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Message Publié : 14 Déc 2018 22:25 
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Bonsoir,

Si on pouvait échanger sereinement avec un peu de modération dans les termes, et si on pouvait éviter de parler de propagande (anti-américaine par-ci et anti-soviétique par-là), ce ne serait reposant et bénéfique pour que l'échange reste constructif.

Vous avez pointé des questions et je vais y répondre. S'il y a des erreurs, je serai le premier à le reconnaître humblement (nul besoin de dire à votre interlocuteur que son message en est "truffé").

Pierma a écrit :
Peut-être ce chiffre de 20% se rapporte-t-il à la consommation de l'Ukraine. Ce serait plausible.


Pour la consommation de l'Ukraine, coeur industriel de l'URSS, il me semble que Tchernobyl représentait lors de son arrêt davantage que 20% de la consommation nationale d'électricité. Pour l'URSS, à terme, la centrale de Tchernobyl devait compter non pas 4 mais 8 réacteurs, dont quatre étaient terminés et actifs, et deux autres étaient déjà partiellement construits. Il est possible que le pourcentage soit moindre, mais il faudrait trouver des sources dans un sens ou dans l'autre. A Tchernobyl, l'ingénieur ukrainien avec qui j'ai visité la centrale me soutenait que c'était l'ordre de grandeur.

Pierma a écrit :
Citer :
Ensuite, une fois l'incendie éteint, il fallait recouvrir le matériau radioactif.

Non, il fallait déjà recouvrir le matériau radioactif lui-même, en surface.

Oui nous sommes d'accord et disons la même chose. Mon intervention en effet ne décrit pas toutes les étapes, la dalle sous le réacteur, toutes les techniques utilisées, testées, essayées, les dangers détaillés précédemment dans ce même fil par Narduccio et dans l'article de wikipedia. Vous aviez déjà parlé du bore. La répétition n'est pas utile, et ce n'est pas le propos.

Le propos est de pointer que Tchernobyl révèle plusieurs failles du système soviétique (que personne n'a appelé "sous-développé"), et on peut dépasser l'accident industriel pour sa signification historique.

Pierma a écrit :
Citer :
La manière dont les responsables locaux de Tchernobyl ont minimisé l'ampleur des dégâts à Moscou révèle les peurs et difficultés de communication au sein de l'Union. Gorbatchev a mis plusieurs jours à être mis au courant de ce qui se passait vraiment. On lui disait que tout était sous contrôle. C'est la Suède qui finalement l'a averti, quand ses scientifiques ont trouvé que les relevés atmosphériques étaient tout à fait anormaux.

Là je suis désolé, mais on tombe dans la propagande anticommuniste. (Il c'est rare que j'émette ce genre de condamnation, mais là c'est trop gros.) Gorbatchev a été mis au courant très vite, et son action a été essentielle, vu l'ampleur des décisions à prendre. (dont la première a été de mettre sur le coup tous les savants atomistes de l'URSS.)


C'est Gorbatchev lui-même qui raconte cet épisode* et s'emporte que ce soit la Suède qui l'avertisse, alors que à Tchernobyl on lui cache l'ampleur des dégâts. C'est encore lui qui raconte dans un documentaire* comment il a demandé à ses agents du KGB de l'informer personnellement de ce qui se disait à Tchernobyl. C'est à partir de ce moment que justement je souligne son rôle essentiel dans la résolution de la crise. Je parlais des responsables locaux minimisant l'ampleur des dégâts (relisez), et non de Gorbatchev.

Pierma a écrit :
Citer :
l'ignorance dans laquelle les habitants ont été maintenus, les condamnant à mort,

J'imagine que les anciens habitants de Pripyat constituent une population suivie médicalement, avec très probablement une surincidence de cancers, mais ils n'ont pas été "condamnés à mort." (toutefois, ils n'ont été évacués que le surlendemain, ils ont donc passé une journée à respirer de l'air contaminé.)

Il n'y a pas que Pripyat, qui est un cas à part et mériterait un post à elle toute seule. La ville de Tchernobyl, ville très ancienne à 7 km de la centrale, est évacuée sept jours après l'explosion.

Six jours après l'explosion, la Pravda continuait de minimiser l'accident et de dire que le danger était passé. Les autorités ont encouragé toute la population ukrainienne de la région à participer aux célébrations du 1er mai, en dépit d'un niveau de radioactivité ayant largement dépassé le point de danger. Gorbatchev: "Ces célébrations étaient très importantes pour nous, il fallait éviter la panique. Si nous avions su quels étaient les niveaux de radioactivité...". Les archives ukrainiennes de l'époque ont toutes disparu.



*voir le documentaire référencé dans le titre du post: the Battle of Chernobyl, où Gorbatchev intervient à plusieurs reprises pour éclairer ce que furent ses décisions à l'époque. Gorbatchev n'a aucun intérêt à faire de la propagande.


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Message Publié : 14 Déc 2018 22:51 
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Il faudrait aussi évoquer ce qu'a pu représenter le radar Duga*, l'autre site stratégique de Tchernobyl. Contrairement à la centrale, dont l'existence était connue, le radar Duga, un des plus avancés du monde, était tenu secret et la route unique qui y menait soigneusement camouflée en voie privée menant à un centre scolaire, gardée par un checkpoint anodin (au-delà duquel les intrus civils étaient pourtant abattus sans sommation).


*Duga et non Dugan, comme précédemment écrit, et que l'on appela à l'ouest "le pic-vert" (the woodpecker) en raison du bruit qu'il émettait sur les radios longues ondes.


