fdomi a écrit :
Sol_Invistus a écrit :
Les Romains... s'imaginaient que les Juifs adoraient le ciel et les nuages...
C'est bien mal se rappeler l'histoire.
Ahaa ?!
Si vous le dites...
fdomi a écrit :
Pompée, en 63 avant J.-C., était entré dans Jérusalem, dans le Temple et même dans le Saint des Saints ; de là une croyance, grecque (Flavius Josèphe, Contre Apion) et romaine (pour aider à l'histoire, et à l'historien, remarquons qu'il manque 4 livres - VII à X - des Annales de Tacite sur la période de 37 à 47 de notre ère, mais c'est une autre histoire), que le peuple d'Israël adorait une tête d'âne (voir Apulée). Pas le ciel et les nuages.
Certes. Mais pour ma part, je me rappelle bien les vers 96-97 de la Satire XIV de Juvénal, qui sont parfaitement explicites :
Quidam sortiti metuentem sabbata patrem
Nil prater nubes et caeli numen adorant.
(
Trad.: "Certains, ayant hérité du sort un père
craignant-le-Sabbat, n'adorent rien que les nuages et la puissance du ciel.")
D'ailleurs, l'intégralité des vers 96-106 de cette satire apporte de nombreux éléments de réponse à la question par laquelle cette discussion a commencé : je ne saurais qu'en recommander la lecture.
Le passage auquel je me réfère n'infirme nullement ce que vous avez cité, fdomi, mais y apporte un complément utile... et lave ma mémoire de tout soupçon de défaillance !
Il en ressort que le judaïsme faisait l'objet de croyances fort variées ("tête d'âne", "ciel et nuages")... en raison, précisément, des informations parcellaires que les Romains pouvaient avoir de ce culte.
La question de savoir si les Romains considéraient les Juifs d'abord comme des Orientaux est particulièrement intéressante.
En effet, il est possible de remarquer que c'est précisément lorsqu'ils sont bien en cour, très hellénisés et, finalement, très "assimilés", que les Juifs sont considérés comme des Orientaux : par exemple, on ne reprocha pas sa judéité à un personnage comme Tibérius Alexandre, mais on le dépeindra sous les traits typiques de l'Oriental parvenu.
En revanche, lorsqu'ils sont loqueteux, miséreux, mendiants et peu "assimilés", les Juifs sont spécifiquement identifiés comme Juifs : en témoigne le fameux "cophinus" dont l'imagerie "d'Epinal" romaine les affublait.
Pour résumer, s'il y a bien un mot qui soit contestable dans le titre originel de cette discussion, c'est (bien plus que le verbe "haïr"), l'adverbe "tant".
Il est indiscutable que les Romains nourrissaient de l'aversion pour les Juifs, pour deux raisons qui se complètent :
- une religion "absurde" considérée comme une superstition "barbare" et, éventuellement, dangereuse pour l'ordre public.
- une tendance constante à la rébellion
Mais, lorsqu'ils étaient suffisamment "assimilés", les Juifs changeaient de catégorie, si je puis dire, et "retombaient" dans le mépris plus général que les Romains entretenaient vis-à-vis des Orientaux.
On est effectivement assez loin de l'antijudaïsme tel qu'il pourra se développer par la suite : l'aversion envers les Juifs n'est ni plus ni moins forte que celle dont faisaient l'objet d'autres peuples culturellement trop éloignés de Rome et enclins à la sédition perpétuelle.
Il faut néanmoins admettre que l'aspect à la fois "irréductible" et "incompréhensible" du judaïsme aux yeux des Romains compte pour beaucoup dans l'"aversion" dont la plupart de nos sources classiques font preuve à l'égard des Juifs. C'est d'ailleurs toujours l'élément qu'elles mettent en avant. Il me paraît donc de mauvaise méthode de l'évacuer et de réduire le problème à une question de "ras-le-bol" envers les habitants d'une région en perpétuelle agitation (même si cet aspect entre aussi en ligne de compte) : il y avait bel et bien une aversion particulière des Romains envers cette "drôle de religion".
Je crois donc que nos réponses se complètent et s'éclairent mutuellement. D'ailleurs, n'est-ce pas le but de ce forum.