Il est utile ici de s’attarder un peu sur ces fameux usages guerriers susceptibles d’être appliqués aux villes ou forteresses prises d’assaut. On peut à ce sujet se souvenir des mots de Carnot-Feuleins, tenus le 25 juillet 1792, dans le cadre des débats relatifs au décret ordonnant la condamnation à mort de tout commandant de place capitulant avant qu’il y ait brèche accessible et praticable : « Toutes les fois qu'une place est prise d'assaut, il est du droit de la guerre (et malheureusement on n'use que trop souvent de ce droit) de passer au fil de l'épée non seulement la garnison, mais même tous les habitants. C'est ainsi qu'on a agi au siège de Berg-op-Zoom ; c'est ainsi qu'on a agi à Okzacow. »
Cette réprobation se retrouva cinq ans plus tard et deux ans avant Jaffa dans la correspondance même de Bonaparte : « Le général Guieu poussa la colonne qu‘il avait battue à Pulfero jusqu'à la Chiusa autrichienne , poste extrêmement retranché, mais qui fut enlevé de vive force, après un combat très opiniâtre […] Le général Kœblœs défendait lui-même la Chiusa avec 500 grenadiers. Par le droit de la guerre, les 500 hommes devaient être passés au fil de l'épée; mais ce droit barbare a toujours été méconnu et jamais pratiqué par l'armée française. » (Bonaparte au Directoire exécutif, 25 mars 1797)
Sur le théâtre d’opération oriental, ce « droit barbare », pour reprendre l’expression du général en chef de l’armée d’Italie, restait néanmoins applicable. Ainsi, le 7 mars, quelque temps avant l’attaque de Jaffa, quand fut lancée la sommation au commandant de la place, Abd-Allah-Aga, Berthier ne cacha en rien ce qu’il adviendrait de la malheureuse cité en cas d’assaut victorieux : « Le général en chef Bonaparte me charge de vous faire connaître […] que la place de Jaffa est cernée de tous côtés; que les batteries de plein fouet, à bombes et de brèche, vont, dans deux heures, culbuter la muraille et en ruiner les défenses; Que son cœur est touché des maux qu'encourrait la ville entière en se laissant prendre d'assaut »
Sommation qui n’est pas sans rappeler celle lancée le 20 février précédent au commandant du fort d’El Arich : « Le général en chef me charge de vous faire connaître que la brèche commence à être praticable; que les lois de la guerre, chez tous les peuples, sont que la garnison d'une ville prise d'assaut doit être passée au fil de l'épée; que votre conduite, dans cette circonstance, n'est qu'une folie de laquelle il a pitié »
A noter que six ans plus tard, ces mêmes lois officiellement appliquées à Jaffa furent à nouveau rappelées dans le 6e Bulletin de la Grande Armée du 18 octobre 1805 : « L'Empereur, lorsque l'armée occupait les hauteurs qui dominent Ulm, fit appeler le prince de Liechtenstein, général major, enfermé dans cette place, pour lui faire connaître qu'il désirait qu'elle capitulât, lui disant que, s'il la prenait d'assaut, il serait obligé de faire ce qu'il avait fait à Jaffa, où la garnison fut passée au fil de l'épée; que c'était le triste droit de la guerre; qu'il voulait qu'on lui épargnât, et à la brave nation autrichienne, la nécessité d'un acte aussi effrayant »
Jaffa, tel que présenté dans le Moniteur ou dans les ouvrages parus en 1800 et 1801 (puis dans ceux ayant abondé dans le même sens dans le cours du Consulat et de l’Empire), s’inscrivait donc dans le cadre des lois de la guerre et dans la longue suite des carnages ayant fait suite à l’assaut d’une cité assiégée.
