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Message Publié : 06 Nov 2006 19:53 
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Thucydide
Thucydide

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Les hommes ont dû donner des noms en fonction des caractéristiques de chaque individu ou de leur caractère, de leur prédilection pour telle ou telle chose, etc. Tout comme aujourd'hui: Le Bègue, le Boiteux, le Grand, le Gros, le Petit, le Chauve...Il y a de quoi faire! Il faudrait étudier les noms que se donnent les peuples très anciens comme les Aborigènes d'Australie par exemple, les Papous, etc. Avant l'influence des religions modernes évidemment. On peut aussi penser aux Amérindiens qui se servaient des animaux pour se donner des noms: Crazy Horse "cheval fou", Sitting Bull '"taureau assis", etc.


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Message Publié : 06 Nov 2006 22:12 
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Plutarque
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Dans les petits groupes humains on a tout simplement recours au termes de parenté, qui forment souvent un système plus complexe que celui du français. On s'appelle donc "petit frère", "grand-mère", "oncle", etc. C'est aujourd'hui le cas encore dans de nombreuses sociétés.


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Message Publié : 06 Nov 2006 22:34 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

Inscription : 17 Oct 2003 19:37
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Y a-t-il parmi toutes ces hypothèses, un cas que l'on retrouve plus fréquemment que les autres parmi les derniers chasseurs-cueilleurs qui ont survécu jusqu'à notre époque ?


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Message Publié : 11 Nov 2006 21:41 
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On peut aussi penser aux Amérindiens qui se servaient des animaux pour se donner des noms: Crazy Horse "cheval fou", Sitting Bull '"taureau assis", etc.


Petite remarque. Il n'y a pas que les "Indiens" qui utilisent ce système.
Les Germains aussi et donc nous :
Bernard = Ours fort
Adolf = Loup
...

Nota sur les noms de chefs Indiens cités. Crazy Horze et Sitting Bull, c'est de l'Anglais. Quel est le nom réel en Indien.

(Cheval Fou s'appelle ainsi car un cheval fou a traversé le camp le jour de sa naissance, si mes souvenirs sont bons)

_________________
Pour grands que soient les rois, ils sont ce que nous sommes : Ils peuvent se tromper comme les autres hommes.
Pierre Corneille, Le Cid


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Message Publié : 11 Nov 2006 23:02 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges

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Nota sur les noms de chefs Indiens cités. Crazy Horze et Sitting Bull, c'est de l'Anglais. Quel est le nom réel en Indien?
(Cheval Fou s'appelle ainsi car un cheval fou a traversé le camp le jour de sa naissance, si mes souvenirs sont bons)

Dans la mesure où l'anglais traduit l'indien, Crazy Horse = Cheval Fou et Sitting Bull = Taureau Assis. Où est le problème? Vous recherchez peut-être la transcription phonétique du prénom original dans la langue indienne originale?
L'Encyclopaedia Britannica indique seulement que Sitting Bull, chef des Teton Dakota (ou Prairie Sioux) était le fils de Jumping Bull (= Taureau bondissant).
Il faudrait consulter un dictionnaire Sioux-Anglais (Américain) ou Sioux-Français (... existence hypothétique!).


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Message Publié : 12 Nov 2006 1:58 
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Jules Michelet
Jules Michelet
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julien a écrit :
Petite remarque. Il n'y a pas que les "Indiens" qui utilisent ce système.
Les Germains aussi et donc nous :
Bernard = Ours fort
Adolf = Loup
...

D'ailleurs tout prénom a sa signification... et parmi ces significations beaucoup sont en rapport avec les animaux et ce partout sur la planète et sur tous les continents.

_________________
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Skipp


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Message Publié : 12 Nov 2006 12:30 
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Skipp a écrit :
julien a écrit :
Petite remarque. Il n'y a pas que les "Indiens" qui utilisent ce système.
Les Germains aussi et donc nous :
Bernard = Ours fort
Adolf = Loup
...

