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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 27 Déc 2013 10:22 
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Fustel de Coulanges
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Pour info, le 19 décembre 2011, M. Remiller, député UMP de l’Isère, déposa un amendement (finalement bien vite retiré) à la proposition de loi relative à la répression de la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi.
L’amendement en question :
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pd ... 500004.pdf

Je n’apporterai pas d’autre commentaire sur ce texte, celui-ci reprenant quasiment textuellement la proposition de loi de 2007 qui avait été abordée ici :
viewtopic.php?f=55&t=2297&p=394347#p394347

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 27 Déc 2013 10:47 
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Eginhard
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Tant de bêtises en si peu de mots, il faut d'urgence renvoyer nos élus à l'école. Ces gens là ne lâchent jamais l'affaire ?

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"Le génie mériterait les chaînes s'il favorisait les crimes des tyrans"


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 28 Déc 2013 9:35 
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Fustel de Coulanges
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Les députés ne sont pas les seuls à s’être penchés sur la Vendée. Quelques sénatrices et sénateurs se sont également intéressés à l’affaire, mais pas sous l’angle direct du génocide. Ainsi, le 23 février 2012, fut enregistrée cette proposition de loi visant à abroger les décrets des 1er août et 1er octobre 1793 :
http://www.senat.fr/leg/ppl11-426.html

Là encore, un texte pour le moins médiocre et bâclé.
Quelques réflexions :



Citer :
La Convention vote le 1er août 1793 un premier décret dit d'anéantissement de la Vendée qui prévoit l'exécution des hommes « pris les armes à la main »


Cocasses ces guillemets pour un passage qui n’est pas tiré du décret en question mais de celui du 19 mars de la même année. Pour mémoire :
« Art.2 : S[i « Ceux qui sont ou seront prévenus d’avoir pris part aux révoltes ou émeutes contre-révolutionnaires qui ont éclaté ou éclateraient à l’époque du recrutement, dans les différents départements de la République, et ceux qui ont pris ou qui prendraient la cocarde blanche, ou tout autre signe de rébellion »] sont pris ou arrêtés les armes à la main, ils seront dans les vingt-quatre heures, livrés à l’exécuteur des jugements criminels, et mis à mort, après que le fait aura été reconnu et déclaré constant par une commission militaire formée par les officiers de chaque division employés contre les révoltés. »

Le décret du 1er août, s’il épargnait les femmes, les enfants et les vieillards, ne mentionnait pas les hommes. Le texte en question visant, selon l’expression de Barère, « à exterminer cette race rebelle », la Convention ouvrait ici aux exécuteurs du terrain des portes bien plus larges que celles destinant à la mort les seuls rebelles « pris les armes à la main ».




Citer :
mais surtout la déportation des femmes, des enfants et des vieillards.


« Mais surtout » ? Je ne comprends pas cette entrée en matière. Qu’ont voulu ici, de cette manière, après l’évocation de la mise à mort des insurgés masculins, sous-entendre les signataires de la proposition de loi ? N’aurait-il pas été plus simple de retranscrire l’article auquel il est ici fait référence, afin de disperser le doute ne pouvant que naître dans l’esprit du néophyte face à une telle formulation ? A ce sujet, il est quand même étonnant qu’une proposition de loi vise à abroger deux décrets vieux de plus de deux siècles sans même recopier lesdits textes (ni même d’ailleurs un seul passage…). Voici l’article dont il est question :
« Art. 8. Les femmes, les enfants et les vieillards seront conduits dans l’intérieur ; il sera pourvu à leur subsistance et à leur sûreté avec tous les égards dus à l’humanité. »
Mais peut-être que la formulation d’un tel article ne correspondait pas au message que les sénateurs désiraient faire passer ici…

Pour info, voici le reste du décret à abroger :
«Art. Ier. Le ministre de la guerre donnera sur-le-champ les ordres nécessaires pour que la garnison de Mayence soit transportée en poste dans la Vendée. Il sera mis, à cet effet, à la disposition du ministre de la guerre, 3 millions pour l'exécution du cette mesure."

II. Il sera procédé à l'épurement de l'état-major et des commissaires des guerres de l'armée des Côtes de La Rochelle, pour leur substituer des officiers généraux et des commissaires d'un patriotisme prononcé.

III Les généraux de l'armée de La Rochelle tiendront la main à l'exécution rigoureuse des lois rendues contre les déserteurs, les fuyards, les traîtres, et ceux qui jettent les armes et vendent leurs habits.

IV. L'organisation des compagnies des pionniers et des ouvriers sera accélérée; ils seront choisis dans les communes les plus patriotes.

V. Les généraux feront un choix pour former des corps de tirailleurs et de chasseurs intrépides.

VI. Il sera envoyé par le ministre de la guerre des matières combustibles de toutes espèces, pour incendier les bois, les taillis et les genêts.

VII. Les forêts seront abattues, les repaires des rebelles seront détruits, les récoltes seront coupées par les compagnies d'ouvriers, pour être portées sur les derrières de l'armée, et les bestiaux seront saisis.

VIII. Les femmes, les enfants et les vieillards seront conduits dans l'intérieur, il sera pourvu à leur subsistance, à leur sûreté avec tous les égards dus à l'humanité.

IX. Il sera pris des mesures par le ministre de la guerre pour préparer tous les approvisionnements d'armes et de munitions de guerre et de bouche de l'armée, qui, à une époque prochaine, fera un mouvement général sur les rebelles.

X. Aussitôt que les approvisionnements seront faits, que l'armée sera réorganisée, et qu'elle sera prête a marcher sur la Vendée, les représentants du peuple se concerteront avec les administrations des départements circonvoisins qui se sont maintenus dans les bons principes, pour faire sonner le tocsin dans toutes les municipalités environnantes, et faire marcher sur les rebelles les citoyens depuis l'âge de 16 ans jusqu'à celui de 60.

XI. La loi qui expulse les femmes de l'armée sera rigoureusement exécutée. Les généraux en demeurent responsables.

XII. Les représentants du peuple, les généraux veilleront à ce que les voitures d'équipages, à la suite de l'armée, soient réduites au moindre nombre possible, et ne soient employées qu'au transport des effets et des matières strictement nécessaires.

XIII. Les généraux n'emploieront désormais pour mots d'ordre que des expressions patriotiques, et que les noms des anciens républicains ou des martyrs de la liberté, et dans aucun cas le nom d'aucune personne vivante.

XIV. Les biens des rebelles de la Vendée sont déclarés appartenir à la république; il en sera distrait une portion pour indemniser les citoyens qui seront demeurés fidèles à la patrie, des pertes qu'ils auraient souffertes.

XV. Le présent décret sera envoyé sur-le-champ au pouvoir exécutif, au ministre de la guerre et aux représentants du peuple près l'armée des Côtes de La Rochelle. »





Citer :
la Convention adopte le 1er octobre 1793 un décret modificateur qui ajoute à l'anéantissement matériel de la Vendée


Comme si le décret du 1er août n’était qu’un décret incendiaire…





Citer :
l'extermination de ses habitants.


Voyons donc ce que dit le décret en question :
« Art. 1er. Le département de la Loire inférieure demeure distrait de l'armée des côtes de Brest et réuni à celle de la Rochelle, laquelle portera désormais le nom d'armée de l'Ouest.
Art. 2. La convention nationale approuve la nomination du citoyen Léchelle, général en chef, nommé par le conseil exécutif pour commander cette armée.
Art.3. La Convention nationale compte sur le courage de l'armée de l'Ouest et des généraux qui la commandent, pour terminer, d'ici au 20 octobre, l'exécrable guerre de la Vendée.
La reconnaissance nationale attend l'époque du premier novembre prochain pour décerner des honneurs et des récompenses aux armées et aux généraux qui, dans cette campagne, auront exterminé les brigands de l'intérieur, et chassé sans retour les hordes étrangères des tyrans de l'Europe. »

Et il faudrait voir là l’extermination des habitants de la Vendée insurgée ? Le décret du 1er octobre n’est qu’une réorganisation des forces militaires républicaines servant sur le théâtre vendéen et un rappel des objectifs définis par le décret du 1er août avec l’ajout de la date du 20 octobre comme échéance.





Citer :
Sur le terrain, la guerre de Vendée s'achève avec la défaite de Cholet le 17 octobre 1793, la Virée de Galerne et l'écrasement de ce qui reste de l'armée vendéenne dans les marais de Savenay juste avant Noël de la même année.


Pas exactement : des bandes ont continué à batailler notamment dans les Mauges pendant la campagne d’outre-Loire et se virent renforcées par l’arrivée des survivants ayant échappé au désastre de cette opération, et puis, surtout, Charette, qui n’a pas passé la Loire, n’est pas soumis. Ainsi, à l’heure où la bataille de Savenay achève la campagne d’outre-Loire, une position hautement stratégique telle que l’île de Noirmoutier est encore au main des rebelles.





Citer :
l'application rigoureuse des deux décrets d'anéantissement et d'extermination des 1er août et 1er octobre.


Turreau est allé bien plus loin que ce que lui prescrivaient les décrets de la Convention.





Citer :
Carrier à Nantes trouve la guillotine trop lente et lui substitue les noyades expéditives dans la Loire de milliers de suspects


On tombe ici dans le genre de discours approximatif où la répression à Nantes se résume aux noyades. Quid des fusillades de masse pratiquées dans ces mêmes lieux ?





Citer :
Deux armistices furent signés après Thermidor mais, depuis lors, ces deux textes n'ont fait l'objet d'aucune abrogation.