Ne pas faire de quartier vis-à-vis de la garnison d’une place prise d’assaut et la passer par les armes dans le feu de l’action était une chose ; s’en prendre à des prisonniers de guerre en était cependant une autre, par le fait que ces derniers, eux, étaient sous la protection de la loi, en vertu du décret du 4 mai 1792 : « L'Assemblée nationale, voulant, au commencement d'une guerre entreprise pour la défense de la liberté, régler, d'après les principes de la justice et de l'humanité, le traitement des militaires ennemis que le sort des combats mettrait au pouvoir de la nation française ; Considérant qu'aux termes de la Déclaration des droits, lorsque la société est forcée de priver un homme de sa liberté, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ; Reconnaissant que ce principe s'applique plus particulièrement encore aux prisonniers de guerre, qui, ne s'étant point rangés volontairement sous la puissance civile de la nation, demeurent sous la sauvegarde plus spéciale du droit naturel des hommes et des peuples, décrète qu'il y a urgence. L'Assemblée nationale, après avoir décrété l'urgence, déclare et décrète ce qui suit : Art. 1er. Les prisonniers de guerre sont sous la sauvegarde de la nation et la protection spéciale de la loi. Art. 2. Toute rigueur déplacée, insulte, violence, ou meurtre commis contre des prisonniers de guerre, seront punis d'après les mêmes lois, et des mêmes peines que si ces excès avaient été commis contre des Français. »
Peyrusse (lettre du 10 mars 1799; « Expéditions de Malte, d'Egypte et de Syrie. Correspondance (1798-1801) ») est très clair sur les deux cas de figures : « Que, dans une ville prise d'assaut, le soldat effréné pille, brûle et tue tout ce qu'il rencontre, les lois de la guerre l'ordonnent et l'humanité jette un voile sur toutes ces horreurs ; mais que deux et trois jours après un assaut, dans le calme de toutes les passions, on ait la froide barbarie de faire poignarder 3 000 hommes qui se sont livrés à votre bonne foi, on ne peut alors que faire un appel énergique à la postérité contre ceux qui ont donné un ordre aussi cruel. »
Dans le même sens, Jomini (Histoire critique et militaire des guerres de la révolution) écrivait ceci : « Les personnes des prisonniers sont sacrées, elles sont sous la sauvegarde de l’honneur ; dès qu’on avait consenti à recevoir les armes de ces ennemis, aucune considération de prudence ne pouvait les priver des droits qu’ils avaient acquis par leur capitulation. »
Napoléon lui-même, dont les prisonniers de guerre sous son règne eurent la plupart du temps un sort bien plus enviable que chez d’autres nations coalisées, s’est exprimé sur le sujet à l’occasion de l’insurrection du Tyrol. Des prisonniers français et Bavarois ayant été massacrés (le nombre reste douteux), on accusa de ce crime le lieutenant-général autrichien Chasteler. Voici ce que Napoléon écrivit dans le 23e Bulletin du 28 juin 1809 :
« Le 10 avril, […] le général Chasteler insurgeait le Tyrol et surprenait 700 conscrits français qui allaient à Augsbourg, où étaient leurs régiments, et qui marchaient sur la foi de la paix. Obligés de se rendre et faits prisonniers, ils furent massacrés. Parmi eux se trouvaient 80 Belges nés dans la même ville que Chasteler. 1 800 Bavarois, faits prisonniers à la même époque, furent aussi massacrés. Chasteler, qui commandait, fut le témoin de ces horreurs. Non seulement il ne s'y opposa point, mais on l'accusa d'avoir souri à ce massacre, espérant que les Tyroliens, ayant à redouter la vengeance d'un crime dont ils ne pouvaient espérer le pardon, seraient ainsi plus fortement engagés dans leur rébellion. Lorsque Sa Majesté eut connaissance de ces atrocités, elle se trouva dans une position difficile. Si elle voulait recourir aux représailles, 20 généraux, 1 000 officiers, 80 000 hommes, faits prisonniers pendant le mois d'avril, pouvaient satisfaire aux mânes des malheureux Français si lâchement égorgés. Mais des prisonniers n'appartiennent pas à la puissance pour laquelle ils ont combattu; ils sont sous la sauvegarde de l'honneur et de la générosité de la nation qui les a désarmés. »
J’ai ouvert ici à dessein cette parenthèse sur l’idée que l’on se faisait à l’époque du sort qui devait être réservé aux prisonniers de guerre. Si un grand nombre d’ennemis tomba au feu ou lors du sac de Jaffa, de très nombreux autres défenseurs de ville furent en effet abattus dans des conditions fort différentes. Si, sur ce point, les premiers rapports de Bonaparte et Berthier étaient peu explicites, voire mensonger pour ce qui est de l’ouvrage de ce dernier, il eut bien, à Jaffa, une tuerie de masse de prisonniers de guerre, bien après la fin des combats et la chute de la cité.
