat, on ne peut que se ranger derrière Catherine. Qui d'autre avancer ? Et puis ce style de prise de pouvoir est devenu presque commun. Catherine Ière fera de même grâce à l'un de ses amants.

vincent.1976 a écrit :
...et s'il était aller à Saint Petersbourg directement, tous ceux qui avaient été abusés par sa soit disant mort, auraient pu se retourner. C'est ce que Munnich avait proposé dès le début des événements...
Mais Pierre a tergiversé, incrédule devant l'action de sa femme. Femme qu'il aurait pu répudier lors de son arrivée sur le trône, ce n'était pas les bonnes raisons qui auraient manqués...

Sankt-Petersburg (à l'époque) aurait été en effet un bon choix mais je ne crois en rien à l'incrédulité de Pierre ou alors il était franchement limité parce-que ceci faisait longtemps que la Cour était divisée. Ce n'est pas un coup de tête, le renversement avait été préparé de longue date. A la Cour, il y avait déjà une opposition dont Catherine était à la tête. Cette opposition regroupait les personnes dont la politique pro-prussienne de Pierre excédait.
De plus, elle avait des raisons de craindre pour sa vie car son époux était tout sauf stable. La répudier ? Impossible, il aurait fallu l'aval de l'église orthodoxe. Et puis on ne répudie pas ainsi quant aux bonnes raisons, je ne vois lesquelles...
Chacun a joué sa partie, au départ Pierre III avait l'avantage mais sa confiance en lui et sa suffisance étaient telles que ceci l'empêchera d'analyser objectivement les faits et l'impasse dans laquelle il continue d'avancer.

Alain.g a écrit :
En avait-elle eu beaucoup avant Orlov, je croyais que non en dehors du comte mis en place par Elisabeth pour suppléer à la carence de Pierre qui fit craindre un manque d'héritier.

Est-ce bien important ? Son époux se montre incapable d'honorer cette union. Il faudra qu'Elisabeth Ière se mêle de l'affaire. Alors Catherine aurait eu bien tort de se gêner. Combien ? Bien moins que son époux et bien moins qu'Elisabeth Ière.
Les Orlov sont trois frères. Alexis commande les forces navales, je crois. Grigori est l'amant de Catherine.
Il faut remettre tout ceci dans le contexte d'une Cour où tous les sens partent dans tous les sens. Alors faire un tableau de Catherine aussi noir est un peu exagéré.
Elle arrive d'une petite principauté (Anhalt-Zerbst), n'a que 14 ans, connait l'allemand et le français. En une année, elle maîtrise le russe. On ne peut lui reprocher d'avoir plus intelligente et avisée que son époux. Pas encore impératrice, elle s'intéresse déjà aux écrits français. Ce fut une femme de tête, au fort tempérament et à la forte personnalité.
Maintenant, comme son époux d'ailleurs, elle ne montrera aucune affection envers son fils Paul Petrovitch. Aucun des parents ne se penchera avec sérieux sur l'éducation du grand duc, de lui trouver des précepteurs etc. Ensuite Catherine II l'écartera. Il aura sa "petite Cour", ses résidences et ne sera jamais associé à des décisions politiques. On peut donc comprendre qu'une fois empereur, il se dépêchera de mettre un terme à l'éventualité d'un retour des femmes au pouvoir avec une loi qui porte son nom.

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"... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)


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Message Publié : 09 Jan 2014 19:50 
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Grégoire de Tours
Grégoire de Tours

Inscription : 17 Juin 2013 18:20
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@vincent.1976 : "Ce n'est qu'après sa prise de pouvoir que Catherine fit répandre le bruit que Paul était peut être le fils de Saltykoff. En effet, mettre en doute la légitimité de Paul, faisait qu'il n'était plus l'héritier légitime de Pierre III et n'obtiendrait la couronne que comme héritier de sa mère Catherine Impératrice. Ce qui la renforçait dans sa légitimité à tenir le trône en son nom et pas comme régente de son fils".

Superbe interprétation. J'ai lu les mémoires de Catherine II sans comprendre pourquoi elle y a quasi avoué le fait que Paul n'était pas le fils de Pierre.

Au contact de Russes, j'ai perçu que Catherine II n'est pas populaire en Russie : choque la façon dont, même âgée, elle satisfaisait son goût pour les hommes. On répète la rumeur selon laquelle elle s'accouplait à des chevaux.


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