Il est ici fait référence aux traités de paix de la Jaunaye (17 février 1795) et de Saint-Florent (2 mai 1795). Là encore : qu’une simple évocation alors qu’il aurait été indispensable de se pencher sur ces traités. J’y reviendrai, mais on pourrait, parce que la marche vers la pacification n’a pas commencé au début de l’année 1795, aussi aborder d’autres textes :

-L’arrêté du Comité de salut public, du 21 mai 1794 :
« Le comité voulant établir l'ordre et ta sûreté publique dans le département Vengé, arrête :
Art.1er.Il sera fait dans chaque commune du département vengé, un recensement exact de toutes les familles et de tous les individus qui y sont domiciliés.
Art.2. Chaque chef de famille déclarera ses propriétés ou la consistance et l’étendue de son exploitation s'il est fermier ou locataire, le nombre de ses chevaux, bestiaux, équipage charrues et charrettes la quantité de grains et de boissons qui lui restent. Il remettra toutes ses armes à la disposition des agents de la république.
Art.3.Il sera dressé en même temps un état masse et par aperçu de toutes les terres chargées de récolte en distinguant les différentes espèces de grains et productions et l'étendue ou quantité de terre chargée de chaque espèce.
[…]
Art.6. On désignera les lieux où le dépôt des récoltes doit se faire dans ou hors les cantons, les moyens de transport suffisants ou à suppléer.
Art.7. On déterminera s'il convient de faire transporter les récoltes en gerbes, ou s'il est plus utile de les conserver sur les lieux, de les faire battre et de faire transporter les grains dans les dépôts et magasins qui seront désignés.
[…]
Art.9. Dans les lieux où il n'y aura pas sûreté suffisante et où les récoltes seraient exposées au pillage des brigands, les grains des particuliers seront transportés soit en gerbe, soit battus, comme il aura été reconnu plus utile, après en avoir fait constater la quantité. Il ne sera laissé à la disposition du cultivateur que l'approvisionnement de deux mois, à raison du nombre d'individus composant sa famille ou employés à son exploitation.
[…]
Art.16. La force armée appuiera et protégera les opérations des agents qui s'exécuteront progressivement en avançant dans le pays. Elle dissipera et détruira tous les obstacles. Elle ne laissera dans la commune aucuns individus qui ne soient domiciliés et qui ne se fassent enregistrer.
Art.17.La force et en force tout le pays de manière que dans tous les points où elle se portera elle ne puisse éprouver aucune résistance et que tout cède au nombre, à la force, à l'ordre la discipline et à la bonne tenue.

-L’instruction du Comité de salut public du 5 juin 1795 :
« [Les colonnes] observeront la discipline la plus exacte, elles ne livreront aucuns combats, elles ne feront aucune attaque, qu'autant qu'elles apercevront des hommes rassemblés en état d'hostilité ou de rébellion.
Elles maintiendront l'ordre et la sûreté dans tous les lieux que les agents de la commission parcourront.
Elles traiteront comme rebelles ceux qui auront des armes, qui n'auront pas de domicile, qui ne seront pas réunis à leur famille, qui ne se présenteront pas dans les assemblées de communes et ne s'y feront pas inscrire.
On n'emploiera la force que dans le cas de nécessité.
[…]
Les agents de la commission feront publier dans le département vengé une proclamation pour annoncer l'objet de leur mission ; ordonner à tous les habitants de se retirer dans leurs communes, et de se présenter au jour qui sera indiqué pour se faire inscrire sur la liste qui sera dressée de tous les habitants, et déclarer que tous ceux qui ne seront pas inscrits sur les listes seront traités en rebelles. »

-L’arrêté du Comité de salut public, du 16 août 1794 :
« Art.8. Les représentants du peuple remettront la justice, le désintéressement à l’ordre du jour ; les moeurs, la voie de persuasion, la bonne foi seront mises en vigueur.
Tous les chefs des brigands, tous ceux qui ont accepté des grades parmi eux, seront punis de mort. Ceux qui n’auront été qu’égarés ou entraînés par la violence seront pardonnés. »

-Le décret du 2 décembre 1794 :
« Art. 1er. Toutes les personnes connues dans les arrondissements de l’Ouest, des côtes de Brest et des côtes de Cherbourg, sous le nom de rebelles de la Vendée et de Chouans, qui déposeront leurs armes dans le mois qui suivra le jour de la publication du présent décret, ne seront ni inquiétées ni recherchées dans la suite pour le fait de leur révolte. »

-La proclamation de la Convention « à ceux qui avaient pris part aux révoltes des départements de l’Ouest », accompagnant ce décret :
« La Convention nationale vous pardonne, en son nom, si vous posez les armes, si le repentir, si l’amitié sincère vous ramène à lui. Sa parole est sacrée et, si d’infidèles délégués ont abusé de sa confiance et de la vôtre, il en sera fait justice.
C'est ainsi que la République, terrible envers ceux du dehors, veut rallier ses enfants égarés. Profitez de sa clémence, hâtez-vous de rentrer au sein de la patrie.»


Venons à présent aux traités de paix. Voici ce que dit le deuxième arrêté des commissaires de la Convention à la Jaunaye :
« Art. 1er. Les personnes des chefs et des habitants insurgés de la Vendée, se soumettant aux lois de la République française une et indivisible, sont à l'abri de toutes recherches pour le passé.
Art. 2. II sera accordé des secours et indemnités aux habitants de la Vendée, pour leur aider à exister, et relever leurs chaumières et maisons, pour y rétablir l'agriculture et faire revivre le commerce. »
Le 14 mars 1795, la Convention confirma à l’unanimité tous les arrêtés pris à la Jaunaye.


Comme on le voit, les décrets des 1er août et 1er octobre avaient été jetés aux orties depuis longtemps, et le vote des députés, le 14 mars 1795, finissait de les enterrer.
Pourquoi donc chercher à les abroger, deux cents ans plus tard ?

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 11 Jan 2014 13:07 
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Fustel de Coulanges
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Le très recommandable Jean-Clément Martin a répondu dans L'Humanité (29 janvier 2013) à la proposition de loi du 16 janvier de la même année (j'avais dit de ce que pensais de ce texte ici : viewtopic.php?f=55&t=2297&p=460476#p460476). Voici sa tribune :


« Les armées républicaines se sont-elles livrées à un génocide en Vendée en 1793-1794 ?
Il y eut des crimes de guerre mais pas de projet génocidaire

Le 23 janvier dernier, un groupe de 
députés conduits par Lionnel Luca, dont Marion Maréchal-Le Pen, a déposé un projet de loi visant à faire reconnaître par la République française l’existence d’un génocide en Vendée en 1793 et 1794. Les commentaires sur la signification politique de la démarche et sur ses protagonistes ne seront pas mon propos. En revanche, je relèverai les attendus ajoutés à cette réclamation déjà portée depuis plusieurs années. Les députés invoquent pêle-mêle des lois, des discours, des jugements, comme la déclaration du général Westermann assurant ne pas avoir « de prisonniers à se reprocher » pour éviter la guillotine, ou la formule « race rebelle » du conventionnel Barère comme si « race » avait le sens d’aujourd’hui. Même une invention de Babeuf dénonçant un « populicide » pour accabler Robespierre, déjà guillotiné, et pour aider Fouché à ne pas l’être, est citée !
Passons. En citant les lois de 1793, les députés butent sur des articles exigeant qu’on traite « avec tous les égards dus à l’humanité » les femmes, les enfants, les vieillards (et les hommes sans armes). Ils en concluent pourtant qu’il s’agit d’un « véritable appel au meurtre, au vol institutionnalisé et à la déportation des non-combattants ». Il faudrait se demander pourquoi la République aurait eu besoin de camoufler des intentions aussi perverses, quand elle prenait des mesures répressives, comme la déportation de plusieurs milliers de Basques susceptibles de trahir. Il faudrait se demander pourquoi cette République avait créé des caisses de secours pour les « réfugiés vendéens », au moins 20 000, subventionnés jusqu’en 1797. Il faudrait aussi se demander pourquoi cette même République voulait l’extermination des « brigands de la Vendée », comme de tous les « brigands » quels qu’ils soient, Normands, Alsaciens ou Niçois.
Dans une guerre mettant en cause la survie même de la République, la répression politique, avec les violences et les exactions commises par des hommes laissés libres de leurs actes, mal encadrés par des chefs militaires et craints par les politiques dont ils étaient censés dépendre, a entraîné ici des crimes et spécifiquement des crimes de guerre. Elle n’a été liée ni à un système de terreur, inexistant dans la Constitution ou dans les lois, ni, encore moins, à une entreprise proprement génocidaire.
La volonté démonstrative des députés les conduit à énumérer les actes criminels qui illustreraient leur propos : « mutilation sexuelle », « camp d’extermination », « crémations », « noyades collectives » « ateliers de tannage de peau humaine », « extraction de graisse » humaine. La confusion est totale entre la dénonciation d’un cadre légal et la litanie d’atrocités destinée à éveiller des sentiments d’horreur. Malheureusement, chacun sait que les armées en guerre, de cette période comme de tant d’autres, commettent des abominations, notamment sexuelles, des exécutions massives et des tortures, sans être couvertes par des ordres exprès. La situation de la Vendée n’a pas été malheureusement différente de celle de l’Italie des années 1797-1815, de l’Espagne entre 1807 et 1812, de l’Algérie après 1840, quand la France occupait ces pays. Méfions-nous des condamnations à courte vue !
Relevons quand même que les habitants des Lucs, en Vendée, ne furent pas tous brûlés dans une église, comme ceux d’Oradour en 1944. Relevons aussi que les noyades, bien réelles à Nantes notamment, continuaient des pratiques communes aux négriers habitués à noyer les esclaves révoltés. Rappelons que l’écorchement des condamnés à mort était également une réalité ordinaire à l’époque, qu’un « chirurgien » s’en rendit responsable aux Ponts-de-Cé sans être soutenu ni par sa hiérarchie, ni par les républicains, ni même par les tanneurs du lieu ; mais qu’il n’y eut jamais d’« atelier », comme une légende l’a obstinément rappelé, autour du château de Meudon. Il y eut encore, à la fin du XIXe siècle, un condamné à mort dont la peau servit à confectionner des portefeuilles. Enfin, l’extraction de la graisse humaine, dont le profit revenait aux bourreaux ou aux dissecteurs des facultés de médecine, donnait lieu à un commerce florissant avant et après la Révolution ; ce qui se passa à Clisson, au sud de Nantes, n’en fut qu’un exemple isolé, loin des pratiques quasi industrielles des garçons d’amphithéâtre parisiens sous l’Empire.
Tout cela souligne à quel point l’histoire, et la mémoire, de la Vendée continue d’obséder l’imagination des Français depuis le début du XIXe siècle. Livres, tableaux, films, monuments et innombrables débats rappellent à qui mieux mieux qu’il y a bien une mémoire régionale au cœur des querelles politiques et sociales de la France, c’est la Vendée, de Machecoul à Saint-Florent-le-Vieil, du Loroux-Bottereau à Luçon. Pas plus qu’il n’y eut de génocide, il n’y eut de « mémoricide ». La notoriété du Puy-du-Fou le prouve depuis près de quarante ans.
L’histoire reste une affaire sérieuse. Arrêtons de confondre les déclarations moralisatrices, les témoignages mal contrôlés, les récits d’horreur choisis pour toucher une opinion qui a perdu l’habitude des références érudites et qui est facilement manipulée. Le besoin d’histoire demeure, la nécessité de refonder une école historique solide est une urgence.
 