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Message Publié : 15 Déc 2018 0:07 
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our de nombreux spécialistes l'accident de Tchernobyl est un accident soviétique, avant d'être un accident nucléaire. On pourrait dire que 90% de ses causes sont le fait du système soviétique, avec son cloisonnement des informations et sa propagande. L'un des premiers trucs que j'ai appris lors de ma formation pour être technicien puis opérateur dans une centrale nucléaire a été qu'il fallait rester modeste vis-à-vis de l'installation. Toujours douter de soi, des autres, ou de l'installation. Car il faut sans cesse se remettre en cause et ne pas se reposer sur ses lauriers. Dans le système soviétique ce qui était élaboré par des soviétiques était parfait. On a donc caché au personnels quelques petites failles qui existaient et que les concepteurs connaissaient.

Il a existé jusqu'à 7 réacteurs RBMK en service. Les 4 RMBK de Tchernobyl alignaient une puissance de 1000 MW chacun. Le plus puissant réacteur RMBK est à Ignalina, il a été ouvert en 1983, et ses deux réacteurs font chacun 1500 MW... Sauf erreur de ma part, il y a encore 11 RMBK en service en URSS. Les RMBK font de l'électricité, mais aussi du plutonium militaire ... Les soviétiques n'avaient pas que des réacteurs RMBK, il avaient développé d'autres filières, les VVER qui sont des REP et les BN-600 qui sont des réacteurs à neutrons rapides. Sur wikipedia, on trouve la liste des réacteurs soviétiques.. Vu le nombre de réacteurs en service en 1986, je ne pense pas que Tchernobyl représentait 20% de la puissance électrique de l'URSS. Quant à la liste des réacteurs nucléaire en Ukraine, il est possible que le site de Tchernobyl représentait bien 20% de la puissance électrique disponible en Ukraine. Mais, c'est le site entier.


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Message Publié : 15 Déc 2018 2:21 
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Léonard59 a écrit :
Pour de nombreux spécialistes l'accident de Tchernobyl est un accident soviétique, avant d'être un accident nucléaire. On pourrait dire que 90% de ses causes sont le fait du système soviétique, avec son cloisonnement des informations et sa propagande. L'un des premiers trucs que j'ai appris lors de ma formation pour être technicien puis opérateur dans une centrale nucléaire a été qu'il fallait rester modeste vis-à-vis de l'installation. Toujours douter de soi, des autres, ou de l'installation. Car il faut sans cesse se remettre en cause et ne pas se reposer sur ses lauriers. Dans le système soviétique ce qui était élaboré par des soviétiques était parfait. On a donc caché au personnels quelques petites failles qui existaient et que les concepteurs connaissaient.

ça me semble réaliste.

Le récit de la cause de l'accident est effrayant. Il y a à la fois une absence manifeste de culture de la sécurité, et une volonté très soviétique de la part de l'ingénieur en chef de réussir un essai qui valorise sa carrière.

Et des techniciens qui ignorent les alarmes, qui shuntent des sécurités, c'est un cauchemar ! (Le seul individu sensé semble être l'ingénieur du réacteur jumelé, qui le met en arrêt le lendemain malgré l'interdiction du directeur de la centrale.)

Certains des défauts de conception sont étonnants pour nous, typiquement les barres motorisées qui mettent 30 secondes pour descendre. (Dans une centrale française les barres seraient tombées d'elle-mêmes, et bien avant.)

@Dalgonar : je ne crois pas à votre vision de cette crise. Je n'ai pas les sources pour contredire certains points que vous évoquez, mais sur certains points je "n'achète pas".

Un détail : l'Ukraine n'est pas, et n'a jamais été, le coeur industriel de l'URSS. (Il y a à ça des raisons qui remontent à la SGM, mais aussi le fait que fondamentalement l'Ukraine a une vocation agricole : elle possède les meilleures terres du monde.)

Typiquement, ce qui coince, c'est cette histoire de Gorbatchev tenu dans l'ignorance. Et pire encore, contraint d'envoyer le KGB à Tchernobyl (ce qu'il a certainement fait de toute façon, dans tout le secteur, et en meute, encore...) mais pour être tenu au courant des "détails techniques" ! A supposer même que le KGB, dont ce n'était pas la vocation, dispose en interne des connaissances propres à évaluer les paramètres techniques d'une telle situation de crise ! A qui veut-il faire croire ça ?

Nota : c'est pourtant la version retenue par Wikipédia, mais vraiment j'ai du mal... :rool:

Au passage, connaissant l'Union Soviétique, vous pouvez être certain qu'il y avait déjà un ou plusieurs correspondants du KGB présents dans la centrale. (bon sang, le KGB quadrillait déjà toute la population, alors une installation pareille ! D'autant que vous dites qu'un nouveau radar secret était alimenté par ce site, ce qui impliquait les militaires.)
Là, Wikipédia donne un indice : les travaux de construction de Tchernobyl, d'ailleurs en dessous des normes, ont fait l'objet d'un rapport de Youri Andropov, directeur du KGB, en 77. Le nucléaire est trop sensible en URSS pour ne pas intéresser le KGB.

