Monsieur était-il un homme réellement capable pour assumer des charges de gouvernement ? ma première opinion pencherait pour l'affirmative, sans m'avancer plus avant sur le sujet, faute d'éléments, hélas !
C'était un bon capitaine, ce n'est pas rien pour un prince à cette époque, c'était une grande qualité et la France aimait les rois et les princes guerriers, meme si le frère de Louis XIV était un prince éfféminé et précieux ! Quant à des responsabilités de gouvernement, nous sommes dans le domaine de la portion congrue, car comme tu le rappelles Louis-Auguste, Philippe d'Orléans n'en fut jamais pourvu. L'analyse est difficile à faire, je dois bien l'avouer, ce n'est pas simple.
Toutefois à la reflexion, plus j'y songe plus je pense qu'il aurait été fort capable, car ne serait-ce qu'a l'armée non seulement il se comportait comme un vrai soldat, mais de plus il supervisait avec bonheur les opérations d'intendance et savait se faire aimer des soldats. Dans le contexte de la guerre, il ordonna au moins une fois d'interdire le pillage des villes conquises lors de la guerre de Hollande, c'est tout à son honneur !
Son intelligence me parait au moins égale à celle de son royal frère. Comme Louis XIV, il avait une conscience au moins égale du "métier"royal. Certes, il était peut-etre un peu trop entiché par la passion du cérémonial et de l'étiquette mais aprés tout tous les princes de ce temps l'étaient.
Son mécénat est certain : le chateau de Saint-Cloud était considéré comme un enchantement, voire une "maison de délices" et Louis XIV semble-t-il en fut un peu jaloux. Certes Saint-Cloud n'avait pas l'importance de Versailles, mais il était plus esthétique, plus italianisant, moins pompeux que Versailles, tant pour les décors exterieurs qu'intérieurs. Philippe avait un gout trés sur en matière d'Art : sa passion des bijoux le conduisit à faire d'énormes dépenses, il était prodigue, mais ses collections de joyaux étaient trés réputées. Monsieur s'adressait aux meilleurs artistes de son temps, mais il était moins académique que son frère et n'était pas réticent pour innover de nouvelles créations.
Sa deuxième femme, Elisabeth-Charlotte de Bavière fait parfois allusion dans ses Lettres, à la faiblesse de son mari vis-à-vis de ses mignons et de sa Cour. Philippe ne savait rien refuser à ses amants. Le Chevalier de Lorraine, le plus célèbre d'entre eux profite du caractère influencable du prince pour arriver à ses fins. Le chateau de Saint-Cloud fut souvent le théatre de cabales des favoris soit entre eux, soit avec les deux femmes successves de Monsieur. Philippe, donne la plupart du temps raison à ses favoris en dépit du bon sens, mais ce dernier veut avoir la paix avec ses mignons. Il est certain que la vie oisive de Monsieur (mais il n'avait pas le choix) dénatura ses belles dispositions intellectuelles et morales : aux yeux du public il ne fut plus qu'une grosse poupée assoiffée de plaisirs et un peu ridicule.
En ce qui concerne la bibliographie de notre prince, elle est pauvre. Celle de Philippe Eranger est bonne certes, mais elle est aujourd'hui ancienne et mérite d'etre revue, corrigée et refondue. Je possède cependant un ouvrage imortant consacré à sa femme sous le titre de "Madame Palatine" de Van der Cruysse aux éditions Fayard. Dans cet ouvrage, un copieux chapitre est consacré aux moeurs de Monsieur et au mouvement gay Louis-Quatorzien. On constate que le frère du roi est trés loin de faire étalage de son homosexualité à la cour...
Un livre récent vient de sortir sur Philippe sous le titre "Le Duc D'Orléans" (je ne me souviens plus ni de l'auteur ni de l'éditeur, mais il figure sur les rayonnages de libraires). Je n'y ai prété que peu d'attention car a première vue il ne comporte aucun élément nouveau sur le frère de Louis XIV, ou trés peu.
L'histoire monumentale de Monsieur, frère de Louis XIV reste à écrire...!
_________________ Dominique Poulin
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