(1) Dernier livre paru : Nouvelle Histoire de la Révolution française, Perrin, 2012, 638 pages, 27 euros.»
http://www.humanite.fr/tribunes/il-y-eu ... t-g-513956





Après autant de bêtises, un peu d'air frais (même si je ne partage pas toutes les analyses de Martin) ne fait jamais de mal. :rool:

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 19 Jan 2016 11:32 
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Marc Bloch
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Je déterre ce sujet qui est peut être plus adapté pour évoquer les événements de Vendée.


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Avr 2017 7:36 
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Fustel de Coulanges
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Un livre qui fait quelque bruit depuis plusieurs semaines : "Vendée 1793-1794. Crime de guerre ? Crime contre l'humanité ? Génocide ? Une étude juridique" de Jacques Villemain, aux éditions du Cerf.

Une étude originale et fort intéressante du point de vue de son approche juridique, mais qu'il convient cependant de coupler avec d'autres lectures sur la question afin de pallier la fragilité de certaines analyses de sources historiques et de mieux recontextualiser le conflit vendéen et la répression qui fut menée sur ce théâtre d'opération.

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Avr 2017 7:53 
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Marc Bloch
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Drouet Cyril a écrit :
Un livre qui fait quelque bruit depuis plusieurs semaines : "Vendée 1793-1794. Crime de guerre ? Crime contre l'humanité ? Génocide ? Une étude juridique" de Jacques Villemain, aux éditions du Cerf.

Une étude originale et fort intéressante du point de vue de son approche juridique, mais qu'il convient cependant de coupler avec d'autres lectures sur la question afin de pallier la fragilité de certaines analyses de sources historiques et de mieux recontextualiser le conflit vendéen et la répression qui fut menée sur ce théâtre d'opération.


Et la conquête des Gaules par César fut ce un génocide ou un roman ?

Je suis très agacé par cette façon de relire l'histoire avec l'oeil du juriste - et en plus en appliquant rétro activement des concepts juridiques typiques du XXe siècle à une époque ancienne dont tous les témoins et éventuels coupables ont disparu depuis longtemps.

Ni Louis XVIII ni Charles X n'ont envisagé de punir les responsables des massacres de Vendée ! Alors pourquoi leur faire un procès aujourd hui si ce n'est pour des raisons de basse polémique contemporaine ?

Je le dit d'autant plus franchement que je considère que la cause et les souffrances vendéennes sont émouvantes et dignes d'être conservées dans la mémoire nationale et étudiées durable plan historique. Il n'y a pas là matière à analyse juridique.


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Avr 2017 8:07 
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Jean-Clément Martin a commenté l’ouvrage en question en ces termes :

« Des bonnes relations entre Droit et Histoire à propos de la notion de génocide
et à propos du livre de Jacques Villemain, Vendée 1793-1794, Editions du Cerf, 2017, 305 pages, 24 euros.



Comment faut-il s’aventurer dans une discipline intellectuelle avec les instruments empruntés à une autre ? C’est la question qui est posée par l’Auteur, juriste, à propos de la guerre de Vendée et du débat autour du « génocide ». Il le fait certes à raison, mais aussi sans précaution et modestie, si bien que ce livre ravive une polémique, à partir d’arguments contestables et qu’il convient de revenir à une lecture respectueuse des méthodes historiques.

L’argument essentiel du livre tient à l’utilisation par les historiens – dont je suis - de la notion juridique de « génocide », après qu’elle a été réélaborée et mise en œuvre dans les procédures du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, pour le Rwanda et de la Cour Pénale Internationale. L’évolution de la jurisprudence a profondément modifiée la définition qui avait été proposée par R. Lemkin et celle qui fut adoptée ensuite par l’Assemblée générale des Nations Unies. L’Auteur relève que les éléments de jugement employés par les historiens ne prennent pas suffisamment en considération ces mutations et continuent de se référer au génocide commis par l’Allemagne nazie sur les Juifs pour tirer des éléments de comparaisons, en recherchant une intention idéologique marquée, une administration étatique, une définition claire de la population persécutée, toutes caractéristiques que les génocides récents n’ont pas possédées.

L’examen qu’il effectue sur ces bases de la guerre de Vendée mérite l’attention, puisqu’il remet en cause l’usage des notions de « crimes de guerre », « crimes contre l’humanité » et « génocide » pour conclure qu’en 1793-1794 il aurait eu ces trois types d’Entreprises Criminelles Concertées de mars 1793 à octobre 1793 et janvier 1794.

La première difficulté de sa démonstration tient à la faiblesse des arguments tirés de l’histoire. Si les historiens adoptent sans réflexions suffisantes les critères de définition des crimes, l’Auteur ne s’embarrasse pas de précautions pour appuyer son jugement d’exemples jugés déterminants : telle citation d’un soldat, tel extrait de lettres, tel mot d’un représentant en mission, évidemment telle phrase de Robespierre, considéré comme le maître du pays…, comme si tout élément faisait sens pour qualifier la Révolution dans son ensemble et surtout dans sa complexité et ses contradictions.

Pour prendre un exemple particulièrement important, il interprète sans aucune connaissance des faits les décrets du 19 mars 1793, du 1er août 1793 et du 1er octobre 1793. Lorsque le décret du 19 mars 1793 crée la notion de hors-la-loi avec une procédure expéditive pour la comparution et l’exécution sous 24 heures des personnes concernées, il ne suffit pas de citer l’étude du juriste Eric de Mari en oubliant ce qui en fait l’importance, la loi initialement prévue contre les Bretons insurgés a été appliquée de façon pragmatique par des juges selon les circonstances et les lieux concernés, si bien que la loi, contrairement à ce qui est assuré p. 61 ne visait pas les « Vendéens » [1]. Il ne suffit pas non plus de relever que la loi du 1er août a été prise dans la précipitation et dans l’emphase avec l’invocation de la nécessité de « détruire la Vendée » proclamée à plusieurs reprises par Barère, si l’analyse néglige la fonction que ce discours et ce texte jouent dans la lutte à mort engagée entre les factions révolutionnaires, Montagnards contre sans-culottes, mais aussi Montagnards au pouvoir et anciens girondins et anciens dantonistes qui peuplent les bancs de l’Assemblée, les instances administratives départementales et pour une partie les hauts grades militaires.

Que la loi du 1er octobre soit mal écrite, redondante et irréaliste, puisqu’elle réclame l’arrêt de la guerre de Vendée, ne dit rien de l’état mental des Conventionnels, comme le sous-entend l’Auteur mais tout de leur incapacité à diriger effectivement la conduite de la guerre. Ajoutons qu’il est inutile d’invoquer le décret du 7 prairial an II qui avait décrété de mettre à mort les prisonniers anglais ou hanovriens quand on ne sait pas les raisons politiciennes qui provoquèrent sa rédaction. Toutes ces lois ne sont pas des normes mais des armes pour éliminer des adversaires politiques révolutionnaires. Qu’elles soient des bricolages juridiques et que leurs effets aient été terribles est une évidence, que j’ai contribué à établir[2], il est cependant inapproprié d’en tirer des lectures idéologiques aussi réductrices et fausses.

L’histoire n’est sans doute pas une science dure, comme le souhaiterait l’Auteur qui serait prêt à décerner le qualificatif à l’archéologie au motif que les pierres et les os ne mentiraient pas ; elle n’en a pas moins ses exigences et surtout sa connaissance des temps antérieurs sur lesquels il est illusoire de plaquer des considérations actuelles. Que les armées révolutionnaires n’aient pas fait de distinction entre combattants et non-combattants dans la répression, en violation de l’article 8 de la loi du 1er août 1793, censé protéger les femmes, les enfants et les vieillards, est une évidence, que j’ai régulièrement rappelé. Qu’il n’y ait pas d’excuses à chercher est une autre évidence.

