Je reviens sur ce fil parce que l'association entre racialisme et protestantisme me parait largement coincidentale, dérivant du même type de raisonnement qui associerait l'usage de boire de la bière au protestantisme sous prétexte que c'est en effet surtout dans les pays protestants qu'on boit de la bière
.
Je ne peux pas analyser le cas de l'apartheid sud-africain, connaissant mal l'histoire de cette région.
Pour ce qui est de la ségrégation institutionnalisée dans le Sud des EU, il faut rappeler cette évidence: elle a été mise en place APRES l'abolition de l'esclavage, abolition qui instituait (en théorie) les noirs de sexe masculin comme citoyens de plein droit--y compris les droits politiques.
Auparavant, comme le statut d'esclave précisé dans les Codes noirs des différents états du Sud constituait légalement l'esclave en objet et propriété de son maître, le fossé entre blancs citoyens et noirs esclaves était évident, immense, et infranchissable: il y avait entre eux une différence de nature, radicale, ils n'appartenaient pas à la même espèce: le blanc était un humain et sujet de droit et le noir un être mi-humain, mi-animal dont le statut légal s'apparentait à celui du bétail.
D'ailleurs, cette distance infranchissable était tellement évidente que, sans que les noirs et les blancs se fréquentent sur un pied d'égalité, ils vivaient non séparés, côte à côte dans les plantations et dans les demeures des blancs--séparés en fait par une barrière invisible.
En faisant des noirs des citoyens américains en principe égaux en droit aux blancs, l'abolition de l'esclavage abolit ce fossé "naturel" infranchissable entre blancs et noirs.
Elle fait des noirs mâles des êtres humains et des citoyens au même titre que les blancs et instaure une"confusion des races" égalitariste que les blancs du Sud ne sont pas disposés à accepter.
Ils réagissent donc en développant une réponse matérielle et légale pour éviter cette confusion égalitaire: le système "separate but equals"--qui affirme une fausse égalité pour justifier la ségrégation.
Autrement dit, ce système de ségrégation légale n'est nécessaire que parce que l'on est dans une démocratie qui ne fait (en principe) aucune différence entre les citoyens mâles selon la couleur de leur peau.
Dans un système politique de type autoritaire où existe un système de castes dans lequel les membres d'un groupe ethno-culturel particulier sont posés comme inférieurs tant légalement que par des prescriptions socio-culturelles, il n'est nul besoin d'instaurer une ségrégation légale, puisque le fossé entre castes est donné comme infranchissable.
Loin de correspondre à un système politique raciste à l'apogée de son pouvoir, la ségrégation instutionnalisée correspond au contraire à
la réaction de défense d'un système politique raciste sur son déclin car miné par un processus de modernisation démocratique: en Inde, le système des castes était encore si prégnant au XIXème siècle que l'instauration d'un système de ségrégation institutionnalisée aurait été inutile.
Là où on peut trouver une miette de sens dans l'intitulé du fil, c'est que les distinctions de classe/caste ont été généralement nettement plus marquées et durables dans les pays catholiques que dans les pays protestants, les pays catholiques étant restés attachés à des systèmes politiques autoritaires plus longtemps que les pays protestants.
Et bien sûr, j'y reviens, le métissage n'est absolument pas signe de non-racisme, parfois au contraire--voir l'innombrable population de "bâtards" nés des relations sexuelles entre esclaves et blancs racistes du Sud.