Mes souvenirs peuvent me trahir, mais il me semble que les occidentaux ont été informés de la gravité de l'accident... par eux-mêmes ! Sauf erreur de ma part, ce sont des photos satellites qui ont montré le réacteur "à ciel ouvert". A ce moment, il me semble qu'ils étaient déjà informés par les Soviétiques d'un "problème" à Tchernobyl - mais que ceux-ci cherchaient encore à en dissimuler la gravité. (Glasnost ou pas, les bonnes traditions soviétiques perduraient.)

Bon, Gorbatchev n'est pas Staline, c'est entendu, mais l'URSS en 86 est encore tenue. Personne ne va chercher à dissimuler à Moscou un accident nucléaire susceptible de dévaster la moitié de l'Ukraine (et pire encore si l'on n'agit pas rapidement à grande échelle et avec un maximum de moyens) à moins d'être candidat au peloton d'exécution. Vous avez d'ailleurs raison de signaler que Kiev aurait pu y passer : c'est à deux pas.

En revanche il est possible que les ingénieurs de la centrale aient tardé à faire remonter la situation réelle, éventuellement effrayés des conséquences pour eux-mêmes. Mais Gorbatchev prévenu de la probabilité d'un accident nucléaire chez lui par Stockholm (si j'ai bien suivi) là il pousse le bouchon un peu loin. Pour moi Gorbatchev ment, et on voit bien pourquoi : la diffusion de l'information par les Soviétiques a été calamiteuse (à destination de l'occident, je veux dire, on ne parle même pas de la population) et par ailleurs il cherche sans doute à se dédouaner de toute responsabilité dans certaines mesures qui ont tardé. (sur les évacuations, notamment.)

Ce qui nous ramène au sujet de ce fil : quelle aide les occidentaux ont-ils apporté au cours, ou après cet accident ? Déjà, à partir de quand ont-ils été sollicités ?

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Message Publié : 15 Déc 2018 13:55 
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Je vois bien où le bât blesse.

Sur le pourcentage que Tchernobyl, une fois terminé, aurait dû représenter pour l'URSS, il nous manque encore les chiffres, mais Leonard59 semble bien informé pour dire que la centrale produisait 4000 MW. Une fois terminés les 8 réacteurs, dont 4 plus modernes, cela aurait donc représenté au minimum 8000MW.

Sur le fait que l'Ukraine ne représentait pas un coeur industriel (au moins un des principaux centres industriels de l'industrie soviétique), il faut voir les vestiges des usines qui y étaient implantées. Par exemple dans le secteur automobile et véhicules industriels: Tavria, ZAZ, Zaporozhets, Laz, Kraz, Odaz, Luaz... De "grenier à blé" de l'URSS avant-guerre, l'Ukraine passe aussi après-guerre à des plans d'industrialisation, notamment sous Khrouchtchev, qui était Ukrainien, dans l'agro-alimentaire (sucre), puis l'industrie lourde et les biens de consommation. L'Ukraine était un des plus gros producteurs de fonte, de charbon, de fer et d'acier en Europe. Les zavod de Kharkiv produisait des blindés et des trains. Les fameux mineurs du Donbass. Les chantiers navals de Kiev, Mariupol, Mikolaiv, Sébastopol et autres fournissaient la flotte soviétique. Enfin, l'Ukraine produisait de l'énergie, à travers des centrales hydroélectriques et thermiques, puis évidemment le nucléaire.

Je reviendrai sur l'insincérité supposée de Gorbatchev.


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Message Publié : 15 Déc 2018 14:02 
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On oublie souvent le rôle joué par les français dans la détection de l'accident. Il est exact que ce sont les suédois qui ont détectés les premiers une augmentation de la radioactivité présente dans l'air. Le professeur Pèlerin, dès qu'il en a été averti a fait placer sur un avion commercial qui reliaient Paris à une capitale scandinave (et retour) des films et des détecteurs. C'est le développement et l'exploitation de ces données qui a indiqué que l'accident concernait un réacteur nucléaire et pas l'explosion d'une bombe. Face aux questions assez précises des occidentaux, les soviétiques ont reconnus petit à petit la réalité. Et ils ont ensuite demandé de l'aide. Cette aide a été demandée en priorité à des pays perçus comme plutôt neutres plutôt qu'à des pays qui pouvaient paraitre hostiles. Ce qui explique le choix de la Suède .... La Suède avait déjà des centrales nucléaires en services. Essentiellement des REB et quelques REP. Voici la [url=Liste des centrales nucléaires en Suède]liste des centrales nucléaires en Suède.[/url] Les REP ont été construits par Westinghouse. Les REB ont été construits par ABBATOM, et je n'arrive pas à savoir s'il s'agit d'un constructeur local qui exploite une licence américaine ou d'une licence spécifiquement suédoise.

Selon le cas, leurs spécialistes pouvaient avoir quelques connaissances sur un corium... De là à savoir le maîtriser... En fait, l'essentiel des connaissances actuelles sur le comportement d'un corium proviennent soit de Tchernobyl, soit d'études lancées et réalisées suite à Tchernobyl. En fait, on sait qu'un corium a tendance à agréger tous les matériaux qui va trouver sur son passage, ce qui favorise sa dilution, et donc son refroidissement. Or, de nombreuses centrales sont construites à proximité de l'eau, avec la présences de nappes phréatiques. La question est donc de savoir si le corium arrêtera de creuser son sous-sol avant d'avoir atteint l'eau ou pas. Dans le second cas, vu la température du corium, vu que l'eau peut servir de modérateur (mais pas la vapeur qui s'envole très vite), on peut imaginer pas mal de choses. La première est une contamination irréversible de la nappe phréatique. La seconde est une explosion de la vapeur qui va disperser le corium et disperser dans l'atmosphère une grande partie des matières radioactives sous forme de micro-particules ... Donc qui vont aller polluer une zone plus ou moins grande.