La reddition de ces hommes, suite à l’assaut, aux combats de rue et au pillage de la ville, a été relatée, après l’Empire, par de nombreux mémorialistes :
Beauharnais (Mémoires) : « Les rues de la ville étaient si étroites, qu’à peine deux cavaliers pouvaient y passer de front. On s’y battit avec acharnement pendant une partie de la journée. Nos soldats, irrités de la résistance, firent main basse sur ce qu’il rencontrèrent : le massacre et le pillage durèrent toute la nuit. Le lendemain je fus envoyé pour essayer de rétablir l’ordre et de faire cesser les excès auxquels le soldat se livre toujours en pareil cas. C’était la première fois que je voyais une ville prise d’assaut, et ce spectacle me frappa d’horreur. Presque tous les habitants de Jaffa avaient été égorgés sans distinction ni d’âge ni de sexe, la terre était jonchée de leurs cadavres, le sang ruisselait dans les rues. J’arrive à un fait qui a été raconté si souvent et si diversement qu’il est impossible de le passer sous silence. Je vais dire ce que j’ai vu et entendu alors. Nos troupes, rassasiés de carnage, firent quelques prisonniers à Jaffa le second jour, et leur nombre s’augmenta d’environ huit cents hommes, qui s’étaient jetés dans un petit fort et capitulèrent la même journée. »
François (Journal) : « Les soldats ne s’arrêtèrent que lorsqu’ils furent épuisés de la fatigue du meurtre. Les débris de la garnison, réfugiés dans les mosquées, mirent alors bas les armes en demandant quartier. Ces malheureux, au nombre de 3770, furent conduits devant Bonaparte, assis dans ce moment sur une pièce de 3, s’entretenant avec le général Lannes. Les Egyptiens furent séparés des autres nations dont j’ai parlé plus haut [« des Maugrebins, des Albanais, des Kurdes, des Alepins, des Damasquins, des Natoliens, des Caramaniens et des nègres »], et ceux-ci furent confiés à un fort détachement. Les autres furent mis au centre des divisions Bon et Lannes qui étaient restées au camp. »
Miot (Mémoires pour servir à l'histoire des expéditions en Égypte et en Syrie) : « J'entrai dans la ville. Quel spectacle ! La pâleur, la terreur des habitants, les cris bruyants de nos soldats ; des femmes égarées, dépouillées de leurs voiles, obligées de franchir à chaque pas des morts ou des mourants, et retrouvant leurs parents, leurs amis parmi des cadavres mutilés ; les meubles, les étoffes semées sur le sol ; nos soldats choisissant dans ces débris empestés les vêtements les plus riches Il faut convenir que la guerre vue de près, et comme je la voyais alors, est un spectacle bien hideux. Pendant que tout ceci se passait, une bonne partie de la garnison s'était retirée dans un des forts de la place et dans les mosquées. Elle mit bas les armes et fut amenée au bivouac devant les tentes mêmes du quartier général. On en retira les Egyptiens. Le reste, composé de canonniers Turcs, de Maugrabins et d'Arnautes, au nombre de deux à trois mille, fut mis sous la garde d'un fort détachement. »
Bourrienne (Mémoires) : « [Beauharnais et Croisier] apprirent qu'une forte partie de la garnison s'était retirée dans de vastes bâtiments, espèces de caravansérails formés d'une grande cour entourée de constructions. Ils y entrèrent, portant au bras leur écharpe d'aide-de-camp. Les Arnautes et Albanais, dont se composaient presque en totalité ces réfugiés échappés au massacre, crièrent des fenêtres qu'ils voulaient bien se rendre si on voulait leur assurer la vie sauve, et les soustraire au massacre auquel la ville était condamnée, sinon ils menaçaient de faire feu sur les aides-decamp, et ils déclarèrent qu'ils se défendraient jusqu'à la dernière extrémité. Les deux officiers crurent devoir et pouvoir accéder à leur demande, et les faire prisonniers, malgré l'arrêt de mort prononcé contre toute la garnison de la ville prise d'assaut. Ils les amenèrent au camp en deux troupes, dont on estima l'une à environ deux mille cinq cents hommes, l'autre à quinze cents. »