Cependant, l’étude du passé apprend que la distinction n’a guère de sens dans les armées de l’époque, où les femmes et les jeunes adolescents sont mêlés aux troupes et font éventuellement le coup de feu si nécessaire, ou surtout ils servent d’aides de camp, d’émissaires, d’espions. C’est encore plus vrai dans tous les cas d’insurrections locales et régionales, quand des rébellions mobilisent des villages ou des bourgs et qu’elles s’affrontent à des soldats venus d’ailleurs, incapables de parler la langue vernaculaire et persuadés, à juste titre le plus souvent, d’être environnés d’ennemis cachés sous les vêtements quotidiens. Le guasto pratiqué pendant les guerres d’Italie estsuffisamment attesté dans toute l’Europe moderne pour que nous sachions que la Vendée n’a été qu’un exemple parmi d’autres. Sous d’autres formes, avec autant d’intensité, ce genre de pratique a été mené dans les derniers siècles sur tous les continents. Il suffit de penser à la guerre menée au Viet Nam et aux débordements qui eurent lieu pour comprendre à quel point cette triste réalité est universelle et ne peut pas être tenue pour discriminante pour la Vendée.

De la même façon, il n’est pas besoin de s’étonner du flou juridique autour du mot « brigand » qui est retenu pour qualifier les insurgés. L’Auteur le note lui-même, les révolutionnaires continuent de recourir à une qualification vieille comme le monde et déjà employée par la monarchie. Mais la conséquence la plus importante n’est pas tirée. Il n’y eut pas que la Vendée, et loin de là, à posséder ses « brigands » qu’il fallait détruire. Le moindre examen des textes émanant du Comité de Salut public montre sans beaucoup chercher que des « brigands » sont traqués partout en France. Il y a bien là, et c’est un trait de l’époque, une culture de la mort, comment appeler ça autrement, qui est partagée par tous et qui ne disparaît sans doute pas avant les années 1840-1850, voire 1870. Reste que cette violence commune n’est pas l’apanage d’un régime ou d’un groupe, il suffit de voir, événement bien connu, ce que furent les massacres de Machecoul (Loire-atlantique) en mars 1793 pour comprendre qu’entre deux populations proches, distinctes sur des questions apparemment limitées de pratiques religieuses et d’habitudes de vie quotidienne, couvait une haine qui fit que, profitant du changement politique, les voisins tuèrent les voisins – à vrai dire comme au Rwanda ou en ex-Yougoslavie - les arguments idéologiques se surimposant à ces actes.

Il n’est pas contradictoire d’écrire, comme l’Auteur me le reproche expressément, que la région Vendée était tout à la fois comparable à toutes les zones marquées par une identité communautaire forte qui la différenciait des zones urbaines, engagées dans la modernité, sans que cela crée une identité particulière spécifique. La « région-Vendée », appellation certes compliquée mais qu’il conviendrait d’employer plutôt que « Vendée » qui crée beaucoup de confusions, fut par contre bien créée par les révolutionnaires parisiens en mars 1793 à l’occasion de discussions opposant Girondins et Montagnards. Toute autre identité est illusoire. En revanche, je maintiens que je ne comprends toujours pas que l’Auteur ne s’intéresse pas à la répression des Basques, déportés parce que basques en 1794, aux Catalans pourchassés parce que ne parlant pas français, voire aux Alsaciens germanophones qui furent persécutés[3].

Dans ce maelström, il n’est pas possible, comme l’Auteur l’assure, de trouver une ligne politique claire. Sa démonstration ne retient des exactions, bien connues et dénoncées par des historiens républicains depuis plus d’un siècle, commises par les colonnes infernales que quelques cas les plus cités, sans tenir compte du fait que la moitié de ces colonnes, par l’effet de positions prises par les généraux les commandant, ne s’adonnèrent pas à ces pratiques systématiques et inefficaces. En janvier 1794, comme avant, il n’y avait pas unité de vue, orientations politiques claires, chaînes de commandement établies. Les massacres, destructions et tortures exécutées sont suffisamment documentés pour qu’il ne soit pas possible de les imputer à un courant, à un groupe ou à un gouvernement ni qu’il soit possible de les lier à la désignation d’une population particulière. Ces pratiques, que l’on peut retrouver dans l’Italie des années 1797-1815, dans l’Espagne de 1808-1809 sont dépendantes du climat de la guerre, des rivalités internes et aussi des jeux politiciens. Même sous le commandement de Turreau, il n’y eut pas de répression systématique dans toute la région-Vendée, notamment là où des représentants en mission, Montagnards pourtant mais jaloux de leurs prérogatives, empêchèrent le passage des troupes – j’ajoute que je ne tire de ces faits aucun argument moral ou politique.

Les arguments du juriste sont peu appropriés en l’occurrence pour rendre compte de la politique suivie par les Conventionnels à propos de la guerre de Vendée. Ils n’ont pas le contrôle des armées commandées par des généraux qui dépendant du ministère de la Guerre, dépendant des sans-culottes. La situation est à l’évidence acceptée par Robespierre, et d’autres membres du comité de Salut public, jusqu’en décembre 1793, avant qu’il s’oppose à la déchristianisation et qu’il remette en cause les mesures prises à Lyon et à Marseille, puis à Nantes. La mise en place du gouvernement révolutionnaire à ce moment précis correspond à l’écroulement du pouvoir sans-culotte lié à la disparition des armées qui ont affronté et anéanti les Vendéens partis outre-Loire. En revanche, la guerre n’est pas achevée au sud Loire, alors que les Bretons entrent à leur tour en insurrection ouverte.

J’arrive à penser que la politique suivie par la Convention a été un calcul cynique, puisque après mars 1794, elle n’a plus à craindre pour sa survie immédiate, les deux menaces représentées par les Vendéens et par les sans-culottes étant dorénavant contenues – mais pas supprimées, on sait que les Vendéens, toujours dangereux, obtiendront une paix de la République en 1795, et que les sans-culottes se révolteront la même année. Les massacres dans la région-Vendée résultent de ce que la guerre fut une guerre « politique », comme on dit un procès « politique », provoquée pour résoudre des des rivalités politiciennes. Ce n’est certainement pas une réponse digne du droit, sauf à rappeler l’évidence que c’est la force qui fonde le droit et que seule l’histoire est capable d’en établir la généalogie.

Ce rappel du point de vue de l’histoire doit s’accompagner de trois autres mises en garde. Qu’il faille tenir compte comme l’Auteur l’assure à raison de l’évolution de la jurisprudence sur le génocide, doit obliger à prendre aussi en compte, en retour, l’épaisseur historique qui a présidé à cette mutation. La transformation du droit est advenue sous la pression de la communauté internationale, en réaction aux événements. Le point de vue du juge, ni même du législateur n’est pas supérieur à celui de l’historien ; en dernier recours c’est même ce dernier qui est capable d’expliquer et de comprendre les changements des normes juridiques. Il suffit de suivre les hésitations du droit international sur le génocide pour perdre toute prétention à dire la vérité de cette façon absolue[4].

Reconnaître qu’une notion juridique est le produit de compromis et de négociations, implique qu’on ne l’utilise pas en toute naïveté. Depuis des années, des chercheurs comme Jacques Sémelin ou David Scheffer récusent l’usage simpliste du mot « génocide » pour lui préférer le mot de « massacres » ou « crimes atroces » pour éviter les débats sans fin liés à la volonté de qualifier telle abomination de génocide[5]. Pourquoi l’Auteur tient-il absolument à cette qualification sauf pour entrer dans un débat étranger à l’histoire ? Il suffit de rappeler les propos de Jacques Hussenet, directeur d’une synthèse consacrée à la guerre de Vendée, estimant que le mot génocide n’ajoutait rien à la compréhension de la réalité pour douter de l’intérêt de ce retour sur une question maintenant bien établie[6].

Enfin se revendiquer de la justice pénale exige qu’on en respecte la règle fondamentale : l’arrêt des poursuites dès lors que le justiciable est décédé – même en présence d’héritiers du poursuivi comme de la victime. C’est donc en droit qu’il n’est pas possible d’entamer une discussion sur des actes commis il y a deux cents ans, et qu’aucun jugement ne peut être prononcé. Dans ce cas, seule l’histoire est capable de donner sa vérité, qui est par définition toujours révisable, au gré des révisions inévitables des méthodes et des approches que chaque génération d’historiens adoptera, loin du précepte qui veut que chose jugée soit tenue pour vérité. Pour toutes ces raisons, il n’y a pas lieu d’accepter cette mise en cause des méthodes historiques mais à en retenir les injonctions à maîtriser les sources, les arguments et les qualifications, pour que la vérité historique et la vérité judiciaire puissent continuer leur dialogue dans un souci de réciprocité et de confiance[7].


