Randolph Carter a écrit :
Ne serait-ce pas plus simple de considérer que la "décadence" appartient au champ des représentations et n'est pas un idéal-type fonctionnel en histoire ? Les acteurs peuvent parler de décadence, sans doute, mais les historiens devraient, me semble-t-il, se garder de l'utiliser pour faire l'histoire d'une civilisation. La "décadence" est un terme bien peu scientifique qui ressemble quand même fort à un plancher pourri.
C'est exactement mon avis ; on en apprend plus sur ceux qui pensent la décadence que ce que le concept essaie de construire qui est par définition extrêmement fourre-tout et fondé sur des idées plutôt orientées.
Léonard59 a écrit :
Je pense que vous avez raison. Le problème est que pas mal des passionnés qui fréquentent ce forum l'utilisent souvent pour justifier pas mal de choses. SI on fouille dans les profondeurs du forum, on trouvera de nombreuses interventions sur la décadence de telle ou telle civilisation et sur les conséquences que cela a eu. Je pense qu'il faudrait plus s'axer sur des raisons objectives qui permettent souvent de relativiser le tableau. Alors que la "décadence" entraîne un jugement moral. Et là, on quitte le champ de l'histoire pour tomber dans celui de la sociologie.
Faire l'Histoire de ces files de discussion ne serait sans doute pas inintéressant
Plus sérieusement je viens de tomber sur cette citation éclairant un peu ce que j'avais montré plus haut avec mes courbes :
"Mais entre 1871 et le tournant du siècle, le nationalisme passa progressivement de la gauche à la droite du paysage politique. Les mécanismes en sont complexes. D'une part, la blessure non encore cautérisée de la perte de deux provinces entraîne une sorte de fièvre obsidionale : la République, dont l'installation est concomitante de la défaite et qui parapha le traité qui en résulta, doit donc endosser le péché originel, malgré son attitude en 1871. Bien plus, elle doit supporter, en tant que régime chargé de la politique extérieure française, les effets d'une telle fièvre. D'autant que, par ailleurs, ce nationalisme blessé est aussi un nationalisme inquiet. La proximité du tournant du siècle a exacerbé un sentiment d'incertitude et d'impuissance, que la République là encore doit assumer. La France serait menacée par la décadence et par l'épuisement de la race et devrait dont être protégée contre des ferments internes de dissolution et des atteintes étrangères conduisant à la désagrégation."
Un élément de contexte en somme permettant de comprendre aussi ce contexte d'épanouissement de l'idée de décadence. En fait réfléchir sur pourquoi on pense ce concept est plus instructif que le concept lui-même.