Bergame a écrit :
Et bien, Huyustus, pardonnez-moi, mais
a priori, c'est vous qui confondez. C'est-à-dire que lorsqu'on parle de "tabou", on parle bien de morale, et non de droit. "A priori", càd vous avez le droit d'utiliser les mots que vous voulez avec le sens que vous voulez, bien sûr -il n'y a pas de loi contre cela, justement
- mais le "tabu",
à l'origine, c'est, en polynésie, la qualité d'une chose ou d'une personne investie d'une puissance magique, et faisant l'objet d'une "terreur sacrée". Or, si le terme "tabou" est entré dans la langage courant, c'est en tant qu'on a vu en ce phénomène l'origine de principes éthiques, qu'on a retrouvé -ou cru retrouver- de manière étonnemnent similaire dans de nombreuses civilisations et cultures passées ou présentes.
Maintenant, on peut bien entendu défendre l'existence d'un lien entre Morale et Droit. Mais
a priori, lorsque vous faites du tabou un délit, c'est vous qui réduisez la morale au droit, et c'est pourquoi j'avais cru bon de proposer de bien distinguer les deux -au moins dans un premier temps. Dans une discussion, autant essayer de s'entendre sur le sens des mots.
Mais en adoptant une perspective uniquement juridique, et en déniant toute dimension morale au tabou, je trouve que vous défendez une position assez typique, et qui est d'ailleurs peu ou prou la même que celle que défend Plus Oultre lorsqu'il dit qu'il n'y a pas de tabou en histoire.
J'avoue que je ne comprends pas très bien. Comment articulez-vous cette position avec la notion de "valeur", Plus Oultre ? Pensez-vous qu'une société, qu'une culture ne véhicule
aucun élément éthique ? Ou pensez-vous que le discours historique est hermétiquement étranger à la société dans laquelle il nait, et des valeurs qu'elle reconnait comme telles ?
Je ne fais pas du tabou un délit, bien entendu. Je dis juste que quand la loi interdit d'aborder un sujet, la loi crée un tabou ; ce qui n'empêche pas qu'il puisse y avoir des tabous non protégés par la loi : par exemple, on n'a pas le droit en France de dire qu'on n'aime pas Zidane, bien que la loi le permette tout à fait (exemple idiot j'en conviens).
Quand à votre second point, ce n'est pas parce que une société véhicule des valeurs où une éthique que certains de ses membres ne devraient pas avoir le droit de les contester, voire de les jeter bas. Sinon, on est dans le totalitarisme, à la façon du Meilleur des Mondes ou de Farenheit 451.
Sans vouloir caricaturer, on commence comme vous dites à imposer le respect de "valeurs" ou "éthiques" ; ensuite on interdit la critique, puis on finit par bruler les livres, car ils sont par essence subversifs.
Non, il ne faut pas de tabous, le tabou est malsain pour la liberté, pour le progrès et tout simplement pour la démocratie. Et surtout pas en sciences (dures ou molles), et donc pas en histoire, pour revenir au sujet du fil après cette courte digression.