La plupart des études ultérieures ont montré que dans les centrales REP, l'enceinte de confinement avait une résistance suffisante pour empêcher le percement des dalles de fond. Il faut noter que c'est le fait du hasard. Ces dalles ont été formatées en vue de la résistance mécanique que l'on attendait du bâtiment réacteur en cas de survenue de ce qu'on nomme l'accident de référence. L'épaisseur de la dalle s'est révélée suffisante. Sauf dans quelques cas qui ont été corrigés en injectant du béton sous ou sur la dalle. Des bétons spéciaux d'ailleurs dont la formulation permet d'augmenter le volume du corium.

Or, tout cela on ne le connaissait pas à l'époque de Tchernobyl, et il y a eut, de la part des soviétiques, une espèce de course pour empêcher que le corium n'atteigne la nappe phréatique. Cela a été obtenu en déversant du sable, du bore, du plomb sur les restes du réacteur qui brûlaient.


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Message Publié : 15 Déc 2018 16:07 
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Dalgonar a écrit :
Sur le fait que l'Ukraine ne représentait pas un coeur industriel (au moins un des principaux centres industriels de l'industrie soviétique), il faut voir les vestiges des usines qui y étaient implantées. Par exemple dans le secteur automobile et véhicules industriels: Tavria, ZAZ, Zaporozhets, Laz, Kraz, Odaz, Luaz... De "grenier à blé" de l'URSS avant-guerre, l'Ukraine passe aussi après-guerre à des plans d'industrialisation, notamment sous Khrouchtchev, qui était Ukrainien, dans l'agro-alimentaire (sucre), puis l'industrie lourde et les biens de consommation. L'Ukraine était un des plus gros producteurs de fonte, de charbon, de fer et d'acier en Europe. Les zavod de Kharkiv produisait des blindés et des trains. Les fameux mineurs du Donbass. Les chantiers navals de Kiev, Mariupol, Mikolaiv, Sébastopol et autres fournissaient la flotte soviétique. Enfin, l'Ukraine produisait de l'énergie, à travers des centrales hydroélectriques et thermiques, puis évidemment le nucléaire.

Là j'apprends des choses. En particulier sur ce que vous décrivez des usines pour véhicules industriels. (Sachant que l'URSS avait plus ou moins spécialisé chaque région dans une industrie donnée, la CEI constituait le marché naturel... à condition que Russie et Ukraine jouent le jeu. Je ne sais pas comment dans le détail s'est passée la transition, mais déjà la décision de sortir de la zone rouble a constitué une catastrophe. - l'Ukraine est l'un des pays qui a le plus trinqué de la chute de l'URSS.)

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Message Publié : 16 Déc 2018 19:05 
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Léonard59 a écrit :
our de nombreux spécialistes l'accident de Tchernobyl est un accident soviétique, avant d'être un accident nucléaire. On pourrait dire que 90% de ses causes sont le fait du système soviétique, avec son cloisonnement des informations et sa propagande. L'un des premiers trucs que j'ai appris lors de ma formation pour être technicien puis opérateur dans une centrale nucléaire a été qu'il fallait rester modeste vis-à-vis de l'installation. Toujours douter de soi, des autres, ou de l'installation. Car il faut sans cesse se remettre en cause et ne pas se reposer sur ses lauriers. Dans le système soviétique ce qui était élaboré par des soviétiques était parfait. On a donc caché au personnels quelques petites failles qui existaient et que les concepteurs connaissaient.

Il a existé jusqu'à 7 réacteurs RBMK en service. Les 4 RMBK de Tchernobyl alignaient une puissance de 1000 MW chacun. Le plus puissant réacteur RMBK est à Ignalina, il a été ouvert en 1983, et ses deux réacteurs font chacun 1500 MW... Sauf erreur de ma part, il y a encore 11 RMBK en service en URSS. Les RMBK font de l'électricité, mais aussi du plutonium militaire ... Les soviétiques n'avaient pas que des réacteurs RMBK, il avaient développé d'autres filières, les VVER qui sont des REP et les BN-600 qui sont des réacteurs à neutrons rapides. Sur wikipedia, on trouve la liste des réacteurs soviétiques.. Vu le nombre de réacteurs en service en 1986, je ne pense pas que Tchernobyl représentait 20% de la puissance électrique de l'URSS. Quant à la liste des réacteurs nucléaire en Ukraine, il est possible que le site de Tchernobyl représentait bien 20% de la puissance électrique disponible en Ukraine. Mais, c'est le site entier.


Est-ce qu'une forme de coopération internationale sur la sûreté nucléaire s'est développée après l'accident et notamment après la fin de l'URSS ?

Et aujourd'hui, connait-on (ou peut-on connaitre) quel est le niveau d'expertise des techniciens et opérateurs du nucléaire en Russie ? Par ailleurs est-ce que leur culture de la sûreté a profondément changé ?
Des échanges entre Français et Russes existent-ils ?


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Message Publié : 16 Déc 2018 19:24 
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Pierma a écrit :
à partir de quand ont-ils été sollicités ?


Dès le 25 avril, Gorbatchev sollicite la Suède et la RFA. Cf ce titre d'époque:

Image

On y lit aussi que la France a immédiatement proposé son aide.

