Adélaïde a écrit :
J'ai entendu dire que le dernier fils d'Isabeau de Bavière, Philippe (1407-1407) était le fils de Louis d'Orléans, amant de la reine. On m'a parlé d'un enterrement de nuit pour l'enfant.
Par ailleurs, certains prétendent que Jeanne d'Arc serait la fille d'Isabeau et du duc d'Orléans.
A-t-on des informations ou site internet sur ces deux suppositions ?
Nous en parlons ici :
Jeanne d'Arc par Michel LamyMichel Lamy se donne beaucoup de mal pour défendre cette théorie, dite « bâtardisante ». Il le fait fort habilement, sans en avoir l'air : il n'affirme jamais rien, agrémente chacun de ses arguments par un «ceci, quoique troublant, serait insuffisant pour légitimer la thèse...», ce qui lui permet d'introduire un « mais... » prélude à un nouveau « fait troublant » qui vient s'ajouter au précédent... etc.
Rappelons que cette thèse « bâtardisante » repose sur une prétendue histoire de substitution d'enfants.
1°/ Diverses chroniques du tout début du XVème siècle disent que le 10 novembre 1407 Isabeau de Bavière accouche d'un garçon qui décède après avoir été baptisé du nom de Philippe. En réalité, Isabeau aurait accouché d'une fille, à laquelle on aurait substitué un garçon mort-né ou qu'on aurait aidé à mourir.
Que cela ne colle pas avec la date de naissance de Jeanne d'Arc (1412) n'est pas un problème pour M. Lamy : c'est qu'on s'est trompé sur la date de naissance, ou on l'a peut-être même falsifiée.
Et M. Lamy nous explique que le remplacement d'un enfant par un autre n'a pas de quoi nous étonner ; que cette pratique n'était pas si exceptionnelle qu'on pourrait le penser (il nous renvoie... aux « Rois Maudits » de Maurice Druon. Sic !!!) ; qu'il n'y a aucune mention de messe d'enterrement ; que certaines feuilles d'un certain registre ont été arrachées, et d'autres «faits troublants» comme un tombeau vide (celui de l'enfant Philippe).
Mon avis est que tout cela fait de bons ingrédients pour un excellent roman ; Shakespeare lui-même l'a très bien vu : il s'est servi de la thèse bâtardisante pour pimenter sa pièce de théâtre "Henry V", où il fait dire à Jeanne d'Arc elle-même qu'elle est princesse de sang royal...
2°/ le père de la petite fille qui vient de naître ne pouvait être Charles VI le roi fou. Le vrai père, c'était l'amant d'Isabeau, le duc Louis d'Orléans. Et cela expliquerait pourquoi Jeanne était appelée « la Pucelle d'Orléans» : rien à voir avec la libération de la ville d'Orléans ; on appelait Jeanne «d'Orléans » parce qu'elle était fille du duc d'Orléans.
3°/ suite du « roman » de M. Lamy : il fallait vite mettre l'enfant adultérain à l'abri, car Charles VI faisait des colères terribles pendant ses phases de lucidité, lorsqu'il découvrait les écarts de conduite de la reine. Et justement, le roi était précisément en période de rémission. M. Lamy nous démontre que la petite Jeanne a été mise en sûreté entre le 10 et le 23 novembre. La preuve ? le 23 Isabeau soupa joyeusement avec Louis d'Orléans alors qu'elle avait été triste jusque là.
Et pour finir, M. Lamy nous gratifie d'un beau conte de Noël : l'équipée réunit sans doute quelques hommes d'armes assez discrets et une nourrice ; il fait très froid (66 jours de gel cet hiver-là), il y a des loups dans les bois et des brigands sur les chemins ; on arrive à Domrémy le 6 janvier 1408 au petit matin ; les coqs chantent ; l'escorte dépose l'enfant et repart aussitôt ; les gens de Domrémy se demandent ce qui se passe : un bébé ? Mais on ne savait pas qu'Isabelle Romée était enceinte !...
Mais comme M. Lamy n'est pas homme à croire au Père Noël, il conclut le chapitre II ainsi : «
Scénario de fiction ? Peut-être ! Sans doute, si les seuls éléments étaient ceux dont nous avons fait état jusqu'à maintenant. Mais nous verrons au fil de l'histoire de Jeanne que cette thèse a parfois de quoi séduire».
Bref, M. Lamy raconte tout et son contraire.