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Je ne peux résister à l'envie de renvoyer à l'exceptionnelle interview que Michel Pastoureau avait donnée à L'Express tout au long de l'été 2004. J'en avais lu quelques morceaux à l'époque mais jamais la totalité, et c'est avec joie que je viens d'en découvrir l’intégralité sur le site internet du journal:
http://livres.lexpress.fr/dossiers.asp?idC=8701&idR=5 (et pages suivantes...)
Tout y est évidemment intéressant mais voici quelques extraits saillants:
A propos du bleu, Michel Pastoureau nous dit que ce qui est devenu la couleur préférée des Occidentaux était très mal vu durant l'antiquité. Avoir les yeux bleus pour une femme, était un signe de mauvaise vie et pour les hommes, une marque de ridicule! C'est la Vierge qui, au XIIe siècle, devient le principal agent de promotion du bleu. Dans la foulée, Philippe Auguste et Saint-Louis adoptent la couleur qui se répand alors comme une traînée de poudre... La demande de guède, plante que l'on utilisait comme colorant bleu, explose et fait la fortune de certaines régions. C'est un véritable or bleu. On la cultive pour produire des boules appelées «coques», d'où le nom de pays de cocagne! Il fait également une intéressante remarque sur le
jean, pantalon soi-disant rebelle, en réalité on ne peut plus conformiste, car le bleu ne peut pas être rebelle.
Au contraire du bleu, le rouge était bien vu dans l'antiquité. La première raison est que le système de couleurs se résumait en réalité à trois tons: le blanc, qui représentait l'incolore, le noir qui était synonyme de saleté, et le rouge, qui représentait donc la couleur dans toute sa splendeur. Deux cause: très vite, l'homme a su manier les pigments de rouges. Très tôt, le rouge devient ambivalent: représentant le sang ou le feu, l'amour ou l'enfer, le sang du Christ ou le diable...
A partir du XVIème siècle, le rouge qui était l'attribut masculin passe au féminin tandis que le bleu suit le chemin inverse!
Lorsqu'il parle du blanc, Pastoureau aborde le teint de la peau. Nous savons que pendant des siècles, les élites ont voulu se distinguer des paysans qui avaient la peau hâlée en exagérant la blancheur de leur teint (c'est encore le cas dans nombre de pays d'Asie). Ce qui est intéressant, c'est qu'à partir du XIXème siècle, il convient, cette fois, de se distinguer des ouvriers, qui ont la peau blanche puisqu'ils travaillent à l'intérieur: pour l'élite, c'est donc le temps des bains de mer et du "bronzage".
Couleur difficile à stabiliser, le vert a une symbolique de changement, d'instabilité, et est donc naturellement devenue la couleur du hasard, du jeu, de l'ambiguïté, de la chance... Casino, tapis de poker, terrains de sport (et pas seulement les pelouses).
La réception du jaune est curieuse. Très apprécié dans diverses parties du monde (Asie, Amérique du Sud...), il n'est généralement pas aimé en Occident, où il représente la fourberie, la tromperie, l'ostracisme... sans que l'on s'explique d'ailleurs bien pourquoi.