[1] Eric de Mari, La mise hors de la loi sous la Révolution française (19 mars 1793 - an III), une étude juridictionnelle et institutionnelle, Paris, LGDJ, 2015.
[2] J.-C. Martin, La guerre de Vendée, Paris, Seuil, 2014.
[3] Je renvoie à ma Nouvelle Histoire de la Révolution française, Paris, Perrin, 2012, pour les descriptions des répressions dans les différentes régions françaises, notamment dans le Sud-Est pendant toute la période.
[4] Eric de Weitz, « Génocide », in C. Delacroix et alii., Historiographies, Paris, Folio Histoire, 2010, T. II, p. 1046-1061.
[5] Jacques Sémelin, Purifier et détruire, Paris, Seuil, 2005.
[6] Jacques Hussenet (dir.), « Détruisez la Vendée ! », La Roche-sur-Yon, Centre vendéen de recherches historiques, 2007.
[7] Voir le dossier « Vérité historique, vérité judiciaire » que j’ai coordonné avec J.-P. Le Crom, dans la revue Droit et Société, 1998, n°38, et l’article « La Démarche historique face à la vérité judiciaire », p. 13-20. »
https://blogs.mediapart.fr/jean-clement ... e-genocide





Voici la réponse de Jacques Villemain à l’article de Martin :

« Réponse à M. Jean-Clément Martin
Monsieur Jean-Clément Martin, qui est l’historien le plus hostile à la thèse d’un génocide ou de crimes contre l’humanité en Vendée (et que je critique pour cela dans mon livre) publie sur son blog une critique, évidemment défavorable de mon ouvrage, ce qui est bien son droit, comme c’est le mien de lui répondre. Ceci seul justifie que (« A tout seigneur tout honneur », si ce fervent robespierriste peut me pardonner un proverbe féodal) que je lui offre une page dédiée sur mon blog, page qui pourra cependant accueillir ensuite d’autres réponses à d’autres critiques, y compris aux siennes s’il venait à les réitérer ou à les développer. Je lui réponds sur mon blog car le sien ne permet de répondre que si on est « abonné » et je n’ai pas l’intention de payer un droit de réponse.
https://blogs.mediapart.fr/jean-clement ... e-genocide

TEXTE
Monsieur Martin dans le long article qu’il veut bien consacrer à mon ouvrage sur son blog, termine par ce par quoi il aurait sans doute dû commencer : «se revendiquer de la justice pénale exige qu’on en respecte la règle fondamentale : l’arrêt des poursuites dès lors que le justiciable est décédé – même en présence d’héritiers du poursuivi comme de la victime. C’est donc en droit qu’il n’est pas possible d’entamer une discussion sur des actes commis il y a deux cents ans, et qu’aucun jugement ne peut être prononcé ». Il y a là une vérité et une erreur : la vérité c’est qu’après la mort des éventuels coupables, aucun procès devant un tribunal n’est possible. L’erreur, c’est de dire qu’aucune « discussion », notamment aucune discussion juridique n’est possible. Non seulement une telle discussion est possible, mais elle est nécessaire.
Elle est possible parce que le concept de « génocide » est tout à fait pertinent pour les faits qui se sont produits en 1793-94 en Vendée. Les contemporains ont en effet tout à fait conscience qu’il s’agit là de crimes, et même de crimes tellement énormes qu’ils n’ont pas de mot à mettre dessus. Alors ils inventent des néologismes. Le Conventionnel Lequinio parle dès mai 1794 de « dépopulation ». La même année Babeuf invente « populicide » un peu comme un siècle et demi plus tard Lemkin inventera « génocide », là aussi pour désigner un crime dépassant toutes les notions de Droit pénal alors connu : la Shoah. Il n’y a pas besoin de faire beaucoup d’étymologie pour comprendre que « dépopulation », « populicide », « génocide », c’est le même sens voire le même mot. La discussion a commencé il y a deux siècles (ne serait-ce que dans les deux procès qui furent alors faits à Carrier en 1794 et à Turreau en 1795, et dans le livre précité de Babeuf), je ne fais que la poursuivre.
Elle est nécessaire si on veut sortir de ce « passé qui ne passe pas ». La Restauration de 1815-1830, mais plus encore celle de 1830-1848 qui essaya de concilier l’Ancien Régime et la Révolution ont en effet été à l’origine de ce que l’historien Reynald Secher appelle un « mémoricide », disons tout simplement la mise sous le boisseau des crimes énormes commis en Vendée en 1793-94. De ce fait la plaie ne s’est jamais refermée. Je ne m’explique pas autrement le succès immédiat que semble avoir mon livre, paru il y a un mois, dans les quatre départements sur lesquels, en tout ou partie, s’étend la « Vendée militaire » (Vendée, Loire-Atlantique, Deux-Sèvres, Maine-et-Loire). Les articles de presse les plus nombreux que j’ai eus dès sa parution se trouvent dans la presse locale de ces départements, ce n’est pas un hasard. Deux siècles après la mémoire reste à vif. Les traumatismes, qu’ils soient individuels ou collectifs, ne sont surmontés que si on n’en parle. Prétendre qu’ »il n’y a pas de sujet » ou pis, que le sujet n’en est pas vraiment un (ce qui est largement la thèse de M. Martin pour qui les violences de la guerre de Vendée sont de simples crimes de guerre comme il s’en commet tant, commis dans le « chaos » d’une « guerre civile » -et donc au moins pour partie par la faute des Vendéens eux-mêmes, pour le reste de la faute à « pas-de-chance ») ne peut qu’exacerber le ressentiment. Bref, ce sujet doit être traité.
Il doit cependant l’être de manière rigoureuse, selon une méthode claire et validée. C’est pourquoi, m’interdisant de poser mes propres règles, je me suis astreint à appliquer celles que la communauté internationale a défini pour la reconnaissance des crimes contre l’humanité et du génocide en les appliquant aux faits de la guerre de Vendée. Les affaires du Rwanda et de l’ex-Yougoslavie ont amené la communauté internationale à s’interroger de manière concrète sur ce qu’est un crime contre l’humanité et un génocide, de manière bien plus précise qu’on ne l’avait fait au procès de Nuremberg, ne serait-ce que parce qu’on avait affaire à des criminels en quelque sorte beaucoup moins « exceptionnels » que Hitler ou Himmler. Cette « banalité du mal » déjà exposée par Hannah Arendt à propos d’Eichmann se montre de manière encore plus évidente avec les tueurs serbes, croates ou hutus agissant dans le cadre de ces tragédies. Turreau ou Westermann ressemblent bien plus à ces militaires qu’à Himmler, Robespierre est bien plus semblable à Karadzic qu’à Hitler. Le génocide est de tous les temps, comme le dit d’ailleurs la convention de l’ONU qui en 1948 affirme dans son préambule qu’«à toutes les périodes de l’histoire le génocide a infligé de grandes pertes à l’humanité ». En outre la Cour Internationale de Justice reconnait que les principes qui sous-tendent la Convention sont reconnus par les « nations civilisées » comme ayant force contraignante pour les États même en l’absence d’obligation découlant d’une convention. Voilà qui établit assez, sauf à nier qu’en 1793 la France était une « nation civilisée » que la discussion est légitime. Encore faut-il qu’elle se fonde sur des concepts et des raisonnements reconnus aussi universellement que possible : la jurisprudence des tribunaux de l’ONU et de la Cour Pénale Internationale répond à ce critère. Ajoutons que des auteurs, qui ne sont pas moins historiens que M Martin, comme M. Yves Ternon (dont je suis loin d’approuver toutes les conclusions) n’hésitent pas à appliquer le concept de génocide aux époques les plus reculées puisqu’il remonte jusqu’au moyen-orient ancien, à Rome, aux Mongols etc. La seule limite à respecter est en l’occurrence de vérifier que le concept pénal qu’on applique aux faits du temps passé est pertinent pour cette époque, ou pour le dire plus clairement, que le fait qu’on considère comme criminel aujourd’hui l’était déjà à l’époque où ils se sont produits (élément de « mens rea » autrement dit d’ »intention criminelle »), mais cela ne fait pas de doute pour les violences de la guerre de Vendée, on l’a vu.
Je ne suis pas loin de penser que si M. Martin ne répute la discussion impossible qu’après avoir sur plusieurs pages argumenté contre ma thèse, c’est qu’au fond il ne croit pas lui-même à son propre argument. S’il y croyait vraiment, cet argument l’aurait aisément dispensé de tous les autres, et pour commencer il se dispenserait comme il le fait lui-même dans ses ouvrages de qualifier les faits de simples « crimes de guerre ». En effet, si la discussion sur la qualification pénale est impossible, elle est impossible pour tous les types de crimes. Enfin, dès lors que M. Martin intitule son texte «Des bonnes relations entre Droit et Histoire à propos de la notion de génocide », on comprend mal qu’il affirme qu’ »il n’est pas possible d’entamer une discussion » sur les violences de Vendée. Vouloir conserver à l’Histoire « de bonnes relations » le Droit, tout en affirmant que la discussion n’est pas possible a quelque chose de paradoxal. Cela ne peut se comprendre que parce que pour M Martin, le Droit n’a finalement qu’à se taire ou se borner à enregistrer les conclusions de l’Historien au nom du « respect » dû à sa méthode comme nous allons le voir.
Je ne reprendrai pas un à un les arguments de M. Martin, mais j’exposerai brièvement les cinq raisons principales pour lesquelles ils ne me convainquent pas.

