Ouch, comme ça sous la main, non, désolée. J'ai lu des choses là-dessus dans des livres sur l'empire ottoman, il me semble que c'est le plus facile à étudier pour le coup. On doit avoir aussi des documents pour al-Andalus, et peut-être dans les archives de la Geniza ?
Edit. Le recouvrement de la jiziya est en fait beaucoup plus complexe que dans mon souvenir.
Pardon pour cette affirmation trop rapide.
Je vous copie-colle un extrait de l'article djiziya de l'EI² au cas où vous n'y auriez pas accès :
Citer :
Toutefois, assez vite, des difficultés apparurent. En Egypte, les moines étaient exemptés de la capitation; les Coptes, depuis le temps de Rome, spécialistes de la fuite devant l’impôt, s’avisèrent que le contribuable pourrait éviter le paiement de la capitation s’il quittait la localité où il était inscrit et, mieux encore, s’il s’établissait dans un monastère. Il fallut donc frapper à leur tour les moines de la capitation (explication bien plus vraisemblable que celle à laquelle on est acculé si l’on croit la capitation absente au début du régime musulman: puisqu’on la trouve ensuite établie sur les moines, c’est donc qu’elle aurait fait son apparition d’abord sous la forme d’un impôt sur ceux-ci). Il fallut soumettre les déplacements à des autorisations, marquer d’une empreinte indélébile les contribuables, d’où ces passeports, ces sceaux, etc., dont l’archéologie nous ; a retrouvé tant d’exemplaires irrécusables. Des phénomènes du même genre ont dû exister en beaucoup d’endroits et nous sont signalés par exemple en Haute-Mésopotamie, ainsi qu’au ʿIrāḳ.
[...]
Personnelle et fixe, la d̲j̲izya est perçue par année lunaire (en général juste avant ou juste après le début de l’année; sous les Mamhūks parfois en ramaḍān), contrairement aux impôts liés à l’agriculture; elle peut donc en être dissociée dans les concessions de ferme et d’iḳṭāʿ. Stipulée en argent, elle doit normalement être payée de même, mais on admet qu’elle le soit en nature, à un prix d’équivalence officiellement déterminé. D’après le texte ḳur’ānique, on doit donner al-d̲j̲izyaia ʿan yodininin, ce qui a été interprété ensuite, mais peut-être à tort, comme signifiant «de la main» et personnellement (sur ce point, voir F. Rosenthal, Some minor problems in the Qur’ân, dans The Jos̲h̲ua Starr Mémorial Volume, New York 1953, 68-72 et Cl. Cahen, Coran IX-20 ..., dans Arabica, IX (1962), 76-8); ce sens évoque, pour l’administration, le besoin de recenser la population non-musulmane, d’où par exemple l’interdiction à tout notable de village d’assumer le payement global de la d̲j̲izya de ses subordonnés. D’autre part, on veut faire témoigner à chaque intéressé de sa qualité de sujet de l’Islam ou plus exactement de membre d’une classe sociạlẹ inférieure; c’est ainsi, semble-t-il, qu’il faut interpréter la formule ḳur’ānique (qui suit la précédente) wa-hum ṣag̲h̲irūn (glosé parfois aḳarrū bi l-ṣag̲h̲ār), en connexion avec les exemples connus de notables ou d’Arabes refusant de payer, bien que Chrétiens, la t d̲j̲izya des ʿulūd̲j̲», plutôt que comme impliquant la nécessité d’une procédure humiliante, qu’y ont prétendu voir des rigoristes ultérieurs. Des recensements véritables ont été entrepris, semble-t-il, ¶ surtout lors de la différenciation de la d̲j̲izya et du k̲h̲arād̲j̲ (par ʿAbd al-Malik en Syrie, Yazīd II en Egypte, etc.), et, réciproquement, l’évaluation à 130 000 dinars du montant global de la d̲j̲izya en Égypte au temps de Saladin, par exemple, au taux moyen de 2 dinars, nous permet d’évaluer à 65 000 chefs de familles environ la population chrétienne de ce momeent en ce pays.
