Pour ce qu'il est intéressant votre argumentaire n'en comporte pas moins d'importantes faiblesses.
Daisuke a écrit :
Pour moi tous les arguments évoqués précédemment -et qui sonnent juste- ne sont que des conséquences inévitables dû à la taille de l'empire. En biologie il existe une sorte de relation entre la taille possible pour un organisme vivant et sa complexité. Donc pour répondre à la question initiale je dirais, le déclin s'est amorcé quand l'empire était à son maximum. Si rien ne change drastiquement après cette expansion maximal c'est juste un effet inertiel, mais les problèmes vont commencer à apparaître. Si l'empire a stoppé sa progression c'est bien parce qu'il était trop étiré et que des problèmes de communications, d'approvisionnement, de maintient de l'ordre et de cohésion, social, administrative et structurelle commençait à se manifester.
Il y a beaucoup à dire déjà au sujet de la méthode ; le rapprochement avec la biologie, que ce soit en matière de taille et de complexité comme vous le faites ou en terme de "durée de vie" comme d'autres l'ont proposé implique qu'il s'agit d'une loi.Or en science si un contre-exemple se manifeste il contredit la thèse. En l'occurrence l'existence d'Empire bien plus vaste et plus pérennes dans le temps discréditent d'emblée votre position. Que ce soit l'Empire chinois ou l'Empire russe aucun effondrement ne fut définitif et leur existence actuelle démontre que la taille excessive n'est pas une loi du déclin. c'est une chose encore plus prégnante avec l'Etat chinois qui existait déjà à l'époque de Rome.
Par ailleurs l'expansion romaine ne s'est pas arrêtée à cause de lignes de communications trop étirée, elle s'est interrompue faute de territoires urbanisés aptes à recevoir les structures de commandement romaines ; ils ont tenté de les créer ex nihilo en Germanie mais les populations tribales n'étaient pas prêtes à en accepter le fonctionnement trop éloigné de leurs conception à l'époque du pouvoir. Et pourtant les Romains ont bien soumis un temps la Germanie. Ce ne sont pas des considérations d'approvisionnement ou de capacités militaires pures qui en ont empêché la conquête mais bien des questions de possibilité d'y implanter une administration. Je vous rappelle dans ce sens que dès que les Daces ont commencé à posséder quelques éléments de structuration étatique et une capitale ils ont été soumis à l'autorité romaine.
En clair ne postulez pas trop vite des règles implicites qui vous semblent aller de soi ; l'expérience des faits montre le contraire.
Daisuke a écrit :
La seule échappatoire de mon point de vue, aurait-été un repli ferme et rapide sur un territoire "sûr" et stratégique (peuple bien intégré, nourriture, barrières naturelles).
Un territoire sûr? Mais je vous rappelle que Rome n'était pas une simple puissance coloniale ; son Empire était son territoire "national", elle s'incarnait dans son domaine. En laisser des portions, même mal tenues à toujours été un déchirement jusqu'à nommer des territoires voisin du nom de la province perdue ; Germanie, Dacie... Quand on raisonne à l'échelle d'un territoire je pense qu'il faut se souvenir que les dirigeants le pensent rarement comme divisible et amputable aussi vaste soit-il. La stratégie de défense, comme je l'ai largement expliqué reposait aussi essentiellement sur ses marges ; expliquez-moi comment construire une armée en se séparant des provinces qui pourvoyaient le plus en soldats... De même expliquez-moi comment assurer la stabilité d'un Empire si on commence à semer aux quatre vents ses provinces pour en optimiser le territoire. C'est un raisonnement beaucoup trop teinté de l'idéologie contemporaine de la rationalité comptable pour avoir la moindre efficacité à rendre compte d'une situation passée. Les problématiques de défense de l'Empire étaient très complexe : multitude de menaces, divisions internes entre les pouvoirs civils et militaires, incompétences de cadres, stratégie politique déficiente (confier la défense à des fédérés et laisser disparaître une grande partie de l'armée romaine a été le choix du trépas)...
Et n'oublions pas que l'Empire s'est perpétué en Orient et y fit face à des menaces toujours renouvelées : invasions perses, arabes, turques, bulgares, petchenègues, varègues... Une telle convergence de menace aurait mis à genou plus d'un Etat solide. La position de carrefour de Byzance a aussi été son tombeau...
Daisuke a écrit :
En même temps c'est dans l'ordre des choses, quand on est puissant d'en vouloir plus, toujours plus, à un moment, la structure ne tient plus.
Attention également avec ce genre de formule ; ce n'est pas une règle. Je vous rappelle que Hadrien, maître de l'Empire, décide précisément le contraire en rapatriant les frontières romaines sur des points antérieurs aux conquêtes de Trajan... Encore une fois, ce que vous dites ne fait pas loi...