Une thèse toute récente et consultable en ligne, présentée en octobre 2007 par Emilie Freyssinet,
L’organisation du territoire entre Meuse et Rhin à l’époque romaine fait le point sur la question aux pages 55-57.
Après un rapide bilan historiographique de la question, l’auteur commente rapidement les rares données disponibles, à savoir :
- La mention double de Ptolémée signalée par Plantin. Mais dans sa descriptions de la Belgique, il mentionne plusieurs fois de multiples agglomérations par peuple (3 chez les Rauraques, deux chez les Ubiens, quatre chez les Séquanes, etc.). Ptolémée ne répertorierait donc que les principaux sites urbains sans présager de leur statut. Bref, inutilisable pour notre sujet.
- La
Table de Peutinger, où seule Nasium bénéficie d’une vignette. Mais là aussi, Mme Freyssinet montre un certains nombres d’incohérences (par exemple, c’est Argentorate qui est mise en valeur, et non Brumath-Brocomagus, la capitale). Bref, rien de concluant.
- La date de fondation de Toul. En gros, mystère, mais « une datation précoce pour l'établissement de Toul comme capitale de cité n’est pas à exclure, même si la situation de la ville a pu être précaire, dès ses débuts, en comparaison de celle de Nasium ». Bref, on est pas plus avancé.
- Enfin et surtout, une inscription datée aux alentours de 42 ap. :
Tul(l)o Loucoru(m) / Albano medico, « De Toul des Leuques, à Albanus, médecin ». Notre docteur en tire deux enseignements : primo, la ville romaine existe déjà en tant que tel dans la première moitié du Ier ap ; secondo, la formulation est celle employée pour les capitales de cités en Gaule Belgique.
Ce qui permets de faire pencher la balance en faveur de Toul, dès le Ier siècle. Etait-ce le cas dès la conquête ? A priori, rien ne permet de l’affirmer en l’état actuel de la recherche (d’ailleurs, même après, il est délicat d’être catégorique…).
Bon, ben, maintenant que je l’ai feuilletée et consultée, il ne me reste plus qu’à la lire intégralement cette thèse… Quant à la « capitale » (au sens de centre de décision politique, et non simple ville/marché principale) avant la conquête, je ne suis pas convaincu pour ma part qu’il soit pertinent de s’y attarder vu qu’on ne sait absolument rien avant César (et pas grand chose après) :
- il faudrait connaître le système politique des Leuques (en gros, existe-t-il un dynaste (peu probable), une assemblée permanente ou un siège d’une assemblée populaire régulière, qui lierait un pouvoir politique à un lieu précis fixe, par exemple) ; d’autre organisation peuvent très bien exister (je précise que je suis globalement ignorant des institutions gauloises, à plus forte raison encore du Ier siècle av. en Belgique)
- il faudrait supposer que les institutions sont concentrées en un seul site (là aussi, c’est possible mais pas obligatoire)
- il faudrait supposer que ce site en question est urbain (par exemple, un sanctuaire isolé peut très bien faire l’affaire et évite de froisser les susceptibilités ; je pense par exemple dans un autre contexte à la fameuse forêt des Carnutes).
- enfin il faudrait supposer une continuité et une permanence des institutions mais aussi de la situation politique, très douteuse (je songe en particulier aux invasions cimbres qui ont dû largement redessiner la carte politique de la région une petite cinquantaine d'années avant César)