D'ailleurs tout prénom a sa signification... et parmi ces significations beaucoup sont en rapport avec les animaux et ce partout sur la planète et sur tous les continents.


C'est bien plus compliqué que cela.
Comment nommes-t-on les gens dans les diverses sociétés humaines.
- sur des bases religieuses : on cherche dans ce cas un protecteur à l'enfant. Que se soit un saint dans le cas des chrétiens ou un esprit dans les sociétés chamaniques. Dans le système chamanique, les esprit sont souvent des esprit d'animaux, il est logique de nommer les enfants avec des noms d'animaux et l'on prend des noms correspondants aux signes que les esprits envoient aux hommes. D'où "cheval fou", puisque l'on retient que par cet évènement, l'esprit du cheval s'est manifesté et à donné éventuellement un indice sur le caractère ou la vie future de l'enfant. Dans certaines sociétés, l'enfant reste sans nom jusqu'à ce que l'on détermine exactement quel est son totem. Ou pour être plus exact, il va avoir un nom d'enfant et lors de la cérémonie de passage dans le monde adulte on va lui décerné un nom. Pour être encore plus précis, ce n'est pas toujours la cérémonie de passage au monde adulte, c'est plutôt une espèce de baptême tardif où on reconnait qu'il fait partie du groupe, d'ailleurs, le baptême, c'est bien cela, la reconnaissance que l'enfant appartient à la communauté.
- dans ces conditions, il y a donc un nom d'enfant. Nom donné souvent par la mère pour nommer son enfant en attente du "baptême" officiel. Dans ces cas, si j'ai bien compris, il y a un "prénom intime", le nom d'enfant, un "prénom officiel", choisi par les anciens ou le chaman, plus éventuellement un nom de clan ou de groupe comme nos noms de famille actuels.
Mais, ce ne sont pas les seules manières de nommer qui existent.
- il y a aussi le nom qui sert à rappeler un ancêtre illustre. Mais dans ce cas, on peut considérer que l'on met l'enfant sous la protection de cet ancêtre et l'on rejoins peu ou prou le premier cas.
- un cas qui se rapproche, c'est celui ou l'on vas donner à l'enfant les prénoms de personnes bien vivantes qui vont servir de "protecteurs" à l'enfant ou qui vont permettre la reconnaissance de l'enfant par la société. De là, les usages résiduels de certaines régions, ou l'enfant porte le prénom de grands parent (s'ils acceptent que l'enfant porte leur prénom, c'est qu'il le reconnaissent comme faisant partie de leur famille). Mais aussi les usages de port des prénoms des parrains. Ce qui explique que parfois, l'enfant peut avoir plusieurs prénoms.
- mais le nom d'un ancêtre peut aussi avoir des buts "politiques" pour signifier que l'on attend de tel fils de chef qu'il soit aussi important que tel ancêtre illustre.
- on peut aussi utiliser le nom d'un héros ou d'un personnage illustre. Puisque ce nom à bien mis en valeur son porteur précédent, il n'y a pas de raison qu'il n'aide pas cet enfant. Il semblerait que certains noms cessent alors d'être portés quand une des personnes ainsi nommé se rende responsable d'actes que l'entière société réprouve.
- il y a pour finir des sociétés ou le nom est laissé à l'entière appréciation des parents et l'on voit ainsi des prénoms liés à diverses modes.
En fait, dans la plupart des sociétés nommé un enfant n'est pas chose anodine, cela signe son appartenance au groupe et il peut exister des règles fort complexes. Parfois, la liste des noms portés n'est dite qu'à quelques occasions importantes de la vie de la personne, et dans ce cas on voit apparaitre en plus le nom d'usage, le nom courant que l'on va utiliser usuellement pour appeler la personne.
Bien entendu, on sait que ces systèmes ont existé puisqu'ils ont perduré jusqu'à nous. Mais comme la souligner DESHAYS Yves-Marie, nous ne pouvons que spéculer pour savoir si toutes les sociétés préhistoriques se sont servies de ces systèmes ou si elles n'en utilisaient pas d'autres encore différents.