Niello Sargy (Mémoires sur l’expédition d’Egypte) : « Toute l’armée se précipita dans la ville avec une fureur difficile à décrire. Le viol, l’égorgement et la dévastation la remplirent de sang et de deuil; on passa au fil de l’épée tous les habitants, sans distinction d’âge ni de sexe. […] Le général Robin parvint à arrêter le désordre, en sabrant de tous côtés le soldat devenu féroce; mais on peut dire que le soldat s’arrêta plus encore, parce qu’il était épuisé de fatigues que les de tuer. Deux mille Musulmans avaient été passés au fil de l’épée sur les remparts, pendant l’assaut ou dans la ville ; le reste de la garnison, s’élevant à un égal nombre, s’était réfugié dans les mosquées. Ceux-ci mirent bas les armes et demandèrent quartier; ils furent amenés devant le général en chef, qui était assis alors sur une petite pièce de campagne, devant la principale brèche; il confia la garde des prisonniers à un fort détachement. Le pillage se prolongeant pendant la nuit, dans toutes les maisons, dans toutes les rues on n’entendait que des cris lamentables. »
Peyrusse (lettre du 10 mars ; « Expéditions de Malte, d'Egypte et de Syrie. Correspondance (1798-1801) ») : « A midi, l'assaut fut résolu, et à 3 heures, nous étions maîtres de la ville. Les assiégés se défendirent partout vigoureusement ; chaque maison était une citadelle, d'où ils faisaient un feu très soutenu. Les lois de la guerre ordonnent que, lorsqu'une ville est prise d'assaut, la garnison et les habitants doivent tous être passés au fil de l'épée ; nos troupes se sont rigoureusement acquittées de ce devoir pénible. Le désir de la vengeance, l'appât du gain, puissant mobile chez des soldats, les avaient tous égarés, et hommes, femmes, enfants et vieillards, furent impitoyablement massacrés; aucun asile ne fut épargné; les femmes, violées, furent ensuite poignardées, puis jetées par les fenêtres. J'ai vu une très jolie femme, percée de cinq à six coups de baïonnette, expirant au milieu de quatre enfants mutilés. Toutes les maisons furent pillées ; tout ce qui échappa à la rapacité du vainqueur fut dévoré par les flammes. Depuis trois heures, nous étions maîtres de la ville, et la garnison se défendait encore. Cependant, effrayés de notre audace et déterminés par les promesses qu'on leur faisait au nom du général en chef, 3 000 hommes environ mirent bas les armes et furent conduits au camp. »
Malus (Agenda) : « A une heure la brèche était praticable. On sonna la charge et on monta à l'assaut, au son de la musique des différents corps de l'armée. L'ennemi fut culbuté, épouvanté et se retira, après une fusillade assez vive, dans les maisons et les forts de la ville. Il se soutint dans plusieurs points et continua le feu pendant environ une heure. Pendant ce temps les soldats répandus de toutes parts égorgeaient hommes, femmes, vieillards, enfants,chrétiens,Turcs; tout ce qui avait figure humaine était victime de leur fureur. Le tumulte du carnage, les portes brisées, les maisons ébranlées par le bruit du feu et des armes, les hurlements des femmes, le père et l'enfant culbutés l'un sur l'autre, la fille violée sur le cadavre de sa mère, la fumée des morts grillés par leurs vêtements, l'odeur du sang, les gémissements des blessés, les cris des vainqueurs se disputant les dépouilles d'une proie expirante, des soldats furieux répondant aux cris de désespoir par des cris de rage et des coups redoublés, enfin des hommes rassasiés de sang et d'or, tombant de lassitude sur des tas de cadavres : voilà le spectacle qu'offrit cette malheureuse ville jusqu'à la nuit. Nous revînmes coucher au camp, nous ramenâmes environ quatre mille soldats turcs qui avaient échappé au carnage et qui avaient déposé les armes dans les différents forts, sur la promesse qu'on leur laisserait la vie. On les plaça près du camp, sous une faible garde. Ils y restèrent trois jours pendant lesquels ils furent nourris comme nos soldats »