1-Une partie des arguments de M. Martin résulte de son refus, ou peut-être de son incapacité à sortir de sa méthode historique. Il affirme ainsi qu’ « il convient de revenir à une lecture respectueuse des méthodes historiques ». Eh bien non, cela ne convient pas. L’historien est en quelque sorte le policier du temps passé : il enquête sur les faits du passé comme le policier le fait sur ceux du présent. Mais le juge n’a pas à apprécier le dossier pénal dans « une lecture respectueuse des méthodes policières » s’agissant des faits du présent pas plus que je n’ai en tant que juriste à faire une lecture respectueuse des méthodes historiques s’agissant de faits du passé sur lequel l’historien enquête. Le devoir du juge ou du juriste est précisément de s’extraire de ces méthodes pour confronter les conclusions policières ou historiennes à la norme légale qui leur est extérieure. Dois-je ajouter qu’il n’est pas rare que le juge s’oppose aux méthodes de la police et déclare nulles les preuves que cette dernière a obtenues par certains moyens qu’elle estime pourtant être « de bonne méthode » en ce qui la concerne ? Le policier s’interdit, et la loi lui interdit d’ailleurs, de qualifier les faits sur lesquels il enquête. Ou plutôt cette forme de police particulière qu’est la « police judiciaire » (dont les membres ont d’ailleurs une formation juridique spéciale) doit, dès qu’elle a connaissance de faits dont le caractère criminel lui semble vraisemblable, les dénoncer au Parquet, mais là s’arrête son rôle. C’est ensuite aux seuls magistrats à définir, selon des méthodes qui sont celles du droit pénal et non celles de la police (et heureusement !), si les faits doivent être qualifiés pénalement, et dans l’affirmative comment ils doivent l’être, et à mener ensuite la procédure qui aboutira peut-être à une condamnation. La science historique a ses méthodes et ses mérites, mais exclusivement pour son objectif propre : établir les faits et en fournir une explication. Elle est inadaptée à l’exercice de qualification pénale : tout crime peut s’expliquer, mais l’explication n’est pas une excuse (sauf si la loi le dit) et ne retire en rien leur éventuel caractère criminel aux faits. Pour le dire par métaphore : je ne nie pas le mérite des couteaux à poisson, mais si c’est une côte de bœuf que j’ai dans mon assiette, c’est un couteau à steak que j’irai chercher. Monsieur Jean-Clément Martin attaque mon livre avec des instruments inadéquats : il ne peut convaincre que lui-même. Lorsqu’il prétend analyser ou critiquer mon étude juridique avec les moyens de sa méthode historique qu’il me somme de respecter, ma réponse est un « non » de principe pour les raisons que je viens d’exposer et que je vais développer ci-après. Je ne respecte la méthode historique que pour les résultats qu’elle peut légitimement produire, et là je la respecte absolument. Mais pour ceux qu’elle ne peut pas légitimement produire, comme des jugements à caractère pénal, je la traite comme le couteau à poisson que je viens de mentionner et la remets dans son tiroir.
Un bon exemple de ce curieux « autisme historien » qui consiste à n’être pas capable de s’extraire de sa matière pour comprendre que le sujet des « crimes en Vendée 1793-94 » n’est pas un sujet purement historique, ni même essentiellement historique, est lorsque M. Martin écrit : «Il suffit de rappeler les propos de Jacques Hussenet, directeur d’une synthèse consacrée à la guerre de Vendée, estimant que le mot génocide n’ajoutait rien à la compréhension de la réalité pour douter de l’intérêt de ce retour sur une question maintenant bien établie». Mais où diable monsieur Martin a-t-il pris que l’analyse juridique avait pour objet d’expliquer l’Histoire aux historiens ? que le concept de génocide ne permette pas à ces derniers de mieux comprendre les faits de la guerre de Vendée, le juriste ne s’en surprendra pas. Il n’a d’ailleurs rien à dire sur ce chapitre qui n’est pas de sa juridiction. Le but du droit pénal n’est pas de faire comprendre l’histoire, mais éventuellement de dire, parmi les faits historiques que cette science établit, lesquels constituent des crimes, et de quel type. J’admets encore bien volontiers que la notion de « génocide » n’explique sans doute pas mieux, pour les historiens, que celle d’ »extermination » ou de « massacre » le système concentrationnaire nazi, et j’admets volontiers que la même affirmation s’applique mutatis mutandis à l’affaire vendéenne de 1793-94. Mais même M. Martin devrait être capable de comprendre qu’il n’est pas indifférent d’exposer les raisons pour lesquelles cette «extermination» ou ce « massacre » constituent des « crimes de guerre » ou « crimes contre l’humanité » ou «génocide». Quant au fait que la question serait maintenant «bien établie », c’est sans doute ce que M. Martin veut croire et faire croire. Mais il semble assez clair qu’elle ne l’est pas, ou alors on ne s’explique pas qu’il se répande dans tant d’ouvrages, de blogs et d’émissions de télévision pour expliquer qu’il ne s’agit pas d’un génocide. Que la bataille de Marignan ait eu lieu en 1515 me semble effectivement être affaire« bien établie» si j’en juge par le fait que personne n’en discute plus. Quant à la question des crimes commis en Vendée en 1793-94, nous n’en sommes pas là, loin s’en faut, et M. Martin qui se bat sur ce créneau depuis trente ans (depuis que M. Secher a lancé la thèse inverse avec le succès qu’on sait en 1986) est particulièrement bien placé pour le savoir.

2- faute d’être capable de s’abstraire de sa méthode historique (ou d’accepter de le faire), M Martin en vient à des affirmations totalement inopérantes, par exemple : « l’Auteur ne s’embarrasse pas de précautions pour appuyer son jugement d’exemples jugés déterminants : telle citation d’un soldat, tel extrait de lettres, tel mot d’un représentant en mission, évidemment telle phrase de Robespierre, considéré comme le maître du pays…, comme si tout élément faisait sens pour qualifier la Révolution dans son ensemble et surtout dans sa complexité et ses contradictions. ». Je ferai observer à M. Martin que le propre de l’activité juridictionnelle est précisément de s’appuyer sur des éléments «jugés déterminants». C’est ce qu’on appelle le «faisceau d’indices» en jurisprudence administrative ou les «indices graves et concordants» en matière pénale. Si M. Martin estime que les éléments que je cite ne sont pas « déterminants » qu’il dise en quoi ils ne le sont pas, mais qu’il admette que tout jugement, notamment pénal, est fondé sur de tels éléments (parfois une simple analyse ADN suffira pour élucider une affaire de meurtre, qui bien sûr ne s’y résume pas). En l’occurrence je cite effectivement, avec toutes les précautions qu’impose la méthode juridique, de nombreux documents de militaires qui exposent qu’ils tuent tous les Vendéens qu’ils rencontrent et qu’ils le font sur ordre de leurs supérieurs, ordres qu’ils ne commentent éventuellement que pour les approuver. Ceci est effectivement déterminant pour l’établissement de la responsabilité criminelle. Pour le reste, M. Martin déforme ma thèse quand il laisse entendre que j’aurais écrit que je considère Robespierre comme responsable en tant que «maître du pays». Au contraire, et me fondant d’ailleurs sur les propres écrits de M. Martin, je lui donne volontiers acte de ce que Robespierre est seulement un membre, certes particulièrement important (« prépondérant » est l’adjectif le plus souvent utilisé par les historiens), de cet organe collégial qu’est le comité de salut public, mais pas le « maître » de la France ou le président dudit comité. Mais précisément parce que c’est un organe collégial, chaque membre du collège endosse la responsabilité des actes de l’ensemble du groupe (exactement comme dans une bande criminelle chaque membre de la bande voit sa responsabilité pénale engagée pour l’ensemble des actes criminels qu’elle commet). La jurisprudence pénale internationale a développé, dans le sillage des « organisations criminelles » du Tribunal de Nuremberg (la SS, la Gestapo etc) le concept d’ »entreprise criminelle commune » pour déterminer la responsabilité dans les crimes de masse qui, de fait, ne peuvent pas être commis par un homme seul mais le sont nécessairement par un collectif. Et à cet égard, oui, tout élément fait sens du moins dès qu’il peut être reconnu comme un élément nécessaire de la chaîne des responsabilités criminelles : le vérifier est la seule « précaution » que la méthode juridique m’impose et je le fais en m’appuyant à chaque fois sur la jurisprudence topique. Chaque maillon, chaque détail même, a son importance, et certains sont effectivement « déterminants » : l’historien ne le sait peut-être pas, mais s’il lisait ne serait-ce qu’un roman policier (je ne parle pas même d’un vrai dossier pénal) il s’en rendrait compte rapidement. M. Martin m’obligera enfin à me dire où je qualifie «La Révolution dans son ensemble» de quoi que ce soit : je n’en considère que les 15 mois qui vont de mars 1793 à mai 1794, et sur ces 15 mois je ne considère que les faits intervenus dans ce qu’on appelle la «Vendée militaire». Mais là, oui, tout ce qui concerne cette période a son importance. Pour le reste ce n’est pas à la Révolution que j’attribue les crimes de la guerre de Vendée mais, selon la logique du droit pénal, à certains acteurs révolutionnaires.

