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Message Publié : 07 Sep 2017 16:37 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Le soucis que l'on rencontre ici c'est la mise en perspective de la conquête coloniale européenne. Si on veut donner du crédit à la thèse de Cesaire qui, et c'est le privilège su poète sur l'universitaire, ne donne pas les moyens d'objectiver son propos, il faut identifier ce qui fait la spécificité de cette conquête.

En effet si c'est une conquête comme les autres, elle s'inscrit dans le concert des violences humaines de la conquête de la Gaulle à Tamerlan.

S'il existe des éléments spécifiques, ces derniers doivent se former sous une forme, plus ou moins dégradé, dans des éléments de continuité entre Shoah et conquêtes européennes coloniales.

Enfin même dans le troisième point il sera intéressant de savoir si les éléments de la Conquête coloniale retrouvés Shoah sont apparus ailleurs que dans le fait colonial allemand et pourquoi ceux ci n'ont pas déclenché de phénomène équivalent...

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Message Publié : 07 Sep 2017 17:06 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Il y quand même quelques articles de recherche sur le sujet facilement disponible avec lesquels on peut être ou ne pas être d'accord. Ils ne sont pas des arguments d'autorité.

Citation : "Si l’expérience intensive de sujétion et d’extermination coloniales contribue à générer la violence individuelle et institutionnelle et qu’une telle expérience puisse être re-transférée en Europe, il devient alors difficile d’expliquer les différences entre d’une part, la Grande-Bretagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas et d’autre part, l’Allemagne, on pourrait également ajouter l’Autriche et l’Italie. Selon l’hypothèse des continuités, il devient alors impossible de comprendre le fait que la Grande-Bretagne et la France aient pratiqué une violence coloniale à connotation raciale tout en constituant le noyau des démocraties occidentales et non celui du totalitarisme génocidaire."

Artcile de Robert Gerwarth et Stephan Malinowski dans XXème siècle

www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-r ... ge-143.htm

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Message Publié : 07 Sep 2017 17:57 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 13 Juin 2017 15:04
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-
melpomène a écrit :
Sans prétendre participer à un débat auquel je ne pourrais pas apporter grand chose, il me semble tout de même qu'il y a une forme d'incompréhension entre les participants...

Ceci me semble normal car plusieurs approches se mêlent : le juridique (pour la notion de génocide), le philosophique, l'historique qui amène par sa méthode à se trouver en porte à faux des deux autres et parfois des combinaisons.

Citer :
"Le point de départ, et aussi le titre du livre, est fourni par une phrase du livre de Conrad, Au cœur des ténèbres, prononcée par un des personnages : "Exterminez toutes ces brutes". Sven Lindqvist prend cette phrase au sérieux, et montre dans ce livre que Conrad a saisi ici l’essence de la colonisation occidentale. Il considère dès le début du livre le sens primaire des mots extermination et brute : l’annihilation totale de personnes considérées comme "brutes", c’est-à-dire dont l’humanité est niée.

Je n'ai pas lu ce livre et quoique je ne trouve aucune imprégnation du colonialisme dans le choix nazi d'extermination de minorités avec chacune une sorte de spécificité, le livre aussi me pose des questions.
Vous évoquez un écrivain prenant son titre au sérieux, je traduis par stricto sensu pour le mot "brutes". J'ai déjà un problème : qu'entend-t-il par "brutes" ? Des personnes très cultivées se comportent en brutes. Alors "homme brutal" c'est à dire ne s'encombrant pas de manières ou "homme brut" à savoir être humain dans sa culture estimée "primaire" face à une autre qui s'autoproclame "civilisé".
Comment alors le civilisé peut-il régresser et se complaire dans une barbarie avec ce que le mot induit d'instincts bas et primitifs.

A l'époque ceci était déjà discutable mais non discuté car là n'était pas le problème : il fallait justifier une appropriation de terre tout en étant mal à l'aise avec des lois édictées à des moments vu comme des parangons de civilisation (droits de l'homme et liberté d'expression avec les contorsions d'un pouvoir politique etc.) car ces appropriations ne tenait pas même d'une volonté d'hégémonie face à ces primitifs mais face à d'autres puissances colonisatrices. Sans compter à la course aux richesses.


