Arkoline a écrit :
A mes yeux, c'est une sagesse uniquement si l'on postule que l'Union soviétique ne profite pas du délai pour intensifier son effort d'armement.
Je pars du principe que ce délai aurait permis relativement un renforcement de la Wehrmacht plus important que celui de l'Armée rouge. La Wehrmacht pouvait capitaliser sur un retour d'expériences extrêmement riche, concret, direct, au contraire de l'Armée rouge qui n'en bénéficiait que d'un indirect ; la Wehrmacht pouvait en profiter pour régler certains des problèmes de croissance buissonnante issue de sa naissance très récente, notamment un sous-équipement et un dimensionnement inadéquat de la plupart de ses grandes unités ou une capacité antichar insuffisante - ce qui encore une fois n'était pas un problème pour l'Armée rouge ; la Wehrmacht enfin pouvait densifier sa masse, puisqu'au contraire de l'Armée rouge c'est sa limitation dans ce domaine qui explique l'essentiel de son échec en 1941.
Arkoline a écrit :
Puisque Staline s'était auto-persuadé que l'attaque de l'armée allemande était inévitable au plus tard en 1942, je doute que les livraisons auraient continué jusqu'au printemps 1942. On peut donc supposer que le volume des livraisons auraient été moindres.
Et ? L'Allemagne n'avait pas un besoin vital des livraisons soviétiques, elle a su s'en passer entre 1941 et 1945... Tout ce qui aurait été pris de plus entre juin 1941 et mai 1942 l'aurait été et stocké en prévision des opérations militaires.
Arkoline a écrit :
Si l'offensive est reportée en 1942, cela n'entraine pas nécessairement un R-U inoffensif, ou une Méditerranée sécurisée.
Puisque nous sommes dans une uchronie, je fais le choix de dire que si - et cela peut bien entendu s'expliciter.
Les Allemands, avec dix mois de plus pour opérer à l'Ouest et au Sud, étaient en mesure de neutraliser durablement le Royaume-Uni : en prenant Gibraltar et l’Égypte par exemple, ce qu'ils étaient capables de faire pour peu qu'ils ne soient pas obligés d'engager les trois-quarts de leur potentiel militaire en URSS, ou en poursuivant leurs efforts maritimes et aériens contre l'archipel.
Avec une Méditerranée vidée de Britanniques, les capacités de nuisance du Royaume-Uni sont réduites à quasiment rien, en tout cas, les perspectives stratégiques d'une menace britannique s'éloignent de plusieurs années (comment débarquer en Grèce ou en Sicile si on n'a pas accès à la Méditerranée ?). En réduisant les options stratégiques britanniques à une attaque frontale sur le littoral de la Manche ou de la mer du Nord, ou à une reconquête lente et hypothétique de l’Égypte depuis le Moyen-Orient, les Allemands obtenaient un gain de potentiel très substantiel puisqu'ils n'avaient à y opposer que des moyens limités (plus limités que ceux effectivement déployés en 1941 à l'Ouest et au Sud - pour rappel : 21 divisions et deux brigades en France, huit divisions en Norvège, trois divisions en Libye, huit divisions dans les Balkans).
Avec une Méditerranée vidée de Britanniques, la quasi-totalité du potentiel militaire allemand peut être orientée contre l'URSS, contrairement à 1941. Là où le Heer et la Luftwaffe ont déployé environ 66% de leur puissance contre les Soviétiques en juin 1941 (149 divisions sur 203 soit 73%, trois Luftflotten sur cinq soit 60%), ce ratio aurait été de 85 à 90% avec une Méditerranée sécurisée - il n'y a qu'à défendre l'"Atlantikwall". Et en plus, la force potentielle totale aurait été élargie puisque l'année 1941 aurait été mise à profit pour renforcer ce potentiel (appel de la classe 1942, production de matériels nouveaux en quantité, etc.), ce qui aurait permis non seulement un accroissement relatif (de 66% à 85%), mais aussi un accroissement brut (avec 200 divisions sur 230 et quatre Luftflotten engagées contre l'URSS). Dès lors, il est bien possible que la Wehrmacht ait été suffisamment puissante pour abattre l'ours soviétique.
Des inconnues toutefois :
- est-ce que l'accroissement de potentiel de l'Armée rouge aurait permis de compenser ce renforcement allemand ? Voire de le surpasser ?
- est-ce que les opérations contre les Britanniques, même couronnées de succès, n'auraient pas prélevé un tribut trop important, notamment matériel (je pense en particulier à l'aviation), pour atténuer les mesures de renforcement du potentiel militaire allemand qui auraient été prises en 1941-1942 ?
- est-ce que le plan allemand serait resté significativement le même, sachant qu'il est une partie essentielle du problème ?
CEN EMB