Gér@rd a écrit :
cush a écrit :
on peut dire concernant la première remarque que la France n'a de leçon à donner à personne dans le domaine. La spécificité de la Shoah a aussi été soigneusement gommée chez nous, dans les années d'immédiate après guerre en tous cas. Paradoxalement, l'éclairage (justifié) porté sur la spécificité du génocide juif a eu tendance à reléguer dans l'ombre une foultitude d'autres victimes dont le peuple Tzigane.
Je ne comprends pas trop le sens de cette phrase ? Vous entendez par là qu'on le savait à cette époque et que ça a été occulté
volontairement ?
Pour ce que j'en sais, c'est plus complexe que ce que laisse entendre cush. D'abord, les déportés politiques rentrèrent plus nombreux que les déportés "raciaux". De plus, les déportés politiques avaient des relations, des contacts. En ce qui concerne la déportation des juifs, il faut se rappeler que globalement, 80% des juifs "français", français de longues dates réussirent à ne pas se faire raffler. Tandis que 80% des déportés étaient des juifs qui avaient émigrés en France dans les années 20 et 30. Et surtout, pas mal des juifs survivants étaient des adolescents et des jeunes adultes. De plus, leurs témoignages étaient "stupéfiants", ils ne correspondaient pas à ce que les gens pensaient qu'ils étaient possible de faire. Donc, ils rencontrèrent un certains scepticisme.
Ensuite, les retours furent échelonnés. Les survivants issus des camps de la mort revinrent assez tard, car il fallut les remettre sur pied et quand ils revinrent, la France avait tourné la page et pensait déjà à la suite : "on" voulait oublier la guerre. Il faut se souvenir que Paris avait été libérée en août 44, la majorité du sol national à l'hiver 44 et que de février 45 au 8 mai 45, il n'y avait que les poches de l'Atlantique a être occupées. De plus, la plupart des français accueillirent l'annonce de la fin de la guerre avec une certaine indiférence. On pensait plus à la reconstruction, puis on bascula dans la guerre froide.
Le parti communiste se présenta comme le parti de la Résistance et des fusillés. A droite, de Gaulle faisait pendant et discrètement, on recycla des gens de droite ou de gauche qui s'étaient plus ou moins compromis. Ce qui conduisit au roman de la France Résistante. Bref, tous les français déportés l'avaient été parce que français ... Ou du moins, on feignit de la croire. Bien entendu, si on creusait un peu, on apercevait la réalité. Dans le même temps, pour réparer ce qui pouvait l'être, on donnait un foyer national aux juifs dans ce qui devint Israël. Et, il faut bien se rappeler que ce "geste" était aussi en partie la conséquence de ce que l'on savait du massacre des juifs ... Donc, "on" savait. On savait au moins assez pour permettre aux juifs d'avoir leur pays. On a pas cherché à gommer "sciemment" la Shoah. Il n'y a pas eu de complot visant à nier ou à minimiser la réalité de la Shoah, comme on pourrait le croire en lisant certains commentaires. Mais, on exaltant le patriotisme, la résistance du peuple français, les fusillés du PC, on réduisait d'autant la part mémorielle de l'holocauste.
Puis, petit à petit, on a exhumé la Shoah, au point que certains trouvèrent qu'elle fit de l'ombre aux autres ignominies que l'on doit aux nazis et à leurs séides. Des associations firent des recensements, comptèrent les départs et les retours. De plus, les crimes contre les résistants avaient été jugés par contumace dans l'immédiat après-guerre. Or, quand on mis la main sur certains fugitifs, il s'avéra que ces crimes avaient été prescrits. En fait, les seuls non-prescriptibles étaient les crimes contre l'Humanité et justement, ils n'avaient pas été encore jugés. Ce qui contribua un peu plus à les mettre en lumières.
Mais, pendant de nombreuses années, on avait recentré la commémoration du génocide sur le seul Auschwitz, au point que ce camp occulta la réalité du génocide, on a eu tendance a reléguer dans l'ombre les autres camps de la mort et la Shoah par balle. Bien entendu, comme avant, ceux qui cherchaient ou s'intéressaient à cela n'ignoraient pas que cela avait existé. Mais, dans les années 80-90, quand on parlait génocide, on pensait aux juifs déportés à Auschwitz. Alors que dans les années 50-60, quand on parlait de cela, on pensait aux déportés dans les camps de concentration et la majorité des gens pensaient que les gazages étaient marginaux, et que la plupart des gens étaient décédés des mauvaises conditions qui leur étaient faites lors de la déportation.
Petit à petit, on commence à percevoir la réalité de tout cela, on commence à percevoir les imbrications. Les taux de survie des convois de déportés politiques dépassent les 30%. Le taux de survie des convois des déportés "raciaux" sont inférieurs à 10%. Moins, si on prend en compte les convois d'Europe de l'Est. Le taux de survie de la Shoah par balle ... Sur les gens raflés, il est de 0%. Il y a eu occasionnellement quelques survivants qui ont réussi à s'extraire des monceaux de cadavres ...