J'arrive même à douter que l'essence du colonialisme occidental ait été bien analysé (comment d'ailleurs le pourrait-on ? Il s'agit d'un prisme ou l'Histoire n'est qu'une seule facette.).
Quant à mettre en évidence les racines de massacres, ceci n'appartient plus au domaine historique.

Citer :
... et c’est bien là la puissance et le moteur profond du livre - que les racines des massacres et des crimes contre l’humanité des Européens en Afrique avaient un fondement et une "justification" idéologique[/b]. Cette idéologie était raciste, et indiquait que les "sauvages" rencontrés par les "hommes blancs" n’étaient pas humains ;

Cette théorie n'est pas nouvelle.

Citer :
leur extermination rapide était un service à leur rendre, étant donné que dans la lutte du plus apte, ils n’étaient pas armés face à la civilisation occidentale. L’origine de cette idéologie raciste était un "darwinisme social" appliqué aux civilisations : seuls les plus aptes pourraient survivre.

Là je crois que le problème est pris à l'envers. Le but étant de démontrer un lien entre les exterminations nazies et la brutalité de la colonisation, on fait feu de tout bois.

Citer :
Si elles étaient toutes noyées demain par un immense déluge, elles ne laisseraient aucune trace derrière elles, si ce n’est leur trace organique. Et je les appelle des sauvages irrécupérables [parce que] bien loin d’être influencées par la civilisation, celle-ci les fait disparaître, aussi sûrement et nettement que la neige bat en retraite sous l’avancée des rayons du soleil."

Ceci est assez typique de l'époque, tant le vocabulaire que la tournure de phrase. La métaphore de la neige face au soleil est facilement discutable pour aboutir à la démonstration que si le soleil n'est pas présent au bon moment, la neige peut faire des ravages. Une fois ceci exposé, cette belle tirade n'a plus lieu d'être et ce qui précède non plus.

Si la pensée de Lindqvist s'inscrit dans celle de Césaire, alors ce livre n'a rien d'Historique car la pensée de Césaire ne vise pas à passer dans l'Histoire mais à interpeller et par domino à régler quelques comptes avec sa propre souffrance et son rapport à la négritude qui est très complexe.
D'autre part, chez Césaire le mot choisi est juste c'est la construction qui est volontairement biaisée. On ne peut faire de l'Histoire et de la Littérature. Césaire le sait et s'il introduit parfois un élément appartenant à l'Histoire, c'est souvent par provocation et pour rappeler au lecteur sa place dans la civilisation et à lui sa souffrance dans le rejet, l'indifférence d'une société face à des pans de son passé.
Rien n'est plus mortifère que l'indifférence surtout lorsqu'on transforme cette volonté en autre chose involontaire à savoir "oubli". L'emballage est plus "civilisé" et se défend d'une quelconque volonté de déni mais personne n'est dupe.

Isidore a écrit :
Artcile de Robert Gerwarth et Stephan Malinowski dans XXème siècleArtcile de Robert Gerwarth et Stephan Malinowski dans XXème siècle

Le problème de ce lien est que concernant Arendt, sa place est sur PHILOSOPHIE.
Pour Tocqueville, la question est récurrente.

[Je pense donc que l'espèce d'oppression, dont les peuples démocratiques sont menacés, ne ressemblera à rien de ce qui l'a précédée dans le monde ; nos contemporains ne sauraient en trouver l'image dans leurs souvenirs. Je cherche en vain moi-même une expression qui reproduisent exactement l'idée que je m'en forme et la renferme ; les anciens mots de despotisme et de tyrannie ne conviennent point. La chose est nouvelle, il faut donc tâcher de la définir, puisque je ne peux la nommer ... Après avoir pris ainsi tour à tour dans ses puissantes mains chaque individu, et l'avoir pétri à sa guise, le souverain étend ses bras à la société toute entière ; il en couvre la surface d'un réseau de petites règles compliquées, minutieuses et uniformes, à travers lesquelles les esprits les plus originaux et les âmes les plus vigoureuses ne sauraient se faire jour pour dépasser la foule ; il ne brise pas les volontés mais il les amollit, les plie et les dirige ; il force rarement d'agir mais il oppose sans cesse à ce que l'on agisse ; il ne détruit point, il empêche de naître ... il comprime ... il éteint, il hébète et il réduit enfin chaque nation à n'être plus enfin qu'un troupeau d'animaux timides ... dont le gouvernement est le berger.]

