L'article du Monde d'aujourd'hui:
Citer :
Après trente-cinq années de fouilles, le mystère semble avoir été percé. Ehoud Netzer, archéologue de l'université hébraïque de Jérusalem, est convaincu d'avoir localisé la tombe du roi Hérode. La nouvelle a été révélée mardi 8 mai, mais la découverte remonte à trois semaines. Une équipe de chercheurs a trouvé des morceaux d'un sarcophage de 2,5 m de long, en pierre ocre de Jérusalem, orné de rosettes. Il n'y avait rien à l'intérieur, mais Ehoud Netzer est persuadé qu'il s'agit de la dernière demeure d'Hérode, en raison du "caractère spécial de ce sarcophage que l'on ne voit pas ailleurs". Aucune inscription n'a été trouvée.
De plus amples vérifications seront nécessaires pour confirmer la nature de la découverte, mais il est probable qu'il s'agit bien de la sépulture de ce monarque nommé par les Romains, qui a régné sur le royaume de Judée entre 37 et 4 ans avant Jésus-Christ. Le sarcophage a été trouvé sur le site d'Hérodion, une colline se trouvant à une vingtaine de kilomètres au sud de Jérusalem - en Cisjordanie - où Hérode avait fait édifier un palais. "C'est le seul site qui porte son nom, et c'est l'endroit qu'il avait choisi pour être enterré", a expliqué le professeur Netzer.
L'historien Flavius Josèphe racontait au Ier siècle, dans La guerre des juifs, qu'Hérode "fit bâtir du côté de l'Arabie un château extrêmement fort qu'il nomma Hérodion, et donna le même nom à une colline distante de soixante stades de Jérusalem, qui n'était pas naturelle, mais qu'il fit élever en forme de mamelle, avec de la terre portée", poursuivant : "Il bâtit au-dessous des palais (...). Il y fit venir de fort loin avec une extrême dépense grande quantité de belles eaux, et l'on y montait par deux cents degrés de marbre blanc."
Les premières recherches avaient été entreprises dans la partie inférieure d'Hérodion. Elles ont permis de mettre au jour les restes de structures byzantines, mais pas la tombe royale à laquelle les chercheurs espéraient aboutir. Les fouilles ont été interrompues par la première puis par la deuxième Intifada. Finalement, après des années de vaines recherches, elles se sont déplacées sur la colline même, ce cône en forme de volcan qui subsiste toujours.
Encore une fois, les seuls écrits que l'on possède sur cette époque sont ceux de Flavius Josèphe, qui a décrit le site et les funérailles du roi, mais n'évoque jamais la tombe : "Le corps, vêtu à la royale, avec un diadème sur le front, une couronne d'or sur la tête et un sceptre dans la main droite, était porté dans une litière d'or enrichie de pierreries. Les fils du mort et ses proches parents suivaient la litière, et les gens de guerre, armés comme un jour de combat, marchaient après eux distingués par nations. Les compagnies de ses gardes thraces allemandes et gauloises allaient les premières, et tout le reste des troupes commandées par leurs chefs les suivait en très bon ordre. Cinq cents officiers, domestiques ou affranchis portaient des parfums et fermaient cette pompe funèbre et si magnifique. Ils allèrent dans cet ordre depuis Jéricho jusqu'au château d'Hérodion, où l'on enterra ce prince ainsi qu'il l'avait ordonné."
Ainsi fut enseveli celui que les juifs avaient désigné comme "une marionnette des Romains", mais qui fut aussi un grand bâtisseur. Il a considérablement agrandi le second temple de Jérusalem, fait construire le port de Césarée et les palais de Massada et de Jéricho.
Le lieu de sa sépulture fut saccagé lors de la première révolte des juifs contre les Romains, entre 66 et 72 après Jésus-Christ. Son sarcophage fut alors réduit en miettes. Ce sont ces débris qui ont été retrouvés.
Hérode fut aussi, d'après l'évangile selon Matthieu, le souverain qui ordonna le massacre des Innocents, c'est-à-dire l'assassinat de tous les enfants mâles vivant à Bethléem, de crainte d'être détrôné par un nouveau "roi des juifs". Selon les textes, Joseph et Marie fuirent en Egypte pour échapper au massacre.
Hérodion fut conquis par les Romains en 71 après Jésus-Christ, un an après la destruction du temple de Jérusalem.
Michel Bôle-Richard