Surya a écrit :
Je ne l'ai pas précisé, mais c'était effectivement des navires marchands dont il est question. Le chiffre de 45 hommes par tonneau me paraît absolument énorme (...) j'ai trouvé divers exemples qui montrent que 200-400 personnes pour de si petits bateaux, ça fait effectivement beaucoup : pour le navire danois Dronningen en 1743, 540 tonneaux et 160 personnes à bord par exemple, ou encore le Boswijck néerlandais (1687) : 370 tonneaux, 100 hommes (...) A propos des bateaux japonais (...) la taille des navires allait justement de 70-100 tonneaux à 600-800 tonneaux, avec une moyenne à 300. Au niveau des personnes à bord (équipages + marchands passagers), ça va de 50 à 397 personnes.
Je suis surpris de cette unité "hommes
par tonneau". L'amirauté parle plutôt de
tonneaux par homme (en anglais,
registered tons served per man). Parler du nombre d'hommes ne signifie pas parler de charge ou de surcharge, et nécessite de préciser la cargaison et l'armement, et si on parle de l'équipage nécessaire, ainsi que de la nature du voyage, colonisation ou non, passagers ou non, troupes de protection ou non. On n'embarque pas le même nombre d'hommes selon ce qu'on transporte et où on navigue (a fortiori bien sûr si le cargo est des esclaves).
"Dans les années 1630, les navires anglais allant chercher du vin et des fruits à Cadiz et Malaga avaient des équipages de 1 homme pour 6.7 tonneaux. En 1686-1687, le ratio est de 1 homme pour 7.7 tonneaux (registres de la Haute cour de l'Amirauté)." (
The Rise of the English Shipping Industry in the Seventeenth and Eighteenth Centuries, Ralph Davis, Oxford University Press). En ce qui concerne l'équipage nécessaire, en 1662, un édit obligeait tout navire de 200t se rendant en Méditerranée d'emporter un minimum de 16 canons et trente hommes, en raison du risque de piraterie, sous peine de taxes punitives (en réalité ils en déclaraient tous 32, mais n'en avaient que 19 selon Davis). En 1688, la Compagnie du Levant ordonnait à tous ses navires un ratio de 100 tonneaux pour 15 hommes, avec également une pratique plus frugale.
Ces ratios sont de même ordre que ceux donnés par De Zwart et al. dans
The Origins of Globalization: World Trade in the Making of the Global Economy, 1500-1800 (2018): les navires transatlantiques de 250t avaient un équipage d'environ 30 hommes en 1600, puis ont vu ce nombre se réduire progressivement.
En revanche, dans les eaux plus nordiques, au-delà de la Manche, la piraterie étant moins un problème et la concurrence commerciale étant féroce, les équipages étaient moindres:
l'Endeavour (140t) n'avait que 9 hommes pour ses traffics vers la Norvège en 1632, soit 15.5t/homme. Le
Edward and Sara en 1650: 280t pour 13 hommes, soit 21.5t/homme. La moyenne tombe à 20t/h vers la Baltique, qui comptait pour un tiers du traffic de et vers Londres, à la fin du 17e-début du 18e.