- "De la démocratie en Amérique" - A. de Tocqueville (Tome II) - 1981 - Garnier-Flammarion

Le problème est lorsque Tocqueville est cité est qu'il faut tout le passage et connaître la source. Tocqueville a trouvé cette observation chez Rousseau qui sera reprise par Marx dans "La question juive".
Ceci vise à se défier de l'Etat bien intentionné, l'Etat providence, la douce servitude. Entre l'Etat socialiste et dirigiste et la société de welfare des républiques, cette prophétie parait assez pertinante.
Ici Tocqueville peut être vu comme précurseur de monstres humains tel H. ou autres ou utilisé pour la démonstration que mieux vaut un régime dur qui trace la route d'une liberté pesée (on songe à la vision 1792-1794 en France) et on peut décliner avec les régimes et y voir une prescience de l'auteur.
Alors que ceci démontre que voulant rester libre, l'homme moderne éprouve le besoin d'être conduit, pour peu que le confort matériel lui permette de n'exister que "pour lui même et en lui seul".

Au final ce n'est pas tellement HS :oops: il manquait le confort matériel aux colonisés, ce fut apporté sans leur laisser perdre de temps à s'interroger sur une éventuelle décadence à venir et de quelle nature elle serait. Le temps -toujours un luxe- manquait semble-t-il.

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"... we shall fight on the seas and oceans, we shall fight ... whatever the cost may be ... we shall never surrender...." (W. L. Churchill)
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Message Publié : 07 Sep 2017 18:41 
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Polybe
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Astori a écrit :
Les colons ne vont pas déclarer que les "indigènes" ne méritent pas de vivre et qu'il faut les exterminer.
Ces choses là ne se disent pas explicitement. Mais les colons étaient probablement assez nombreux à penser que les autochtones ne méritaient pas de vivre.

En Turquie, avant l'extermination des Arméniens, les Turcs étaient probablement assez nombreux à penser que les Arméniens ne méritaient pas de vivre. Mais ils étaient sans doute moins nombreux à le dire explicitement.
(Je sais que ce n'est pas un génocide colonial mais c'est un génocide quand même)



Elgor a écrit :
Mis à part peut-être dans les terres du far-west, le génocide n'était pas le but des colons.

C'est une affirmation péremptoire.
L'anéantissement du peuple Herero ne fut-il pas un but des colons allemands ? C'est une hypothèse que l'on ne peut pas écarter de prime abord. On peut en débattre à condition d'éviter les affirmations péremptoires.



Elgor a écrit :
Mis à part peut-être dans les terres du far-west, le génocide n'était pas le but des colons. C'est par nature anti-productif.

Qu'un génocide soit anti-productif, cela ne change rien à la gravité des faits. Un certain nombre d'historiens affirment que le sort subi par le peuple Herero en 1904 est un génocide. Qu'il soit "anti-productif", c'est bien possible, mais là on est dans un autre débat.


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Message Publié : 07 Sep 2017 19:05 
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melpomène a écrit :
Bien que la forme du livre ne soit pas académique, la démarche devrait intéresser ceux qui voudraient en savoir plus ou vérifier les sources : des références sont données dans les notes à la fin du livre "Exterminez toutes ces brutes" de Sven Lindqvist. Il s’agit d’une véritable recherche dont le but est de mettre en évidence les racines des massacres par les colons européens en Afrique : il s’agit d’une véritable démonstration, utilisant la forme d’un récit, une approche tout à fait novatrice qui est sans doute un exemple à suivre. Il montre - et c’est bien là la puissance et le moteur profond du livre - que les racines des massacres et des crimes contre l’humanité des Européens en Afrique avaient un fondement et une "justification" idéologique. Cette idéologie était raciste, et indiquait que les "sauvages" rencontrés par les "hommes blancs" n’étaient pas humains ; leur extermination rapide était un service à leur rendre, étant donné que dans la lutte du plus apte, ils n’étaient pas armés face à la civilisation occidentale. L’origine de cette idéologie raciste était un "darwinisme social" appliqué aux civilisations : seuls les plus aptes pourraient survivre.