Dernière édition par Narduccio le 12 Nov 2006 21:21, édité 1 fois.

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Message Publié : 12 Nov 2006 19:10 
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Maintenant, traitons la seconde partie du problème : que peut nous apporter l'archéologie pour éclairer tout cela ?

Le point le plus facile a mettre en évidence est l'appartenance ou non d'un enfant à la communauté. Avant toute chose, il faut se rappeler que les squelettes d'enfants et de nourrissons sont plus fragiles et donc que l'on en retrouve moins que les squelettes d'adultes. L'autre point, c'est que jusqu'au début du paléolithique, on estime qu'une femme avait un enfant tout les 6 à 7 ans contre moins de deux ans après le néolithique. Ensuite, plus on remonte loin dans le passé, moins on a d'individus à disposition et il est difficile d'extrapoler en dehors des cas individuels. Et pour finir, il n'y a rien de sur, ce sont juste des hypothèses ou des indices.

On a trouvé des foetus, des corps de nourrissons, voire de jeunes enfants parmi les déchets dans des sociétés qui enterraient déjà leurs morts. Puisque ces corps étaient en connexion, il faut oublier tout ce qui pourrait se rapporter à du cannibalisme. Bien entendu, cela n'exclut pas des cas de sacrifices. Mais la réponse la plus simple semble être que ces enfants n'étaient pas encore considérés comme appartenant à la communauté. Si l'on suit le schéma général décrit par les ethnologues, il y a de fortes chances que ce soit liés à des cérémonies de passage ou d'intégrations, des espèces de baptême, donc.
Avant cette cérémonie, l'enfant est considéré comme ne faisant pas parti de la communauté ou même peut être considéré comme ne faisant pas parti des vivants. Son corps est donc un simple déchet n'ayant jamais été habité par un esprit. L'âge des corps retrouvés peut donner une indication sur l'âge auquel cette cérémonie à lieu. Si l'on reste sur un schéma commun, il est possible que le nom ai été donné au cours de cette cérémonie.
Dans d'autre périodes ou d'autres communautés, les squelettes de nourrissons ou de jeunes enfants sont trouvés enterrés avec des adultes. Dans certains cas, il semble que ce soit la mère et l'enfant et cela suggère une mort commune en couches. Dans d'autres, le corps de l'enfant semble avoir été enterré postérieurement à l'enterrement de l'adulte. Aurait-on voulu permettre à l'esprit de l'enfant d'être avec l'esprit d'un familier pour l'apaiser ?
Mais, là aussi, il arrive un âge où l'enfant "gagne" le droit à avoir une inhumation spécifique, ce qui laisse aussi supposer une cérémonie de passage du statut d'enfant à celui de membre de la communauté.
Le troisième cas est celui des inhumation "domestiques", l'enfant est enterré dans le lieu d'habitation ou aux abords immédiats. Ce qui voudrait dire qu'il ne fait pas partie de la communauté, puisqu'il n'est pas inhumé dans la nécropole, mais il fait quand même partie d'un cercle familial qui l'accueille et le garde en son sein.
Le dernier cas, est le "carré réservé" dans certaines nécropoles. Il semblerait que dans certains cas, les enfants ou jeunes enfants sont enterrés à part dans une partie de la nécropole. Pour autant que je sache, le seul cas dont j'ai lu la narration dans un article, il semblait qu'il y avait une polémique entre ceux qui pensent que c'était du à une épidémie et ceux qui pensent que cela signale un statut particulier de l'enfant.

Cette évolution du statut de l'enfant que l'on voit avec le traitement de sa dépouille a peut-être pu être lié à des cérémonies et à des noms particuliers. Du moins, c'est ce que les ethnologues ont constaté dans les groupes humains qui vivent dans des conditions proches de celles des chasseurs-cueilleurs du mésolithique, mais, il y a quand même au moins 4 000 ans d'évolution culturelle d'avec les sociétés néolithiques et plus de 40 000 ans pour les paléolithique.


