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Message Publié : 07 Nov 2006 8:25 
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Hérodote
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J'ai crée ce sujet pour parler d'un sujet méconnu. Quand vous regardez la plupart des atlas historiques, vous verrez que Clovis a conquis l'ouest de la Gaule entre 486 et 507. En général, on considère une frontière bretonne autour de Vannes, incluant Rennes et Nantes dans le royaume franc. Pourtant une relecture minutieuse des sources n'autorise pas cette assertion.

La secession armoricaine

En 409, alors que l'empire romain d'Occident est envahi par des armées barbares et divisé par la guerre civile, nous savons que les cités bretonnes et armoricaines ont fait sécession. Selon Zosime, la cause de cette sécession n'est pas liée à une volonté indépendantiste vis à vis de l'empire, mais à des raisons fiscales et stratégiques: le pouvoir impérial (alors représenté en Gaule par l'usurpateur Constantin III) défend en priorité la Gaule méridionale et principalement le quart sud-est. Les cités armoricaines n'ont pas été envahies par la grande invasion de 407-409 mais ces cités se sentent justement menacées de subir le même sort que celles du nord-est et d'Aquitaine. La sécession eut lieu d'abord parce que les Armoricains ne voulaient plus payer d'impôts et fournir des recrues à l'empire alors que ses armées ne les protège pas. La sécession est d'abord la volonté de ces cités de se défendre seules. Bretons et Armoricains, moins touchés par la civilisation urbaine romaine des régions méditérannéennes fournissait de bons soldats. Leur volonté et leur capacité à se battre seuls ne fait aucun doute.

Au Ve siècle, l'Armorique va subir non pas la guerre face aux barbares mais un grand nombre d'expéditions militaires du pouvoir impérial, essayant de restaurer son autorité. Nous savons qu'il y eut celle du préfet des Gaules Exuperantius vers 416, celle d'Aétius en 425, celle de Litorius en 435 et celle de Goar en 448. La plus sanglante fut celle de Litorius qui employait des alliés Huns. La répression de 448 nous est connue dans la vie de St Germain d'Auxerre (qui fut peut-être duc d'Armorique avant d'être élu évêque en 418). Le médecin Eudoxe commandait le soulèvement armoricain. Le pouvoir impérial décida de châtier les armoricains en ordonnant aux alains de Goar, basés à Orléans, d'aller ravager leurs terres. Germain, apprenant le départ de Goar, rattrappa l'armée des alains sur le chemin et négocia une trève avec leur chef. Ce dernier accepta à condition que Germain obtint le pardon impérial. Il partit donc pour l'Italie mais mourut en chemin. Et les armoricains rompirent la trève. Ensuite, la révolte fut châtiée et Eudoxe se réfugia auprès d'Attila !

La soumission théorique aux francs

Au cours de la deuxième moitié du Ve siècle, l'empire n'a plus les moyens de s'imposer en Gaule étant sur la défensive face aux ambitions wisigothiques mais l'Armorique tint bon. Etait-elle sous l'autorité de l'armée romaine du nord commandée par Aégidius, Childéric puis Syagrius ? Nous ne le savons pas. Le dernier combat d'une armée romaine à l'ouest eut lieu vers 470 à Angers. Il s'agissait d'une opération militaire combinée du comte Paul et de Childéric contre les mercenaires Saxons d'Odoacre.
Les francs ne conquirent la région d'entre Seine et Loire qu'entre 486 et 500, au prix de durs combats contre les Armoricains. Nous tenons ces faits de l'historien byzantin Procope. Les Armoricains ne furent jamais complètement vaincus par les francs. Ils étaient renforcés par des immigrants bretons. Nous savons qu'il y eut un traité de paix et que les dernières unités romaines se rendirent à Clovis, conservant leurs enseignes, leur nom et leurs traditions militaires. C'est une unité militaire romaine de Bretons qui aurait fondé Blois (chronique de Blois). Nantes a connu un siège en 498 mais les francs ne sont pas parvenu à s'en emparer et se sont repliés après deux mois.
Nous savons que les évêques Saint Patern de Vannes et Saint Melaine de Rennes ont négocié la paix entre bretons, armoricains et francs (les évêques au Ve siècle, dirigeaient la plupart des cités gauloises du nord).
Entretemps Clovis s'était baptisé ainsi que la plupart de ses guerriers francs. Il avait aussi reçu la légitimité impériale (fait consul par l'empereur Anastase). Un foedus a été signé. Il semblerait que les armoricains et les bretons ont obtenu le statut de peuple tributaire. Ils sont officiellement intégrés dans le regnum francorum mais, moyennant un tribut (en nature, des vaches entre autre) conservent leur autonomie et ne sont pas occupés par des garnisons franques. Il s'agit d'un statut d'autonomie qui était courant aux frontières (les Alamans et les Thuringiens ont obtenu le même statut à l'est). Le traité concernait à la fois les colons bretons et trois cités gallo-romaines d'Armorique: Vannes, Rennes et Nantes. Celles-ci étaient des cités gallo-romaines, on y parlait le bas-latin, elles étaient hors de l'immigration bretonne à l'exception de Vannes qui avait l'originalité d'avoir conservé dans ses campagnes une population parlant le gaulois (le breton Vannetais vient linguistiquement du gaulois et non du breton insulaire). En relisant bien Grégoire de Tours, on s'aperçoit que cette autonomie a duré jusque dans les années 580.