Quelle est la part d'idéologie dans les massacres coloniaux ? Vaste débat. En ce qui concerne la tragédie du peuple Hererero en 1904, il ne fait guère de doute que les racines des massacres perpétrés par les des soldats allemands avaient un fondement idéologique.
Moi aussi j'ai lu "Exterminez toutes ces brutes" de Sven Lindqvist. L'auteur révèle une pensée raciste et darwinienne dans les colonies. Il insiste beaucoup sur les colonies britanniques. Il évoque également le massacre du peuple herero par les Allemands.



Duc de Raguse a écrit :
Depuis le début de la discussion j'attends qu'on illustre cette idéologie "raciste" des colons européens (Allemands pour le sujet), qui souhaitaient exterminer les autochtones car ils n'étais pas humains ou inférieurs à eux.

Est-ce le mot "idéologie" qui vous semble inapproprié ?
Il y a certainement une pensée raciste des colons européens, notamment les colons allemands.


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Message Publié : 07 Sep 2017 19:23 
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Polybe
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Isidore a écrit :
Citation : "Si l’expérience intensive de sujétion et d’extermination coloniales contribue à générer la violence individuelle et institutionnelle et qu’une telle expérience puisse être re-transférée en Europe, il devient alors difficile d’expliquer les différences entre d’une part, la Grande-Bretagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas et d’autre part, l’Allemagne, on pourrait également ajouter l’Autriche et l’Italie. Selon l’hypothèse des continuités, il devient alors impossible de comprendre le fait que la Grande-Bretagne et la France aient pratiqué une violence coloniale à connotation raciale tout en constituant le noyau des démocraties occidentales et non celui du totalitarisme génocidaire."


Je n'aime pas beaucoup cette citation. La qualité du raisonnement laisse à désirer. La citation laisse croire que « l’expérience intensive d’extermination coloniale » forme un bloc homogène. Cela me laisse perplexe.
Dans les colonies d'Afrique des crimes furent commis par les armées françaises, britanniques, belges, portugaises, allemandes. Mais il n'existe aucun génocide colonial à l'exception de l'extermination des Hereros et des Namas par les Allemands.
Les génocides sont rares car la volonté d'anéantir un peuple n'est pas chose fréquente.


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Message Publié : 07 Sep 2017 20:36 
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Au lieu de l'affirmer péremptoirement, prouvez qu'il s'agit d'un génocide avec des arguments convaincants. Il y en a onze pages qui ne l'ont pas été à mes yeux, il est donc inutile de les reprendre ad nauseam en espérant que la lassitude joue...

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Message Publié : 07 Sep 2017 21:42 
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Milton a écrit :
Elgor a écrit :
Mis à part peut-être dans les terres du far-west, le génocide n'était pas le but des colons. C'est par nature anti-productif.

Qu'un génocide soit anti-productif, cela ne change rien à la gravité des faits. Un certain nombre d'historiens affirment que le sort subi par le peuple Herero en 1904 est un génocide. Qu'il soit "anti-productif", c'est bien possible, mais là on est dans un autre débat.


Un n'est pas dans "un autre débat", on est dans le débat "est-ce un génocide ou pas ?" Par essence les colonisateurs tendent à éviter les bain de sang inutiles car cela les prive d'une main d'oeuvre très économique. Je sais que l'esclavage, le travail forcé sont des Crimes contre l'Humanité, et j'en suis bien content. Mais le problème est qu'à vouloir trop généraliser les termes ne veulent plus rien dire.

Savez-vous ce que voulait dire "décimer" à l'origine ? Tuer une personne sur 10 pour obtenir que les 9 autres obéissent. Actuellement, décimer est devenu un synonyme d'anéantir. Nous voila avec 2 termes qui désignaient quelque chose de différents et qui veulent dire la même chose. On peut continuer, "hécatombe", c'était de tuer 100 animaux différents pour un sacrifice rituel. C'est devenu un synonime de massacre, ou de tuerie en masse.

On peut continuer la liste. Chaque fois que l'on détourne un mot de son utilisation, il finit par vouloir dire la même chose qu'un autre mot ... Du coup, on est parfois obligé d'inventer à nouveau un mot qui a la signification de l'ancien sens. Et puis, cela continue...

