Jean-Marc Labat a écrit :
Pourquoi pas. Le pays était petit, les contacts continuels entre musulmans et chrétiens, alors, c'est le contraire qui eût été étonnant.
Le but premier des Assassins était avant tout de renverser l'hégémonie turque et de faire triompher leur cause religieuse.
En Perse - j'ignore si c'était le cas en Syrie -, il y avait également des revendications "nationalistes" : les Ismaéliens priaient en persan, et plus en arabe.
Dans cette optique, en tant qu'adversaires des Turcs, les Francs étaient leurs alliés objectifs : ce n'est pas la première fois qu'un parti s'allie avec l'étranger pour détruire un ennemi dont il est pourtant très proche. (Ce n'est pas non plus la dernière : l'intégrisme islamique actuel doit beaucoup à la lutte américaine contre le communisme).
A plusieurs reprises, les chefs turcs qui obtiennent quelques succès contre les Croisés tombent sous les coup des Assassins. De leur côté, les Croisés, extrêmement peu nombreux, ont besoin de tous les alliés possibles pour encadrer les foules musulmanes qu'ils commandent, théoriquement.
Les Templiers, comme les autres ordres de moines chevaliers, constituent les seules armées permanentes en Terre Sainte, et ont tendance à mener leur propre politique. Il est donc normal qu'ils aient des relations avec les Ismaéliens.
Selon un documentaire anglais, il n'est pas impossible que les échanges entre les deux aient débordés sur le domaine religieux : les Ismaéliens auraient transmis aux Templiers leur connaissance des doctrines gnostiques : un courant de pensée apparu en même temps que le christianisme, opposant le monde matériel - création d'un être mauvais - au monde spirituel - le seul valable - et exigeant la pratique d'une ascèse afin de quitter progressivement un monde pour l'autre, sous la direction de maîtres disposant d'un savoir tenu secret.
Pour ce qui est des relation avec les Mongols, il s'agit d'un tout autre sujet : les Mongols n'étant pas musulmans et comptant parmi eux des Chrétiens Nestoriens, les Croisés caressaient l'espoir de conclure une alliance avec eux pour prendre l'islam en tenaille. C'est pourquoi il y eut des relations suivies avec eux, dirigées par le pape en personne. Deux missions partirent, conduites par Jean de Plan Carpin et Guillaume de Rubrouck. Mais elles n'aboutirent pas, car le Khan refusait une alliance d'égal à égal, et exigeait une reconnaissance de sa souveraineté universelle.