Parmi les choses qui peuvent faire sourire sur les réactions en Europe (et font franchement rigoler les Ukrainiens aujourd'hui), c'est la théorie "officielle" des autorités françaises sur le nuage de particules qui s'arrête à la frontière. Il semble que la France soit alors le seul pays européen à réagir ainsi. L'exécutif et le gouvernement de cohabitation sont en phase: les ministres du gouvernement Chirac ne veulent pas "alarmer" la population, et le Président François Mitterrand ne veut pas apporter de l'eau au moulin anti-nucléaire de ses grands amis de Greenpeace. La plupart des journalistes semble d'ailleurs avoir suivi.


Dernière édition par Dalgonar le 16 Déc 2018 19:31, édité 1 fois.

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Message Publié : 16 Déc 2018 19:26 
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Nico69 a écrit :
Léonard59 a écrit :
our de nombreux spécialistes l'accident de Tchernobyl est un accident soviétique, avant d'être un accident nucléaire. On pourrait dire que 90% de ses causes sont le fait du système soviétique, avec son cloisonnement des informations et sa propagande. L'un des premiers trucs que j'ai appris lors de ma formation pour être technicien puis opérateur dans une centrale nucléaire a été qu'il fallait rester modeste vis-à-vis de l'installation. Toujours douter de soi, des autres, ou de l'installation. Car il faut sans cesse se remettre en cause et ne pas se reposer sur ses lauriers. Dans le système soviétique ce qui était élaboré par des soviétiques était parfait. On a donc caché au personnels quelques petites failles qui existaient et que les concepteurs connaissaient.

Il a existé jusqu'à 7 réacteurs RBMK en service. Les 4 RMBK de Tchernobyl alignaient une puissance de 1000 MW chacun. Le plus puissant réacteur RMBK est à Ignalina, il a été ouvert en 1983, et ses deux réacteurs font chacun 1500 MW... Sauf erreur de ma part, il y a encore 11 RMBK en service en URSS. Les RMBK font de l'électricité, mais aussi du plutonium militaire ... Les soviétiques n'avaient pas que des réacteurs RMBK, il avaient développé d'autres filières, les VVER qui sont des REP et les BN-600 qui sont des réacteurs à neutrons rapides. Sur wikipedia, on trouve la liste des réacteurs soviétiques.. Vu le nombre de réacteurs en service en 1986, je ne pense pas que Tchernobyl représentait 20% de la puissance électrique de l'URSS. Quant à la liste des réacteurs nucléaire en Ukraine, il est possible que le site de Tchernobyl représentait bien 20% de la puissance électrique disponible en Ukraine. Mais, c'est le site entier.


Est-ce qu'une forme de coopération internationale sur la sûreté nucléaire s'est développée après l'accident et notamment après la fin de l'URSS ?

Et aujourd'hui, connait-on (ou peut-on connaitre) quel est le niveau d'expertise des techniciens et opérateurs du nucléaire en Russie ? Par ailleurs est-ce que leur culture de la sûreté a profondément changé ?
Des échanges entre Français et Russes existent-ils ?


Je précise ma 1ère question

Au-delà du cas du site de Tchernobyl stricto sensu, après l'accident et notamment après la fin de l'URSS est-ce qu'une forme de coopération internationale sur la sûreté nucléaire s'est développée avec la Russie (et l'Ukraine) ?

Et aujourd'hui, connait-on (ou peut-on connaitre) quel est le niveau d'expertise des techniciens et opérateurs du nucléaire en Russie ? Par ailleurs est-ce que leur culture de la sûreté a profondément changé ?

Des échanges techniques (confrontations des expériences, voire formations etc) entre professionnels Français et Russes existent-ils ?


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Message Publié : 16 Déc 2018 19:33 
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Dalgonar a écrit :
Parmi les choses qui peuvent faire sourire sur les réactions en Europe (et font franchement rigoler les Ukrainiens aujourd'hui), c'est la théorie "officielle" des autorités françaises sur le nuage de particules qui s'arrête à la frontière. Il semble que la France soit alors le seul pays européen à réagir ainsi. L'exécutif et le gouvernement de cohabitation sont en phase: les ministres du gouvernement Chirac ne veulent pas "alarmer" la population, et le Président François Mitterrand ne veut pas apporter de l'eau au moulin anti-nucléaire de ses grands amis de Greenpeace. La plupart des journalistes semble d'ailleurs avoir suivi.


Euhh... Vous ne croyez quand même pas à cette invention médiatique ? Si oui, allez donc consulter la Une du journal Libération du 02/05/86, vous y verrez en grand que les autorités françaises ont bien signalé que le nuage de Tchernobyl était en train de survoler la France. Ce qui n'a pas empêché le même journal Libération de tirer le 12/05/86, l'article qui lançait ce mensonge médiatique... Franchement, on n'arrivera jamais à éradiquer cette fake-news tellement il y a de gens convaincus que c'est vrai. Pourtant, c'est simple de le vérifier, vous aller dans n'importe quel quotidien, localn régional ou national et vous demandez à consulter dans leurs archives leur exemplaire du 02 mai 1986...


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Message Publié : 16 Déc 2018 20:26 
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Léonard59 a écrit :
Dalgonar a écrit :
Parmi les choses qui peuvent faire sourire sur les réactions en Europe (et font franchement rigoler les Ukrainiens aujourd'hui), c'est la théorie "officielle" des autorités françaises sur le nuage de particules qui s'arrête à la frontière. Il semble que la France soit alors le seul pays européen à réagir ainsi. L'exécutif et le gouvernement de cohabitation sont en phase: les ministres du gouvernement Chirac ne veulent pas "alarmer" la population, et le Président François Mitterrand ne veut pas apporter de l'eau au moulin anti-nucléaire de ses grands amis de Greenpeace. La plupart des journalistes semble d'ailleurs avoir suivi.