3- à force de vouloir tout « contextualiser » M. Martin ne voit plus les faits et partant ne peut pas en comprendre la portée juridiquement pertinente ou non. N’en donnons qu’un exemple quand il me reproche d’avoir «négligé» (à propos de la loi du 1er aout 1793 et du discours de Barère «Détruisez la Vendée») «la fonction que ce discours et ce texte jouent dans la lutte à mort engagée entre les factions révolutionnaires, Montagnards contre sans-culottes, mais aussi Montagnards au pouvoir et anciens girondins et anciens dantonistes qui peuplent les bancs de l’Assemblée, les instances administratives départementales et pour une partie les hauts grades militaires.». Je lui donne volontiers raison. Je dirai même plus. Je ne «néglige» pas : j’»ignore». Et je ne puis qu’ignorer car la considération de la « fonction » de ce discours et de ce texte est en l’occurrence sans intérêt pour l’analyse juridique. Que la loi du 1er août ait été prise pour tel ou tel motif politique est en effet entièrement indifférent, dès lors qu’elle sert de base légale et donc de motivation à un crime qui sera ensuite effectivement commis à savoir l’envoi d’une «armée incendiaire» en Vendée qui doit enlever les subsistances (réduire une population à la famine est un crime contre l’humanité, rappelons-le). De tels motifs politiques sont peut-être des explications, ils ne seront jamais des excuses (juridiquement cela s’analyse même en «circonstances aggravantes»). M. Martin confond ici le «mobile» (qui est à l’origine ce qui motive l’acte) et l’»intention criminelle» (qui est le but poursuivi). Un mobile non-criminel peut tout à fait engendrer une intention absolument criminelle. Dans la trame du crime passionnel : «Je l’aimais, elle ne m’aimait pas (ou plus), je l’ai tuée», «Je l’aimais» est le mobile, certes non criminel. «Je l’ai tuée» est en revanche un acte tout à fait criminel que le «mobile» «Je l’aimais» ne saurait absoudre. Puisque M. Martin s’attache tant à la «fonction» de la loi du 1er août et si peu à ses effets, je lui rappelle que les historiens peuvent bien soutenir, et ils n’ont sans doute pas tort, que la «fonction» du discours antisémite a bien souvent été de concentrer ou de détourner la frustration populaire, issue de conditions de vie difficiles, vers un groupe particulier désigné comme «bouc émissaire», à savoir les Juifs. C’est particulièrement vrai dans l’Allemagne post-1929 où les choses ont finit par prendre les dimensions qu’on sait. Mais d’un point de vue pénal, cette «fonction» (qui s’analyse juridiquement comme un « mobile ») est indifférente et tout ce qui compte c’est que des Juifs ont été victimes de crimes dont ces discours sont la cause directe et certaine, ce qui permet d’ailleurs d’affirmer que les auteurs de ces discours portent la responsabilité criminelle de leurs conséquences. Dans notre affaire, tout ce qui importe est que la loi du 1er août ordonne un crime contre l’humanité ou «attaque généralisée et systématique contre une population civile. Le « mobile » n’intéresse le juge que dans la mesure où il explique « l’intention criminelle » (« is fecit cui prodest » disaient les latins) ou quand il se confond avec elle ce qui peut arriver notamment pour ce qu’on appelle les « crimes de haine » (motivés par exemple par le racisme, l’homophobie etc).
Autre exemple d’argument inopérant lorsque M. Martin écrit : « il est inutile d’invoquer le décret du 7 prairial an II qui avait décrété de mettre à mort les prisonniers anglais ou hanovriens quand on ne sait pas les raisons politiciennes qui provoquèrent sa rédaction. Toutes ces lois ne sont pas des normes mais des armes pour éliminer des adversaires politiques révolutionnaires. ».C’est peut-être inutile à l’historien, ce n’est pas inutile au juriste en tant que ce décret est clairement la manifestation d’un refus de respecter le droit de la guerre et donc de faire du crime de guerre une « politique d’Etat » avec tout le caractère systématique, et la responsabilité pénale, que cela implique. Ce décret est la preuve irréfutable, en droit pénal, d’une intention criminelle, identique pour la guerre étrangère à celle qui fut mise à l’œuvre dans cette guerre intérieure que fut l’affaire vendéenne : ce n’est donc pas rien. Certes cette loi ne fut jamais appliquée (les généraux républicains savaient qu’à la différence des Vendéens qui n’en usèrent que rarement, les Anglais ou Hanovriens auraient usé du réciproque et que les représailles auraient été immédiates). Mais cette loi eût-elle été appliquée, comme l’a été la loi du 1er août (et avec quelle énergie !), le moins qu’on puisse dire est que, toute « arme pour éliminer des adversaires politiques révolutionnaires » qu’elle soit aux yeux de M. Martin, elle en aurait tué bien d’autres que dans ce camp-là.
Cette « contextualisation » finit d’ailleurs par être contre-productive. Ainsi quand, prétendant replacer les violence de Vendée dans le cadre plus large des répressions menées par la Convention, M. Martin écrit : « je maintiens que je ne comprends toujours pas que l’Auteur ne s’intéresse pas à la répression des Basques, déportés parce que basques en 1794 » etc. Je renoncerai à la facilité qui consisterait à lui dire que mon livre portant sur la Vendée, les Basques n’y ont pas leur place, mais je dirai ceci : si véritablement les Basques du Labourd ont été déportés « parce que Basques », cela constitue prima facie ce crime contre l’humanité décrit à la lettre d) du paragraphe 1 de l’article 7 du Statut de la Cour Pénale Internationale («Déportation ou transfert forcé de population »). C’est évidemment à vérifier sur pièces. Je prends d’ailleurs ici solennellement l’engagement envers M. Martin, s’il veut seulement me promettre en retour d’en appuyer la publication soit aux « Annales Historiques de la Révolution Française », publiées par la Société des Etudes Robespierristes dont il est l’un des piliers, d’écrire un article, de la longueur qu’il déterminera lui-même sur ce sujet, et à cet effet je suis tout à fait disposé à recevoir ses conseils bibliographiques pour l’établissement du dossier historique. Comme c’est dans les ouvrages de M. Martin, que je cite dans mon livre d’ailleurs beaucoup plus souvent que M. Secher, que j’ai trouvé certains des meilleurs arguments en faveur de la thèse du génocide, et je tiens ici à l’en remercier, je considèrerai ses conseils d’historien comme précieux, s’agissant des faits à examiner tout au moins.

4- L’incapacité de M. Martin à comprendre un raisonnement juridique est absolument impressionnante. Par exemple il se défend d’une critique que je lui adresse en écrivant : «Il n’est pas contradictoire d’écrire, comme l’Auteur me le reproche expressément, que la région Vendée était tout à la fois comparable à toutes les zones marquées par une identité communautaire forte qui la différenciait des zones urbaines, engagées dans la modernité, sans que cela crée une identité particulière spécifique » (c’est moi qui souligne). L’erreur de M Martin est ici de comprendre « identité particulière spécifique » au sens objectif, alors que précisément, et il me semble que je l’explique assez clairement pages 111-114 en citant les jurisprudences Nikolic (1995) et Jelisic (1999) du Tribunal pour la Yougoslavie (TPIY) et Akayesu (1998) et Bagilishema (2001) du Tribunal pour le Rwanda, que ce qui compte est moins le fait que le groupe visé ait objectivement une « identité particulière spécifique » que le fait ce groupe soit perçu par ses persécuteurs comme ayant une telle identité. A cet égard, quand dans la phrase qui suit celle que je viens de citer M. Martin ajoute «La « région-Vendée », appellation certes compliquée mais qu’il conviendrait d’employer plutôt que « Vendée » qui crée beaucoup de confusions, fut par contre bien créée par les révolutionnaires parisiens en mars 1793 à l’occasion de discussions opposant Girondins et Montagnards» (c’est moi qui souligne). Il démontre exactement que c’est bien « comme tels » que les Vendéens ont été exterminés, ce qui caractérise le génocide, et je le remercie d’un témoignage « à charge » aussi capital contre les « révolutionnaires parisiens ». A l’élément objectif « identité communautaire forte » se joint l’élément subjectif « identité particulière spécifique » parce que les « révolutionnaires parisiens » savaient parfaitement ce qu’étaient ces Vendéens qu’ils voulaient exterminer et c’est l’essentiel. Pour que M. Martin me comprenne bien je prendrai l’exemple du meurtre antisémite : 1) les Juifs ont bien objectivement une «identité communautaire forte» comme dit M Martin à propos des Vendéens 2) je suppose ici que M. Martin n’est pas juif. Cependant, si (ce qu’à Dieu ne plaise) quelqu’un l’assassine demain aux cris de « Meurs, sale Juif ! » ce sera juridiquement un meurtre antisémite. L’assassin, en supposant qu’il ait pris conscience de son erreur, ne pourra pas l’utiliser en défense devant le au tribunal en disant « M. Martin n’avait pas spécifiquement une identité juive, donc la circonstance d’antisémitisme/racisme ne peut pas être retenue !». Le juge lui répondra : «La circonstance que M Martin n’ait pas été objectivement juif est inopérante. Ce qui est important c’est que vous ayez cru subjectivement qu’il l’était et que vous l’ayez tué pour ce motif, donc « comme tel » : le racisme/antisémitisme était donc bien constitutif de votre intention criminelle ». Et il n’est pas niable que les « révolutionnaires parisiens » ont bien cru que le « peuple Vendéen » existait. Il se trouve qu’en outre les Vendéens avaient bien une identité communautaire objective. De fait il n’y a pas de contradiction entre les deux affirmations relatives à l’« identité communautaire forte » et à l’« identité particulière spécifique », simplement M. Martin n’a compris que la moitié du sujet, car il n’a clairement pas compris que la question de l’identité doit être envisagée, du point de vue pénal, à la fois objectivement et subjectivement. Encore un effort sinon pour être juriste, du moins pour comprendre un raisonnement juridique, M. Martin ! Ou alors dites-moi en quoi ma démonstration n’était pas claire.