Richardot (Relation de la campagne de Syrie) : « Dès lors, la ville est en proie à toutes les horreurs d'un sac. Rien ne peut la sauver de la dévastation, et tes ténèbres de la nuit ne succèdent si promptement au jour que pour porter au comble la désolation et le désespoir de ses malheureux habitants ! N'essayons pas d'en tracer le hideux tableau : c'est déjà bien assez d'avoir encore à parler d'une autre scène de carnage sans qu'il soit possible de n'en pas dire les horreurs. Toute la garnison, disait-on, avait été passée au fil de l’épée : seulement le commandant avec quelques-uns des siens étaient parvenus à gagner le rivage et à se sauver dans une barque. Cependant, quand l'astre du jour vient éclairer l’affreux spectacle que présente l'intérieur de Jaffa ; quand la soif horrible du carnage et du pillage est assouvie ; lorsque la discipline peut reprendre ses droits et que l'ordre succède au désordre; lorsqu'enfin l'on fait la reconnaissance des fortifications et des magasins de la place, on trouve dans les bâtiments militaires quatre mille hommes armés, et ces hommes posent à l'instant leurs armes ! ! ! »
Laporte (Mon voyage en Egypte et en Syrie) : « Tout ce qui se présenta fut tué, habitants, soldats, femmes, enfants, vieillards ; on les poursuivit de terrasse en terrasse, de maison en maison, l’irritation et le carnage furent si terribles que les Français, dans leur fureur, n’épargnèrent pas même deux ou trois cents Grecs ou chrétiens de différentes sectes qui, costumés à la turque et ne pouvant se faire comprendre, perdirent aussi la vie ; en un mot, tout ce qui fut rencontré fut tué ; l’épouvante fut si grande chez les Turcs et le sac si complet qu’à l’entrée de la nuit on ne voyait pas un ennemi, ce qui existait encore et qui avait échappé au massacre s’était caché dans des grottes, des souterrains, des égouts, et on eût toutes les peines du monde à les trouver dans ces réduits ; des ordres furent donnés pour faire cesser cette boucherie, le peu d’habitants qui avaient échappé obtint la vie du vainqueur, grâce à laquelle ils ne devaient pas s’attendre, attendu que la ville ayant été prise d’assaut, ils devaient selon les usages cruels de la guerre, ayant fait surtout feu contre nous, être considérés comme soldats et, comme tels, en subir toutes les conséquences ; deux mille hommes environ, restes de la garnison, furent ramassés et trouvés ça et là, cachés, déguisés et désarmés, conduits à la tombée de la nuit hors de la ville. »
On est bien loin ici du mensonge de la Relation de Berthier : « La garnison poursuivie se défend avec acharnement, et refuse de poser les armes; elle est passée au fil de l’épée. » Ainsi, quand Bonaparte écrit au Directoire exécutif : « Quatre mille hommes des troupes de Djezzar ont été passés au fil de l'épée », il faut comprendre qu’une partie des forces ennemies est tombée au feu, mais que l’autre, faite prisonnière, a été exécutée. Sur ce point, dans ses missives à ses subordonnés, le général en chef de l’armée d’Orient se montrait bien plus clair qu’il ne le fût vis-à-vis des autorités politiques de métropole :
« La garnison de Jaffa était de près de 4 000 hommes ; 2 000 ont été tués dans la ville, et près de 2 000 ont été fusillés entre hier et aujourd'hui. » (Bonaparte à Kléber, 9 mars)
« La garnison de Jaffa était de 4 000 hommes; 2 000 ont été tués dans la ville, et près de 2 000 ont été fusillés entre hier et aujourd'hui. » (Bonaparte à Reynier, 9 mars)
Le tout répondant à un ordre sans appel : « Vous ferez, Citoyen Général, venir le colonel des canonniers; vous lui demanderez les noms des vingt principaux officiers des canonniers; vous ferez prendre ces vingt officiers et les ferez conduire au village où est le bataillon qui doit partir pour le Caire. Là, ils seront consignés dans le fort jusqu'à nouvel ordre. Quand ils seront partis pour le village, vous ordonnerez à l'adjudant général de service de conduire tous les canonniers et autres Turcs, pris les armes à la main à Jaffa, au bord de la mer, et de les faire fusiller, en prenant ses précautions de manière qu'il n'en échappe aucun. » (Bonaparte à Berthier, 9 mars)
_________________ " Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)
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