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Message Publié : 12 Nov 2006 20:50 
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Localisation : Pas loin du rond-point du Petit Clamart (92)
Petite remarque sur l'enterrement des enfants. Encore actuellement on trouve des carrés pour enfants dans nos cimetierres. Pourquoi ?
Un de mes ancêtes à la fin du XIXème siècle a fait enterré son fils mort en bas âge dans une concession temporaire (1 an) alors qu'il avait les moyens d'avoir une concession perpétuelle. Désintéré pour les nourrissons ?

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Pierre Corneille, Le Cid


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Message Publié : 12 Nov 2006 23:36 
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DESHAYS Yves-Marie a écrit :
Dans la mesure où l'anglais traduit l'indien, Crazy Horse = Cheval Fou et Sitting Bull = Taureau Assis. Où est le problème? Vous recherchez peut-être la transcription phonétique du prénom original dans la langue indienne originale?
L'Encyclopaedia Britannica indique seulement que Sitting Bull, chef des Teton Dakota (ou Prairie Sioux) était le fils de Jumping Bull (= Taureau bondissant).
Il faudrait consulter un dictionnaire Sioux-Anglais (Américain) ou Sioux-Français (... existence hypothétique!).

Je l'ai peut-être si ça vous intéresse, j'ai en effet un livre sur les indiens et il me semble que la VO de certains noms était donnée. Cela dit, la signification est la même.
Un point est d'ailleurs intéressant concernant ces indiens, le nom n'est pas immuable de la naissance à la mort. L'individu peut s'il le souhaite changer de nom plusieurs fois au cours de sa vie. Ce n'est d'ailleurs pas le seul exemple de ce type, il me semble que dans certaines sociétés plusieurs prénoms (comme dans la nôtre d'ailleurs) sont donnés à l'enfant, qui choisira à un âge précis lequel sera son prénom usuel.

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Yoda

On ne peut jamais se reposer sur l'amour - et c'est pourtant sur lui que tout repose. - Jean Rostand


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Message Publié : 13 Nov 2006 1:34 
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Localisation : Alsace, Zillisheim
Pour compliquer un peu les choses, dans certaines sociétés animiste, le nom fait partie de l'essence de la personne. Si on n'a pas de nom, c'est comme si l'on n'existait pas.

Citer :
Selon les conceptions du monde inuit, atiq (le nom), anirniq (le souffle vital) et tarniq (l'âme-double) sont les trois instances psychiques qui animent l'individu (Saladin d'Anglure 1977). Nuttall (1994) rapporte des données semblables pour le nord-ouest du Groenland de même que Dorais (1997) pour Quaqtaq au Nunavik. C'est à la suite de l'union de ces éléments, provenant de diverses origines, que la personne humaine est formée. Les liens qui unissent les Inuit les uns aux autres, ainsi qu'à leur environnement et à ses composantes, paraissent dans la façon dont la personne est constituée. Dans chaque humain on retrouve une partie de l'univers (sila en inuttitut). Ce partage lie les individus entre eux, en même temps qu'à sila (Saladin d'Anglure 1990). Les composantes de la personne résident dans le corps pour une durée déterminée, mais elles n'y sont pas prisonnières puisque les frontières du corps sont perméables. Le passage ou la traversée du monde des vivants vers celui des êtres non-humains, des animaux et des défunts est assez courant puisque tout individu a la possibilité de le faire en rêve. Le nom, composante qui demeure éternellement parmi les vivants, lie les défunts à ceux-ci.

Le passage d'un ordre de réalité à un autre constitue un élément fondamental des représentations inuit. Outre la conception de la personne humaine elle-même, le nom et son système d'attribution sont d'autres indicateurs de moments où s'actualise cette perméabilité des frontières entre les réalités.

