Geopolis a écrit :
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Elle assassine plusieurs de ses frères et soeurs, bien moins âgés qu'elle, de crainte qu'ils ne la renversent sur le trône, ce qui atteste déjà d'une forme de pensée à la fois mégalomane et paranoïaque.
Faut dire que c'était presqu'une "tradition" chez les Lagides. Quant à l'ultime rejeton d'une dynastie qui pratiquait couramment l'inceste, pas très étonnant qu'elle manifestait certains traits (comme ses prédécesseurs) trahissant une forme certaine de dégénérescence.
Ceci étant dit, elle était aussi douée de réelles capacités intellectuelles, tout particulièrement pour les langues étrangères et montra beaucoup de goût pour les sciences. Dion Cassius la présente comme une femme extrêmement belle, ce qu’infirme ses portraits figurant sur les pièces de monnaie. Plutarque parle de sa grâce (
charis) et vante surtout ses qualités intellectuelles : «
sa beauté en elle-même n’était pas, dit-on, incomparable ni propre à émerveiller ceux qui la voyaient, mais son commerce avait un attrait irrésistible, et l’aspect de sa personne, joint à sa conversation séduisante et à la grâce naturelle répandue dans ses paroles, portait en soi une sorte d’aiguillon. Quand elle parlait, le son même de sa voix donnait du plaisir. Sa langue était comme un instrument à plusieurs cordes, qu’elle pliait sans peine au langage qu’elle voulait, en sorte qu’il était peu de barbares avec qui elle parlât par le truchement d’un interprète » Bref elle fascine.
Par rapport à ses prédécesseurs, elle mit sa puissance de séduction au service du relèvement de la monarchie lagide et réussit à lui donner assez de force pour inquiéter sérieusement Rome. Indirectement, c'est aussi ce qui fait qu'elle est devenue une figure de l'Histoire. Son héritage c'est d'avoir défié Rome ( à rapprocher de d'autres personnages comme Bouddica, Vercingétorix, Mithridate, Jugurtha, Zénobie...et bien sûr Hannibal). Côté propagande romaine, il y a tout intérêt à brosser un portrait de l'adversaire vaincu vantant à la fois le danger réel ou supposé qu'il représentait (a contrario, son vainqueur s'en voit auréolé d'un mérite aussi grand) et les traits de caractère qui le rendait abject, inférieur, vil... (tout ce qui justifiera a postériori sa ruine). Auguste "fait" Cléopâtre, comme Antoine fait Auguste (qui se souvient de Lépide ?) et réciproquement. On pourrait trouver de nombreuses autres analogies dans l'Histoire.
Depuis un célèbre
Vae victis en passant par Napoléon , "
l'Histoire est écrite par les vainqueurs", ou encore plus près de nous Churchill,"
l'Histoire me sera favorable, car j'ai l'intention de l'écrire", il est clair que pour pleinement apprécier un personnage comme Cléopâtre il nous manque un deuxième son de cloche, non romain.