La conquête de la Gaule fut à mon avis tout sauf une erreur.
Regardez donc la carte de l'empire romain en 60 av JC.
Qu'y voit-on ?
Une Italie qui a conquis la majorité de l'Espagne, la Provence et le Languedoc, la côte illyrienne, la Grèce et la Macédoine, la Tunisie, l'Asie mineure plus la Syrie.
Bref, il y avait là un patchwork plutôt incohérent, conquis largement au gré des événements et difficile à défendre.
Ces conquêtes avaient beaucoup enrichi l'Italie mais ne protégeaient pas l'Italie elle-même. A tel point que l'Italie a failli succomber à la fin du 2ème siècle avant notre ère, lors de l'invasion des cimbres et des teutons, ces derniers déboulant directement en Gaule cisalpine (actuelle Italie du nord) avant d'être vaincus en 101 par Marius et Catulus.
La logique de la conquête de la Gaule, c'était de protéger l'Italie des voisins qui l'avaient toujours le plus menacée : ceux du nord. La ligne de défense de l'Italie se trouvait reportée sur le Rhin.
Le grand-oeuvre d'Auguste, ce sera de ne pas se lancer dans une énième, invertaine et inutile guerre contre les parthes mais d'achever la constitution d'un glacis protecteur pour l'Italie en conqerrant les territoires alpins et balkaniques jusqu'au Danube.
Pour revenir à la conquête de la Gaule, Rome avait déjà fait une expérience douloureuse des mouvements de population qui ne se sont jamais arrêtés au pied des Alpes mais avaient déjà déboulé en Italie. C'est la seule fois où Rome a reconnu avoir été prise.
Quant au déclenchement de la conquête de la Gaule par César, il est intervenu à un moment où précisément, il y avait à nouveau un ébranlement massif de tribus.
Les helvètes entendaient bouger de la Suisse actuelle pour s'installer à l'ouest de la Gaule. Le roi suève arioviste commençait à coloniser une bonne partie du territoire des séquanes en faisant venir des tribus germaniques de l'autre rive du Rhin. Le Rhin n'a jamais été un obstacle naturel aux mouvements de population. Ce n'est pas le fait de rester en Italie qui aurait protégé Rome des mouvements de population d'Europe centrale. Surtout que les peuples migrants avaient naturellement tendance à se diriger vers des régions prospères.
Il n'en reste pas moins que d'un point de vue stratégique, la frontière Rhin-Danube était particulièrement étendue et donc coûteuse à défendre. Mais à ce compte, plutôt qu'incriminer la conquête de la Gaule, il me semble plus judicieux de pointer l'échec de la conquête de la Germanie dans sa partie s'étendant à l'est du Rhin, au nord du Danube et à l'ouest de l'Elbe. Si le limes avait pu être durablement porté sur une ligne Elbe-Danube, il aurait été beaucoup plus court et donc moins difficile et moins coûteux à défendre.
En tout état de cause, sauf à être une île, Rome et l'Italie n'auraient certainement pas échappé aux grands pouvements de population. L'Espagne, dont la frontière nord est constituée par les Pyrénées, a bien été concernée elle aussi par ces mouvements de populations armées.
Plus que la question d'une éventuelle surextension de l'empire romain, la bonne question me semble être celle de l'évolution des menaces, de la manière d'y répondre, des changements de stratégie et de tactique, et de la santé économique de l'empire.
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