Chez les Inuit le nom contribue de façon significative à la formation / transformation de l'individu. À sa naissance, ce dernier recevra un ou plusieurs noms selon le nombre de personnes (vivantes ou décédées) qui en auront exprimé le désir. Dans le cas des vivants, une personne âgée pourrait vouloir être l'éponyme d'un nouveau-né afin de lui donner «un surcroît de vitalité» ou «qu'en raison d'un handicap, elle veuille par ce biais améliorer sa condition physique en acquérant la vitalité» de l'enfant à naître (Saladin d'Anglure 1998a: 129-130). Un individu, fatigué d'effectuer les tâches imposées par la division sexuelle du travail, pourrait vouloir un homonyme de sexe opposé, car «c'est alors comme s'[il] chang[eait] de sexe et d'occupation» (Saladin d'Anglure 1970: 1028). Les défunts expriment parfois la volonté de transmettre leur nom à un nouveau-né en visitant les futurs parents en rêve (Saladin d'Anglure 1970; Saladin d'Anglure et Morin 1998). Ceux-ci peuvent s'adresser directement à l'enfant afin de connaître les noms à lui transmettre. L'enfant indique le bon choix de nom par un signe quelconque. Lorsqu'un bébé tarde à naître, les Inuit disent que c'est parce que les parents n'ont pas encore trouvé le bon nom de l'enfant (Saladin d'Anglure 1998a). Au cours de cures chamaniques qui se déroulaient autrefois dans la région d'Igloolik, il arrivait qu'un angakkuq transmette le nom d'un de ses esprits auxiliaires à un enfant en danger ou en détresse (Saladin d'Anglure 1998a).

La polynomie confère à un enfant «plusieurs identités dans une même individualité» (Saladin d'Anglure 1970: 50). Toutefois, l'identité propre à chaque nom ne sera vraiment significative que pour certains membres du groupe. Les individus vont s'adresser les uns aux autres en utilisant l'appellation parentale, liée au nom, qui exprime le plus adéquatement la relation qui les unit. Selon les noms qui lui seront transmis, un nouveau-né pourra être simultanément le père de sa mère, l'époux de sa grand-mère, le grand-père de ses frères et soeurs, et ainsi de suite[4]. Ces relations s'expriment dans les formes d'adresse (Saladin d'Anglure 1977).

À Inukjuak, Willmott (1961) a rapporté le cas d'une fillette qui avait reçu le nom de sa mère et que les frères, dès lors, appelaient maman. À la même époque, au même endroit, un garçon de 15 ans parle des membres de la famille immédiate de son éponyme comme de son épouse et de ses enfants. D'autres enfants qui avaient reçu le nom de leur grand-père étaient appelés «petit grand-père» (Willmott 1961). Des phénomènes semblables sont toujours observables à Inukjuak aujourd'hui (notes de terrain, 1998, 2002).


http://www.erudit.org/revue/etudinuit/2002/v26/n2/007647ar.html

Citer :
Nuttall (1994) confirme l'importance du nom chez les Inuit du Groenland. En effet, dans les villages du district d'Upernavik, le nom est une composante spirituelle et sociale de la personne. Afin de devenir une personne à part entière, le nouveau-né doit recevoir un nom. En tant qu'homonyme, l'enfant entretient des relations diverses avec les parents de son éponyme. Ces derniers s'adressent à l'enfant en utilisant la même forme d'adresse que pour le défunt. À la mort, les gens ne disparaissent pas, ils continuent par le nom à faire partie de la communauté.


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Message Publié : 13 Nov 2006 1:53 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges

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Pour compliquer un peu les choses, dans certaines sociétés animistes, le nom fait partie de l'essence de la personne. Si on n'a pas de nom, c'est comme si l'on n'existait pas.

