La filiation entre l'Islam et les autres traditions religieuses présentes en Arabie et dans son voisinage est un fait incontestable. Le Coran le rappelle dans plusieurs versets quand il parle du "Dieu d'Israel", du "Dieu d'Abraham", des "Gens du Livre", ou quand il place le Prophète Muhammad dans la continuation des autres prophètes bibliques.
Cependant vouloir faire ramener les origines de l'Islam à une seule tradition religieuse et à une secte chrétienne en particulier me paraît être sans fondements historiques solides. Cette théorie repose sur plusieurs points :
1 - L'existence dans l'entourage du Prophète d'une ou plusieurs personnes relevant de telle ou telle secte. Les traditions, le Coran et les données historiques confirment en effet l'existence de chrétiens et de juifs à la Mecque et à Médine du temps du Prophète mais aussi de païens, de zoroastriens, de manichéens ... Par ailleurs, aucune donnée historique ne nous permet d'identifier ces juifs ou ces chrétiens à une secte en particulier. Des arguments comme celui-ci
Alain.g a écrit :
Mark A. Gabriel précise que le jeune Mahomet a été influencé par sa première femme qui était chrétienne ébonite et par son cousin Waraqa qui est devenu son guide spirituel et lui a enseigné une forme du christianisme. Un hadith mentionne que Waraqa écrivait "des portions des évangiles en arabe";
ne sont au mieux que des intuitions fondées sur des raccourcis et des généralisations. Malheureusement des arguments comme ceci sont légions dans la littérature et chaque nouvelle avancée autour des débuts de l'Islam relance de nouvelles hypothèses de cet acabit.
2 - Jésus dans le Coran. La personnalité de jésus n'est pas plus importante dans le Coran que celle de Moïse ou d'Abraham. Certes la naissance miraculeuse de Jésus est admise mais la geste fondatrice de la mythologie islamique reste la vie d'Abraham avec la construction de la Kaaba, l'institution du pèlerinage, le sacrifice de son fils Ismael qui est considéré comme l'ancêtre des arabes.
3 - La reprise dans le Coran de parties de la Bible et en particulier de l'Ancien Testament et parfois (selon certains auteurs) d'évangiles apocryphes. Pour que cette argument puisse nous guider vers telle ou telle secte il faudrait d'abord établir la filière exacte de transmission or cette question reste aujourd'hui ouverte à cause de sa complexité et des difficultés inhérentes à la rareté des documents historiques, à la problématique de fixation du corpus coranique, à la nature de la graphie arabe et son évolution ...
En conclusion, j'aimerais rappeler un fait capital (mais souvent occulté) : Les arabes ne sont pas entrés dans l'histoire du proche-orient à l'arrivée de l'Islam.
On les trouve déjà cités dans les chroniques des rois assyriens dés le VIII siècle avant l’ère commune. Les royaumes d'Arabie des Sud (Saba', Minéens, Himyar ...) vers le début du Ier millénaire avant l’ère chrétienne ont créé une civilisation de haute-culture. Les tribus arabes en s'infiltrant dans le croissant fertile, créèrent les civilisations nabatéennes et palmyriennes... Ceci pour dire que les arabes à l'instar des autres peuples de la région furent en contact et donc influencés par toute les civilisations de la région (babylonienne, assyrienne, égyptienne, perse, hellénistique, juive, romaine, chrétienne ...), sans toutefois oublier leur propre culture (langues arabiques, panthéons et divinités locales et pan-arabes, littérature ...). Au vu de tout ceci, vouloir faire de l'Islam le simple scion d'une obscure secte chrétienne n'est, à mon avis, pas tenable scientifiquement.