[... Pour les Ottomans]
Sanctionnée par naṣṣ et id̲j̲tihād, ainsi que l’affirment les firmans, la d̲j̲izya était pour les Ottomans un impôt religieux dont la perception et l’utilisation exigeaient un soin particulier. Elle était en général perçue directement pour le Trésor de l’État par les propres kuls [q.v.] du sultan, et l’attribution de son produit comme tīmār ou mülk était une exception; de même, elle n’était affermée que dans des cas particuliers (cf. R. Anhegger et H. Inalcik, 39). En tant qu’impôt s̲h̲arʿī revenant au bayt māl al-Muslimīn, l’administration en était placée sous le contrôle des ḳādīs, et il n’était pas rare ¶ que ces derniers en effectuassent le recouvrement (cf. Gökbilgin, 158).[...]
Quand un pays conquis devait être organisé en province ottomane, un recensement des personnes assujetties à la d̲j̲izya était effectué par le ḳādī local, et un livre nommé defter-i d̲j̲izya-i gobrān était établi (pour un exemple datant d’après la conquête, voir le defeter de Buda et Pest dans L. Fekete, Die Siyāqai-schrift in der türkischen Finanzverwaltung, Budapest 1955, I, doc. 8, 20, pp. 176-98, 350-5, II, facsimilés, table XI, XXXVI). Appelé également aṣl defter, ce livre était établi en deux exemplaires, l’un pour le Trésor central, l’autre pour l’administration provinciale; le recensement devait être renouvelé, mais, ainsi qu’il ressort du nīs̲h̲ān du 22 d̲j̲umādā II 1102/23 mars 1691, il n’en fut rien pendant de longues périodes, de sorte que par suite des morts et des naissances, des fuites et des conversions, les livres ne reflétaient pas la situation réelle. Sous le règne de Meḥemmed II, la moitié de la d̲j̲izya due par les contribuables en fuite d’un village dut être versée par le timariote et l’autre moitié, par les assujettis qui y étaient demeurés (R. Anhegger et H. İnalcik, 76); mais, avec la disparition du système des tīmārs à la fin du Xe/XVIe s., tout le poids retomba sur ces derniers. Enfin, par la réforme de 1102/1691, chaque personne assujettie à la d̲j̲izya ne fut plus responsable que de sa propre contribution, et un papier (kāg̲h̲i̊d ou waraḳ) fut délivré pour en certifier le paiement. D’autre part, les fugitifs furent poursuivis (ibid.) ou, parfois, les autorités essayèrent de les faire revenir en leur promettant une réduction du taux de la d̲j̲izya, comme ce fut le cas, en 1117/1705, dans la province de Monastir, pour repeupler les villages abandonnés.
[...]
En ce qui concerne les îles, une situation semblable, ainsi que des responsabilités spéciales de défense imposées à la population, étaient prises en considération. Les d̲h̲immīs de l’île d’Imbros étaient même exemptés totalement de d̲j̲izya (Barkan, 237). Le taux unique de 80 aḳčes en Syrie et Palestine paraît être une survivance de la dernière phase de la période mamlūke au cours de laquelle la d̲j̲izya était pour toutes les classes d’une pièce d’or plus une fraction destinée à couvrir les frais de recouvrement (cf. B. Lewis, Notes, 11). Considéré comme trop bas en comparaison des taux s̲h̲arʿīs, ce taux unique fut augmenté à l’occasion de l’avènement d’un nouveau sultan (à l’avènement de Selīm II, une augmentation de 10 aḳčs fut imposée; Barkan, 318).
Je ne peux pas tout vous mettre, pour des raisons de droit et de place, mais je vous incite vivement à lire l'article, qui est passionnant, ainsi que celui sur la Dhimma. Il y a aussi une assez bonne bibliographie.