Effectivement, pour "génocide", il y a effectivement 4 significations selon que l'on retient la définition des juristes, des hommes politiques, des médias ou du grand public. Le problème est que "génocide" tend à devenir un synonyme de massacre de masse ... C'est déjà le cas, car c'est ce qu'il veut dire pour une partie du grand public. En fait, pour pas mal de peuples, il est presque plus "classe" d'avoir été victime d'un génocide que d'un "bête" massacre de masse .... Mais, du coup, il va falloir inventer un nouveau nom pour remplacer le génocide des juristes, soit un meurtre d'un groupe d'humains non pas pour ce qu'ils ont fait, mais parce qu'ils appartiennent à ce groupe. Les Herreros ont été persécutés car ils se sont rebellés. Ils étaient bien vus par les colons avant leur révolte... Moins par les bochimans, car ceux-ci se faisaient trucider par les Herreros simplement parce qu'ils étaient des bochimans....

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Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
Appelez-moi Charlie


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Message Publié : 08 Sep 2017 8:07 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Milton a écrit :
Isidore a écrit :
Citation : "Si l’expérience intensive de sujétion et d’extermination coloniales contribue à générer la violence individuelle et institutionnelle et qu’une telle expérience puisse être re-transférée en Europe, il devient alors difficile d’expliquer les différences entre d’une part, la Grande-Bretagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas et d’autre part, l’Allemagne, on pourrait également ajouter l’Autriche et l’Italie. Selon l’hypothèse des continuités, il devient alors impossible de comprendre le fait que la Grande-Bretagne et la France aient pratiqué une violence coloniale à connotation raciale tout en constituant le noyau des démocraties occidentales et non celui du totalitarisme génocidaire."


Je n'aime pas beaucoup cette citation. La qualité du raisonnement laisse à désirer. La citation laisse croire que « l’expérience intensive d’extermination coloniale » forme un bloc homogène. Cela me laisse perplexe.
Dans les colonies d'Afrique des crimes furent commis par les armées françaises, britanniques, belges, portugaises, allemandes. Mais il n'existe aucun génocide colonial à l'exception de l'extermination des Hereros et des Namas par les Allemands.
Les génocides sont rares car la volonté d'anéantir un peuple n'est pas chose fréquente.


La qualité du raisonnement laisse à désirer ? Rien que ça... Je vous invite à lire l'article et non pas à vous aaréter à ce qui n'est qu'une citation illustrant mon message précédent.


Rebecca West a écrit :
Le problème de ce lien est que concernant Arendt, sa place est sur PHILOSOPHIE.
Pour Tocqueville, la question est récurrente.


Refuser de prendre en compte Arendt sur un fil ayant un sujet comme celui-ci est assez curieux alors que c'est son livre "Les origines du totalitarisme" qui développe le premier (ou presque) cette position est assez curieux...

Par contre refuser à Arendt cette prise en compte au titre de sa position de philosophe mais faire un développement sur Tocqueville juste derrière est plutôt drôle. On se demande en quoi Alexis de Tocqueville est moins philosophe qu'Arendt et ce qui fait qu'on puisse accepter le second et pas la première.

Trêves de plaisanterie on a discuté sur ce froum Hegel, Marx, Gauchet, Foucault, Badiou... et ce n'est pas près de s'arrêter.

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Message Publié : 08 Sep 2017 8:41 
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Polybe
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CEN_EdG a écrit :
Au lieu de l'affirmer péremptoirement, prouvez qu'il s'agit d'un génocide avec des arguments convaincants. Il y en a onze pages qui ne l'ont pas été à mes yeux, il est donc inutile de les reprendre ad nauseam en espérant que la lassitude joue...


On dirait que vous doutez de la réalité génocidaire du massacre des Hereros. Je vais lire les onze pages. Je suppose que vous avez participé à la discussion. Je vais voir si vos arguments sont solides car il faut quand même beaucoup d'aplomb pour oser avancer à contre courant d'un certain nombre d'historiens.


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Message Publié : 08 Sep 2017 8:50 
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Narduccio a écrit :
Effectivement, pour "génocide", il y a effectivement 4 significations selon que l'on retient la définition des juristes, des hommes politiques, des médias ou du grand public. Le problème est que "génocide" tend à devenir un synonyme de massacre de masse ... C'est déjà le cas, car c'est ce qu'il veut dire pour une partie du grand public.


Peu importe ce que pense le "grand public". Il faut regarder de près les publications des historiens. Quand ils parlent du génocide des Hereros, ils considèrent que le massacre résulte d'une volonté d'anéantir (en partie ou en totalité) une population.