Au cours du VIe siècle, l'immigration bretonne s'est renforcée, provoquant la création de roitelets locaux. En 560, lorsque Chramne le fils du roi franc Clotaire fuit, il rejoint Chanao, un roitelet breton de la région vannetaise. Il y eut une bataille entre Chramne, Chanao et Clotaire mais c'est ce dernier qui fut victorieux, tuant les deux autres. Cet épisode n'a pas tout de suite eu d'effets politiques dans la région. Mais désormais, l'hostilité allant croissante entre bretons et francs, les cités autonomes de Vannes, de Rennes et de Nantes se trouvèrent prises entre deux feux. D'un côté elles étaient menacées directement par les francs, de l'autre, en demandant de l'aide, elles risquaient de perdre leur autonomie politique. Et tôt ou tard, les francs ne pourraient plus prendre le risque de laisser des enclaves autonomes sur la frontière.

Waroch, fils de Chanao, a rompu le traité en s'emparant de la cité de Vannes (576). Il s'ensuivit une réaction du roi franc qui avait l'autorité sur l'ouest: Chilpéric envoya des armées contre les bretons de Vannes. Les généraux francs furent vaincus. Vannes était perdue pour les francs et les bretons faisaient tous sécession. Nantes et Rennes se retrouvaient à la frontière entre francs et bretons. La cité de Nantes fut victime de raids des pillards bretons de Chanao (le raisin des vignes fut emporté par les bretons qui en firent du vin) jusqu'au moins en 593. En 582, à la mort de l'évêque St Félix de Nantes, l'évêque fut désormais choisi par le roi franc. Nous savons qu'une garnison fut installée à Nantes au plus tard en 610 (première mention d'un comte franc à Nantes) mais certainement dans les années 580 au plus fort du conflit entre bretons et francs. A Rennes, l'occupation franque provoqua des tensions avec les habitants (un comte franc assassiné).


Bien sûr toute cette histoire n'est fondée que sur peu de sources, aucune n'explicant clairement la situation de Nantes et de Rennes au VIe siècle. Cela dit, dans Grégoire de Tours, nous savons par exemple que lorsqu'une expédition militaire était décidée par les francs contre les bretons, on ne levait pas de soldats dans les cités de Nantes et de Rennes avant 585 alors qu'on en levait dans les cités du Mans, d'Angers ou de Poitiers.
Par ailleurs, l'évêque de Nantes Félix était tout puissant dans sa cité, c'est lui qui la géra sans partage. Il a fait montre d'une grande autonomie du point de vue diplomatique (évangélisation des Saxons de la presqu'île guérandaise). St Félix, était en théorie sous l'autorité de l'évêque métropolitain de Tours (le fameux historien Grégoire de Tours). Or il est un fait que jamais Grégoire ne put le contraindre à quoique ce soit. Félix, selon Grégoire n'était pas pour rien dans le procès qui faillit perdre l'évêque de Tours. Aucune représaille n'atteignit Félix. De même la succession des évêques de Nantes était dynastique, une puissante famille d'Aquitains règna plus d'un siècle sur la ville aux Ve-VIe siècle, son dernier représentant étant le neveu de Félix. Par la suite, l'indice de perte d'autonomie est le fait que désormais, les évêques soient nommés par le roi. Et la prospérité de la ville de Nantes à cette époque est certainement en lien avec cette autonomie.

Si quelqu'un trouve d'autres indices confirmant ou contredisant cette thèse, j'espère qu'il en fera part.

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Message Publié : 07 Nov 2006 10:39 
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Inscription : 27 Avr 2004 17:38
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Localisation : Région Parisienne
Je ne pense pas que les évêques étaient nommés par le roi mérovingien, du moins pas systématiquement.

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 Sujet du message : évêques merovingiens
Message Publié : 07 Nov 2006 14:15 
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Hérodote
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Inscription : 02 Nov 2006 11:08
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Localisation : Bretagne
Certes, ce n'était pas systématique mais ils pouvaient s'opposer le cas échéant à une nomination. C'est ce qui s'est passé en 582 à la mort de Félix. Félix avait prévu un neveu et puis c'est un autre qui lui a succédé par ordre royal.

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Message Publié : 08 Nov 2006 17:19 
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Polybe
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Inscription : 11 Oct 2003 13:58
Message(s) : 110
Localisation : Bordeaux
Je ne parlerai pas de l'Armorique, mais je souhaiterai juste indiquer une source qui cherche à prouver que les évêques étaient bien choisis par le roi, et ceci en présentant de nombreux exemples. Ce texte est peu être un peu assez ancien je conçois mais il n'a pas été écris par un arriviste.

C'est une oeuvre de Fustel de Coulanges (1830-1889) commencée en 1875. Il s'agit de l'Histoire des institutions politiques de l'ancienne France. L'extrait dont je fais allusion se trouve dans le Tome III (La monarchie franque), chapitre XV (Rapports des rois avec l'Eglise), 3e partie (Les élections épiscopales dans l'Etat Franc), pp. 544 à 566.

Cette oeuvre est librement accessible, et gratuitement téléchargeable sur le merveilleux site de la BNF.

Ce sujet m'intéresse toutefois et si ma petite culture le permet j'essaierai d'y mettre ma petite touche.

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