Euhh... Vous ne croyez quand même pas à cette invention médiatique ? Si oui, allez donc consulter la Une du journal Libération du 02/05/86, vous y verrez en grand que les autorités françaises ont bien signalé que le nuage de Tchernobyl était en train de survoler la France. Ce qui n'a pas empêché le même journal Libération de tirer le 12/05/86, l'article qui lançait ce mensonge médiatique... Franchement, on n'arrivera jamais à éradiquer cette fake-news tellement il y a de gens convaincus que c'est vrai. Pourtant, c'est simple de le vérifier, vous aller dans n'importe quel quotidien, localn régional ou national et vous demandez à consulter dans leurs archives leur exemplaire du 02 mai 1986...


Je ne sais si c'est une fake news. Mais on trouve en ligne les JT. J'ai bien vu l'article de Yann Kindo sur Mediapart, mais je ne trouve pas qu'il démontre que les autorités n'ont pas fait au minimum de la rétention d'information, et les JT montrent bien les théories d'époque sur la barrière anticyclonique. La revue Hérodote consacre bien un article à un "mensonge d'Etat", c'est à dire des autorités. Après, il est possible que la presse ait douté. Voulez-vous dire qu'il n'y pas pas eu de mensonge d'Etat, ou que toute la presse a mis en doute ce que disaient les autorités?

A voir ces archives d'époque (INA):
https://youtu.be/28XT5gZEfUk
https://youtu.be/87YCdJNMGXo

à lire:
https://www.lci.fr/politique/30-ans-de-tchernobyl-comment-a-t-on-pu-affirmer-que-le-nuage-radioactif-ne-passerait-pas-la-frontiere-1508979.html

(svp pourriez-vous également référencer avec des liens en ligne pour que chacun puisse voir les sources?)


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Message Publié : 17 Déc 2018 1:46 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 27 Déc 2013 0:09
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Sur la question du nuage de Tchernobyl, on peut lire cet article très virulent : http://www.astrosurf.com/luxorion/tchernobyl5.htm

L'article de wikipedia, présente également une analyse détaillée mais plus neutre.

L'explosion s'est produite le 26 avril 1986.
Un taux anormal de radiation a été détecté en Suède le 28 avril.
Le 29 avril, le professeur Pellerin, directeur du SCPRI (Service central de protection contre les rayonnements ionisants) tient des propos rassurants dans le journal de 13 heures d'Antenne 2 :  même pour les Scandinaves, la santé n’est pas menacée. Dans le journal de 20h, le communiqué du SCPRI est :  on pourra certainement détecter dans quelques jours le passage des particules mais, du point de vue de la santé publique, il n’y a aucun risque
Dans son journal météo A2 informe que l'anticyclone des Açores oppose une une barrière au panache de particules radioactives, et va jusqu'à afficher un panneau STOP au niveau des Alpes. C'est l'origine de l'histoire du nuage qui n'aurait pas survolé la France.
Contrairement aux prévisions, l'anticyclone des Açores a reculé et, le 30 avril, une augmentation de la radioactivité est observée dans le sud de la France. L'information est diffusée par l'AFP et relayée par l'ensemble des media.
Différents pays d'Europe ont pris des mesures de précaution : restriction sur la commercialisation du lait ou de produits frais, tandis que le gouvernement français n'en a pris aucune.

Le taux moyen de contamination a été très faible, mais la contamination dépendant de facteurs météorologiques locaux, il y a eu localement des pics locaux très au-dessus de la moyenne ce qui n'a pas été porté à la connaissance de la population..

Il subsiste une controverse sur les conséquences qu'a eu en France la catastrophe de Tchernobyl malgré une enquête ordonnée en 2002 qui n'a pu aboutir.

Il ne fait aucun doute que les autorités françaises, dans le but d'éviter toute panique et des réaction hostiles au programme nucléaire de production d'électricité, ont cherché, à tort ou à raison, à minimiser les conséquences de l'accident et à faire autant que possible de la rétention d'information. C'est ce que les media dénoncent.


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Message Publié : 17 Déc 2018 1:55 
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Dalgonar a écrit :
Pierma a écrit :
à partir de quand ont-ils été sollicités ?


Dès le 25 avril, Gorbatchev sollicite la Suède et la RFA. Cf ce titre d'époque:

Image

On y lit aussi que la France a immédiatement proposé son aide.

Là il va falloir s'entendre sur le timing : l'essai puis l'accident ont eu lieu dans la nuit du 25 au 26. (L'explosion d'hydrogène qui fait voler en hauteur la dalle du réacteur, puis éventre celui-ci a lieu à 1h24 du matin, le mercredi 26.)

Cette Une du Figaro ne colle pas, elle est en contradiction avec tout ce qu'on sait du timing.
ça cloche complètement.

Déjà, en France les quotidiens du matin partent de Paris dans la nuit pour être distribués en province à partir de 6 heures. (Si c'est le cas du Figaro - qui est un quotidien du matin, sauf erreur - il faudrait effectivement que l'information soit tombée la veille, donc, comme vous le dites, le 25. Mais le 25 c'est AVANT l'accident !?)