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Message Publié : 08 Sep 2017 9:47 
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Milton a écrit :
Narduccio a écrit :
Effectivement, pour "génocide", il y a effectivement 4 significations selon que l'on retient la définition des juristes, des hommes politiques, des médias ou du grand public. Le problème est que "génocide" tend à devenir un synonyme de massacre de masse ... C'est déjà le cas, car c'est ce qu'il veut dire pour une partie du grand public.


Peu importe ce que pense le "grand public". Il faut regarder de près les publications des historiens. Quand ils parlent du génocide des Hereros, ils considèrent que le massacre résulte d'une volonté d'anéantir (en partie ou en totalité) une population.


la question n'est ici pas tant de discuter de la qualification d'un épisode coloniale mais de savoir si les violences coloniales ont été ou nom des prémices du génocide nazi. Pédro a repris à cette occasion une citation de Césaire mais c'est aussi un des éléments important mentionnés par Hanna Arendt dans "Les origines du titalitarisme".

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Message Publié : 08 Sep 2017 14:12 
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Vu qu'il n'y a pas de consensus chez les historiens sur le sujet, je trouve que parler d'aplomb est extraordinairement culotté. Paille, poutre.

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Message Publié : 08 Sep 2017 18:53 
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Jean Froissart
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..
Isidore a écrit :
la question n'est ici pas tant de discuter de la qualification d'un épisode coloniale mais de savoir si les violences coloniales ont été ou nom des prémices du génocide nazi. Pédro a repris à cette occasion une citation de Césaire mais c'est aussi un des éléments important mentionnés par Hanna Arendt dans "Les origines du titalitarisme".

Concernant mon post précédent, nous nous sommes mal compris ou plutôt je me suis mal exprimée.
J'avais en tête le concept arendtien de la théorie du boomerang (un intervenant a initié cette théorie) et le rapport à la liberté et aux biens de Tocqueville, c'est en ceci que j'ai dû mal m'exprimer.

S'il ne tenait qu'à moi, je renverrais chacun à votre lien et au segment XXXIX de celui-ci.

Le post d'Adler fait de SL le théoricien (je le comprends ainsi) du lien colonialisme-totalitarisme-Totalitarisme-massacre de masse (j'évite génocide : le mot et l'importance de la Shoah dans l'imaginaire collectif en fait un concept sujet à de fortes récupérations politiques).
Ceci a été théorisé par Arendt. Voici pourquoi, je voyais mieux le sujet dans PHILOSOPHIE.

Si l'on reprend le titre : Violences coloniales prémices du génocide nazi ?

Pourquoi mettre un point d'interrogation ? Arendt a démontré qu'en effet ceci était.
L'initiateur du sujet n'a manifestement pas lu HA et découvre cette théorie.
Les années 90 avec le post colonial studies a dépoussiéré ce qui jusqu'ici avait peut-être échappé au lecteur.
[... En montrant le lien entre le nazisme et le colonialisme européen, HA nous donne les clés pour comprendre la filiation et la généalogie du totalitarisme. Les régimes totalitaires ne se présentent plus comme une négation radicale de la liberté surgissant dans un monde soudain soumis à une violence extrême mais s'intègrent dans l'historialité des pays européens et de leur modernité.].

[... La théorie du boomerang caractérise donc la dynamique à l’œuvre entre l’empire colonial et la pensée occidentale. Elle repose sur l’idée que les européens ont créé les éléments qui vont définir le totalitarisme en dehors de leur espace traditionnel, et que c’est seulement par un retour dans la société occidentale que ces éléments vont donner naissance à l’Allemagne nazie et à la Russie stalinienne.]
Pour Arendt ni le nationalisme ni le darwinisme, ni même les premières hiérarchies raciales théorisées par Boulainvilliers ou Gobineau, ne sont à l’origine de la constitution de la race en tant qu’idéologie structurante.
Cette position lui permet de s’éloigner de l’histoire de l’Europe pour s’interroger sur l’espace colonial.
Au cours de ses développements sur le régime colonial, elle ne cesse d’insister sur la distance qui sépare les colonies de leur métropole. Le racisme naitrait d’une situation de rupture avec la scène occidentale et de la confrontation des colons avec l’univers africain, tandis que le gouvernement bureaucratique se développe à partir de l’autonomisation de l’administration coloniale face aux institutions centrales (à savoir un Etat de non droit).

