ALMAYRAC a écrit :
. Il est vrai que le vieux futhark est tiré du latin.
Bonjour Almeyrac, je corrige : le futhark n'est pas dérivé de l'alphabet latin, ni de l'alphabet grec. Il vient de l'alphabet étrusque, plus précisément nord étrusque, vraisemblablement par l'intermédiaire de l'alphabet lépontique de la région des lacs de l'Italie du nord utilisé pour noter une langue celtique.
Jean-Marc Labat a écrit :
Les Irlandais n'ont jamais parlé le latin, sauf peut être quelques commerçants en relation avec la Bretagne romaine. Les élites ont parlé le latin après la conversion au christianisme.
Pour le reste, là où le "germain" était majoritaire, il a imposé sa langue, minoritaire, il l'a perdue.
La remarque de Jean-Marc est marquée du sceau du bon sens à mon avis. J'ajouterais même pour affiner le propos que l'émergence précoce de la langue d'oil dans les textes (voir les Serments de Strasbourg), doit être, ce sont certains linguistes qui le disent, le resultat d'un fossé qui s'est créé entre le latin véhiculaire utilisé dans l'empire et le gallo-roman septentrional. Langue dont l'émergence ne semble pas avoir intéressé Charlemagne de langue maternelle germanique et dont le modèle était évidemment le latin classique. En tout cas, il est sûr que la précocité française (la langue d'oil) ne doit quasiment rien au gaulois, mais bien au germanique. Or, cette influence ne peut être liée qu'à un bilinguisme de fait, du moins dans certains endroits. Ainsi les Germains introduisent deux nouveaux phonèmes qui avaient disparu du latin, à savoir /w/ et /h/, ce qui n'est arrivé dans aucune autre langue romane, y compris l'occitan. Des mots d'étymologie latine se sont trouvés "germanisés" "z'est ze k'on appellerait un akzent" comme dans
WULPICULA > woupil, goupil, pour bas latin
vulpicula < latin
vulpus > italien
volpe, etc. idem pour
HALTU > haut, pour bas latin
altu > italien
alto, etc. On note qu'il existe encore certains dialectes du nord de la France où les personnes agées prononcent encore le [h]. J'ajoute aussi que [w] se maintient en picard par exemple (parfois il est passé à [v] plus tardivement), là où l'influence germanique a été moindre (ouest, centre), il est passe à [gw], puis [g]. Autre exemple parmi d'autres le latin
puteus a donné l'occitan
potz, espagnol
pozo, italien
pozzo. De manière régulière on aurait dû avoir
*poiz en français, mais on a l'ancien français
puiz (puits avec un t pour faire latin). La plupart des spécialistes ont recours au vieux bas francique
*putti, attesté en bas allemand, pour expliquer cette évolution non romane. Même chose pour le problème de l'accent tonique de mot, qui est un accent mélodique en latin, et par là dans la plupart des langues romanes, avec comme exception notable le français. Certains linguistes expliquent que l'accent germanique, un accent d'intensité qui frappe la syllabe accentuée, a engendré la chute des syllabes non accentuées, c'est ce qu'on observe en germanique, mais c'est aussi ce qu'on observe en français d'où par exemple latin
'catena > chaine (italien
catena, espagnol
cadena) ; latin
'tegula > tuile (italien
tegola). Ca serait trop long à expliquer dans les détails et je passe sur les très nombreux mots d'origine germanique qui n'ont pas été empruntés par les autres langues romanes, dont de nombreux doublons germanique/latin, par exemple
sen / sens, distincts en ancien français, le premier issu du germanique
*sinnu, que l'on retrouve dans forcené (jadis
forsené, préfixe
for-), assener. Ces différents faits linguistiques ne peuvent s'expliquer que par la présence de groupes non latinophones, puisqu'à l'époque il n'y a pas la télé pour provoquer des modes linguistiques.
Je ne comprends les propos de M. Dumézil que d'après les commentaires qu'en font tous les autres intervenants du forum, car je n'ai, hélas, plus de son ! Cela dit, que les Francs aient été en partie romanisés n'est pas étonnant ni nouveau, mais ils étaient bien présents dans certaines régions à mon avis. Je ne comprends pas, si j'en juge les commentaires cette phrase <<se mettent à se réinventer comme barbares, y compris dans les prénoms des enfants, mais en fait poursuivent la latinité et forgent une mixité ?? >> Les Germains conservent certaines de leurs traditions, comme celles des prénoms germaniques, qui ,pour beaucoup, vont être adoptés par les autochtones, car ce sont les prénoms des dirigeants, ce qui explique qu'outre Martin (inexpliqué car il a rarement été donné comme prénom), ce sont Bernard et Gérard les deux patronymes les plus fréquents en France encore aujourd'hui. J'ajoute que certains noms germaniques contenus dans les toponymes ou dans les textes sont beaucoup trop rares pour ne pas être issus directement de la tradition germanique (ils ne ne sont même pas devenus des noms de baptème). La toponymie de la Gaule du nord recèle peut-être un reliquat de l'ancien système anthroponymique germanique, alors qu'avec la romanisation et la christianisation, il tendait à se conformer au modèle chrétien du nom de baptème. A savoir l'habitude de léguer au descendant, notamment mâle, une partie du nom composé de deux éléments, (voir la généalogie d'Arminius par exemple, pour l'élément
seg- /
sig-), ainsi note-t-on au sud de la Seine, alors que beaucoup d'historiens jugent que l'influence francique y a été moindre qu'au nord, dans le département de l'Eure : ainsi note-t-on les toponymes Heudebouville, Fontaine-Heudebourg, Heudreville, tous basés sur des anthroponymes, à savoir
Hildebold > Heudebout,
Hildeburgis > Heudebourg,
Hildhar > Heudier qui contiennent tous l'élément
hild. Or cette tradition qui allait bientôt disparaître n'a pu se perpétuer qu'au sein d'authentiques Germains ou de populations germanisées de longue date. Les prénoms cités ci-dessus devenus noms de famille vers le XIIe se perpétuent de nos jours dans la même région, jusque récemment, et pas ailleurs.
Un des intervenants évoquait le scramasaxe, on pourrait aussi ajouter l'angon.