La fameuse lettre de Jefferson est très longue. Dans le bouquin de Jacques Portes, le texte n'est pas exhaustif :
Citer :
La cession par l’Espagne de la Louisiane et des Florides à la France a des effets des plus douloureux sur les États-Unis... Cela renverse complètement toutes les relations politiques des États-Unis, et va engendrer une nouvelle ère pour notre évolution politique. Parmi toutes les nations d’importance, la France est, jusqu’à maintenant, celle avec laquelle nous avons eu le moins d’occasion de conflit... et le plus de communauté d’intérêts. De ce fait, nous l’avons toujours considérée comme notre amie naturelle... Aussi nous avons regardé comme nôtre son essor et ses malheurs également. Il y a un seul endroit au monde dont le possesseur est notre ennemi naturel et régulier. Il s’agit de la Nouvelle-Orléans, par laquelle les produits des 3/8e de notre territoire doivent passer pour trouver un marché, et ce territoire, grâce à sa fertilité, fournira avant longtemps plus de la moitié de notre production totale et contiendra plus de la moitié de nos habitants. La France, se plaçant au travers de cette porte, nous impose une attitude de méfiance. L’Espagne aurait pu la posséder tranquillement pendant des années. Ses dispositions pacifiques, son état de faiblesse la conduiraient à accroître nos facilités en cet endroit, à tel point que sa possession de celui-ci nous serait à peine sensible, et il ne faudrait sans doute pas attendre très longtemps avant que quelques circonstances se produisent qui rendent des plus avantageuses pour [l’Espagne] sa cession aux [États-Unis]. Il ne peut pas en être de même dans les mains de la France : l’impétuosité de ses humeurs, l’énergie et l’agitation de son caractère, ainsi placées à un point de perpétuelle tension avec nous, dont le tempérament s’il est tranquille, désire la paix et la poursuite de la prospérité, n’en est pas moins ambitieux, n’accepte pas la richesse si elle doit s’accompagner d’insultes ou de préjudices et est entreprenant et énergique comme celui d’aucune autre nation sur la terre ; ces circonstances rendent impossible que la France et les États-Unis puissent rester longtemps amis... Le jour où la France s’emparera de la Nouvelle-Orléans, marquera la date de la sentence qui doit la maintenir à jamais à l’intérieur de son niveau des basses eaux. Cela scelle l’union de deux nations qui, ensemble, peuvent maintenir la possession exclusive de l’océan. De ce jour nous devons nous marier avec la nation et la flotte britanniques. Nous devons tourner toute notre attention vers une force maritime, pour laquelle nos ressources nous situent à un rang très élevé... Ce n’est pas un état de choses que nous recherchons ou que nous désirons... mais il se produira nécessairement, par les lois de la nature, si la France prend cette décision. Ce n’est pas la peur de la France qui nous fait réfuter celle-ci. Car aussi supérieure, dans l’abstrait, que soit sa force par rapport à la nôtre, rien ne peut s’y comparer, quand elle doit s’exercer sur notre propre sol... [La France] peut dire qu’elle a besoin de la Louisiane pour le ravitaillement de ses Indes occidentales. Elle n’en a pas besoin en période de paix, et en cas de guerre elle ne pourra compter dessus, dans la mesure où il sera très facilement intercepté. Je suppose que ces considérations peuvent être portées à la connaissance du gouvernement de la France... [sans qu’il se sente offensé]... Nous les mentionnons, non pas comme des choses que nous désirons à tout prix, mais comme des choses que nous redoutons, et nous implorons un ami de faire preuve de clairvoyance et de les prévenir dans notre intérêt commun. Si la France considère néanmoins la Louisiane comme indispensable à ses yeux, elle pourrait peut-être rechercher des arrangements qui pourraient être compatibles avec nos intérêts... ce serait nous céder l’île de la Nouvelle-Orléans et les Florides. Cela ferait certainement cesser, dans une grande mesure, les causes d’irritation entre nous... et nous éviterait d’avoir à prendre nécessairement des mesures immédiates de compensation...Je ne doute pas que vous ayez insisté sur ces considérations, en chaque occasion, avec le gouvernement auprès duquel vous vous trouvez... L’idée est ici, que les troupes envoyées à Saint-Domingue, doivent être affectées en Louisiane après avoir achevé leur travail dans cette île. Si cela est bien l’arrangement prévu, vous aurez le temps pour retourner encore et encore à la charge. Carla conquête de Saint-Domingue ne sera pas une tâche facile et rapide. Cela prendra beaucoup de temps et usera un grand nombre de soldats. Tous les yeux aux États-Unis sont maintenant fixés sur les affaires de Louisiane. Depuis la guerre révolutionnaire rien peut-être n’a produit un plus grand malaise dans le corps de la nation.