Cette théorie a un étonnant retour. En faisant de la confrontation avec l’Afrique le moment de la construction de l’idéologie raciste, HA conforte la conception traditionnelle de l’Afrique comme continent primitif et vide d’histoire (Dossa). Ceci préserve la dignité de la tradition occidentale, et contribue à l’absoudre de sa responsabilité dans l’émergence du concept de Race.
« It seems that, like many philosophers since, Arendt was determined to protect Kant’s reputation, instead of asking if some of the best representatives of the Western philosophical tradition were not responsible for the spread of racism.

HA ne consacre que quelques pages au darwinisme social, sans percevoir le rôle que cette théorie a pu jouer dans le milieu intellectuel de la fin du 19e siècle et la théorisation de l’impérialisme. du point de vue politique, le darwinisme en tant que tel est neutre (Les Origines du totalitarisme), il nous faut comprendre que le darwinisme social n’a pas influencé l’idéologie raciste, mais que les théories racistes s’en sont emparé afin de disposer d’une crédibilité scientifique (je fais peut-être une erreur de compréhension).

Le titre tel posé ne peut avoir de conclusion : le mot génocide semble poser un problème avec la rétro-vision que ceci implique.
Enjeu de mémoire, le mot cristallise les conflits entre les peuples (Turcs/Arméniens) ; shunté il semble impossible à ces peuples de se reconstituer une identité structurante. Ceci est-il un mal lorsque l'on sait que cette reconstruction se fait contre et non avec un pouvoir qui entretient le déni.
La définition adoptée par les Nations Unies semblerait dépassée pour une nouvelle génération car très restrictive puisqu’elle implique la volonté assumée d’exterminer totalement une population considérée en tant que telle. Dans un monde hyper médiatisé où l'emploi de mots cherchent plus à toucher l'affect que la raison (l'affect est plus payant) il est certain que les consensus deviendront de plus en plus rare ou alors basés sur de l'approximatif (à chacun sa compréhension).
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PS : toutes mes excuses pour la couleur bleue, la touche guillemets de mon ordi est morte... donc pas de III non plus. :-|
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Milton a écrit :
Peu importe ce que pense le "grand public". Il faut regarder de près les publications des historiens. Quand ils parlent du génocide des Hereros, ils considèrent que le massacre résulte d'une volonté d'anéantir (en partie ou en totalité) une population.

Etonnante remarque. Je fais partie de ce grand public.
A vous lire les Historiens cautionneraient une volonté d'anéantir (en partie ou en totalité)... Et bien ces historiens sont dans l'approximation des mots sans que ceci les gêne trop pour un tel sujet ou encore sont mal compris et mal redonnés, ce qui ne leur fait nullement de la publicité.
Anéantir : renvoyer au néant. On ne peut anéantir au tiers ou au quart (c'est un non sens), on ne peut donc anéantir en partie.
Le grand public n'a pas eu besoin de regarder de plus près... 8-| Loin d'être convaincu, il se félicite de faire partie des dinosaures qui essaient de trouver le mot juste, tout simplement : un enchaînement de mots justes et justement attribués.
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"... we shall fight on the seas and oceans, we shall fight ... whatever the cost may be ... we shall never surrender...." (W. L. Churchill)
"... The ship is anchor’d safe and sound, its voyage closed and done, ... From fearful trip the victor ship comes in with object won ..." (W. Whitman Jr)


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Message Publié : 08 Sep 2017 19:22 
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Polybe
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Rebecca West a écrit :
A vous lire les Historiens cautionneraient une volonté d'anéantir (en partie ou en totalité)... Et bien ces historiens sont dans l'approximation des mots sans que ceci les gêne trop pour un tel sujet ou encore sont mal compris et mal redonnés, ce qui ne leur fait nullement de la publicité.
Anéantir : renvoyer au néant. On ne peut anéantir au tiers ou au quart (c'est un non sens), on ne peut donc anéantir en partie.


Si cela peut vous faire plaisir je peux changer le vocabulaire. Il faut regarder de près les publications des historiens. Quand ils parlent du génocide des Hereros, ils considèrent que le massacre résulte d'une volonté de détruire (en partie ou en totalité) une population.


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