... et si un nouveau-né décède avant qu'on ne lui ait donné un nom, on ne porte pas son deuil : c'est comme s'il n'avait jamais existé.
Connaître le nom de quelqu'un, c'est aussi pouvoir le contrôler. Le commandant du Nautilus (dans Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne), en rupture de ban avec la société, s'appelle "Némo" (= personne...), donc insaisissable.
A Moïse qui lui demande son nom, le Seigneur répond "Je suis!", sans plus...
L'absence de nom a longtemps été ressentie comme une tare infâmante (cf. les bâtards). L'auteur d'une lettre anonyme est méprisable pour cette raison (les malfaiteurs ou les manifestants masqués ou cagoulés aussi, probablement).
Etre privé de nom représente une sanction grave : sous la Révolution, Marseille fut désignée comme "La ville sans nom". Il y a une rue, à Manosque (Alpes de Haute-Provence) dont la plaque annonce "Rue sans nom" (mais j'en ignore la raison).
Dans un poème, Saint John Perse déclare "J'habiterai mon nom".
Un changement de nom coïncide avec une modification profonde du statut ou de la fonction de l'intéressé : les souverains adoptent parfois en montant sur le trône un prénom différent de celui qu'ils ont reçu au baptême (c'est encore le cas pour le Pape).


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Message Publié : 13 Nov 2006 9:29 
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Jean-Pierre Vernant
Jean-Pierre Vernant

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J'ai posé une question qui n'a pas encore reçu de réponse : parmi tous les modèles rencontrés par l'ethnologie d'attribution du nom, y en a-t-il un (ou plusieurs) qui semble(nt) plus fréquent(s) que d'autres ? Ou a-t-on pu établir une relation entre un modèle et d'autres caractéristiques des peuples (je dis complètement au pif : forestiers tropicaux ou chasseurs des prairies, Europe ou Amérique...)
Bref, quelque chose qui nous permettrait de supposer que tel modèle pourrait être le plus plausible, par exemple, pour les chasseurs-cueilleurs de l'Europe occidentale des derniers âges glaciaires ?
(Peut-être est-ce impossible car relevant des suppositions sur suppositions..)


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Message Publié : 13 Nov 2006 10:26 
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Fustel de Coulanges
Fustel de Coulanges

Inscription : 09 Août 2005 18:34
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Localisation : Marseille
Citer :
parmi tous les modèles rencontrés par l'ethnologie d'attribution du nom, y en a-t-il un (ou plusieurs) qui semble(nt) plus fréquent(s) que d'autres ?

Etant donné les témoins encore attestés dans les langues actuelles, il me semble que le modèle "fils de..."(et, à un moindre titre, "père de..." ou "mère de...") ait été productif depuis une époque reculée dans des cultures variées :
"Fils de..." :
- avec préfixe : Ibn/Ben/Béni dans les contextes sémitiques ; Fitz en Ecosse/Irlande...
- avec suffixe : -ian (arménien), -son (anglais), -sen (pays scandinaves)...
"Père de..." :
- Ab/Av/Abou , "Om" (mère de) dans les contextes sémitiques...
On peut aussi considérer les noms d'origine géographique ("de", "du", "des", "of", "o' " etc.) ou correspondant à une fonction sociale ou artisanale ; ceux indiquant une particularité morphologique ou physique (taille, couleur des cheveux, etc.), ou l'appartenance à un clan ("Mac").


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Message Publié : 13 Nov 2006 19:52 
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Thucydide
Thucydide

Inscription : 12 Juil 2006 11:00
Message(s) : 54
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Concernant la notion d'individu, il faut se souvenir que dans le passé et même encore aujourd'hui (cf. les Chinois, Japonais...) il n'y avait presque pas de distinction entre l'individu et le groupe. L'individu ne se définissait que par rapport au groupe, sans individualisme de type "moderne" (comme chez les Français par exemple!!). Ce qui est assez remarquable c'est que dans certaines langues comme l'algonquin le pronom personnel singulier est identique au pronom pluriel. Autrement dit "je" et "nous" c'était la même chose. Cela a-t-il eu une influence sur la façon de nommer les hommes?


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