5- M. Martin fait enfin toute une série d’affirmations dont on ne voit pas le fondement, sauf à l’attribuer à un aveuglement qu’on espère n’être pas volontaire. Affirmer par exemple que : «« Dans ce maelström, il n’est pas possible, comme l’Auteur l’assure, de trouver une ligne politique claire » (….) « En janvier 1794, comme avant, il n’y avait pas unité de vue, orientations politiques claires, chaînes de commandement établies », c’est nier l’évidence. Les lois des 19 mars, 1er août et 1er octobre sont parfaitement claires. Le projet de Turreau avalisé –de manière tout à fait hypocrite il est vrai- par Carnot, est parfaitement clair. Les instructions des Représentants en Mission sont parfaitement claires. Les ordres donnés aux militaires sont parfaitement clairs, en tous cas pour un juriste. Tous ces textes sont clairs et les violences constatées en sont la conséquence directe et certaine ne serait-ce que parce qu’aucun de ceux qui les ont mis en œuvre n’ont eu d’hésitation sur leur sens. Du point de vue du droit pénal, il n’y a pas besoin d’aller plus loin. Tout cela est parfaitement clair et surtout d’une effrayante cohérence : tous ces écrits convergent en cette idée que la guerre de Vendée ne sera terminée que quand le dernier Vendéen aura été exterminé. Et la chaîne de commandement n’est jamais rompue. La Terreur est là pour en assurer la solidité. Un historien comme Patrice Gueniffey tire en quelques mots les conséquences du poids de cette logique de Terreur qui va du comité de salut public aux militaires sur le terrain en passant par les Représentants en Mission (des Conventionnels, choisis par le comité de salut public et avalisés par la Convention) qui se chargent d’aiguillonner leur zèle par la peur de la guillotine : « Le fanatisme idéologique n’explique presque jamais les atrocités commises en 1793 ou 1794. Ce sont la médiocrité, la veulerie, l’ambition du pouvoir et l’instinct de survie qui les expliquent». Et M. Gueniffey de donner l’exemple de Turreau, exposant comment ce général cherche à se couvrir à l’égard du comité de salut public qui fait guillotiner sans hésiter tout général qui ne lui semble pas marcher conformément à ses vues. Le raisonnement est imparable. C’est d’ailleurs une des raisons de la férocité des massacres : ayant peur de ne pas en faire assez et de se faire expédier à l’échafaud pour négligence, les militaires, Turreau en tête, massacrent avec la dernière énergie.
A la fin, entre ce que M. Martin ne comprend pas, ce qu’il ne peut pas comprendre et ce que peut-être il ne veut pas comprendre, je crains que le dialogue académique que j’aurais pu souhaiter avec lui soit bien mal engagé. Après tout, en tant que diplômé de Sciences Politiques je suis tout de même assez frotté d’Histoire (j’ai même assuré pendant plusieurs années un « cours-séminaire » d’histoire – histoire diplomatique certes- à Sciences-Po Paris), et l’analyse politique (de politique étrangère il est vrai) est mon métier depuis trente ans. Je puis espérer comprendre les livres de M Martin et il ne m’aurait pas déplu de discuter avec lui de ses thèses. Mais évidemment il me faudrait, en sens inverse, un interlocuteur qui ne soit pas totalement fermé à la matière juridique au point de déclarer qu’ »’il n’est pas possible d’entamer une discussion [juridique] sur des actes commis il y a deux cents ans ». Deux conditions sont nécessaires à une telle discussion que j’appelle de mes vœux : 1) il faut d’abord un interlocuteur qui ne la déclare pas impossible par principe et 2) il faut que cet interlocuteur sache se servir au moins un peu et du couteau à poisson et du couteau à steak dont je parlais plus haut (mais ce ne sera pas une discussion « au couteau », je crois être assez diplomate pour le garantir, dès lors qu’on est entre gens de bonne foi). J’ose prétendre remplir ces deux conditions, il est dommage que M Martin n’en remplisse aucune. J’en prends acte à regret et ne puis que dire ma disponibilité à ouvrir le dialogue avec quiconque répondrait à ces deux critères. Ceci dit je me réserve de continuer à répondre aux futurs textes que M. Martin croirait devoir publier contre la thèse que je défends.

En conclusion, j’insiste sur le fait que ma thèse n’est pas une déclaration de guerre à l’Histoire et aux historiens, dont je respecte infiniment les travaux et la science. Il y a place pour une coopération féconde entre disciplines, mais à condition que chacune reste dans son ordre propre. Aux historiens l’établissement des faits et leur explication. Aux juristes l’appréciation de leur éventuelle qualification criminelle selon des règles qui sont celles d’abord celles de la philosophie du Droit, du droit substantiel ensuite. Droit et Histoire ont beaucoup à construire ensemble. Le travail des historiens est tout à fait fécond et fort utile à celui des juristes, mais il est d’une nature différente, ne se fonde pas sur les même méthodes et ne s’y substitue pas. Le travail historien est la base sans laquelle aucun jugement sur les faits du passé n’est possible. Il ne peut cependant prétendre en être au sommet. Ceci ne signifie pas que le Droit soit supérieur, moralement ou scientifiquement, à l’Histoire, je n’entends cette supériorité qu’au sens en quelque sorte « architectural » de la base sur laquelle on construit autre chose, selon d’autres méthodes. Je ne doute pas pour ma part que d’une féconde coopération entre ces deux disciplines puisse naître un progrès global de civilisation./.Jacques VILLEMAIN »
https://vendee1793.com/2017/03/31/reponse-a-jc-martin/

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Juin 2017 15:22 
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Marc Bloch
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Une phrase qui donne à penser sur la spécificité vendéenne : "le bocage empêche la circulation des idées nouvelles mais développe l'esprit de solidarité " Vincent Noyoux.


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Juin 2017 20:14 
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Drouet Cyril a écrit :
Pour info, le 19 décembre 2011, M. Remiller, député UMP de l’Isère, déposa un amendement (finalement bien vite retiré) à la proposition de loi relative à la répression de la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi.
L’amendement en question :
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pd ... 500004.pdf

Je n’apporterai pas d’autre commentaire sur ce texte, celui-ci reprenant quasiment textuellement la proposition de loi de 2007 qui avait été abordée ici :
http://www.passion-histoire.net/viewtop ... 47#p394347


" la répression de la contestation de l'existence des génocides reconnus par la Loi "
Quel verbiage inepte quand même...


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Juin 2017 21:49 
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Lordblackadder a écrit :
" la répression de la contestation de l'existence des génocides reconnus par la Loi "
Quel verbiage inepte quand même...

Ridicule. D'autant qu'il y a des lois sur le négationnisme, non ?

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 17 Juin 2017 23:28 
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Pierre de L'Estoile
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La proposition de loi relative à la répression de la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi a été adoptée par l'Assemblée Nationale et par le Sénat. Elle qualifiait de délit pénal le fait de contester ou de minimiser de façon outrancière l'existence d'un ou plusieurs crimes de génocide défini à l'article 211-1 du code pénal et reconnus comme tels par la loi française . Elle visait en fait uniquement le génocide arménien de 1915, seul génocide reconnu par la loi française (loi du 29 janvier 2001).

Déclarée inconstitutionnelle par le Conseil Constitutionnel le 28 février 2012, elle n'a pas été promulguée.

Le motif donné par le Conseil Constitutionnel est que cette loi aurait porté une atteinte anticonstitutionnelle à la liberté d'expression et de communication.

Le conseil constitutionnel précisait en outre dans sa décision qu'une disposition législative ayant pour objet de « reconnaître » un crime de génocide ne saurait, en elle-même, être revêtue de la portée normative qui s'attache à la loi. Autrement dit, le Conseil Constitutionnel, qui n'avait pas été saisi lors de l'adoption de la loi du 29 janvier 2009, affirme que celle-ci, si elle porte le nom de loi, n'en a pas la qualité.

Il ne s'est pas prononcé sur la loi du 21 mai 2001 qui qualifie de crimes contre l'humanité la traite négrière et l'esclavage. En toute logique, il faut considérer celle-ci également comme un texte sans portée normative.

La contestation du génocide perpétré par les nazi fait l'objet de la loi du 13 janvier 1990 qui n'est pas atteinte par la décision du 28 février 2012. Ce crime contre l'humanité n'a pas été "reconnu" par le parlement mais par une autorité judiciaire, ce qui fait toute la différence avec le génocide arménien ou l'esclavage.


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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 18 Juin 2017 5:49 
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Inscription : 10 Fév 2009 0:12
Message(s) : 9063
Merci pour cette intéressante mise au point juridique.

De manière générale, le Conseil Constitutionnel fait du bon travail, et évite bien des c...ries législatives.

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 18 Juin 2017 9:21 
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Salluste
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Bonjour,

De recentes recherches genealogiques m'ont révèlé de nombreux ancetres liés aux guerres de Vendée, des victimes civiles des colonnes infernales, mais également des membres de l' armée royale et catholique. Ceci tant du côté paternel que maternel.
Je suis issu de cette guerre, car descandant d'une réfugiée installée dans le Loiret, où elle a fait souche.
Depuis je me passionne pour cette période .
J'ai lu et lis encore de nombreux bouquins. J'aimerais aller plus loin et rejoindre une association etudiant cette période et perpetuant cette memoire.
Une association apolitique. ...donc non nostalgique de la monarchie...ca existe d'apres-vous ?

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 Sujet du message : Re: Autour de la Vendée
Message Publié : 19 Juin 2017 12:16 
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Fustel de Coulanges
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Inscription : 06 Fév 2004 7:08
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Jerôme a écrit :
Une phrase qui donne à penser sur la spécificité vendéenne : "le bocage empêche la circulation des idées nouvelles mais développe l'esprit de solidarité " Vincent Noyoux.


Martin (La Vendée et la France) ne partage pas l'avis de ce journaliste :
« La région-Vendée n’est pas constituée par le bloc uniforme du bocage.
[…]
Malgré cette disparité profonde des paysages, la participation des ruraux à la révolte sera à peu de chose près analogue. »

Pink panther a écrit :
Une association apolitique. ...donc non nostalgique de la monarchie...ca existe d'apres-vous ?


Les deux grandes associations spécialisées sur les Guerres de Vendée sont le "Souvenir vendéen" et "Vendée militaire". Elles ne correspondent cependant guère à vos souhaits : la religion est omniprésente au sein de la première, et la seconde est proche d'Action française.
Il existe néanmoins d'autres associations au sein de certaines communes, mais leurs travaux ne sont pas uniquement centrés autour du conflit vendéen et ne concernent que l'histoire locale.

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