Alain.g a écrit :
Harrachi78 a écrit :
[Ce qu'il faut savoir, c'est que l'arabe littéraire ou classique est le fruit d'un effort de standardisation bien défini dans le temps (les deux premiers siècles de l'Islam), et qu'il eut pour référent la forme de la langue arabe (du moins sa forme commune) tel qu'elle apparait dans le texte coranique et la tradition du Prophète. C'est en quelque sorte une photo figée de la langue arabe telle que pratiquée en Arabie centrale aux derniers siècles avant l'Islam et aux premiers qui suivent son avènement.
Sur une radio dans une émission consacrée aux langues, un linguiste disait que l'arabe littéraire était une construction récente et qu'il en était ainsi de nombreuses langues possédant une langue courante et une langue ancienne dite d'origine et en réalité reconstituée récemment. Il n'y a pas eu conservation par de là les siècles mais reconstitution. Idem pour les langues régionales abandonnées puis refabriquées à la manière du 20è siècle
Là, je pense que c'est un peu excessif.
En fait, l'arabe classique n'a jamais cessé d'être en usage à l'écrit et dans les cercles savants du monde musulman, de bout en bout car ca demeurait la seule langue de travail pour les juristes. Sous cette forme, il n'y eut pratiquement pas de variation dans la forme et aucune rupture à aucun moment. Ce qu'il y a, c'est que le persan puis le turc sont venus supplanter l'arabe dans certains domaines officiel, alors que le déclin des sciences dans le monde musulman va exclure l'arabe de ce champs. Donc, disons à partir du 15e s. au plus tard, l'arabe classique a carrément cessé d'évoluer en se limitant presque au seul champ juridique et litteraire (bien que d'une liiterature appauvrie) sera de moins en moins capable de servir à autre chose.
C'est de cet arabe là que, à partir de la fin du 19e s., vont intervenir les auteurs (surtout syro-libanais dans un premier temps) de l'époque de la
Nahdha ("Renaissance"), surtout pour le vocabulaire où ils vont puiser dans le riche repertoire de racines (
masdar, pl.
masâdir) arabes anciennes pour recouvrir des nouveaux conceptes. Ainsi, par exemple le simple verbe
yatîr ("voler") donnera-t-il
tâ'ira ("aéronef") et
matâr ("aérodrome"), ou encore de
yasîr ("marcher [sur la route]") on aura une
sayyâra ("automobile"). Là, c'est la structure même des mots arabes qui a donné cette facilité. Pour les cas où aucune racine arabe n'était transposable de manière satisfaisante, les mots étrangers furent simplement arabisés et intégrés dans le vocabulaire ordinaire :
tilfâz ("télévision"),
tilifoun ("téléphone"),
bank ("banque") ... etc.
Par-contre, la structure de la langue elle ne fut pratiquement pas affectée, si ce n'est par la simplification de certaines règles devenues lourdes ou obsolètes. C'est ainsi qu'est (re)né l'arabe classique sous sa forme moderne, celui-là même qui est en usage de nos jours dans la presse (écrite ou audio-visuelle) ou dans les écoles, et c'est aussi pour cela que tous ceux qui maitrisent cet arabe moderne ne trouvent aucune difficulté à comprendre un texte arabe du 7e s., si ce n'est pour certains mots dont l'usage n'est plus d'actualité. Il ne s'agit pas de la reconstruction totale d'une langue disparue ou dont l'usage fut totalement interrompu, mais bien d'une "revitalisation" ou d'une "réanimation" (ar.
ba3th,
ihyâ') d'une langue arabe classique certes sclérosée mais toujours pratiquée et parfaitement comprise par le commun.