L. VLPIVS POLLEX a écrit :
Devant certaines polémiques et propos (qui, à mon endroit, frisent l'insulte familiale), je propose d'en rester aux faits:
- 16 juin 1940, après la démission de Reynaud, le Président Lebrun nomme Philippe Pétain, président du Conseil (en toute légalité, notez-le)
- 4 juillet 1940: le Conseil de Guerre, condamne Charles De Gaulle à mort par contumace, dans les locaux de la cour d' appel de Toulouse( légal, toujours).
- 10 juillet 1940 : les pleins pouvoirs constitutifs sont décernés à Philippe Pétain, par le Parlement de la 3ème République ... légal encore
Il est vrai qu'en ce même mois de juillet 1940, Pétain s'est "auto-proclamé" en lieu et place du Président Lebrun (qui s'est alors retiré) etc etc etc etc
Lancer une provocation et jouer ensuite la victime outragée n'est pas une bonne manière de discuter.
Les faits sont :
- 16 juin 1940, après la démission de Reynaud, le Président Lebrun nomme Philippe Pétain, président du Conseil ;
- 4 juillet 1940: le Conseil de Guerre, condamne Charles De Gaulle à mort par contumace, dans les locaux de la cour d'appel de Toulouse ;
- 10 juillet 1940 : vote d'une loi constitutionnelle ainsi rédigée :
L'Assemblée Nationale donne tous pouvoirs au gouvernement de la République, sous l'autorité et la signature du Maréchal Pétain, à l'effet de promulguer par un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l'Etat français. Cette constitution devra garantir les droits du travail, de la famille et de la Patrie.
Elle sera ratifiée par la nation et appliquée par les assemblées qu'elle aura créées.
La présente loi constitutionnelle, délibérée et adoptée par l'Assembée Nationale sera exécutée comme loi de l'Etat.- 11 juillet 1940 : Philippe Pétain, par le biais de trois « actes constitutionnels », déclare assumer les fonctions de « chef de l'Etat français », s'attribue les pleins pouvoirs législatifs et exécutifs, abroge l'essentiel des lois constitutionnelles de 1875 et ajourne sine die les chambres parlementaires.
Le seul acte dont la légalité ne fait pas de doute est la nomination de Philippe Pétain comme chef du gouvernement. La légalité de tout le reste se discute et ne relève donc pas du fait mais de l'opinion.
Relève néanmoins du fait l'absence d'invalidation de l'ordonnance du 9 août 1944 par le Conseil d'Etat de même que l'absence d'un refus de ratification de cette ordonnance par l'Assemblée élue le 21 octobre 1945. On peut exprimer l'opinion que le droit aurait été malmené mais on ne peut nier que l'illégalité de la loi du 10 juillet 1940 et des trois actes du 11 juillet ne soit inscrite dans le droit actuellement encore en vigueur soixante-dix ans après.La condamnation à mort du général de Gaulle est plus qu'illégale. Elle est inexistante. Simplement illégale, la sentence aurait été annulée d'une façon ou d'une autre. Mais elle est restée tout simplement ignorée.
La légalité de la loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 ne se défend que si on l'interprète restrictivement.
Une interprétation littérale de cette loi amène à dire que l'Assemblée Nationale
- n'a pas conféré les pleins pouvoirs législatifs au Maréchal Pétain,
- ne lui a pas conféré de pouvoirs exceptionnels l'autorisant à déroger aux lois en vigueur,
- qu'elle lui a seulement donné mandat pour préparer une nouvelle constitution qui ne pourrait entrer en vigueur qu'après ratification par les assemblées qu'il aura créées,
- qu'il est sous-entendu que ces assemblées seraient créées dans le respect des principes fondamentaux de la République, à savoir que la souveraineté continuerait à appartenir au peuple et que les membres des assemblées seraient désignés par le peuple au suffrage universel.
Selon cette interprétation, cette loi est constitutionnelle mais les actes du 11 juillet les outrepassent très largement et, de plus, violent de façon flagrante les principes fondamentaux de la République. Pour ces raisons les actes constitutionnels du 11 juillet sont totalement illégaux.
Mais la loi constitutionnelle du 10 juillet 1940 est en fait généralement interprétée largement :
- elle donne les pleins pouvoirs législatifs et exécutifs au Maréchal Pétain pour une durée indéterminée et sans aucun contrôle,
- elle lui donne des pouvoirs constituants en violation des principes républicains.
En ce sens elle est anticonstitutionnelle et les actes du 11 juillet tout autant.
Les principaux motifs de nullité détaillés dans la déclaration organique du 27 octobre 1940 sont les suivants :
- Tout le territoire de la France métropolitaine est sous le contrôle direct ou indirect de l'ennemi. De ce fait le gouvernement de Vichy de jouit pas de la plénitude de liberté indispensable à l'exercice intégral du pouvoir.
- Le président de la République a été dépouillé, sans avoir démissionné, des droits et prérogatives de ses fonctions.
- Une révision constitutionnelle ne peut être décidée que selon la procédure définie dans les lois constitutionnelles de 1875 qui n'a en rien été respectée.
- Ni les deux chambres séparément ni l'Assemblée Nationale n'ont pu délibérer librement. En particulier, les parlementaires qui avaient embarqué sur le Massilia ont été intentionnellement empêchés de participer aux délibérations et au vote et des tiers sans qualité ont exercé des pressions sur les parlementaires lors des délibérations.
- L'assemblée Nationale, dans les conditions évoquées ci-dessus, a abdiqué une compétence qui lui appartenait à elle seule en donnant un quasi blanc-seing à un tiers.
- Alors que l'article 8 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 dispose que la forme républicaine du gouvernement ne peut faire l'objet d'une proposition de révision, le gouvernement de Vichy a prononcé tant dans la forme que dans le fond l'abolition de la constitution républicaine pour s'attribuer des pouvoirs aussi étendus que ceux d'un monarque absolu, sans contrôle et sans limite de durée.
- Le gouvernement de Vichy a étouffé le droit de libre disposition du peuple en conférant au chef de l'Etat la possibilité, sur sa seule signature, de conclure et ratifier tous les traités, même les traités de paix ou de cession de territoire.
- La disposition de la loi constitutionnelle du 10 juillet prévoyant la ratification de la future constitution par la Nation est sans portée vu que le chef de l'Etat peut à sa guise régler la composition des assemblées et les modalités de la ratification et qu'il peut même reculer indéfiniment cette ratification.
- A défaut d'un parlement libre et fonctionnant librement, il appartenait aux Conseils Généraux, en application de la loi du 15 février 1872, de pourvoir à l'administration générale du pays. Or le gouvernement de Vichy a interdit aux conseils généraux de se réunir.
Il résulte de tous ces motifs de nullité que la constitution de la Troisième République reste en vigueur jusqu'à l'adoption de la constitution de la Quatrième République.
Dans le silence des lois constitutionnelles de 1875 et sous l'empire des circonstances, ce qui n'aurait pas violé les principes républicains aurait été une dictature dans le sens romain du terme pour un temps limité et sous le contrôle de la représentation nationale. C'est dans cet esprit que peut s'appliquer l'article 16 de la constitution de la Cinquième République : s'il en est fait application, alors le parlement siège de plein droit et l'Assemblée Nationale ne peut être dissoute.