CEN_EMB a écrit :
Les cuirassiers français à Austerlitz vainquent leurs homologues autrichiens équipés du seul plastron parce que leur cuirasse leur donne un avantage net, si l'on en croit les témoignages de cet épisode (Marbot ?).
Sans doute faites-vous plus référence à ce qu’il écrivit dans ses Mémoires sur la bataille d’Eckmühl :
« Autrichiens et Français, chacun voulait rester maître du champ de bataille. Des deux côtés, même courage, même ténacité, forces pareilles, mais non pas égales armes défensives; car les Autrichiens n'étant cuirassés que par devant, leur dos ne se trouve nullement garanti dans une mêlée. Ils recevaient dans le dos de .grands coups de pointe portés par les cavaliers français qui, ayant deux cuirasses, et ne craignant pas d'être blessés par derrière, ne s'occupaient qu'à frapper, tuaient un grand nombre d'ennemis et n'éprouvaient que de légères pertes.
Ce combat inégal dura quelques minutes : enfin les Autrichiens, dont le nombre de blessés et de morts était immense, furent contraints, malgré leur bravoure, de céder le terrain. Dès qu'ils eurent fait volte-face, ils comprirent encore mieux combien il est défavorable de ne pas être cuirassé par derrière comme par devant, car le combat ne fut plus qu'une boucherie !... Nos cuirassiers poursuivaient les ennemis en leur enfonçant leurs sabres dans les reins, et, sur l'espace d'une demi-lieue, le terrain fut jonché de cuirassiers autrichiens morts ou blessés. Il n'en serait échappé que fort peu, si les nôtres ne se fussent arrêtés pour charger plusieurs bataillons de grenadiers hongrois qu'ils enfoncèrent et prirent presque en entier.
Ce combat décida sans appel une question débattue depuis longtemps, celle de la nécessité des cuirasses doubles; car le nombre des blessés se trouva de huit Autrichiens pour un Français, et celui des morts de treize ennemis pour un Français ! »
Marbot aborde également le sujet dans « Remarques critiques sur l'ouvrage de M. le lieutenant-général Rogniat, intitulé : Considérations sur l'art de la guerre » :
« Les cuirassiers autrichiens furent bientôt en présence des nôtres. Alors les cavaliers légers des deux partis se jetèrent de côté pour n'être pas écrasés entre ces deux formidables masses de cuirassiers qui, s'avançant l'une sur l'autre avec rapidité, se choquèrent, entrèrent sur plusieurs points l'une dans l'autre, se traversèrent et ne formèrent bientôt qu'une immense mêlée des plus épaisses.
Ce combat à la fois terrible et majestueux, n'était éclairé que par un faible crépuscule, et la lune naissante; les cris des combattants étaient couverts par les sons que rendaient plusieurs milliers de casques et de cuirasses de fer, frappés à coups redoublés par des sabres pesants, qui en faisaient jaillir de nombreuses étincelles. Les Français et les Autrichiens voulaient à tout prix rester maîtres du champ de bataille; des deux côtés même courage, même ténacité, à peu près même nombre, mais non pas égales armes défensives, par conséquent succès bien différent !!! Les cuirassiers autrichiens avaient, ainsi que les nôtres, la tête et la poitrine garanties, mais leur dos était à découvert, de sorte que pendant la mêlée, ils recevaient de grands coups de pointe dans les reins, de la part des cuirassiers français, qui n'ayant rien à craindre pour leur dos, ne s'occupaient qu'à frapper, tuaient un grand nombre d'ennemis, et ne perdaient presque personne.
Un combat aussi inégal ne pouvait durer longtemps; aussi au bout de quelques minutes, les Autrichiens dont les pertes étaient déjà immenses et allaient toujours en croissant, furent-ils forcés, malgré leur bravoure extrême, de céder le terrain, et de se retirer. Mais dès qu'ils eurent fait volte-face, ils sentirent encore plus vivement combien il est vicieux de n'être pas cuirassé par derrière lorsqu'on le peut; car le combat ne fut plus qu'une boucherie : nos cuirassiers poursuivirent les ennemis en leur enfonçant leurs grands sabres dans le dos, et pendant plus d'une demi-lieue, la terre fut jonchée de blessés et de cadavres des cuirassiers autrichiens; leur troupe perdit dans cette affaire un grand nombre d'hommes, et il n'en serait échappé que très peu, si nos cuirassiers ne les eussent abandonnés pour se reformer, et aller charger les bataillons de grenadiers ennemis, qu'ils enfoncèrent et prirent entièrement.
Il est incontestable que les cuirasses de derrière avaient sauvé la vie, pendant la mêlée, à une foule de cuirassiers français, et leur avaient donné un immense avantage sur leurs ennemis; et de plus, il faut remarquer que si une circonstance quelconque, eût forcé les cuirassiers français à céder le terrain, ils auraient encore eu l'avantage de ne pas perdre dans leur retraite, la vingtième partie des hommes que perdirent les Autrichiens dans la leur, faute de cuirasses de derrière.
L'armée française ayant couché dans cette partie de la plaine, où la double charge des cuirassiers avait eu lieu, on y releva pendant la nuit une grande quantité de blessés des deux partis; mais le nombre des blessés autrichiens était à celui des Français, d'après le calcul qu'en fit un officier d'état-major, comme 8 est à 1; et il faut encore observer que les blessés français, l'étaient pour la plupart légèrement, parce que leur buste ayant été garanti de tous côtés par leur cuirasse, leurs bras et leurs visages avaient seuls été atteints, tandis que les Autrichiens avaient presque tous des blessures mortelles, provenant des coups de pointe qu'ils avaient reçus dans les reins ; aussi ceux d'entre eux qui pouvaient encore parler, avouaient que leur malheur venait de ce que leur troupe n'avait pas de cuirasse de derrière.
Le lendemain, au point du jour, on visita le terrain où la mêlée avait eu lieu ; le nombre des Autrichiens morts, était à celui des Français, comme 13 est à 1 ; et la différence eût encore été plus grande au désavantage des Autrichiens, si la charge eût eu lieu en plein jour, parce qu'on aurait pu les frapper encore plus sûrement, et plus souvent dans le dos.
Les cuirassiers autrichiens venant loin de leur armée, attaquer avec résolution un ennemi victorieux, pour donner aux colonnes autrichiennes le temps de se retirer, firent certainement un acte de dévouement et de bravoure des plus admirables; mais s'ils eussent été cuirassés par derrière, leur courage eût été le même, et leur charge eût peut-être réussi, ou du moins ils n'eussent pas été aussi malheureux qu'ils le furent pendant la mêlée, et leur retraite ne fût pas devenue une boucherie. »
CEN_EMB a écrit :
En revanche, face à une formation d'infanterie, le cuirassier n'a pas plus d'avantages que le hussard, si ce n'est peut-être l'aspect plus impressionnant de sa charge.
Un mot de Napoléon (O'Meara, Napoléon dans l'exil) :
"Les cuirassiers français étaient la meilleure cavalerie du monde pour enfoncer l'infanterie."