De plus, il faut regarder les sous-titres :
- fusion du coeur du réacteur, alors que les occidentaux n'en savent encore rien.
- nombreux morts, SOS lancé par la Russie (dans la nuit ?)
- le dernier sous-titre évoque déjà un nuage radioactif, alors que la Suède ne le détecte que deux jours plus tard !

Regardons le timing donné par Wikipédia, et par une autre source, La Dépèche, dans une rétrospective de 2006 :

La détection du nuage radioactif par les occidentaux a lieu le 28, si l'on en croit Wiki, et de plus les informations n'arrivent que de façon fractionnaire :
Citer :
Le 28 avril au matin, un niveau de radioactivité anormal est constaté dans la centrale nucléaire de Forsmark en Suède, qui entraîne l'évacuation immédiate de l'ensemble du site par crainte d'une fuite radioactive interne. Mais les premières analyses montrent que l'origine de la contamination est extérieure à la centrale et vient de l'est. L'après-midi du même jour, l'Agence France-Presse rapporte l'incident.

À partir de ce moment, toutes les hypothèses sont formulées par les médias occidentaux. Les informations arrivent au compte-goutte (entretien à Kiev de personnes évacuées de la zone, etc.). L'agence de presse TASS parle le 29 avril d'un accident « de gravité moyenne survenu à la centrale nucléaire de Tchernobyl » tandis que les photos satellites du site de la centrale fournissent les premières images de la catastrophe.

C'est donc le samedi 29 que les occidentaux ont l'info définitive par satellite, et donc l'explication du nuage radioactif : le bâtiment réacteur de Tchernobyl est fracassé et le coeur est à ciel ouvert.

Il est curieux que l'URSS n'ait pas anticipé et évalué ce problème du nuage radioactif et de sa dérive.

Donc les Suédois ont été les premiers à le détecter. Je retrouve cette date du 28 avril - pour la détection du nuage - dans la Dépêche :
https://www.ladepeche.fr/article/2016/11/29/2468262-catastrophe-tchernobyl-dates-clefs-pire-accident-nucleaire-histoire.html
Citer :
La première alerte publique n'a été donnée que le 28 avril par la Suède, qui a détecté une hausse de la radioactivité sur son territoire.


Sur place à Tchernobyl, les largages par hélicoptères commencent le 27, qui est également le jour de l'évacuation de Pripyat, et donc de l'engagement de moyens massifs par les autorités.

Tout cela fait justice, à mon avis, de l'idée de Gorbatchev "averti par la Suède". (on pourrait en effet remettre en cause cette date du 28, mais elle est logique avec la durée de parcours du nuage radioactif : les vents - au moins pendant cette première phase - ne l'ont pas dirigé vers le pays occidental le plus proche.) Ou alors il faudrait imaginer que Gorbatchev n'est pas tenu au courant par le KGB, ni par personne, des opérations engagées sur place, ce qui est fou. (les hélicos sont rameutés de partout, vous avez indiqué qu'on en comptera jusqu'à 600 engagés, les militaires sont mis sur le pied de guerre, etc...)

Autres éléments de timing dans l'article de la Dépêche :
Citer :
L'AIEA (Agence internationale de l'Energie atomique) reçoit notification officielle de l'accident le 30. Mais le chef de l'Etat soviétique Mikhaïl Gorbatchev n'avouera publiquement que le 14 mai.

Rien de scandaleux, malgré les apparences : on comprend là que Gorbatchev ne fait connaître la gravité de l'accident que tardivement à l'ensemble de la population d'URSS, ce qui est dans la plus pure tradition soviétique (Le public occidental sait à quoi s'en tenir) mais il s'agissait certainement de ne pas affoler les centaines de milliers de "liquidateurs" qu'on a fait venir sur le site. La notification à l'AIEA est de pure forme dès l'instant où une aide officielle a été demandée aux pays européens qui pouvaient l'apporter. (Mais au fait, finalement, à quelle date, cette demande d'aide ? Et quid de la France ?)

Donc, je me pose la question : d'où sort cette Une du Figaro ? Le 26, ce journal ne peut pas avoir ni l'info sur la fusion du réacteur, ni celle sur le nuage radioactif.
(On dirait une Une refabriquée à postériori comme si le journal avait eu toutes les informations en temps réel. Peut-être une série spéciale de collection, bien des années plus tard, du genre "mémoire du siècle" ?)
Bref, j'aimerais comprendre. (d'autant que cette Une fait plus vraie que nature.)


nico69 a écrit :
Est-ce qu'une forme de coopération internationale sur la sûreté nucléaire s'est développée après l'accident et notamment après la fin de l'URSS ?

Et aujourd'hui, connait-on (ou peut-on connaitre) quel est le niveau d'expertise des techniciens et opérateurs du nucléaire en Russie ? Par ailleurs est-ce que leur culture de la sûreté a profondément changé ?
Des échanges entre Français et Russes existent-ils ?

la réponse est oui à toutes les questions, pour la Russie, mais aussi pour l'Ukraine. (en plus de l'aide spécifique apportée à l'occasion de la crise de Tchernobyl.)

Il faut tout de même imaginer les angoisses des occidentaux à la suite de la chute du communisme et de la dislocation de l'URSS :

- le premier sujet de cauchemar portait sur les armes nucléaires.

En effet, certains sites de lancement se trouvaient hors de Russie, et donc des pays indépendants depuis peu, dont les dirigeants étaient de parfaits inconnus, devenaient du jour au lendemain des pays armés jusqu'aux dents.

C'était spécialement le cas de l'Ukraine. la solution adoptée, après négociation, a été tout simplement de leur racheter ces installations pour les démanteler. (Je me souviens que pour l'Ukraine, ce sont les USA qui ont mis le chèque sur la table, j'ai en tête l'ordre de grandeur de plusieurs milliards de dollars.)

Je sais que ça a concerné, dans une moindre mesure, un ou plusieurs des pays "en stan" (les fameux Tadjikistan, Ouzbekistan, etc...) mais de façon plus anecdotique, parce que les sites de missiles soviétiques, dans l'ensemble, ne se trouvaient pas là. (On en a peu parlé, leurs dirigeants n'avaient pas d'ambitions géopolitiques, bref, chèques dessus et sans doute dessous la table, mais rien qui ait posé souci.) Pour la Biélorussie - le Bélarus - je n'ai pas souvenir, mais elle a été neutralisée aussi.

- le second sujet était évidemment, dans l'état de délabrement où se trouvaient les économies de la Russie et de l'Ukraine, d'abord la question de la maintenance des installations, parce que la maintenance d'un réacteur nucléaire ça coûte très cher, et ensuite la gestion du personnel, et sa formation à la sûreté.

Je sais qu'il y a eu une coopération durable, en toute transparence, sur ces deux sujets, financée par l'Europe - et peut être par d'autres sources - mais je ne connais pas les détails. (On peut imaginer que les autorités russes et ukrainiennes, après Tchernobyl et alors que leurs pays respectifs n'avait plus un rond, ne devaient pas être très rassurées non plus sur ces sujets là.) EDF en tous cas y a participé, Narduccio pourra peut-être nous en dire plus.

(Il faut se représenter, pour situer ce que "pas un rond" veut dire, que les réacteurs de certains sous-marins nucléaires ancrés à Mourmansk - Moscou n'avait plus les moyens d'entretenir toute sa flotte - ont tout simplement été raccordés au réseau électrique de la ville. - j'ai vu des images de ces sous-marins avec les câbles électriques qui sortaient par le kiosque. On a beaucoup parlé à l'époque de ces navires à propulsion nucléaire qui rouillaient là, et plus encore à Vladivostok. Tout ce que je peux en dire est qu'il n'y a pas eu de drame majeur, mais il me semble qu'on a parlé de faibles contaminations radioactives en mer.)

la situation actuelle des centrales russes est même encore plus rassurante : je ne saurais pas situer l'année - avant 2000, en tous cas - mais la Russie est allée jusqu'à commander à EDF une mise à niveau de sûreté des équipements de ses centrales. Là encore avec une aide européenne.

La page suivante de l'INRS, plus précise, contient un encart (en bas de page) qui distingue deux phases sur la mise à niveau :
- sur les RBMK une phase de modifications immédiates : barres de ralentissement permanent, compensées par un combustible plus riche, pour les rendre plus stables, et arrêt d'urgence aligné sur celui de la France, en faisant tomber les barres de contrôle.
- et une phase ultérieure, celle dont j'ai parlé pour la Russie, de mise à niveau général des équipements de sécurité sur tous les réacteurs.

https://www.irsn.fr/FR/connaissances/Installations_nucleaires/Les-accidents-nucleaires/accident-tchernobyl-1986/2016-Tchernobyl-30ans-apres/Pages/1-Tchernobyl-2016-30ans-apres-accident-deroulement.aspx

On peut donc considérer que la Russie et l'Ukraine ont aujourd'hui, tant que faire se peut, des réacteurs qui se rapprochent davantage de la culture européenne de la sécurité. A un (gros) détail près : leurs réacteurs ne sont toujours pas confinés. Hors on a vu à Fukushima que c'était un point décisif en cas d'accident majeur.

je me suis un peu avancé : je ne sais pas si cette coopération continue aujourd'hui, mais vu l'expertise apportée par EDF, ça serait logique. (Narduccio, as-tu cette info ?)

@Narduccio : sur le nuage radioactif en France, je ne lisais pas Libé à l'époque, en revanche je me souviens bien d'une intervention d'un spécialiste mandaté par l'état, au journal de 20 Heures, expliquant qu'il n'y avait rien à craindre. (je ne saurais pas dire s'il s'agissait du professeur Pélerin ?) L'idée que j'en avais retenue à l'époque, était que le nuage s'était redéposé sur les pays au nord et à l'est de la France. (Il n'apparaissait même pas que toute la RFA avait été touchée, il ne s'agissait donc pas d'un "arrêt à la frontière" caricatural.)

J'ai surtout retenu cette intervention, mais elle a été corrigée ultérieurement - je dirais une semaine, mais sans être affirmatif - puisqu'il y a eu débat sur les régions de France dont la production agricole devait être détruite, ou simplement "rincée avec soin." :rool: (J'ai en mémoire des points en Alsace et en Corse, mais ce n'est certainement pas exhaustif.) En tous cas je me souviens avoir regardé les reportages sur les destructions massives de produits agricoles en Allemagne avec une certaine incrédulité : qu'est-ce qui leur prenait à ces Allemands ? encore une parano des écolos ?

_________________
Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. (Chamfort)


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Message Publié : 17 Déc 2018 9:35 
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Salluste
Salluste

Inscription : 22 Mars 2011 13:45
Message(s) : 217
Je lis mercredi 30 avril moi :?:


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